Ce nouvel arrêté supprime l’exclusion de consultation pour les dossiers impliquant un mineur. Restent classifiés ceux dont la communication « porte atteinte à l’intimité de la vie sexuelle des personnes » ou à « la sécurité de personnes nommément désignées ou facilement identifiables impliquées dans des activités de renseignement ».
Le Général Charles de Gaulle prononce un discours le 4 juin 1958 depuis le balcon du Gouvernement général sur la place du Forum à Alger. (AFP)
Ce nouvel arrêté supprime l’exclusion de consultation pour les dossiers impliquant un mineur. Restent classifiés ceux dont la communication « porte atteinte à l’intimité de la vie sexuelle des personnes » ou à « la sécurité de personnes nommément désignées ou facilement identifiables impliquées dans des activités de renseignement ».
La France va assouplir davantage l’accès à ses archives sur la guerre d’Algérie, en autorisant la consultation des dossiers impliquant des mineurs, indique un arrêté paru ce dimanche 27 août au « Journal officiel », un geste que réclamaient historiens et familles.
En décembre 2021, après des annonces d’Emmanuel Macron de mars 2021, la France avait ouvert, avec quinze ans d’avance sur le délai légal, ses archives judiciaires liées à la guerre sur la période entre le 1er novembre 1954 et le 31 décembre 1966.
Mais en pratique, l’accès à ces documents restait « toujours aussi difficile » pour les familles et les chercheurs, avait regretté dans une tribune dans Le Monde l’historien Marc André en novembre 2022.
« Ignorer la réalité d’une guerre menée par des jeunes »
L’un des principaux obstacles était l’exclusion des dossiers impliquant des mineurs (les moins de 21 ans, en raison de la législation de l’époque), toujours soumis au délai de classification de 100 ans. En raison de cette limitation, couplée à plusieurs autres, « la majorité des dossiers se referment », relevait l’historien.
« Cette gestion bureaucratique conduit à ignorer la réalité d’une guerre menée par des jeunes. Cela est vrai tant dans l’immigration algérienne en France que dans les maquis, les réseaux urbains et les prisons où les indépendantistes, leurs soutiens, les réfractaires, les appelés avaient pour nombre d’entre eux autour de 20 ans lors de leur engagement ».
« Suffisamment majeur à l’époque pour avoir la tête tranchée, il est aujourd’hui suffisamment mineur pour voir son dossier soustrait de la dérogation générale », s’indignait Marc André, dont les critiques ont été reprises par des médias algériens.
Le nouvel arrêté, paru ce dimanche et daté du 25 août, supprime l’exclusion de consultation pour les dossiers impliquant un mineur. Restent classifiés en revanche ceux dont la communication « porte atteinte à l’intimité de la vie sexuelle des personnes » ou à « la sécurité de personnes nommément désignées ou facilement identifiables impliquées dans des activités de renseignement ». Ce qui, soulignait Marc André, referme également de nombreux dossiers.
Ce nouvel assouplissement s’inscrit dans la politique d’apaisement décidée par Emmanuel Macron durant son premier quinquennat, après les recommandations du rapport de Benjamin Stora sur le conflit mémoriel entre l’Algérie et la France sur le passé colonial. Mais la relation entre la France et l’Algérie reste difficile et empreinte de malentendus et de non-dits.
À partir d’images d’archives coloniales, l’écrivaine et cinéaste franco-algérienne compose un essai où la bande-son donne la parole aux Maghrébins et Maghrébines. Poésies, cris de révolte et chants, en arabe et en français, viennent, en contrepoint de l’histoire officielle, faire revivre la domination vécue par les peuples nord-africains.
AssiaAssia Djebar a marqué de son empreinte unique la littérature mais aussi le cinéma, avec deux films majeurs, les deux seuls films qu’elle a jamais pu réaliser : La Nouba des femmes du mont Chenoua (1977) et La Zerda ou les chants de l’oubli (1982). Le second, moins médiatisé que le premier, écrit en collaboration avec le poète Malek Alloula (qui était alors son deuxième mari), déconstruit de manière magistrale le regard colonialiste et orientaliste.
Porté par une bande-son extraordinaire qui donne à entendre, en arabe et en français, cris de révolte, chants, poésies, paroles anonymes ou imaginées de Maghrébin·es ainsi qu’Assia Djebar en voix off, La Zerda ou les chants de l’oubli fait revivre au travers des images de propagande coloniale française de 1912 à 1942 les zerdas et les fantasias, la violence de la domination des peuples d’Afrique du Nord, l’humiliation et la folklorisation de leurs cultures par le colonisateur.
Présenté en 1982 à Alger puis au premier festival du cinéma arabe à Paris en 1983, il a reçu le prix du meilleur film historique au Festival de Berlin la même année.
Il y a des idiots utiles comme à la télévision ou la radio. Mais il y a aussi des idiots inutiles comme les théoriciens du complot dont les réseaux sociaux se font l’écho.…
C’est l’Occident-Express des paranos qui veulent nous faire croire qu’ils ne font pas partie du lot. Nul n’est à l’abri de leur faux pas, qui consiste à voir le vice là où il n’est pas. Avec eux, la vie n’est pas de tout repos… C’est toujours un branle-bas de combat.
Ils sont prêts à tout pour ridiculiser les mass-médias en exposant les avis les plus ridicules.
Examinons la logique illogique de leurs particules à travers la fin tragique de Prigojine, du plus absurde au moins absurde.
L’absurde puissance 4 : Prigojine n’est pas mort, c’est l’hypothèse la plus inutile et incertaine parce que la seule annonce officielle de sa mort en Russie suffit pour qu’on le considère comme déjà mort.
Définitivement mort même s’il est toujours vivant.
L’absurde puissance 3 : la mort de Prigojine ne comporte point la trace de la Russie.
Elle a été conçue et perpétrée par la vermine, par des ennemis qui se situent en dehors de la Russie entre l’Ukraine et les États-Unis.
Excès ou défaut d’esprit ?
L’absurde puissance 2 : la cause de la mort de Prigojine c’est tout simplement le hasard qui fait bien les choses. L’hypothèse de l’accident c’est comme la thèse du buisson ardent il faut croire pour y croire… en se disant que noir c’est blanc.
L’absurde puissance 1 : c’est Poutine qui a tenu à un règlement de compte spectaculaire pour prévenir et guérir ses militaires et ses hauts dignitaires et les dissuader de changer d’air… c’est l’art et la manière Russe. Tout indocile devrait s’attendre à recevoir un missile à domicile !
La mort du patron du groupe paramilitaire russe Wagner, Evgueni Prigojine, dont l’avion s’est écrasé mercredi 23 août en Russie, a été confirmée par l’expertise génétique, a annoncé ce dimanche 27 août le Comité d’enquête russe.
« Les expertises génétiques moléculaires » effectuées après le crash survenu le 23 août dans la région de Tver « ont été terminées », a indiqué cet organisme chargé des principales investigations en Russie.
A leur issue, il a été établi que les identités des dix victimes dont les corps ont été retrouvés après le crash « correspondent à la liste » des passagers et des membres d’équipage de l’avion, parmi lesquels figurait Prigojine, a précisé le Comité d’enquête, sans plus de détails.
En 2012 Danièle Ponsot était maire de Chaussin et a inauguré une rue du 19-Mars-1962. Comme elle a été une des rares maires pieds-noirs à avoir accompli cette belle action aujourd'hui je vous propose de voir et d'écouter Danièle Ponsot dans l'émission de Samia Arhab "Mon Algérie à moi "
Par micheldandelot1 dans Accueil le 26 Août 2023 à 19:45 http://www.micheldandelot1.com/mon-algerie-a-moi-daniele-ponsot-a214713011
Le 28 août 1963, Martin Luther King partageait son rêve d’un pays sans racisme dans son célèbre discours « Je fais un rêve », prononcé à l’issue de la Marche sur Washington. Soixante ans plus tard, alors que la communauté afro-américaine estime qu’il reste du chemin pour l’exaucer, une nouvelle marche a lieu ce samedi 26 août dans la capitale fédérale.
La chaleur de plomb, la foule, le silence… Gwen Day-Fuller se souvient de ce 28 août 1963 comme si c’était hier. Cette enseignante afro-américaine à la retraite avait 19 ans quand elle a participé, avec 250 000 autres personnes, à la « Marche sur Washington pour l’emploi et la liberté », un grand rassemblement pour l’égalité raciale organisé par plusieurs groupes de défense des droits civiques.
Le point d’orgue de l’événement fut le discours « Je fais un rêve » du pasteur Martin Luther King Jr. Au pied de la fameuse statue d’Abraham Lincoln, le président qui mit fin à l’esclavage, il invita les participants à imaginer une nation débarrassée du racisme et de la ségrégation.
« Nous avions le sentiment que le changement était possible », se remémore Gwen Day-Fuller. Soixante ans plus tard, elle se montre plus mesurée. « Il y a eu des progrès évidents, mais on ne peut pas nier les régressions, estime-t-elle. Ce n’est pas le moment de se relâcher. »
Plombés par l’héritage de l’esclavage
Le « rêve » de « MLK » et de ses alliés est encore loin d’être réalité. Malgré l’examen de conscience déclenché par le meurtre de l’Afro-Américain George Floyd en 2020, les cas de violences policières contre les minorités continuent d’entacher l’actualité. Plombés par l’héritage de l’esclavage, les ménages afro-américains ont un patrimoine sept fois inférieur à celui des ménages blancs, d’après une étude de 2019.
Dans le sillage de la victoire de Joe Biden en 2020, plusieurs États dirigés par le Parti républicain ont instauré des mesures de lutte contre la fraude électorale accusées de rendre plus difficile la participation des Noirs, un électorat traditionnellement démocrate.
Et en juin dernier, les militants ont connu un nouveau revers : la Cour suprême à majorité conservatrice a décidé de mettre un terme à l’« affirmative action », cette politique héritée du mouvement des droits civiques qui autorisait les universités à utiliser le critère racial ou ethnique pour sélectionner leurs futurs étudiants.
Deux populations qui ne vivent pas dans le même monde
Les Américains mesurent qu’il reste du chemin. D’après l’Institut Pew, 52 % estiment qu’en soixante ans le pays a fait « beaucoup » ou « une quantité honnête » de progrès dans le domaine de l’égalité raciale. Mais seuls 30 % des sondés noirs le pensent, contre 58 % des blancs. Signe que ces deux populations ne vivent pas dans le même monde.
«C’est fatigant. On a l’impression de devoir se battre encore et toujours, même si la ségrégation n’est plus légale », souffle Star, une touriste afro-américaine rencontrée au Mémorial de Martin Luther King Jr. à Washington. «On revient aux années 1960 : une période fragile, où les avancées d’hier sont remises en question », estime son amie, Trudy. Cette décennie turbulente avait vu l’interdiction des discriminations grâce à une série de lois nationales majeures, mais aussi l’assassinat de Martin Luther King, en 1968.
« Être dans l’action ! »
Afro-Américaine résidant en Floride, Trudy vit ces dynamiques aux premières loges. Le gouverneur républicain de l’État, Ron DeSantis, candidat aux primaires de son parti pour la présidentielle de 2024, a récemment défendu une nouvelle norme scolaire qui oblige les écoles locales à enseigner que les esclaves ont bénéficié de leur asservissement car il leur a permis d’acquérir des « compétences ».
« J’aimerais beaucoup que les républicains m’invitent à parler de l’héritage de Martin », confie Clarence Jones. À 92 ans, il fut l’avocat et la plume des discours de l’icône des droits civiques – il a notamment signé le début de « Je fais un rêve ». « On doit arrêter de se plaindre des difficultés que nous rencontrons. Il faut s’inscrire sur les listes électorales et voter ! Être dans l’action ! »
Samedi 26 août, il participera à un rassemblement à Washington en présence de la famille du pasteur pour marquer les 60 ans du rendez-vous historique. Plusieurs milliers de personnes sont attendues à cet événement. Avec un mot d’ordre : « La marche continue. »
Mise en place dans les années 1960, la politique d’« affirmative action » vise à favoriser l’insertion d’étudiants afro-américains ou latinos dans les universités, en prenant en compte l’origine raciale ou ethnique dans les admissions.
Il s’agit de favoriser les minorités et la diversité ainsi que de «corriger une tradition nationale de discrimination »,selon la juge Ketanji Brown Jackson, première femme noire à la Cour suprême, nommée en 2022 par le président Joe Biden.
Cette politique a des résultats plutôt décevants. En 2017, indique le New York Times, la proportion d’étudiants noirs en première année dans les établissements d’élite n’est que de 6 %.
Le 29 juin 2023, à six voix contre trois, la Cour suprême américaine révoque cette disposition, jugeant inconstitutionnelle l’utilisation du critère de la race.
lexis Buisson, envoyé spécial à Washington (États-Unis),
Ce que vous faites aujourd’hui est beau et tend à devenir exceptionnel car l’humanité perd de son sens et néglige son essence. Mettre la poésie au service de l’Universel et du Bien devient une perle rare. Pour vos derniers fragments je les trouve merveilleux car ils racontent la même histoire de différents angles. Ils se mettent d’accord pour que les éléments de la nature deviennent l’interlocuteur valable qui a quelque chose à dire, à offrir à l’homme. Lui dire qu’il n’est pas maître de l’Univers, même pas maître de lui-même et de sa destinée. Dans LA MER la sagesse se construit avec délicatesse et s’érige en douce passagère qui pointe le doigt vers « la vie brève » interpellant l’homme dans chaque instant de sa vie. La VIE qui dit ce que la bouche feigne de négliger en ouvrant toutes les issues grandesouvertes tout en sachant « qu’il n’y a pas vraiment de porte » qui donne sur LA TERRE faite pour traverser le temps, qui aura raison de toutes les gloires car silencieuse et sereine ; reine de son monde fait pour se moquer de l’éphémère humain car elle finit toujours par renaître de ses conquêtes. LE CIEL est la preuve immense de la « petitesse » de l’homme vu de làhaut, des nuages qui planent sur les rêves passagers tels un troupeau égaré, méchant, les sens aiguisés, prêts à prendre la vie des autres. Dans LE SOLEIL, l’homme fait mine de ne pas voir ce qui est grandiose, plus grand, plus joyeux que la lumière de ses yeux car cette lumière-même provient de l’astre silencieux, qui brille sans se vanter, sans le dire. LA LUNE est toujours témoin, lumière de ce que l’homme traverse sans voir la source de la vue, aveugle de tous les temps, il traverse « les hautes mers joyeuses » sans dire merci à celle qui rend le rêve possible. L’EAU, source de toute vie, « calme», « caresse », « prévient » ; dans le mot « prévient », sans le dire, il y a « vie » dedans, ce qui veut dire que la parole est reconnaissante pour nous faire oublier « la froideur » du passant, l’homme qui a été fidèle à lui-même tous les temps. LE FEU reste l’objet fétiche, la féerie proposant des cadeaux colorés qui finissent tout le temps par rejoindre l’oubli et le gout de l’inachevé quand tout « part en fumée ». Reste L’AIR, cet univers sensible, enchanteur, voyageur infatigable qui tourne autour de lui-même et « apporte la musique » afin de reconstruire le monde réel à l’image de l’Univers qui nous conduit vers la sagesse, le point de départ de toute la légende. Cela résume aussi toute la poésie de Pierre Marcel Montmory. Abdecelem Ikhlef Professeur à l’Université de Constantine (Algérie) Traducteur en arabe de Mohammed Dib; Yasmina Khadra et de nombreux poètes) Ce que je ressens maintenant c’est que nous devons nous rassembler autour de quelque-chose qui symbolise la joie de vivre toujours. Nous devons rassembler nos ancêtres que les violences colonisatrices ont reléguées aux oubliettes. Ce que je ressens c’est que nous, les peuples, c’est-à-dire tout le monde, nous avons plus que jamais besoin de retrouver notre dignité dans l’accomplissement des gestes simples du vivre ensemble. Ce qui fait nous autres, c’est : se sentir vivre, dans le passage obligé de l’éternité, entre les minutes mécaniques des travaux et des jours. Réinstaller nos horizons infinis devant la ruine des murs aveugles des soumissions et ouvrir le ciel à nos morts inconsolés. Naître sans peur. Vivre sans peur. Mourir sans peur. J'en suis encore à aujourd'hui et à ce que je fais de bien maintenant. Pierre Marcel Montmory – trouveur (Né le 30 Octobre 1954 à Paris) Enfant de la balle, acteur; directeur technique; peintre; photographe, écrivain. Entrepreneur de spectacles; professeur d’art dramatique. Il offre ses spectacles sur les places publiques depuis 1964. Grand maître de théâtre et de musique. Auteur de fantaisies théâtrales, de contes musicaux, de poèmes, de nouvelles et d’articles divers. Vit à Montréal depuis 1994. LES GENS ONT FAIM Les gens ont faim, la vie appelle, je reste avec le monde qui inspire ce que je me dois d’écrire, les muses me guident exclusivement et le scribe que je perfectionne - comme un outil, traduit en lettres avec syntaxe appropriée à mon sujet, traduit le Monde pour le monde. Je me dois de trouver des paroles qui vont sur les places, dans les lieux de vie. Je me dois de capter l’attention par les sons, les images produites par l’assemblage des sons, la réflexion par le déchiffrage du dire, la compréhension de la parole offerte en don, et avec des gestes qui ouvrent tous les horizons possibles à la curiosité et, enfin, dans cet échange momentané, cette création spontanée de ma relation au Monde, faire sens du présent qui nous est offert en éternité comme seul cadeau - d’un paradis que nous cherchons tous à nous approprier, et alors je dis, je chante, tandis que le sable coule de nos mains, que l’ eau emplit nos bouches et que le feu brûle nos cœurs, tandis que nous nous retrouvons sur la trace éphémère du cercle où je porte parole, au monde du Monde, et où le monde se refait. Pierre Marcel Montmory – trouveur
LA MER LA VIE LA TERRE
LA MER L'ordre dans le chaos d’un disciple chahuteur Obéit à la fuite devant le courage dompteur La vie brève brave la mort subite L’enchanteur des rêves suscite Des pensées creuses les yeux fermés Des grands gestes foulant l’éternité Écrit avec la plume légère Son sentiment à une passagère
LA VIE Ce que tu sais te porte Ce que tu ignores t’attend Il n’y pas vraiment de porte Que l’ignorance ne puisse franchir Si dans l’instant pour ouvrir La curiosité soudaine t’oblige À taire les fredaines du vent Pour accueillir le prodige
LA TERRE Elle ne dit rien elle ne se bat Elle a le temps tu n’en as pas Tu respires ce qu’elle t’inspire Si tu es lâche tu peux la conquérir Ta volonté n’est pour elle ambition Ton paradis plein et vide ta nation Toutes les races qui y surviennent N’auront plus de gloire que la tienne
LE CIEL Lève les yeux vers ta petitesse Ferme ta bouche sur tes faiblesses Ton nez suffit pour tes proies Ta peau se tanne par la foi Tes oreilles averties du silence Ta marche écourtée de malchance Tu suis ton ombre de troupeau Une main sur le cœur l’autre au couteau
LE SOLEIL L’éclat de tes yeux reflète sa lumière Ton sang bouillonne dans sa chaudière Étoile de feu en lutte contre l’oubli Tes jours paraissent après la nuit Ton arche cabote sur les flots trop salés Drague les fonds pleins et aborde les terres habitées Tu te consumes feu de paille orgueilleux Ta fierté se moque des astres oublieux
LA LUNE Tu franchis le jusant aux marées claires Ton navire passe au noir les frontières Te voilà marin dans les bras des douces Qui consolent sur les quais les mousses Te voici donc capitaine de tes horizons Ton équipage chante des légendes à l’unisson Sur le pont de l’Univers passent les bohémiennes Hautes mers joyeuses qui te mènent
L’EAU Elle calme la soif de vivre Le halètement des gens ivres Sa caresse polit l’ingratitude Sa froideur saisit le ridicule Sa bouche prévient les rieurs Ses yeux confondent les voyeurs Son corps habite les corps Elle est notre encore
LE FEU La flamme forge les dons Le génie part en fumée Il laisse dans les cendres Le goût amer de Décembre Un trésor inachevé pour les muses Curieux jouet qui amuse Le temps d’un soupir il bondit Et sa renommée est le dit
L’AIR Il apporte la musique On chante son nom Il n’est pas une réplique Qui lui réponde non Il allège l’émotion Il dessine les visages Il manque à la mort Il abonde au sort
CONSOLATION
CONSOLATION Le Soleil pleure la pluie grise chagrine Le mauvais œil brumeux cache les amoureux Et leurs baisers mouillés goûtent le miel du ciel Bleu dans les yeux ravis du jour qui sommeille Beauté et Amour écrivent une comptine Une berceuse pour liberté des heureux
POÈME SERVI Un poème console comme un verre de vin La farandole des ennuis des lendemains Dans la vie il n’y a pas qu’un seul chemin Ressers-toi un vers de poésie ta catin
ADDITION Tu peux compter les jours mais pas tous tes amours Quand on a bien vécu on dit si j’avais su
Première écrivaine maghrébine à être élue à la prestigieuse Académie française, Assia Djebar s’est également imposée comme la première cinéaste maghrébine, à une époque où être femme constituait en soi un obstacle majeur en Algérie pour faire du cinéma.
C’est l’une des plus grandes « blessures » de sa vie, raconte son entourage. Une blessure jamais refermée, même si les honneurs ont plu hors des frontières algériennes. Assia Djebar, de son vrai nom Fatma-Zohra Imalhayène, a marqué de son empreinte unique la littérature mais aussi le cinéma avec deux films majeurs, les deux seuls qu’elle ait jamais pu réaliser : La Nouba des femmes du mont Chenoua (1979) et La Zerda ou les chants de l’oubli (1982).
Première écrivaine maghrébine élue à l’Académie française, elle s’est également imposée comme la première cinéaste maghrébine, un pan de son histoire encore méconnu.
Mais en Algérie, son incursion dans « l’image-son », comme elle nommait cette autre vocation, a suscité un rejet et des entraves tels qu’elle a fini par abandonner le septième art, malgré un talent indéniable, qui aurait fait de cette précurseure, voix de l’émancipation des femmes, à la fois une cinéaste de langue arabe et une romancière francophone.
Assia Djebar, qui voulait allier littérature et cinéma comme le Suédois Ingmar Bergman et l’Italien Pier Paolo Pasolini, l’a souligné avec une lucidité implacable un quart de siècle plus tard, le 22 juin 2006, dans son discours inaugural à l’Académie française : « Malgré mes deux longs métrages, salués à Venise et à Berlin, si j’avais persisté à me battre contre la misogynie des tenants du cinéma d’État de mon pays, avec sa caricature saint-sulpicienne du passé, ou ses images d’un populisme attristant, j’aurais été asphyxiée comme l’ont été plusieurs cinéastes qui avaient été sérieusement formés auparavant. Cette stérilité des structures annonçait, en fait, en Algérie, la lame de fond de l’intolérance et de la violence de la décennie quatre-vingt-dix. J’aurais donc risqué de vivre sourde et aveugle en quelque sorte, parce qu’interdite de création audiovisuelle. »
Les hostilités éclatent lors de son premier film, une heure cinquante-cinq minutes inclassables, où les genres explosent, le documentaire, la fiction, peut-être aussi l’autobiographie : La Nouba des femmes du mont Chenoua.
Assia Djebar met en scène Lila, une jeune architecte qui retourne dans ses montagnes natales du Chenoua, dans la région de Tipaza, au nord du pays, en compagnie de son mari, cloué sur une chaise roulante à la suite d’un accident, et de leur fille. Lila va et vient entre le passé et le présent, écrasée par la mémoire, l’histoire collective, la guerre de 1954 à 1962, les 132 ans d’oppression coloniale, mais aussi par l’enquête sur son frère disparu et, à travers celle-ci, la recherche de l’enfance.
La musique du pianiste et compositeur hongrois Béla Bartók (1881-1945), qui a vécu en Algérie en 1913 pour y étudier les chants chaouis, nourrit le film dédié à une femme libre montée au maquis en 1957 : la chahida (« martyre ») Yamina Oudaï, dite Zoulikha, héroïne oubliée de la révolution algérienne, qui sera en 2002 au cœur d’un puissant roman d’Assia Djebar, La Femme sans sépulture.
À Alger, le film, qui montre des vieilles femmes et des fillettes, dedans, dehors, est accueilli par des cris d’orfraie. Même par des féministes. L’écrivaine et militante féministe Wassyla Tamzali se souvient de ceux qui ont envahi, lors de l’avant-première, la cinémathèque, cet espace mythique au cœur de la capitale algérienne, laboratoire de la culture post-indépendance, où le cinéma du monde entier se pressait.
Elle les a consignés dans son dernier livre consacré au cinéma algérien En attendant Omar Gatlato-Sauvegarde (2023) : « Assia Djebar fut violemment attaquée par des spectatrices, des femmes, des féministes. La pensée unique que nous dénoncions dans nos critiques constructives du pouvoir se déchaîna contre elle : “Vous avez eu la chance de faire le premier film en tant que femme et vous avez fait un film personnel au lieu de parler du contexte politique et social, de la révolution agraire, de la participation des femmes à la guerre.” J’étais tellement sidérée que je suis restée sans voix. Assia, elle, écoutait silencieusement les oukases de la salle. »
La réalisatrice et écrivaine affronte, poings serrés, les invectives, comme aux Journées cinématographiques de Carthage en Tunisie, le plus ancien festival de cinéma d’Afrique et du monde arabe, où son film est programmé en sélection officielle. Les réalisateurs algériens présents menacent de quitter la salle si son film est projeté, exigent son interdiction au prétexte que le projet n’est pas celui d’un professionnel du cinéma et qu’Assia Djebar vient de Paris. Ils obtiennent gain de cause. « L’esprit de clan a fonctionné contre Assia Djebar, alors qu’en temps ordinaire, on ne pouvait pas parler de solidarité entre eux », analyse Wassyla Tamzali.
Pour l’avocate, qui des années plus tard, dans un café de Bastille, à Paris, constatera combien ce « traumatisme » hante son amie qu’elle vouvoie, cette violence contre un film et sa réalisatrice ne traduit pas seulement un conflit de genre : « Elle révèle un mal profond, celui d’un système mis en place depuis l’indépendance qui place les réalisateurs dans une concurrence féroce. »
L’écrivaine algérienne Maïssa Bey a, elle aussi, mesuré le « traumatisme » vécu par cette « artiste dans le sens complet du terme »,qu’elle admire depuis l’enfance, lors d’une rencontre à la Maison de la poésie à Paris : « Assia Djebar était encore extrêmement blessée par l’accueil réservé à son film trente ans plus tôt et par le rejet des gens de la profession : on lui a dénié le droit de toucher au cinéma, on l’a renvoyée en littérature. »
En 1979, un an après « le traumatisme » de Carthage, Assia Djebar rafle le prix de la critique internationale en tant que réalisatrice à la Biennale de Venise. « J’avoue que cette distinction, à laquelle je ne m’attendais pas, m’a fait chaud au cœur. Surtout après cette longue année de “contestation” algérienne sur le film. Cela me paraît être une réparation de Carthage. Nous l’avons bien mérité », écrit-elle dans une lettre le 14 septembre 1979 à l’un de ses rares soutiens dans le milieu cinématographique algérien, Ahmed Bedjaoui, animateur du célèbre « Télé-Ciné-Club » de 1969 à 1989, programmateur et responsable des archives à la Cinémathèque algérienne de 1966 à 1971, et un temps directeur du département de production à la RTA (Radiodiffusion-télévision algérienne).
Dans un article publié en 2016 sur la plateforme Cairn, après la mort de la cinéaste, Ahmed Bedjaoui raconte la bronca essuyée après qu’il eut diffusé dans son émission La Nouba des femmes du mont Chenoua.
« Ce soir-là, Assia, terrorisée par les déferlements de haine dont elle se sentait sourdement l’objet, avait préféré s’abstenir. On attendait cinq invités. Tous déclinèrent du haut de leur lâcheté. Un seul d’entre eux viendra, c’était le grand et regretté Abdelhamid Benhadouga [un des plus grands écrivains algériens de langue arabe – ndlr], qui a tenu à manifester son soutien et son admiration à sa consœur, à qui il voulait manifester son respect. Le lendemain, la presse (militante et autoproclamée) et les milieux spécialisés autour de l’entourage de l’Alhambra persiflaient et se moquaient. La cinéaste en fut ulcérée. »
« Un choc heureux »
Assia Djebar provoque, dérange, dépasse la hchouma (« la honte » en arabe) en son pays, « l’Algérie tumultueuse et encore déchirée ». Au cinéma comme en littérature, elle met le spectateur, le lecteur en tension, en déroute.
Lorsqu’elle la rencontre pour la première fois en 1974 alors qu’elle se lance dans le tournage de La Nouba des femmes du mont Chenoua, la militante féministe Wassyla Tamzali décrit « un choc heureux » : « Pour la première fois, une jeune femme algérienne tient devant moi un discours de liberté. »
Son film, estime-t-elle, « marque un tournant dans le cinéma algérien et nous bouscule jusque dans nos tabous » : « Le peuple algérien est plongé dans un grand silence vis-à-vis de l’intimité : même entre amis, dans les milieux progressistes, socialistes, révolutionnaires, on ne parle pas en disant “je” d’intimité, de nos amours, de nos corps. On ne parle que de la révolution. Assia vient briser cela. »
Wassyla Tamzali voit dans La Nouba des femmes du mont Chenoua un film sur l’histoire, la mémoire, mais aussi sur la maternité qu’Assia Djebar veut démythifier, sur la sexualité des femmes au travers notamment du personnage central de Lila, qui tourne autour d’un lit vide avec son mari handicapé dans la maison de son enfance.
« Enfin une écriture littéraire mais avec des images de mots étouffés,abonde, enthousiaste, Ahmed Bedjaoui dans son article. Les mâles qui avaient exprimé leur haine contre cette expression libre d’une femme d’esprit, ceux-là allaient en avoir pour leur bave. Le seul homme du film est un impotent cloué sur sa chaise roulante, dans un monde où s’ébattent des fillettes et des femmes mûres, ondulant sur la vague de liberté qui s’achève avant la puberté et recommence après la ménopause : à l’âge où le mâle lâchement se disloque devant l’image vertueuse de sa mère. »
Pour Ahmed Bedjaoui, La Nouba des femmes du mont Chenoua est, avec Nahla de Farouk Beloufa, « le film le plus intelligent et le plus prégnant d’idées cinématographiques que le cinéma algérien ait jamais produit ».
Assia Djebar n’est pas passée de la littérature au cinéma pour y adapter la littérature mais bien pour créer un langage nouveau. « Ses films ne ressemblent en rien à ses livres. C’est du cinéma expérimental, avec une musique omniprésente, personnage à part entière, parfois, un film muet, une succession de tableaux, remarque l’écrivaine franco-algérienne Kaouther Adimi, qui place l’immortelle de l’Académie française dans son panthéon. Elle est l’écrivaine dont je me sens la plus proche. »
La première fois qu’il a vu les films d’Assia Djebar, Sofiane Hadjadj, cofondateur des éditions Barzakh à Alger, avait une vingtaine d’années et n’a pas « tout compris ». « Elle est une cinéaste de la modernité qui s’inscrit dans le cinéma moderne, la nouvelle vague, le cinéma soviétique, tchèque, etc., avec une œuvre météore, charnière et choc concentrée en deux films. On n’est pas face à un cinéma grand public mais proche de l’essai cinématographique, avec une dimension documentaire. La forme de montage heurté, où parfois le son et l’image sont désynchronisés, sert à rendre compte de la violence de l’histoire, de la colonisation. »
« Quand Assia Djebar part en tournage, elle ne prépare aucun plan, aucune prise,écrit dans La Plume francophone le poète et essayiste algérien Ali Chibani. Il n’y a même pas de synopsis. Tout doit émerger de l’instant réel désigné pour être filmé. Parfois, Assia Djebar provoque elle-même cette réalité. Il suffit d’un élément qui lui rappelle son passé pour donner lieu à une séquence. »
Un roman clé s’impose pour comprendre l’essence cinématographique djébarienne : Vaste est la prison, troisième volet du quatuor algérien, avec L’Amour, la fantasia, Ombre sultane et Nulle part dans la maison de mon père, fresque fascinante et complexe d’une vie, sur l’histoire des femmes de son pays et de l’Algérie où se déploient la femme, la mère, l’épouse, l’enfant, l’écrivaine, l’historienne, la réalisatrice…
L’artiste multidisciplinaire y expose notamment dans la troisième partie son expérience de cinéaste. Page 173, elle s’émerveille du « premier plan de [sa] vie » : « Un homme assis sur une chaise de paralytique regarde, arrêté sur le seuil d’une chambre, y dormir sa femme. Il ne peut entrer : deux marches qui surélèvent ce lieu font obstacle à sa chaise d’infirme. »
Elle jouit de son premier « Moteur » : « J’ai dit : “Moteur.” Une émotion m’a saisie. Comme si, avec moi, toutes les femmes de tous les harems avaient chuchoté “Moteur”. Connivence qui me stimule. D’elles seules, dorénavant, le regard m’importe. [...] Ce regard, je le revendique mien. Je le perçois “nôtre”. »
Tourner, pour Assia Djebar, écrit encore Ali Chibani en la citant, c’est « faire une fiction qui n’[est] pas une vraie fiction, qui [est] une reconstitution de ce qui avait travaillé [la] mémoire. C’est un retour à la réalité, mais à la réalité qu’a conservée la mémoire douloureuse des femmes. La caméra participe donc à la quête cathartique de la réalisatrice qui veut donner un corps et une âme à la femme effacée par la domination masculine. [...] La caméra est le lieu où s’effectue l’inversion des rapports homme-femme. La femme, hier interdite de voir et d’être vue, place son œil dans le viseur et observe le monde par “rétroprojection” ».
Un regard libéré et libérateur
Dans une passionnante interview reproduite dans l’ouvrage En attendant Omar Gatlato-Sauvegarde, Assia Djebar explique avoir « conscience d’avoir écrit La Nouba en cinéaste », mais « la chair du film, peut-être pas la structure, a été trouvée sur le terrain. En partant des sons des voix des paysannes [qu’elle] a enregistrées. Et puis, ce qui a été important, c’est l’œil et l’espace ».
Dans le même entretien, elle explicite « deux manières de procéder quand vous faites un film ou un livre d’ailleurs ». « Soit vous prenez une situation de fait et vous l’affrontez en la critiquant – par exemple, vous prenez une héroïne étouffée par la société et vous montrez jusqu’à quel point on peut l’étouffer –, soit vous montrez ce qui devrait être. Moi, au lieu de montrer une dizaine de femmes en train de papoter dans leur cuisine, j’ai pris une jeune femme que j’ai libérée dans l’espace, car c’est là le vrai changement, elle est libérée par mon imagination et par mon espoir, car je souhaite que la majorité des femmes algériennes circulent librement et qu’elles soient bien dans leur peau en circulant – c’est le deuxième problème : bien circuler pour voir et entendre, et n’avoir pas à échapper toujours au regard espion de l’autre. Et pendant que ma caméra circule dans l’espace avec mon héroïne, au fur et à mesure le documentaire est là pour montrer ce qui existe, c’est-à-dire des femmes. »
Assia Djebar a souvent parlé de sa caméra comme d’un œil. « Parce qu’elle est enfermée, la femme observe l’espace interne, mais elle ne peut pas regarder l’espace extérieur, ou seulement si elle porte le voile et si elle regarde d’un seul œil. Donc je me suis proposé de faire de ma caméra l’œil de la femme voilée. » Et l’œil de l’histoire de son peuple. Un regard libéré et libérateur.
Le cinéma, ou plutôt « l’image-son » pour reprendre ses termes favoris, est pour Assia Djebar un outil de dénonciation de l’enfermement des femmes, du patriarcat, mais aussi du colonialisme.
Son deuxième film, La Zerda ou les chants de l’oubli, moins médiatisé que le premier, écrit avec la collaboration du poète Malek Alloula (qui était alors son deuxième mari) à partir d’archives coloniales achetées au prix fort par la RTA auprès de Gaumont et Pathé, en est emblématique.
Présenté en 1982 à Alger puis au premier festival du cinéma arabe à Paris en 1983, prix du meilleur film historique au Festival de Berlin la même année, il déconstruit de manière magistrale le regard colonialiste, orientaliste.
Portée par une bande-son extraordinaire qui donne à entendre, en arabe et en français, cris de révolte, chants, poésies, paroles anonymes ou imaginées de Maghrébins ainsi qu’Assia Djebar en voix off, La Zerda ou les chants de l’oubli fait revivre, au travers des images de propagande coloniale française de 1912 à 1942, les zerdas et les fantasias, la violence de la domination des peuples d’Afrique du Nord, l’humiliation et la folklorisation par le colonisateur de leurs cultures.
La parenthèse cinématographique d’Assia Djebar aura duré dix ans. Seulement dix ans durant lesquels la romancière cesse d’écrire, concentrée sur la caméra comme Kateb Yacine avait choisi le théâtre. Une étape fondatrice de son parcours qui laisse un legs immense et influencera son écriture romanesque. Rien que dans le quatuor, les correspondances, prolongements sont multiples, de L’Amour, la fantasia à Vaste est la prison.
« Depuis que j’ai réalisé le film La Nouba, ma manière d’écrire a changé, disait-elle. J’ai alors appris comment écouter les femmes algériennes. »
Plusieurs fois, Assia Djebar a tenté de revenir à la réalisation, présenté des projets de films aux autorités culturelles et politiques algériennes de l’époque : une adaptation du livre de Fatma Ait Mansour Amrouche, une trilogie sur Mohammed Dib, un scénario sur Youssef Seddik... En vain.
En 2003, elle est invitée à participer à « Djazaïr, l’année de l’Algérie en France », événement culturel initié par feu les présidents français Jacques Chirac et algérien Abdelaziz Bouteflika, visant à « renforcer les liens » entre les deux pays.
Elle accepte. L’occasion de renouer avec son pays, elle qui s’est réfugiée dans l’écriture littéraire et l’exil après tant d’entraves. Elle propose de présenter son opéra, Les Filles d’Ismaël. L’affaire est entendue, Assia Djebar se lance dans la préparation. Peine perdue.
« Au moment de la production, on l’informe que son opéra ne peut pas se faire, car on ne peut pas montrer les femmes du Prophète dans une œuvre algérienne », raconte Ahmed Bedjaoui au quotidien algérien El Watan.
De nouveau la brutalité. De nouveau l’incompréhension de voir une immense artiste davantage reconnue et respectée ailleurs que chez les siens. Écrivaine et cinéaste, première autrice du Maghreb à siéger sous la Coupole.
« Dans tout autre pays, l’admission d’un auteur national à l’Académie française aurait entraîné la rediffusion des deux films pour montrer notre fierté de voir une Algérienne consacrée internationalement. Ailleurs oui, mais pas encore chez nous », se désole encore Ahmed Bedjaoui.
Près d’un demi-siècle après La Nouba des femmes du mont Chenoua et huit ans après la disparition d’Assia Djebar, immortelle pionnière, la blessure reste béante et collective.
*
La Nouba des femmes du mont Chenoua, production de la Télévision algérienne, 1978, 1 h 55 min.
La Zerda et les chants de l’oubli, production de la Télévision algérienne, 1982, 59 min.
UN AUTRE ''GENRE RUMP '' MAIS FRANÇAIS CELUI LÀ :)
Après dix années d’enquête, les juges d’instruction considèrent qu’il existe aujourd’hui suffisamment de charges contre l’ancien chef de l’État pour qu’il soit jugé dans l’affaire des financements libyens. Un procès est également demandé à l’encontre de Claude Guéant, Brice Hortefeux et Éric Woerth. Du jamais-vu dans l’histoire politique et judiciaire française.
UnUn président, un dictateur et une affaire d’État comme aucune autre. Deux juges d’instruction du tribunal de Paris ont officiellement demandé, jeudi 24 août, la tenue d’un procès pénal à l’encontre de l’ancien président de la République Nicolas Sarkozy dans l’affaire des financements libyens, douze ans après la révélation du scandale par Mediapart.
Au terme d’une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel (ORTC), c’est-à-dire le document judiciaire qui clôt définitivement une instruction, les juges Aude Buresi et Virgine Tilmont considèrent qu’il existe aujourd’hui suffisamment de charges contre l’ancien chef de l’État français pour qu’il soit jugé pour quatre délits : « corruption passive », « association de malfaiteurs », « recel de détournements de fonds publics libyens » et « financement illicite de campagne électorale ».
Depuis le début de l’enquête libyenne, Nicolas Sarkozy, déjà condamné dans deux autres affaires d’atteinte à la probité (Bismuth et Bygmalion), dément toute malversation. Il bénéficie, comme tout mis en cause, de la présomption d’innocence.
Aux côtés de Nicolas Sarkozy, trois de ses anciens ministres, Brice Hortefeux, Claude Guéant et Éric Woerth, sont également renvoyés devant le tribunal correctionnel, ce qui va immanquablement donner au procès qui se dessine une dimension inédite. Jamais, dans l’histoire politique et judiciaire française, autant de hauts responsables publics vont se retrouver sur le banc des prévenus dans un dossier politico-financier d’une telle sensibilité : le soupçon d’une démocratie, la France, corrompue par une dictature, la Libye.
Un sarkozyste de la première heure, l’affairiste Thierry Gaubert, qui fut un collaborateur de l’ancien président à la mairie du Neuilly-sur-Seine puis dans deux ministères sous le gouvernement Balladur (1993-95), est lui aussi renvoyé devant le tribunal. Tout comme deux protagonistes clés du scandale, Ziad Takieddine et Alexandre Djouhri, que l’on appelle pudiquement dans les allées du pouvoir des intermédiaires mais que les juges d’instruction considèrent, elles, comme deux agents de corruption présumés du clan Sarkozy.
Les magistrates ont décidé de renvoyer, au total, treize personnes devant le tribunal, conformément aux réquisitions du Parquet national financier (PNF) rendues publiques en mai dernier.
Une enquête judiciaire hors normes
Il y a plusieurs manières de voir l’affaire libyenne. Comme une histoire en soi. Ou comme une histoire en plus, mais la plus grave d’entre toutes, pour un sarkozysme dévasté par les scandales. Cela n’a rien d’anecdotique : au moins deux futurs prévenus du procès libyen, Thierry Gaubert et Ziad Takieddine, ont été condamnés (en première instance) dans un autre dossier, l’affaire Karachi, dont les faits remontent certes au mitan des années 1990 mais présentent, à une décennie d’intervalle, de frappantes similitudes avec le scandale Sarkozy-Kadhafi.
Dans les deux cas, l’intrigue judiciaire raconte en effet comment les relations internationales de la France avec des puissances étrangères, le Pakistan et l’Arabie saoudite dans un cas, la Libye dans l’autre, sont devenues le théâtre d’une République occulte sur fond de grands contrats commerciaux, comme les ventes d’armes par exemple.
Au-delà des protagonistes communs, les méthodes se ressemblent à s’y méprendre : une ambition présidentielle de responsables politiques à l’origine de tout, des rendez-vous secrets, une diplomatie cachée, des pressions étatiques, des comptes offshore dans des paradis fiscaux, des valises de cash et des faveurs de la France pour notabiliser sur la scène internationale des pays qui sont au mieux des autocraties, au pire d’effroyables dictatures.
Dans le cas de l’affaire libyenne, l’histoire va toutefois prendre un tour spectaculaire sous la forme d’une guerre. Initiée par Nicolas Sarkozy en 2011, elle va provoquer la chute du régime de Tripoli et la mort de Mouammar Kadhafi, quatre ans seulement après la « lune de miel » – selon l’expression d’un ambassadeur américain –du président français avec le leader libyen. Le premier avait même voulu vendre du nucléaire au dictateur…
Après dix années d’instruction, les juges et les policiers de l’Office anticorruption (OCLCIFF) ont pu reconstituer avec un luxe de détails et d’éléments matériels inédits la part d’ombre de l’histoire franco-libyenne, au-delà des récits officiels.
Les investigations ont accumulé des centaines d’auditions en France et à l’étranger. Des milliers de pièces (bancaires notamment) ont été récupérées aux quatre coins de la planète ; une quinzaine de commissions rogatoires internationales ont été lancées. Des centaines de pages de documents diplomatiques ou des services de renseignement français ont été déclassifiées. Et, en définitive, un ancien président et ses lieutenants les plus fidèles ont été mis en cause dans le scandale potentiellement le plus retentissant de la Ve République.
Durant la procédure, Nicolas Sarkozy a d’ailleurs dû adapter sa ligne de défense à mesure des découvertes judiciaires. Après avoir démenti catégoriquement le moindre comportement problématique avec la Libye de Kadhafi, il a par exemple été obligé, en audition, de lâcher ses deux plus proches collaborateurs, Claude Guéant et Brice Hortefeux. « Je n’avais aucun élément pour connaître ce qu’était la réalité de leur vie », a-t-il ainsi déclaré sur procès-verbal, dénonçant des « fautes » et des fréquentations « incompréhensibles » de leur part.
Contestée à de nombreuses reprises ces dernières années par les mis en cause, dont Nicolas Sarkozy lui-même qui a multiplié avec ses avocats les recours pour tenter de faire tomber l’enquête, la procédure dirigée dans un premier temps par le juge Serge Tournaire, puis par sa collègue Aude Buresi, a été totalement validée par la cour d’appel de Paris et la Cour de cassation ces dernières années.
Sur le fond du dossier, les juges estiment aujourd’hui avoir identifié deux filières de financement occulte, comme Mediapart l’a raconté au fil de ses 145 articles consacrés à cette affaire – nos premières révélations datent de l’été 2011.
Un terroriste d’État libyen au cœur du dossier
La première filière est incarnée par Ziad Takieddine, l’intermédiaire qui fait le pont entre Karachi et Kadhafi. Ses archives, obtenues et authentifiées par la police, ont montré qu’il a été celui qui, dès le printemps 2005, a ouvert les portes de la Libye de Kadhafi au cabinet de Nicolas Sarkozy au ministère de l’intérieur.
D’après l’enquête, c’est d’ailleurs le 6 octobre 2005, jour d’une visite éclair de Nicolas Sarkozy en Libye, que s’est nouée la perspective d’un soutien financier du colonel Kadhafi au futur candidat de la droite française à la présidentielle.
Ziad Takieddine s’est appuyé en Libye sur le beau-frère de Kadhafi et chef du renseignement militaire, un certain Abdallah Senoussi. Dangereuse carte maîtresse : l’homme a été condamné en 1999 à la réclusion criminelle à perpétuité par la justice française pour avoir organisé l’attentat contre un avion de ligne de la compagnie UTA, qui a fait 170 morts. Il était depuis lors visé par un mandat d’arrêt international.
Mais cela n’a pas empêché, entre septembre et décembre 2005, Claude Guéant, directeur de cabinet, puis Brice Hortefeux, ministre délégué… aux collectivités territoriales, de rencontrer secrètement à Tripoli Abdallah Senoussi, dans le dos de l’ambassade française, des services secrets, sans traducteur ni garde du corps, mais en la seule compagnie de Ziad Takieddine. Plusieurs diplomates et responsables du monde du renseignement ont fait part durant l’enquête de leur stupeur devant de telles rencontres entre de hauts responsables publics français et un terroriste d’État recherché par la justice.
Devant les juges, Senoussi (aujourd’hui détenu en Libye) et Takieddine (en fuite au Liban) ont affirmé que ces deux rendez-vous cachés avaient bien comme objet le financement occulte de la campagne de Nicolas Sarkozy dans la perspective de l’élection présidentielle de 2007. Guéant et Hortefeux ont tous deux démenti de tels échanges, restant très vagues sur les raisons et la nature exacte de leur rencontre, qu’ils ont présentée comme un piège.
Les investigations ont en revanche révélé que quelques jours après la dernière rencontre avec Senoussi, ce dernier a fait verser, début 2006, par l’intermédiaire de Ziad Takieddine, 440 000 euros sur un compte non déclaré aux Bahamas appartenant à Thierry Gaubert. Une partie de la somme a ensuite été retirée en espèces en France.
Devant les juges, mais aussi dans les médias, Nicolas Sarkozy a assuré que ces faits lui étaient totalement étrangers, n’ayant plus eu la moindre relation avec Thierry Gaubert depuis le milieu des années 1990. Des archives obtenues par les enquêteurs ont prouvé qu’il s’agissait d’un pieux mensonge, comme l’a raconté Mediapart, Nicolas Sarkozy et Thierry Gaubert n’ayant jamais cessé de se fréquenter durant ces années-là, soit directement, soit par l’intermédiaire de Brice Hortefeux, parfois même en lien avec les affaires libyennes de Ziad Takieddine.
Une « note de calendrier » de Thierry Gaubert, rédigée quelques jours avant de recevoir les fonds libyens d’Abdallah Senoussi, portait même la mention « NS-Campagne ». « NS » pour Nicolas Sarkozy.
Ces éléments accumulés sont d’autant plus accablants que les investigations ont mis en lumière le fait que l’équipe Sarkozy a, dans le même temps, multiplié les diligences pour tenter de faire sauter le mandat d’arrêt visant Abdallah Senoussi en France. L’avocat personnel de Nicolas Sarkozy, Me Thierry Herzog, s’est même rendu à Tripoli pour rencontrer à cette fin, en novembre 2005, l’équipe de défense pénale du terroriste libyen. En mai 2009, une réunion, dont la trace a été trouvée par les policiers, a également eu lieu à l’Élysée concernant le sort judiciaire de Senoussi.
Et le carnet manuscrit d’un ancien dignitaire libyen, retrouvé par les enquêteurs après sa mort suspecte à Vienne (Autriche) en 2012, contenait lui aussi la trace de plusieurs versements en faveur de Nicolas Sarkozy et de ses proches au moment de la campagne de 2007 – le nom d’Abdallah Senoussi était d’ailleurs cité dans ces documents.
Au-delà des virements bancaires, il y a aussi les espèces, d’après l’enquête. Ziad Takieddine s’est en effet auto-accusé dans le dossier d’avoir également transporté 5 millions d’euros en cash entre Tripoli et Paris pour remettre les fonds, en trois fois, à Claude Guéant (deux fois) et Nicolas Sarkozy (une fois).
Ces deux derniers ont vigoureusement démenti les faits, l’ancien président assurant même à la juge Buresi avoir dans son agenda la preuve qu’une telle remise était physiquement impossible à la date soupçonnée par l’enquête (il s’agit de la fin janvier 2007). Problème : au moment de produire son fameux agenda quelques jours plus tard, Nicolas Sarkozy a fait savoir à la magistrate qu’il l’avait en fait égaré.
Les investigations ont par ailleurs montré que, durant l’année 2006, Ziad Takieddine a retiré en cash plus d’un million d’euros, préalablement versés par le régime libyen, avant de rapatrier les sommes en France.
Et des espèces non déclarées, les enquêteurs en ont, de fait, retrouvé en quantité dans la campagne présidentielle victorieuse de Nicolas Sarkozy en 2007. Une étude commandée par la justice a ainsi établi qu’à la fin de la campagne, après toutes les prestations réalisées, il restait dans les armoires de la trésorerie dirigée par Éric Woerth au bas mot 250 000 euros en grosses coupures, ce qui laissait présumer une circulation massive d’espèces durant la campagne.
Pour sa défense, Éric Woerth a expliqué que ces grosses coupures avaient été envoyées anonymement par la poste par des admirateurs aussi généreux que discrets de Nicolas Sarkozy. Une version démentie lors de l’enquête et finalement jugée « captieuse », c’est-à-dire visant à tromper, selon un rapport de police.
La détention par Claude Guéant durant la campagne présidentielle d’une chambre forte à la BNP – elle était si grande qu’un homme pouvait y entrer debout – n’a probablement pas été de nature à apaiser les soupçons. Claude Guéant a expliqué avoir loué ce coffre-fort géant pour y entreposer des archives confidentielles et des discours de Nicolas Sarkozy.
À l’automne 2020, au lendemain de la mise en examen de Nicolas Sarkozy pour « association de malfaiteurs », Ziad Takieddine a contre toute attente annoncé sur BFMTV et dans Paris Match qu’il retirait ses accusations contre l’ancien président. Ce dernier s’en est félicité dans les minutes qui ont suivi – « La Vérité éclate enfin ! », a-t-il tweeté – et a profité de ces confidences pour lancer une offensive d’une rare virulence contre les juges.
Seulement voilà : cette rétractation n’en était pas une. Une nouvelle enquête judiciaire, toujours à l’instruction, a permis de montrer que l’entretien de Takieddine avait été le fruit de négociations et de versements de fonds. L’opération a été orchestrée par une femme d’affaires, Michèle Marchand, une intime de Nicolas Sarkozy et de sa femme, Carla Bruni, d’après la justice.
Plusieurs personnes, dont « Mimi » Marchand, sont aujourd’hui mises en examen pour « association de malfaiteurs » et « subornation de témoin » dans ce volet du dossier. Et Nicolas Sarkozy, récemment entendu comme suspect par les policiers, est à son tour menacé judiciairement, en plus de tout le reste.
La thèse de l’enrichissement personnel de Claude Guéant
L’autre filière de corruption présumée identifiée par les juges a été pilotée par l’homme d’affaires Alexandre Djouhri. Ancien chiraquien passé au service de Sarkozy à la veille de la présidentielle de 2007, Alexandre Djouhri a réussi à prendre petit à petit la place de Ziad Takieddine dans le cœur de la Sarkozie. Les deux hommes, concurrents, se détestent de longue date.
Au sein du régime libyen, le levier d’influence d’Alexandre Djouhri était un dignitaire du nom Bachir Saleh. Il s’agit de l’ancien directeur de cabinet de Mouammar Kadhafi et ex-président de l’un des plus puissants fonds souverains du pays, le Libyan Africa Portfolio (LAP).
Après avoir publiquement nié les faits, ce dernier a finalement reconnu devant les enquêteurs libyens que « Nicolas Sarkozy a demandé à Mouammar Kadhafi de l’aider dans sa campagne » en octobre 2005, précisant que Mouammar Kadhafi avait répondu à Nicolas Sarkozy : « Si mon ami Chirac ne se présente pas, je suis prêt à vous aider. » Plusieurs fonctionnaires libyens en poste à l’époque, entendus l’été dernier, ont confirmé cette sollicitation.
Bachir Saleh est en outre poursuivi dans l’affaire pour un versement de 10,1 millions d’euros, postérieur à la présidentielle 2007, qu’il a fait opérer par le fonds étatique LAP, qu’il présidait, en faveur d’une société offshore panaméenne appartenant à Djouhri. Un versement réalisé sous couvert de l’achat d’une villa dans le sud de la France, qui en coûtait cinq fois moins. Or, Alexandre Djouhri est soupçonné d’avoir financé personnellement, grâce à cette opération, à hauteur de 500 000 euros Claude Guéant quand il était secrétaire général de la présidence de la République. Donc avec de l’argent libyen, comme l’a analysé la cour d’appel de Paris en novembre 2021.
Les fonds, qui ont servi in fine à l’achat d’un appartement derrière l’Arc de Triomphe, à Paris, ont été versés en mars 2008, soit trois mois après le tapis rouge déroulé par Nicolas Sarkozy à Mouammar Kadhafi pour une visite d’État qui avait été largement décriée en France.
En contrepartie, les juges soupçonnent Claude Guéant (dont le RIB a été retrouvé en perquisition au domicile d’Alexandre Djouhri) d’avoir fait pression sur le groupe EADS pour que celui-ci verse à Alexandre Djouhri des reliquats de commissions occultes sur la vente d’avions de ligne Airbus au régime Kadhafi.
Alexandre Djouhri, qui est également accusé d’avoir offert une montre Patek Philippe à Claude Guéant, apparaît dans un autre volet de l’affaire libyenne – et non des moindres. Il concerne l’exfiltration de France de Bachir Saleh au lendemain de révélations de Mediapart en avril 2012, dans l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle.
Les investigations ont en effet établi qu’Alexandre Djouhri, main dans la main avec le chef des services secrets intérieurs de l’époque, Bernard Squarcini, avait supervisé la fuite de France, destination l’Afrique du Sud, de Bachir Saleh alors que celui-ci était visé par une notice rouge émise par Interpol.
Interrogé sur cet épisode, considéré par les juges comme la substitution à l’autorité judiciaire d’un témoin clé de l’enquête, Nicolas Sarkozy a assuré n’avoir jamais rien su des conditions de cette exfiltration, même si son ancien bras droit à l’Élysée, Claude Guéant, était ministre de l’intérieur au moment des faits.
Elle a tenu les États-Unis en haleine jusque tard dans la nuit avant de présenter devant les caméras la nouvelle inculpation de Donald Trump. Fani Willis, la procureure qui a enquêté sur les tentatives de manipulation de la présidentielle de 2020 dans l’État de Géorgie, est décrite comme stricte et ambitieuse, un bourreau de travail qui « refuse l’échec ».
Fani Willis, procureure du comté de Fulton en Géorgie, a enquêté sur Donald Trump pendant deux ans avant de l’inculper le 14 août 2023.
ÉTATS-UNIS - Et de quatre. L’ex-président américain, qui prend de nouveau part à la course à la Maison Blanche Donald Trump a été inculpé lundi 14 août pour une tentative de manipulation du résultat de l’élection présidentielle de 2020 dans l’État de Géorgie. C’est la quatrième fois en six mois que le milliardaire est mis en examen.
Sans surprise, Donald Trump s’en est immédiatement pris à la procureure Fani Willis, qui dirige l’enquête, la traitant de « partisane enragée » au service des intérêts de Joe Biden, candidat à sa réélection après avoir déjà vaincu Trump il y a 3 ans. « Willis a stratégiquement ralenti son enquête pour interférer au maximum avec la course à la présidentielle de 2024 et nuire à la campagne Trump », a dénoncé le milliardaire.
La procureure, habituée aux insultes du magnat de l’immobilier, a répondu qu’elle prenait ses décisions en se basant « sur les faits et la loi ». « La loi est complètement impartiale », a assuré Fani Willis. Mais qui est cette femme sous le feu des projecteurs et qui ne compte pas se laisser intimider par Donald Trump ?
Un père Black Panther
Fani Willis est née en 1971 à Inglewood, près de Los Angeles, en Californie, mais a été élevée dans la capitale Washington D.C. Son père, John Floyd, est un ancien membre des Black Panthers – un groupe d’extrême gauche qui prônait la libération afro-américaine – et aurait contribué à la création du Black Panther Political Party, d’après le média canadien La Presse.
Avocat pénaliste, John Floyd a souvent emmené la petite Fani (qui signifie « prospérité » en swahili) à la Cour supérieure du district de Columbia, raconte le Washington Post. C’est en accompagnant son père et en l’aidant à classer ses dossiers que Fani Willis a trouvé sa voie et décidé de suivre des études de droit. D’abord à Howard University, surnommée la « Harvard noire » à partir de 1992, puis à la Emory School of Law en 1996.
Après plusieurs années de pratique du droit dans le privé, elle décide en 2001 de rejoindre le parquet du comté de Fulton, qui comprend Atlanta, la capitale de l’État de Géorgie. Elle a notamment traité de nombreux dossiers de meurtres, mais aussi conduit une affaire sur un énorme scandale de tricherie organisée par des professeurs dans les années 2010.
C’est aussi elle qui poursuit les célèbres rappeurs d’Atlanta Young Thug et Gunna en vertu de la loi dite « Rico », un texte généralement utilisé contre la mafia et les gangs. C’est d’ailleurs à nouveau sur cette législation visant la délinquance en bande organisée que s’est appuyée Fani Willis pour inculper Donald Trump.
« Elle est un pitbull »
Depuis, sa réputation n’est plus à faire. « C’est un pitbull », a déclaré au Washington PostVince Velazquez, un policier d’Atlanta qui a travaillé avec Fani Willis avant qu’elle ne devienne procureure. Etil ajoute : « Si j’avais commis un crime, je ne voudrais pas être poursuivie par Fani Willis. »
En 2020, elle décide de se lancer dans la course, sous l’étiquette démocrate, pour se faire élire procureure du comté de Fulton et remplacer de Paul Howard, lui aussi démocrate, en poste depuis 1997. Le 4 janvier 2021, elle déclare à l’Atlanta Magazine : « Dans mon esprit, je n’allais jamais me lancer face au procureur en place… Mais les appels sont devenus de plus en plus forts… Et j’ai juste fait ce pour quoi Dieu m’avait appelée. »
Fani Willis l’emporte largement face à son patron et ancien mentor avec près de trois quarts des votes et 40 000 voix d’avance, et devient la première femme à occuper ce poste.
Le 2 janvier 2021, Donald Trump appelle le républicain Brad Raffensperger pour lui demander de « trouver » les quelque 12 000 voix qui lui manquent pour renverser le résultat de l’élection présidentielle en Géorgie, État remporté par Joe Biden. Fani Willis est chargée de mener l’enquête qui résulte de cette manipulation et qui aboutira, donc, à l’inculpation de l’ancien président et de 18 autres personnes. En attendant un procès qui pourrait être dévastateur pour l’avenir de l’ancien chef de l’État.
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