On rappelle souvent que Camus dédie à son instituteur ses Discours de Suède, quand il les publie. On rappelle moins souvent que, dans le discours de Stockholm lui-même, en décembre 1957, il reporte l’honneur qui vient de lui être fait avec le prix Nobel de littérature sur toute sa génération qui, dit-il, « mérite d’être saluée et encouragée » car sa tâche est immense :
Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde ne se défasse. (IV, p. 241)
Ma tâche, ce matin, est de faire résonner ces mots, dans toute leur ampleur.
Cette génération, née dans les années 1910, est arrivée à l’âge adulte au moment de la montée des fascismes et de la guerre d’Espagne, a connu la deuxième guerre mondiale, a vu s’installer l’univers concentrationnaire et a été témoin de la puissance de destruction de la bombe atomique.
Certes, la situation n’est pas exactement la même, soixante-six ans plus tard. Mais les mots de Camus définissant l’héritage de sa génération sont étrangement actuels :
Héritière d’une histoire corrompue où se mêlent les révolutions déchues, les techniques devenues folles, les dieux morts et les idéologies exténuées, où de médiocres pouvoirs peuvent aujourd’hui tout détruire mais ne savent plus convaincre, où l’intelligence s’est abaissée jusqu’à se faire la servante de la haine et de l’oppression, cette génération a dû, en elle-même et autour d’elle, restaurer, à partir de ses seules négations, un peu de ce qui fait la dignité de vivre et de mourir. (p. 241)
C’est en 1957 qu’il fait ce constat amer et en même temps plein d’espoir – car cette génération a déjà entamé sa tâche…
« Empêcher que le monde ne se défasse »… Depuis l’après-guerre, Camus porte un regard lucide sur la France, sur l’Europe, sur le monde ; et il utilise tous les moyens à sa disposition, dont le journalisme, pour dénoncer les forces de désintégration et de mort qui y sont à l’œuvre. Mais, dans le même souffle, il affirme des valeurs au nom desquelles il peut dessiner des perspectives, ouvrir des voies. Et c’est en artiste qu’il le fait ; la conférence d’Upsal, qui suit de quelques jours le discours de Stockholm s’intitule d’ailleurs « L’Artiste et son temps ».
Dans ce parcours que je vous propose à travers Camus, à chaque pas, vous entendrez sans peine les échos avec le monde d’aujourd’hui : en 2023, comme en 1957, il s’agit de « se forger un art de vivre par temps de catastrophe » (p. 241). « Empêcher que le monde ne se défasse », c’est d’abord vivre – à plein.
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Le constat selon lequel le monde se défait n’est pas neuf chez Camus. Né en 1913, orphelin d’un père tué au début de la Première Guerre mondiale, il grandit dans une Algérie où le bonheur de vivre ne masque pas l’injustice du système colonial dans laquelle la France est en train de renier ses propres valeurs. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il entre dans la Résistance par le réseau « Combat », devenant un des piliers du journal du même nom ; à la Libération, il apparaît comme un des porte-parole de la Résistance, par sa plume de journaliste, puis par la publication de son roman, La Peste, reçu comme une allégorie de la Résistance.
Ses textes de l’immédiat après-guerre sont traversés par les thèmes que déploiera, dix ans plus tard, son Discours de Stockholm. En plus des nombreux éditoriaux qu’il donne dans le journal Combat, deux textes sont particulièrement marquants : une conférence qu’il donne aux États-Unis en 1946 sous le titre « La Crise de l’homme », et une série de 8 articles qu’il publie dans Combat en 1946, sous le titre de « Ni victimes ni bourreaux ».
Ce que Camus met clairement en avant, c’est le fait que « l’instinct de mort » est à l’œuvre dans l’histoire, en particulier celle de la civilisation occidentale. Déjà avec ses Lettres à un ami allemand, écrites pendant la Guerre et publiées en 1945, il montrait le nazisme comme le fruit de cet instinct de mort devenu dominant. Dans les textes suivants, il montre comment cet instinct a inauguré un « siècle de la peur », dont il cherche les causes et les implications.
Il dénonce une « rage de destruction » jamais connue dans l’histoire de l’humanité, une science utilisée pour le « meurtre organisé », par des États qui sèment la terreur pour asseoir leur domination. Le 8 août 1945, au moment où les pays occidentaux approuvent massivement la décision des États-Unis de larguer la bombe sur Hiroshima, Camus, au contraire, la condamne comme terrorisme d’État :
Nous nous résumerons en une phrase : la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif et l’utilisation intelligente des conquêtes scientifiques. (II, p. 409)
Selon lui, la guerre froide qui se met en place dans l’après-guerre n’est pas, à terme, moins mortelle que l’autre, puisqu’elle se fonde sur l’équilibre des armes dans les deux camps. C’est tout le développement industriel (et Camus n’a pas connu le développement fulgurant de la finance mondiale !) qui porte en lui des germes de mort car, au nom du progrès, et en visant l’efficacité, on prend parti pour le meurtre, en considérant que « la fin justifie les moyens » (II, p. 748).
Si le monde se défait, c’est aussi parce que les êtres humains disparaissent derrière des abstractions (aujourd’hui, on dirait : derrière les chiffres et les sigles et les tableaux) ; et on règle l’évolution de ces abstractions sur le mode d’une évidente nécessité : on invoque « le sens de l’Histoire » (ou, plus prosaïquement, on répète : « il n’y a pas d’autre solution »). Uniquement perçu dans sa dimension historique, politique, sociale, l’être humain n’est plus considéré en tant que tel : il est seul face à un système inhumain dont il se sent le jouet impuissant. Il est humilié, jugé, condamné – individuellement et collectivement.
Alors, comment se situer pour agir librement ? « Ni victimes, ni bourreaux », répond Camus. Si on se tait, on prend parti pour les bourreaux : on légitime le meurtre ; on se résigne aux massacres (surtout quand ils sont lointains). Mais on ne peut pas se résigner, même si c’est dans une fraternité active avec les victimes. Il faut « reconsidérer [sa] pensée et [son] action » (II, p. 452). En effet, les valeurs ont été perverties (« socialisme », « révolution », « démocratie », « collectivisation des ressources », « vérité des faits ») ; tout contrat social (national et international) semble inatteignable ; l’avenir n’apparaît même plus comme possible (II, p. 454). Je résume ici la pensée de Camus dans la série d’articles de 1946.
Les puissances européennes et nord-américaines, si fières d’elles-mêmes, aboutissent à un échec moral, par ce rétrécissement de l’humain et cette « perversion des valeurs » auxquels elles ne cessent de procéder, avec l’illusion destructrice de les faire prévaloir par la puissance militaire et économique (on songe au ressentiment ainsi attisé de nos jours mais qui, loin de conduire à retourner contre l’Occident ses valeurs fondatrices, promeut une internationale des despotismes et des populismes).
Dans un texte écrit en 1948, « L’Exil d’Hélène », Camus analyse cet échec en termes d’oubli par rapport à l’héritage grec, dans lequel il met en avant la beauté et la mesure. Or, dit-il, « [n]ous avons exilé la beauté » et, fils de la démesure, nous sommes lancés « à la quête de la totalité » ; et ce faisant, nous avons « désorbité l’univers » et nous vivons « dans la laideur et les convulsions » (II, p. 597-598). Devenue nihiliste, la civilisation européenne va vers un « suicide général », ajoute Camus dans une conférence à Athènes en 1955.
Et pourtant, dans cet hiver du monde, il rappelle la force des amandiers qui, en Algérie, fleurissent en février. Dans son beau texte « Les Amandiers » (III, p. 586-588), il plaide contre le désespoir face à la force des armes qui semblent avoir gagné dans le monde contre les forces de l’esprit :
Quand j’habitais Alger, je patientais toujours dans l’hiver parce que je savais qu’en une nuit, une seule nuit froide et pure de février, les amandiers de la vallée des Consuls se couvriraient de fleurs blanches. Je m’émerveillais de voir ensuite cette neige fragile résister à toutes les pluies et au vent de la mer. Chaque année pourtant elle persistait, juste ce qu’il fallait pour préparer le fruit. (III, p. 587)
Camus prend appui sur cette image, et aussi sur les « vertus de l’esprit » prônées par Nietzsche, pour affirmer hautement que, face à la force des armes, on peut encore et toujours opposer la force de l’esprit qui, sans pesanteur, « résiste à tous les vents de la mer par la vertu de la blancheur et de la sève » (III, p. 588).
Il ne nie pas le tragique mais il refuse le désespoir et, dans ce même texte « Les Amandiers », il dessine des chemins d’avenir (je cite ces phrases magnifiques – qui seront reprises par d’autres intervenants) :
Notre tâche d’homme est de trouver les quelques formules qui apaiseront l’angoisse infinie des âmes libres. Nous avons à recoudre ce qui est déchiré, à rendre la justice imaginable dans un monde si évidemment injuste, le bonheur significatif pour des peuples empoisonnés par le malheur du siècle. Naturellement, c’est une tâche surhumaine. Mais on appelle surhumaines les tâches que les hommes mettent longtemps à accomplir, voilà tout. (III, p. 587)
Comment, donc, accomplir ces tâches ?
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D’abord – et c’est capital – il ne s’agit pas de refaire le monde. Camus n’a que méfiance pour les idéologies qui promettent tout pour demain ; il se refuse à les justifier par l’idée de progrès, telle que les Lumières l’avaient introduite (mais c’était dans le monde fixiste des pouvoirs de droit divin). Il veut, écrit-il dans « Ni victimes ni bourreaux », « définir les conditions d’une pensée politique modeste, c’est-à-dire délivrée de tout messianisme, et débarrassée de la nostalgie du paradis terrestre. » (II, p. 440). La nouvelle utopie consistera d’abord à vouloir « sauver les corps », donc à œuvrer fortement en faveur de la paix, et des conditions internationales de son maintien. Camus en parle en termes d’utopie, non parce que ce serait irréalisable, mais parce qu’il s’agit d’un avenir que les générations adultes ont échoué à préparer et que les générations suivantes « mieux armées », espère-t-il, (II, p. 454), auront à inventer. À quoi nous inciterait-il aujourd’hui, nous qui préparons si mal l’avenir de nos petits-enfants ?
Cette « utopie modeste » implique pour chacun de transformer ses mots et sa pensée. Dans sa conférence « La Crise de l’homme », il affirme :
Nous devons appeler les choses par leur nom. […] On ne pense pas mal parce qu’on est un meurtrier. On est un meurtrier parce qu’on pense mal. C’est ainsi qu’on peut être un meurtrier sans avoir jamais tué apparemment. […] La première chose à faire est donc le rejet pur et simple par la pensée et par l’action, de toute forme de pensée réaliste et fataliste. C’est le travail de chacun de nous. (II, p. 744)
En condamnant « toute forme de pensée réaliste et fataliste », Camus ne prêche pas contre la lucidité : les deux adjectifs s’expliquent mutuellement ; souvent on conseille au contestataire d’être réaliste, de se résigner (« il n’y a pas d’alternative », affirment aujourd’hui les tenants du néo-libéralisme triomphant). Camus refuse la résignation, de toutes ses forces. Croire à la force de l’esprit et des mots, c’est le début – et quelquefois la fin – de tout : « Désormais, le seul honneur sera de tenir obstinément ce formidable pari qui décidera enfin si les paroles sont plus fortes que les balles. (II, p. 456)
Pour orienter cette lutte, Camus ne cherche pas le sens mais propose des valeurs. Dans le premier « cycle » de son œuvre, centrée sur la notion d’absurde, il avait montré comment on peut vivre quand on a entériné le fait que rien n’a de sens, quand on s’est mis face à cette condition tragique de l’être humain, au lieu de chercher des réponses philosophiques ou religieuses. Il l’avait montré à travers des personnages comme Meursault ou Sisyphe ou Caligula : des personnages solitaires, affrontés au malheur et à la mort. Certes, Caligula reste enfermé dans sa douleur et ses rêves fous d’empereur tout-puissant, à la différence de Sisyphe et de Meursault qui, chacun à sa manière, savent s’ouvrir au monde. Tous deux ont la lucidité : Sisyphe sait que les dieux l’ont condamné pour toujours à ce châtiment absurde ; Meursault sait depuis longtemps que « rien n’a d’importance », que la mort à venir emporte tout par avance. Tous deux ont aussi le courage : Meursault sort de lui-même pour crier à l’aumônier de la prison cette vérité paradoxale : l’aumônier n’est pas dans la vie alors que lui, le condamné à mort, vit à plein et serait prêt à tout revivre ; Sisyphe refuse toute récrimination contre des dieux qu’il nie, il accomplit simplement sa tâche, aussi absurde qu’elle soit, mais en sachant que « la lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un cœur d’homme ». Camus montre Sisyphe et Meursault le cœur plein : Meursault, tout ouvert au souvenir de sa mère et au monde, peut dire : « j’ai senti que j’étais heureux, et que je l’étais encore » ; et « il faut imaginer Sisyphe heureux ».
Les valeurs qui peuvent soutenir la lutte contre les forces de désintégration et de mort à l’œuvre dans le monde, Camus les a aussi illustrées dans son cycle de la révolte. Dans son roman La Peste ou dans sa pièce de théâtre L’État de siège, il a montré des personnages qui se battent ensemble contre le mal qui frappe les hommes – que ce soit sous la forme d’un virus ou d’un dictateur. Ils se battent au nom de la fraternité, car ils partagent le sort commun : le chroniqueur de La Peste ne peut qu’être un des Oranais enfermés dans la ville pestiférée ; Diego est frappé du même mal mystérieux que les autres opposants au dictateur. Dans la lutte âpre et dangereuse qu’ils mènent, il leur semble par moments perdre toute sensibilité ; et cela n’empêche pas les enfants ou les femmes aimées de mourir. Mais les deux héros saisissent finalement, au plus profond d’eux-mêmes, l’importance de l’amitié, de l’amour, de la tendresse. Dans L’État de siège, Diego choisit de mourir pour que Victoria vive car « […] ce monde a besoin de toi. Il a besoin de nos femmes pour apprendre à vivre. Nous [les hommes], nous n’avons jamais été capables que de mourir. » (II, p. 363-364). Dans La Peste, le docteur Rieux qui s’est battu de toutes ses forces contre l’épidémie comprend finalement l’essentiel : ce n’est pas « que ces choses aient un sens ou non » ; c’est de voir « ce qui est répondu à l’espoir des hommes » ; et ce qui est répondu, c’est que « s’il est une chose qu’on puisse désirer toujours et obtenir quelquefois, c’est la tendresse humaine. » (II, p. 242)
Camus lui-même a mené cette lutte contre les forces de mort, en direct, puisqu’en tant que journaliste et en tant qu’intellectuel « embarqué » (il récuse le terme « engagé »), il peut faire résonner ses mots en France et au-delà des frontières, vu la notoriété qu’il a acquise dans la seconde moitié des années 1940. Même si ses discours, conférences, articles, essais suscitent des polémiques, il fait entendre une voix, une parole qui porte haut des valeurs éthiques. Il ne se pose pas en sauveur, ni en prêcheur de morale (ses détracteurs ne se priveront pourtant pas de l’en accuser). Il réveille les consciences ; il rappelle l’élan de la Résistance ; il parle pour les êtres humains – non à leur place mais afin de plaider pour eux contre l’Histoire qui les broie. Il n’est pas seul ; en France, et plus encore dans toute l’Europe, il est en dialogue avec des êtres de bonne volonté, des intellectuels qui luttent au nom des mêmes valeurs que lui, souvent en butte à l’échec et à la solitude – et l’un des seuls en France à le faire alors contre le stalinisme. De ce dialogue, les chercheurs font actuellement émerger des traces passionnantes, qui dessinent ce climat intellectuel européen visant, pour reprendre des mots de Camus, à « reprendre les choses à leur début pour refaire une société vivante à l’intérieur d’une société condamnée » (II, p. 452).
Et, à Stockholm, il peut saluer ce que sa génération a déjà fait pour commencer à accomplir cette tâche : « […] il est sûr que, partout dans le monde, elle tient déjà son double pari de vérité et de liberté, et, à l’occasion, sait mourir sans haine pour lui. » (IV, p. 242) Je ne m’attarderai pas sur ce propos – qui sera développé ici même demain, ainsi que ce qu’il dit dans la même phrase sur la lutte pour la paix et la réconciliation du travail et de la culture. Je citerai seulement la belle image à laquelle il recourt : « refaire avec tous les hommes une arche d’alliance » (IV, p. 242) ; il ramène dans la sphère humaine l’image biblique de l’alliance de Dieu avec son peuple, il laisse affleurer l’image de l’arc-en-ciel pour suggérer une fédération universelle.
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L’artiste, comme tout être humain, travaille à cette tâche collective : la création est un des moyens d’aller contre le délitement du monde. Camus le fait avec ses moyens propres – ce que soulignent avec force les deux Discours de Suède, celui du prix Nobel et la conférence « L’artiste et son temps ». Il affirme cette responsabilité spécifique de l’artiste : écrire, dit-il, est un honneur – qui implique une obligation de solidarité (IV, p. 24). Il s’agit avant tout de la claire conscience de ce qu’il a en partage avec les autres, c’est-à-dire le monde tel qu’il est, aujourd’hui-maintenant, et, plus largement, la douloureuse condition humaine. Les actes viendront ensuite, c’est-à-dire les œuvres où viendront résonner « le malheur et l’espérance » des hommes.
Mais leur création même nécessite la solitude ; l’artiste ne peut pas créer dans le bruit et le divertissement (au sens pascalien). La beauté, celle qu’on reçoit autant que celle qu’on tente de créer, exige un âpre face à face. Camus médite longuement sur la solitude irrémédiable des vrais artistes ; dans la conférence « L’artiste et son temps », il évoque Nietzsche (qui, pour lui, est un artiste-philosophe) « entré dans une solitude définitive, écrasé et exalté en même temps par la perspective de cette œuvre immense qu’il devait mener sans aucun secours » (IV, p. 265).
On retrouve là le dilemme sur lequel venait se clore la nouvelle « Jonas ou l’Artiste au travail » dans L’Exil et le Royaume ; après une période de stérilité, le peintre Jonas retrouve son étoile avant une sorte de passage symbolique par la mort ; mais avant cela, il a peint une « toile, entièrement blanche, au centre de laquelle [il] avait seulement écrit, en très petits caractères, un mot qu’on pouvait déchiffrer, mais dont on ne savait s’il fallait y lire solitaire ou solidaire. »(IV, p. 83) La tension n’est pas entre un pôle négatif et un pôle positif : l’artiste a un impérieux besoin de solitude ; mais il se stérilise s’il se coupe des autres. Dans les années 1950, Camus vit cette tension sur le mode de l’épuisement personnel.
Il passe aussi par de graves moments de doute, à la fois sur son talent de créateur et sur les risques d’imposture qu’il encourt en prenant la parole : au nom de quoi est-il alors légitime ? Créer – et donc, pour lui, créer avec des mots – peut-il « empêcher que le monde ne se défasse » ? Depuis les années 1930, il n’a cessé, seul ou en dialogue avec des artistes et des philosophes, de réfléchir à la parole – sa puissance et ses impasses. Cette méditation aboutit à la formule-choc que l’on trouve dans l’Introduction de L’Homme révolté (1951): « Parler répare » (OC III, p. 68) ; si, dans le contexte, il s’agit de l’affrontement de l’homme avec l’absurde, l’expression (appuyée par sa construction sonore en chiasme) prend une portée plus grande dans ces années de crise. D’ailleurs, ne se répond-il pas à lui-même quand, à peu près en même temps, il écrit, dans les poèmes en prose de La Postérité du soleil (qui ne sera publié qu’après sa mort) : « Parler sépare, aussi » (OC IV, p. 700).
Pour autant il ne s’agit pas de se taire mais de parler autrement, de parler à partir d’ailleurs. On le comprend mieux si on lit l’ensemble du bref poème de La Postérité du soleil : « Le jour s’achève, les feuilles crissent. Ils attendront encore, tu les aimes mieux d’ici. Parler sépare, aussi. » La parole n’est pas communication quand elle est mal ajustée ; et il arrive que, de loin, on aime mieux, que l’on puisse être en communication plus profonde. Dans ce début des années 1950, Camus se pose la question spécifique du régime de parole que peut, que doit choisir l’écrivain-artiste pour « empêcher que le monde ne se défasse ». Depuis la guerre, il a eu une parole publique (articles dans Combat, discours, pétitions, etc.) au cœur des luttes et des polémiques. Son œuvre s’est développée selon le parcours philosophique qu’il lui avait assigné avant la guerre : le cycle de l’absurde puis celui de la révolte, ce dernier évidemment traversé par les mêmes thèmes et valeurs que la parole publique.
« […] tu les aimes mieux d’ici » ; comment situer cet « ici » d’où il pourra aimer, et parler – mieux ? À l’évidence, le théâtre y occupe une place importante ; puisqu’il en sera amplement question demain, je ne fais que mentionner ici cet ailleurs d’où on parle du monde et au monde ; je rappelle seulement que, dans les années qui précèdent sa mort accidentelle, Camus travaillait à ce qu’on lui confie un théâtre parisien où il puisse réaliser librement ses projets ; ce devait être fait en 1960…
L’ici, d’où il doit et veut parler, c’est, à partir de 1954, ce que l’on n’appelle pas encore la guerre d’Algérie, dans laquelle un monde se défait, de la pire manière. Camus parle d’abord sur le mode « ancien » : la presse, le discours, l’essai – ou l’intervention directe comme lors de l’ « Appel pour une trêve civile en Algérie », qu’il lance à Alger en janvier 1956 à l’initiative d’amis « libéraux » des deux communautés. Mais c’est l’échec. Il rassemble alors l’ensemble des textes qu’il a écrits sur l’Algérie : cela donne, en juin 1958, Chroniques algériennes ; mais ce recueil de vingt ans de textes devient le bilan d’un double échec, celui de la France en Algérie et le sien propre.
Il lui faut dire l’Algérie autrement, non pas pour travailler à maintenir un statu quo injuste mais pour inventer la communauté à venir, pour affirmer qu’elle est possible et souhaitable même quand elle semble devenue impossible :
Je veux croire, à toute force, que la paix se lèvera sur nos champs, sur nos montagnes, nos rivages et qu’alors enfin, Arabes et Français, réconciliés dans la liberté et la justice, feront l’effort d’oublier le sang qui les sépare aujourd’hui. (IV, p. 255)
Dire l’Algérie, c’est la faire apparaître autrement, par les moyens de l’art, c’est-à-dire dans ses récits ; de fait, par l’espace-temps et par les personnages, elle entre concrètement dans les nouvelles de L’Exil et le Royaume et dans Le Premier Homme (les dossiers de travail du roman inachevé nous montrent que la question algérienne y aurait été centrale).
Mais le roman va plus loin : il vise une dimension universelle, inhérente à la tâche spécifique de l’artiste. S’il veut empêcher que le monde ne se défasse », l’art doit réunir, en faisant « retentir le silence » ; il doit « émouvoir le plus grand nombre d’hommes en leur offrant une image privilégiée des souffrances et des joies communes » (IV, 240). C’est parce qu’il a compris cela que Camus a déjà amorcé une mutation profonde de son écriture : écrire de l’intérieur de l’amour, cela change tout. Non seulement il va « parler de ceux qu’il aime », mais il va écrire autrement, en laissant frémir davantage l’émotion, en laissant affleurer le lyrisme.
Il ne s’agit pas de raconter au monde entier sa petite histoire (il refuse d’ailleurs d’écrire une autobiographie). Mais, à travers ces quelques anonymes que sont les membres de sa famille, il veut montrer l’être humain écrasé par l’Histoire ; comme la mère du protagoniste, qui vient d’apprendre la mort de son mari, tué en 1914 à Verdun, « restée muette et sans larmes pendant de longues heures à serrer dans sa poche le pli qu’elle ne pouvait lire et à regarder dans le noir le malheur qu’elle ne comprenait pas. » (IV, p. 783). Camus veut également témoigner de l’éminente dignité de ces pauvres. Il veut aussi, encore et toujours, mais plus concrètement que dans les essais et les articles, lutter pour « préserver la part de l’homme qui n’appartient pas à l’histoire » (II, p. 455), celle où l’on peut être pleinement humain.
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« Empêcher que le monde ne se défasse », c’est lutter pour la vérité et la liberté (on le dira amplement dans ces deux jours). Mais c’est aussi donner sa chance à la vie et à la joie, découvrir en soi une lumière et en préserver les sources, comme il le dit magnifiquement dans « Retour à Tipasa » :
[…] je redécouvrais à Tipasa qu’il fallait garder en soi une fraîcheur, une source de joie, aimer le jour qui échappe à l’injustice, et retourner au combat avec cette lumière conquise. Je retrouvais ici l’ancienne beauté, un ciel jeune, et je mesurais ma chance, comprenant enfin que dans les pires années de notre folie le souvenir de ce ciel ne m’avait jamais quitté. C’était lui qui pour finir m’avait empêché de désespérer. […] Au milieu de l’hiver, j’apprenais enfin qu’il y avait en moi un été invincible. » (III, p. 613)
Le monde aujourd’hui se défait, bien plus gravement encore avec la catastrophe climatique. La tâche des générations à venir est de plus en plus lourde. À nous de leur en donner l’énergie ; Camus nous y aide.
La légende, qui aime la jeunesse fauchée, a oublié qu'Albert Camus détestait la vitesse et trouvait «absurde» de mourir dans des draps de tôle froissée. Cinq ans après que James Dean se fut tué au volant de sa Porsche 550 Spyder et trois ans après que Françoise Sagan eut retourné son Aston Martin dans un champ, on a fait entrer l'auteur de «la Peste» dans le peloton des casse-cou du volant, des héros téméraires du macadam.
Un jeune prix Nobel s'écrase contre un platane ! Et les mythologues d'ajouter que, en 1962, à une semaine d'intervalle, Roger Nimier perdit la vie sur l'A13 et Jean-René Huguenin, l'auteur de «la Côte sauvage», trouva la mort, à 26 ans, près de Chartres.
C'était l'époque, il est vrai, où les écrivains prêtaient aux bolides des vertus animales, où Sagan leur attribuait le pouvoir de «décoiffer les chagrins», où Morand se vantait d'avoir passé «plus de temps avec les voitures qu'avec les femmes». La mort accidentelle de Camus, à 47 ans, participa de ce romantisme machinal d'un autre temps: il était beau, célèbre, couvert de femmes, et il avait encore tellement à écrire. Même ses pires contempteurs s'inclinèrent devant un destin si tôt brisé.
Le livre de José Lenzini, «les Derniers Jours de la vie d'Albert Camus»(Actes Sud, 16,50 euros), rappelle combien la réalité est loin de la légende. Pour rentrer de Lourmarin après les vacances de Noël, Camus avait acheté son billet de train pour Paris. Il finit par céder à l'invitation de son ami et éditeur Michel Gallimard, qui venait d'acquérir une Facel Vega sous le capot de laquelle piaffaient 253 chevaux. Camus s'assit à la place du mort.
Lenzini raconte les deux jours de voyage vers Paris sous la pluie, la halte gastronomique au Chapon Fin, et, le 4 janvier 1960, l'embardée de la voiture au Petit-Villeblevin, dans l'Yonne. Un banal accident de la route où disparut un homme d'exception qui s'était acheté une conduite mais se méfiait des automobiles.
Le monde est ce qu'il est, c'est-à-dire peu de chose. C'est ce que chacun sait depuis hier grâce au formidable concert que la radio, les journaux et les agences d'information viennent de déclencher au sujet de la bombe atomique. On nous apprend, en effet, au milieu d'une foule de commentaires enthousiastes que n'importe quelle ville d'importance moyenne peut être totalement rasée par une bombe de la grosseur d'un ballon de football. Des journaux américains, anglais et français se répandent en dissertations élégantes sur l'avenir, le passé, les inventeurs, le coût, la vocation pacifique et les effets guerriers, les conséquences politiques et même le caractère indépendant de la bombe atomique. Nous nous résumerons en une phrase : la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l'utilisation intelligente des conquêtes scientifiques.
En attendant, il est permis de penser qu'il y a quelque indécence à célébrer ainsi une découverte, qui se met d'abord au service de la plus formidable rage de destruction dont l'homme ait fait preuve depuis des siècles. Que dans un monde livré à tous les déchirements de la violence, incapable d'aucun contrôle, indifférent à la justice et au simple bonheur des hommes, la science se consacre au meurtre organisé, personne sans doute, à moins d'idéalisme impénitent, ne songera à s'en étonner.
Les découvertes doivent être enregistrées, commentées selon ce qu'elles sont, annoncées au monde pour que l'homme ait une juste idée de son destin. Mais entourer ces terribles révélations d'une littérature pittoresque ou humoristique, c'est ce qui n'est pas supportable.
Déjà, on ne respirait pas facilement dans un monde torturé. Voici qu'une angoisse nouvelle nous est proposée, qui a toutes les chances d'être définitive. On offre sans doute à l'humanité sa dernière chance. Et ce peut-être après tout le prétexte d'une édition spéciale. Mais ce devrait être plus sûrement le sujet de quelques réflexions et de beaucoup de silence.
Au reste, il est d'autres raisons d'accueillir avec réserve le roman d'anticipation que les journaux nous proposent. Quand on voit le rédacteur diplomatique de l'Agence Reuter* annoncer que cette invention rend caducs les traités ou périmées les décisions mêmes de Potsdam*, remarquer qu'il est indifférent que les Russes soient à Koenigsberg ou la Turquie aux Dardanelles, on ne peut se défendre de supposer à ce beau concert des intentions assez étrangères au désintéressement scientifique.
Qu'on nous entende bien. Si les Japonais capitulent après la destruction d'Hiroshima et par l'effet de l'intimidation, nous nous en réjouirons. Mais nous nous refusons à tirer d'une aussi grave nouvelle autre chose que la décision de plaider plus énergiquement encore en faveur d'une véritable société internationale, où les grandes puissances n'auront pas de droits supérieurs aux petites et aux moyennes nations, où la guerre, fléau devenu définitif par le seul effet de l'intelligence humaine, ne dépendra plus des appétits ou des doctrines de tel ou tel État.
Devant les perspectives terrifiantes qui s'ouvrent à l'humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d'être mené. Ce n'est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l'ordre de choisir définitivement entre l'enfer et la raison.
À l’occasion de la visite du Premier ministre français, Jean-Marc Ayrault, en Algérie, son épouse et les femmes des ministres, ainsi que Catherine Camus, la fille du grand écrivain Albert Camus, natif de Drean, ex-Mondovi dans la wilaya d’El-Tarf, profiteront de cette opportunité pour se rendre à Tipasa, une région qui a beaucoup inspiré Camus. D’après nos informations, ces dames se rendront au musée de Tipasa, au mausolée royal de Maurétanie et visiteront les ruines romaines dans lesquelles se trouve la stèle érigée en 1961 et gravée par Louis Benisti face au mont du Chenoua, à la mémoire d’Albert Camus. Il y est écrit : “Je comprends ici ce qu'on appelle Gloire, le Droit d'aimer sans compter...”
Il semble difficile de mettre uniquement sur le compte de la conjoncture économique le relatif silence qui entoure la commémoration du centenaire de la naissance d'Albert Camus, qui fut pourtant Prix Nobel de littérature en 1957 et qui reste largement étudié dans l'enseignement secondaire comme l'avait relevé de façon acerbe Jean-Jacques Brochier avec son Camus, philosophe pour classes terminales. Paradoxalement, l'une des explications de ce mutisme médiatique réside vraisemblablement dans la charge politique de cet écrivain pourtant mesuré, adepte de la "pensée de midi". Nonfiction.fr vous propose donc trois aperçus de l'aspect politique de l’œuvre d'Albert Camus : à partir de cette dernière, de ses prises de position explicites mais également à travers les usages politiques et posthumes de sa personne. Dans sa recension d'Albert Camus. Littérature et politique de Jeanyves Guérin, Florian Alix revient sur l'entreprise de définition de la "politique littéraire" de l'écrivain, appréhendée à la fois comme réflexion et geste politique. Chez Camus, l'écriture littéraire recouvre ainsi une certaine méfiance à l'égard des idéologies : la politique est avant tout une expérience matière à questionnements philosophiques, dont celui de la justice constitue l'un des tous premiers, rappelant l'engagement éthique constant de l'homme. Dans un texte fouillé, Isabelle de Mecquenem se penche sur la difficulté à cerner une pensée politique chez Camus, que loin de considérer comme un défaut, ne serait que la traduction d'un hommage rendu à "la plume qui pense", mais aussi d'un attachement profond à la lucidité, la liberté et l'humanité. Au passage, ces convictions expliqueraient sa réhabilitation par les intellectuels des années 1980. Toutefois, l'engagement politique de Camus ne fut pas toujours insaisissable comme le prouve sa participation au Parti communiste algérien, puis à la fin de la Seconde Guerre mondiale, sa mobilisation en faveur d'une Europe socialiste et pacifiée. Enfin, croisant la lecture de trois récents essais sur Albert Camus signés d'auteurs aussi différents politiquement qu'Henri Guaino, Jean Monneret, Benjamin Stora et Jean-Baptiste Péretié, Benjamin Caraco examine les différentes interprétations et récupérations dont fut et est toujours l'objet Camus depuis sa disparition. À cause ou grâce à la complexité de ses engagements politiques, Camus reste populaire dans un certain nombre de cercles politiques différents et parfois antagonistes, de la gauche à la droite en passant par les nostalgiques de l'Algérie française, comme l'a illustré l'une des seules actualités liées à la commémoration de Camus : le fiasco d'une exposition devant lui être consacrée à Aix-en-Provence. Cent ans après sa mort, l’œuvre et la personne d'Albert Camus, en dépit de l'image paisible à laquelle il est parfois associée, continuent de faire l'objet de mobilisations et de luttes politiques et mémorielles, nous incitant, afin de les dépasser, à nous replonger dans ses livres
Les convictions politiques d'Albert Camus rentrent malaisément dans les schémas partisans habituels : se déclarant homme de gauche, il n'a pas hésité à critiquer son camp et ce dernier lui a bien rendu via Sartre et sa revue Les Temps Modernes comme à l'occasion de la parution de L’Homme révolté. Pour autant, il n'a jamais rejoint la droite même si ses prises de position, puis son silence, sur la guerre d'Algérie ont été à l'origine de bien des interprétations mais aussi d'ambiguïtés. De même, son attachement viscéral à la liberté a conduit aussi bien des libertaires, tendance anarchiste, que des libéraux à se réclamer de lui. Paradoxalement, cette popularité de Camus dans des cercles politiques différents et bien souvent antagonistes explique vraisemblablement, bien que partiellement, le relatif silence qui a entouré le centenaire de sa naissance. Entre l'absence de panthéonisation à la demande de ses descendants et l'affaire de l'exposition à Aix-en-Provence, l'on pourrait quasiment parler d'une commémoration qui n'a pas eu lieu. Le personnage d'Albert Camus, prix Nobel de littérature, semble au premier abord pourtant beaucoup plus consensuel qu'un Louis-Ferdinand Céline, dont la célébration fut interdite explicitement...
Trois ouvrages récents, écrits par quatre auteurs situés sur des cases différentes de l'échiquier politique, permettent de nous éclairer sur les luttes mémorielles et politiques dont fait encore l'objet Albert Camus, plus de quarante ans après son décès dans un accident de voiture. Ils incarnent tous les trois une tendance. Camus brûlant écrit conjointement par Benjamin Stora et Jean-Baptiste Péretié, respectivement historien de l'Algérie et documentariste, revient sur l'affaire de l'exposition d'Aix-en-Provence, dont le commissariat leur avait été confié, et plus généralement sur les récupérations politiques de l'écrivain. Camus au Panthéon d'Henri Guaino, aujourd'hui député des Yvelines mais avant tout connu comme la plume et le conseiller spécial de Nicolas Sarkozy durant sa mandature, propose un portrait et un discours qui aurait pu avoir lieu lors de son entrée au Panthéon. Camus et le terrorisme de l'historien Jean Monneret se penche sur l'attitude d'Albert Camus face à la violence en général et le terrorisme en particulier.
Un Camus de gauche
Dans le cadre de Marseille-Provence capitale de la culture 2013, une grande exposition Camus était initialement prévue à Aix-en-Provence. Ses deux commissaires furent "débarqués" en cours de projet par la maire de la ville : Maryse Joissains. Dans Camus brûlant, ils ne reviennent pas seulement sur cette polémique mais souhaitent prendre de la hauteur et étudier les controverses autour de l'écrivain, aussi bien en France qu'en Algérie.
Le capotage de leur exposition s'explique selon eux par leur refus de mettre Camus au service d'une certaine vision politique, qui se résumerait grosso modo à une opération de séduction électoraliste visant à capter les voix des anciens d'Algérie fortement représentés à Aix-en-Provence et courtisés par Maryse Joissains, maire de droite de la ville. Le philosophe Michel Onfray est un temps envisagé pour reprendre le projet mais il jette l'éponge de peur d'être récupéré. Le prix Nobel serait donc également l'objet des attentions des nostalgiques de l'Algérie française que de ceux qui cherchent à séduire ces derniers.
Toutefois, la controverse autour du personnage ne se limite pas à la France : elle touche pareillement son pays natal, l'Algérie. Les auteurs rappellent ainsi l'échec de la "Caravane Camus" initiative de l'écrivain algérien Yasmina Khadra visant à présenter son œuvre à travers tout le pays et objet de polémiques qui ont finalement conduit à son annulation. Pour Stora et Péretié, Camus sert de prétexte à la reprise de luttes mémorielles et politiques algériennes.
Malheureusement, ils sont plus laconiques lorsqu'il s'agit d'aborder la captation de Camus par la gauche social-démocrate après la chute du mur de Berlin. Implicitement, ils livrent par ailleurs leur vision de l'homme qu'ils aiment pour sa poursuite passionnée de la justice, pour la pauvreté de ses débuts, tout comme pour sa critique des totalitarismes et son attachement à l'Algérie. Ils voient en lui "une figure de réconciliation, en France comme en Algérie" et l'on serait tenté d'ajouter à la lumière des déclarations de Benjamin Stora lors du cinquantenaire de l'indépendance algérienne : de réconciliation entre la France et l'Algérie.
Un Camus "Algérie française"
Le Camus et le terrorisme de Jean Monneret présente de son côté une version relativement subtile et documentée de la description de Stora et Péretié : "dans ces milieux de la "nostalgérie", on aime à s'approprier Albert Camus. On le présente, de manière simplificatrice, sous les traits d'un pied-noir pro-Algérie française.", faisant fi de sa critique répétée de l'administration coloniale et de son soutien aux nationalistes (pas à tous) avant la guerre et ne retenant que le fait que celui-ci ait été pour une "Algérie égalitaire" et surtout contre une "Algérie indépendante" Il est nécessaire de saisir la chronologie des déclarations de Camus pour comprendre leur complexité. Or, les nostalgiques de l'Algérie française, pour Stora et Péretié qui parlent de "lecture pour le moins biaisée", se contentent de ses prises de position contre les méthodes terroristes du FLN touchant des civils et reprennent sa déclaration selon laquelle il préférait sa mère à la justice [du FLN]. Camus condamne cependant aussi bien l'emploi de la torture (française) que le terrorisme algérien. La notion de "déchirement" recouvre mieux l'opinion de l'écrivain méditerranéen face à un conflit fratricide que les nostalgiques ont bon dos de récupérer aujourd'hui alors qu'il était perçu à l'époque par bien des ultras comme un "traître".
Se fondant sur propres recherches historiques, sur les biographies d'Olivier Todd et de Michel Onfray, ainsi que sur les œuvres de Camus, Monneret présente ce dernier comme un penseur lucide et solitaire, le comparant à Georges Orwell dans son opposition, venant de la gauche, au communisme. Révolté mais pas révolutionnaire, décelant une filiation entre 1793 et le Goulag, le Camus de Monneret conçoit toute révolution (nationale) comme intrinsèquement violente. Dans le cas de la guerre d'Algérie, Monneret insiste, dans son livre tout comme sur son site personnel, sur les victimes oubliées du conflit : les pieds-noirs tués dans les attentats du FLN, assimilé à Al-Qaïda. Manquant de nuance, en ce qu'il n'aborde quasiment pas la question de la lutte pour l'indépendance d'un peuple colonisé, le livre semble utiliser Camus comme prétexte à une dénonciation actuelle et intemporelle du terrorisme pour parler de la souffrance, certes indéniable, des pieds-noirs et des harkis. Difficile de ne pas souscrire à sa condamnation du terrorisme à grand renfort de citations camusiennes, toutefois, comment ne pas être septique quand l'auteur se lance dans interprétations inspirées du "choc des civilisations" voyant dans l'islam le moteur de la violence du FLN ? Les actes terroristes de ce mouvement sont certes inexcusables mais il était tout même nécessaire d'en rappeler les motivations certainement plus légitimes que les moyens employés.
Camus sert ici de caution et disparaît quasiment dans le chapitre IV, sa pensée n'étant mobilisée que comme argument d'autorité pour juger l’œuvre du FLN. L'argumentation de Monneret aurait gagné à ne pas verser d'un extrême à l'autre, n'accordant pas d'importance à la lutte pour l'indépendance algérienne, et à annoncer directement la couleur à propos du sujet de l'ouvrage. En conséquence, le dernier chapitre qui revient sur la philosophie de Camus tombe paradoxalement comme un cheveu sur la soupe alors que l'annexe 5 sur le FLN et les juifs finit de convaincre le lecteur qu'il s'agit avant tout d'un livre sur les crimes du FLN sous couvert d'une condamnation plus générale de la violence comme moyen d'action politique par Albert Camus.
Un Camus de droite
Pour les auteurs de Camus brûlant, le projet de panthéonisation de Camus envisagé sous la présidence Sarkozy était une tentative de captation de son aura, d'autant plus intéressante qu'il s'agissait d'un homme de gauche critique de son propre camp. Celui-ci n'aboutit pas faute d'un accord de ses enfants. Admirateur de l'écrivain, Henri Guaino publie donc le discours qu'il aurait rêvé écrire pour son entrée au sein des grands hommes, accompagné d'un long prélude à l'éloge, dont on reconnaît le style indéniable de l'auteur.
Outre ses qualités littéraires, il semble difficile de nier l’attachement sincère d'Henri Guaino pour Camus, qu'il annonce d'entrée de jeu : "Lecteur qui ouvrez ce livre, sachez que vous n'y rencontrerez pas le Camus, le plus vrai le plus authentique mais seulement celui que j'aime. Car je l'aime comme chacun de nous aime, c'est-à-dire à ma façon, qui est une façon forcément particulière." Faisant en filigrane un parallèle avec sa propre vie, Guaino estime qu'il ne lui est pas possible de distinguer le destin de l’œuvre de l'homme, qui le touche par sa modestie, en particulier sa honte d'avoir honte d'être pauvre. Au-delà de cet hommage personnel, quelques éléments laissent apparaître une lecture qui coïncide assez bien avec la politique de l'homme pour lequel le discours était initialement écrit.
Tout d'abord, comment ne pas voir en Camus une figure d'union qui pourrait plaire à un président à qui l'on a reproché d'être trop clivant quand Guaino écrit que "Chacun est sommé de choisir son camp, son parti. Il les rejette tous." ? Plus largement, sous la plume de celui-ci, Camus apparaît avant tout comme un homme épris de liberté, plus que d'égalité ou de justice. Il ressort également comme le penseur de la fin des idéologies, le pourfendeur aussi bien des excès de la raison que du relativisme.
Quand l'hostilité du Café de Flore est évoquée, Guaino nous rappelle que Camus "n'a pas sa place parmi les maîtres à penser qui se partagent alors le pouvoir. Il n'est pas normalien. Il n'est pas agrégé. A cause de la tuberculose. Qu'importe. Il n'est pas de leur monde. Il n'est pas comme eux. Il n'écrit pas comme eux. Il n'agit pas comme eux." Comment ne pas alors penser à la présentation du candidat Sarkozy comme quelqu'un qui ne serait pas issu du sérail ? Ou plus largement le registre de la droite victime des puissants (du monde de la culture) qui serait, selon le journaliste Thomas Frank, l'une des principales armes rhétoriques de la droite dans sa course aux voix des pauvres...
D'autres éléments concordent avec la politique étrangère de Nicolas Sarkozy comme lorsque l'on lit que Camus "récuse la repentance. Il écrit : "Le temps des colonialismes est fini, il faut seulement en tirer les conséquences." ou que méditerranéen, il est l'homme des deux rives, potentiel symbole de l'union méditerranéenne impulsée sous le mandat du précédent Président. La captation semble toutefois trouver ses limites quand dans l'éloge, Camus, qui n'a jamais cessé de revendiquer son athéisme, se transforme en chrétien malgré lui.
Une unanimité antagoniste ?
Inclassable de son vivant, Camus semble le rester pour la postérité. Son égal souci de liberté, de justice mais aussi de respect l'a conduit à accorder toute sa complexité au réel dans sa compréhension tout comme à refuser certains actes au nom de la morale. Sa pensée n'a souvent guère variée contrairement aux événements qu'il a dû affronter, ce qui explique peut-être la récupération dont il semble être l'objet de la part d'acteurs hétérogènes. Ces tentatives de captation sont d'autant plus faciles qu'il n'a pas vécu pour voir la fin du conflit et prendre position : l'on peut ainsi spéculer à loisir sur le chemin qu'il aurait emprunté et le faire aller dans la direction qui arrange tel ou tel camp. Camus ferait-il paradoxalement l'unanimité pour des raisons différentes et parfois antagonistes, en particulier au sujet de l'Algérie françaises, dont les plaies ne semblent toujours pas cicatrisées ?
Salut Albert, Comment ça va là haut ? Qu'est ce que ça te fait d'être centenaire ? Et d'être éternel dans le cœur des hommes et des femmes de ce XXIème siècle ? Laisse-moi te dire d'abord que tu nous manques. Beaucoup ! Ton style nous manque. Ta littérature nous manque. Ton intégrité intellectuelle nous manque. Ton regard sur le monde nous manque. Et pourtant ! A la célébrations de ton centième anniversaire, il faut te dire que le temps a fait la différence. Et que les petits enfants de tes détracteurs d'alors ont en gros choisi ton camp contre le leur. Ils signent sans regrets la victoire de tes idées et de ton oeuvre. Des géants de ta génération, tu es en effet aujourd'hui le seul ou presque à être audible. Tes romans, tes essais, tes engagements, font l'unanimité. Ils sont une inspiration pour tous. Mais comme le succès va au succès, il y a un petit danger à ce triomphe posthume. Je ne suis pas sûr en effet que ceux qui t'encensent aujourd'hui sont tous de vrais héritiers. Pas sûr qu'ils résistent à vouloir recueillir une parcelle de ta gloire pour faire oublier leurs égarements et redorer un blason terni par des engagements qui ne te ressemblent pas ou pire qui les trahissent. Pas sûrs en somme que tous te soient fidèles quand ils font aujourd'hui ton éloge.
Je ne voudrais pas à mon tour privatiser ton héritage mais comment copiner avec Bouteflika par exemple et dans le même temps se revendiquer de toi ? Comment continuer à célébrer le génie de Sartre et te vouer une admiration sans limite ? Comment être inféodé à une philosophie de l'histoire et épouser ta conception de la liberté ? Comment en somme concilier ton refus de la servitude avec avec l'allégeance tacite à un antitotalitarisme contre un autre moins fréquentable ?
Tu as été l'animateur intransigeant de la gauche anti totalitaire. Tu as refusé tous les totalitarismes qu'ils soient communistes ou fascistes. Tu les as combattus et en les combattant tu as ouvert la voie, l'espace, pour que la gauche s'approprie ton combat. Pour qu'elle se débarrasse de cet héritage encombrant qui consistait à épouser d'autres combats totalitaires pour, au nom de l'histoire, au nom de la sacro-sainte histoire, ne pas "désespérer Billancourt". Certes, on t'a fait le reproche d'avoir poussé le bouchon un peu loin et d'avoir notamment sur la question algérienne accepté des compromis jugés douteux. On avait oublié en chemin que tu avais été le premier ou l'un des premiers à dénoncer le colonialisme. Et au prétexte que tu refusais de choisir entre la justice et ta mère, on en avait zappé que tu avais plaidé pour une solution fraternelle et pour la paix civile. Foutaises diront certains. Mais que dire alors de ceux qui au nom des lendemains qui chantent ont soutenu les "poseurs de bombes"? Au final, leurs raisons étaient-elles aussi impératives que les tiennes ? En réalité, tu ne voulais pas donner carte blanche aux opprimés dont tu pressentais à l'époque qu'ils incarnaient une version tiers-mondiste de la fin et des moyens. Vieille histoire qui a conduit à de graves dérives. Au final que reste t-il de cette histoire ?
Que tu avais raison contre tous et tous ceux qui nous serinaient à l'époque qu'il valait mieux avoir tort avec Sartre que raison avec toi. Alors merci Albert pour cette lucidité qui 100 ans après fait aussi ta grandeur. Par les temps qui courent, elle nous aide à vivre avec notre temps.
Le 11 mars 1944, Pierre Pucheu, secrétaire d'État à l'Intérieur du gouvernement de Vichy (juillet 1941-avril 1942) fut condamné à mort, et fusillé le 20 mars 1944 à proximité d'Alger. La même année, l'écrivain, essayiste, journaliste et "collaborationniste", Georges Suarez, subit le même sort.
Ces événements suscitèrent la réaction de l'opinion publique, et notamment des intellectuels de l'époque qui rappelons-le était une période d'après-guerre où régnait un "climat de violence - et - de mort violente". A. Camus a qualifié cette atmosphère qui se caractérisait par une "culture mortifère", d'"enfer du présent".
Le premier temps de "la promesse faite aux morts"
Selon Denis Salas, magistrat et essayiste qui a consacré un article au positionnement d'A. Camus à l'égard des "peines de mort", contrairement à l'écrivain François Mauriac (1885-1970) qui appela de tous ses vœux à un "apaisement", une "indulgence" et une clémence à l'égard du condamné à mort, A. Camus approuva cet acte au nom de la "justice humaine" et "de la mémoire des morts". "Porté par l'idéal révolutionnaire de la Résistance, il exige une justice sévère", écrit D. Salas.
En effet, A. Camus se positionne clairement en exprimant son choix pour "la justice" au détriment de "la haine" et du "pardon". De son point de vue, seule compte "la promesse faite aux morts". Cette posture fait ressortir l'image d'un homme profondément attaché à la notion de "devoir" employée dans une acception qui renvoie à l'idée d'obligation morale.
Pourtant, plus tard, le positionnement d'A. Camus à l'égard de la peine de mort change. Il lui substitue alors une posture qui prône plutôt son abolition. "Ni bourreaux. Ni victimes" écrivait-il en 1948, dans la revue "Combat".
Le revirement
Dans son entendement, ôter la vie pour rendre justice est une manière de répondre à la violence par la violence.
Tout au long de son plaidoyer, A. Camus réfute la loi du Talion et exhorte à privilégier "la compréhension" au détriment du "jugement".
Par ailleurs, il préconise l'idée de la nécessité d'une union entre les hommes pour créer les conditions nécessaires à une fraternité et une solidarité humaine contre la mort de manière à "rendre la société plus juste et plus fraternelle". Selon D. Salas, ces idées d'ordre éthique sont omniprésentes aussi bien dans son œuvre que dans son action militante.
Ainsi, dans "l'Homme révolté" (1951), par exemple, l'auteur exprime deux idées. D'une part, le refus de la condition mortelle de l'être humain. Et d'autre part, l'urgence de l'union entre les Hommes dans le but de dépasser cette condition.
C'est à la lumière de ces idées qu'il prit la défense d'écrivains collaborationnistes, Robert Brasillach (1905 - 1945) et Lucien Romain Rebatet (1903 - 1972), de communistes iraniens et soviétiques et des auteurs des attentats nationalistes algériens et ce, en demandant leur grâce.
En se prononçant contre les peines de mort et en sollicitant la "clémence", A. Camus met en avant deux idées qui, de son point de vue, revêtent une importance capitale : "l'innocence" de tout coupable, d'une part. Et "la communauté de destin des hommes devant la mort", d'autre part.
En demandant la clémence, A. Camus vise à "sauver les corps" tout en plaidant pour "une modération de la peine", c'est-à-dire "la proportion de châtiment infligé au coupable" (D. Salas) dans le but d'éviter "un excès de violence". Cependant, il prend le soin de poser des limites d'ordre éthique puisque son positionnement concerne notamment les situations dans lesquelles des accusations s'avèrent "possiblement erronées". En ce sens, son but n'est pas de remettre en cause le caractère légitime du rôle du tribunal.
Dans l'essai intitulé "Réflexions sur la guillotine" (1957) A. Camus analyse le rôle de l'Etat dans la peine de mort qu'il définit comme "un meurtre légal". C'est ainsi qu'il assimile le pouvoir de l'Etat de juger et de punir "sans être à son tour jugé et puni", à une "violence légale sans limite". C'est pourquoi il préconise de désacraliser le "pouvoir absolu" détenu par l'Etat en matière de peine de mort afin de placer la personne humaine au dessus de l'Etat.
Parallèlement à la peine de mort, A. Camus s'est prononcé contre l'enfermement dans les prisons, les camps et pour l'abolition des peines perpétuelles qu'il assimilait à une "mort silencieuse" et à "la certitude d'une mort sans espoir". En 1959, il est intervenu en faveur du militant Ho Huu Tuong qui était enfermé, condamné à mort au Sud-Vietnam puis gracié.
Littérature reprend la présentation hebdomadaire d’un texte de son choix ! Ses membres, réveillés d’un sommeil léthargique relatif à quelque sémi ou entretien , se dirigent d’un pas troublé mais décidé vers leur bibliothèque commune. A peine entrés, bien que mécaniquement entraînés vers l’aile Est (poésie) du bâtiment, ils s’arrêtent après quelques pas, inexplicablement envoûtés par un petit ouvrage, trônant en chef parmi quelques livres boursouflés : je parle des Noces d’Albert Camus. Ces descriptions délicieusement interminables de paysages algériens chers au coeur de l’auteur étaient qualifiées par ce dernier d’«essais poétiques». Alors que Damien, au fond de la salle, discute avec lui-même la place de la métaphysique dans la prose camusienne d’après-guerre («formidable», selon lui), ses frérots et soeurettes s’accordent sur le choix du texte : «Noces à Tipasa» sera l’objet de leur attention. Voici l’extrait que le gourou lit à haute voix, tandis que la chaman dirige la transe et que la trésorière commence la quête au sein des membres :
«Au printemps, Tipasa est habitée par les dieux et les dieux parlent dans le soleil et l’odeur des absinthes, la mer cuirassée d’argent, le ciel bleu écru, les ruines couvertes de fleurs et la lumière à gros bouillons dans les amas de pierres. A certaines heures, la campagne est noire de soleil. Les yeux tentent vainement de saisir autre chose que des gouttes de lumière et de couleurs qui tremblent au bord des cils. L’odeur volumineuse des plantes aromatiques racle la gorge et suffoque dans la chaleur énorme. A peine, au fond du paysage, puis-je voir la masse noire du Chenoua qui prend racine dans les collines autour du village, et s’ébranle d’un rythme sûr et pesant pour aller s’accroupir dans la mer. Nous arrivons par le village qui s’ouvre déjà sur la baie. Nous entrons dans un monde jaune et bleu où. nous accueille le soupir odorant et âcre de la terre d’été en Algérie. Partout, des bougainvillées rosat dépassent les murs des villas; dans les jardins, des hibiscus au rouge encore pâle, une profusion de roses thé épaisses comme de la crème et de délicates bordures de longs iris bleus. Toutes les pierres sont chaudes. A l’heure où nous descendons de l’autobus couleur de bouton d’or, les bouchers dans leurs voitures rouges font leur tournée matinale et les sonneries de leurs trompettes appellent les habitants.»
Dès les premières phrases, on comprend naturellement ce que Camus signifie par «essai poétique» : n’ayant pas la prétention (ou ce qu’il pense en être) d’assimiler son texte à «La Poésie», il la qualifie simplement à un substantif formel, l’essai. Le titre reflète donc la puissante modestie de la globalité de l’oeuvre, qui offre aux descriptions un écoulement translucide, sans engagement ni thèse, comme s’il refusait de trahir son Algérie natale par une infidélité interprétative. Cette éclaircie de douceur est d’autant plus pertinente que l’ouvrage fut publié (en 1939) entre deux monstres idéologiques du Cycle de l’absurde : Caligula (1938) et le Mythe de Sisyphe (1941). Toutefois, cette fidélité à la nature n’est en rien l’élément directeur des Noces : de la même façon que Camus concentre L’Etranger (1942) sur le monde et les sensations qu’il procure, Les Noces sont l’objet d’une formidable confrontation entre le corps et l’existence («L’odeur volumineuse des plantes aromatiques racle la gorge et suffoque dans la chaleur énorme.»). Contrairement au romantisme classique qui annihile la place de l’homme face à la puissance de la nature et du destin (lire quelques pages des «Méditations poétiques» d’Alphonse de Lamartine pourra vous remettre les idées au clair), le rapport camusien entre les deux parties n’est ni doux ni belliqueux ; il exploite un constant frottement neutre entre l’être humain et son environnement, sans que l’un des deux soit considéré comme supérieur : l’Homme aime mais agresse la Nature, la Nature aime mais agresse l’Homme. On peut enfin souligner le halètement dont témoigne la structure des Noces : la majorité des phrases successives n’étant nullement corrélées, les paragraphes sont courts, nombreux, volontairement incohérents : «Toutes les pierres sont chaudes.». On y constate donc une recherche de la naturalité dans la forme, et non dans le fond, qui apparaît quant à lui comme la conséquence logique de la plume de son auteur.
La ville de Tipasa, à l’effigie de son amoureux, a dressé une stèle portant des inscriptions directement issues des Noces : «Je comprends ici ce qu’on appelle gloire : le droit d’aimer sans mesure».
Albert Camus was a French-Algerian existentialist. He was a journalist, playwright, novelist, writer of philosophical essays, and Nobel laureate. Though neither by advanced training nor profession a philosopher, Camus nevertheless through his literary works and in numerous reviews, articles, essays, and speeches made important, forceful contributions to a wide range of issues in moral philosophy – from terrorism and political violence to suicide and the death penalty. In awarding him its prize for literature in 1957, the Nobel committee cited the author’s persistent efforts to “illuminate the problem of the human conscience in our time,” and it is pre-eminently as a writer of conscience and as a champion of imaginative literature as a vehicle of philosophical insight and moral truth that Camus was honored by his own generation and is still admired today. He was at the height of his career, at work on an autobiographical novel, planning new projects for theatre, film, and television, and still seeking a solution to the lacerating political turmoil in his native Algeria, when he died tragically in an automobile accident in January, 1960.
1. Life
The writer Albert Camus was born on November 7, 1913, in Mondovi, a small village near the seaport city of Bonê (present-day Annaba) in the northeast region of French Algeria. He was the second child of Lucien Auguste Camus, a military veteran and wine-shipping clerk, and of Catherine Marie Cardona, a house-keeper and part-time factory worker. (Note: Although Camus himself believed that his father was Alsatian and a first-generation émigré, research by biographer Herbert Lottman indicates that the Camus family was originally from Bordeaux and that the first Camus to leave France for Algeria was actually the author’s great-grandfather, who in the early 19th century became part of the first wave of European colonial settlers in the new melting pot of North Africa.)
Shortly after the outbreak of WWI, when Camus was less than a year old, his father was recalled to military service and on October 11, 1914, died of shrapnel wounds suffered at the first battle of the Marne. As a child, about the only thing Camus ever learned about his father was that he had once become violently ill after witnessing a public execution. This anecdote, which surfaces in fictional form in the author’s novel L’Etranger and which is also recounted in his philosophical essay “Reflections on the Guillotine,” strongly affected Camus and influenced his own lifelong opposition to the death penalty.
After his father’s death, Camus, his mother, and older brother moved to Algiers where they lived with his maternal uncle and grandmother in her cramped second-floor apartment in the working-class district of Belcourt. Camus’ mother Catherine, who was illiterate, partially deaf, and afflicted with a speech pathology, worked in an ammunition factory and cleaned homes to help support the family. In his posthumously published autobiographical novel The First Man, Camus recalls this period of his life with a mixture of pain and affection as he describes conditions of harsh poverty (the three-room apartment had no bathroom, no electricity, and no running water) relieved by hunting trips, family outings, childhood games, and scenic flashes of sun, seashore, mountain, and desert.
Camus attended elementary school at the local Ecole Communale, and it was there that he encountered the first in a series of teacher-mentors who recognized and nurtured the young boy’s lively intelligence. These father-figures introduced him to a new world of history and imagination and to literary landscapes far beyond the dusty streets of Belcourt and working-class poverty. Though stigmatized as a pupille de la nation (that is, a war veteran’s child dependent on public welfare) and hampered by recurrent health issues, Camus distinguished himself as a student and was eventually awarded a scholarship to attend high school at the Grand Lycee. Located near the famous Kasbah district, the school brought him into close proximity with the native Moslem community and thus to an early recognition of the idea of the “outsider” that would dominate his later writings.
It was during his high school years that Camus became an avid reader (absorbing Gide, Proust, Verlaine, and Bergson, among others), learned Latin and English, and developed a lifelong interest in literature, art, theatre, and film. He also enjoyed sports, especially soccer, of which he once wrote (recalling his early experience as a goal-keeper): “I learned . . . that a ball never arrives from the direction you expected it. That helped me in later life, especially in mainland France, where nobody plays straight.” It was also during this period that Camus suffered his first serious attack of tuberculosis, a disease that was to afflict him, on and off, throughout his career.
By the time he finished his Baccalauréat degree (June, 1932), Camus was already contributing articles to Sud, a literary monthly, and looking forward to a career in journalism, the arts, or higher education. The next four years (1933-37) were an especially busy period in his life, during which he attended college, worked at odd jobs, married his first wife (Simone Hié), divorced, briefly joined the Communist party, and effectively began his professional theatrical and writing career. Among his various employments during the time were stints of routine office work (one job consisted of a Bartleby-like recording and sifting of meteorological data; another involved paper-shuffling in an auto license bureau), and one can well imagine that it was during this period that his famous conceptions of Sisyphean struggle and of heroic defiance in the face of the Absurd first began to take shape within his imagination.
In 1933 Camus enrolled at the University of Algiers to pursue his diplome d’etudes superieures, specializing in philosophy and gaining certificates in sociology and psychology along the way. In 1936 he became a co-founder along with a group of young fellow intellectuals of the Théâtre du Travail, a professional acting company specializing in drama with left-wing political themes. Camus served the company as both an actor and director and also contributed scripts, including his first published play Revolt in Asturia, a drama based on an ill-fated workers’ revolt during the Spanish Civil War. That same year Camus also earned his degree and completed his dissertation, a study of the influence of Plotinus and neo-Platonism on the thought and writings of St. Augustine.
Over the next three years Camus further established himself as an emerging author, journalist, and theatre professional. After his disillusionment with and eventual expulsion from the Communist Party, he reorganized his dramatic company and renamed it the Théâtre de l’Equipe (literally the Theater of the Team). The name change signaled a new emphasis on classic drama and avant-garde aesthetics and a shift away from labor politics and agitprop. In 1938 he joined the staff of a new daily newspaper, the AlgerRépublicain, where his assignments as a reporter and reviewer covered everything from contemporary European literature to local political trials. It was during this period that he also published his first two literary works – L’Envers et l’endroit (Betwixt and Between), a collection of five short semi-autobiographical and philosophical pieces (1937) and Noces (Nuptials), a series of lyrical celebrations interspersed with wistful political and philosophical reflections on North Africa and the Mediterranean.
The 1940’s witnessed Camus’ gradual ascendance to the rank of world-class literary intellectual. He started the decade as a locally acclaimed author and playwright, but a figure virtually unknown outside the city of Algiers. He ended it as an internationally recognized novelist, dramatist, journalist, philosophical essayist, and champion of freedom. This period of his life began inauspiciously – war in Europe, the occupation of France, official censorship, and a widening crackdown on left-wing journals. Camus was still without stable employment or steady income when, after marrying his second wife, Francine Faure, in December of 1940, he departed Lyons, where he had been working as a journalist, and returned to Algeria. To help make ends meet, he taught part-time (French history and geography) at a private school in Oran. All the while he was putting finishing touches to his first novel L’Etranger (The Stranger), which was finally published in 1942 to favorable critical response, including a lengthy and penetrating review by Jean-Paul Sartre. The novel propelled him into immediate literary renown.
Camus returned to France in 1942 and a year later began working for the clandestine newspaper Combat, the journalistic arm and voice of the French Resistance movement. During this period, while contending with recurrent bouts of tuberculosis, he also published Le Mythe de Sisyphe (The Myth of Sisyphus), his philosophical anatomy of suicide and the absurd, and joined Gallimard Publishing as an editor, a position he held until his death.
After the Liberation, Camus continued as editor of Combat, oversaw the production and publication of two plays, Le Malentendu (The Misunderstanding) and Caligula, and assumed a leading role in Parisian intellectual society in the company of Sartre and Simone de Beauvoir among others. In the late 40’s his growing reputation as a writer and thinker was enlarged by the publication of La Peste (The Plague), an allegorical novel and fictional parable of the Nazi Occupation and the duty of revolt, and by lecture tours to the United States and South America. In 1951 he published L’Homme Revolte (The Rebel), a reflection on the nature of freedom and rebellion and a philosophical critique of revolutionary violence. This powerful and controversial work, with its explicit condemnation of Marxism-Leninism and its emphatic denunciation of unrestrained violence as a means of human liberation, led to an eventual falling out with Sartre and to his being branded a reactionary in the view of many European Communists. Yet it also established him as an outspoken champion of individual freedom and as an impassioned critic of tyranny and terrorism, whether practiced by the Left or by the Right.
In 1956, Camus published La Chute (The Fall), the short, confessional novel, which unfortunately would be the last of his completed major works and which in the opinion of some critics is the most elegant, and most under-rated, of all his books. During this period he was still afflicted by tuberculosis and was perhaps even more sorely beset by the deteriorating political situation (which had by now escalated from demonstrations and occasional terrorist and guerilla attacks into open violence and insurrection) in his native Algeria. Camus still hoped to champion some kind of rapprochement that would allow the native Moslem population and the French pied noir minority to live together peaceably in a new de-colonized and largely integrated, if not fully independent, nation. Alas, by this point, as he himself must have painfully recognized, the odds of such an outcome were becoming increasingly unlikely.
In the fall of 1957, following publication of L’Exil et le Royaume (Exile and the Kingdom), a collection of short fiction, Camus was shocked by news that he had been awarded the Nobel prize for literature. He absorbed the announcement with mixed feelings of gratitude, humility, and amazement. On the one hand, the award was obviously a tremendous honor. On the other, not only did he feel that his friend and esteemed fellow novelist Andre Malraux was more deserving, he was also aware that the Nobel itself was widely regarded as the kind of accolade usually given to artists at the end of a long career. Yet, as he indicated in his acceptance speech at Stockholm, he considered his own career as still in mid-flight, with much yet to accomplish and even greater writing challenges ahead:
. . . Every person, and assuredly every artist, wants to be recognized. So do I. But I have been unable to comprehend your decision without comparing its resounding impact with my own actual status. A man almost young, rich only in his doubts, and with his work still in progress. . . how could such a man not feel a kind of panic at hearing the decree that transports him all of a sudden. . . to the center of a glaring spotlight? And with what feelings could he accept this honor at a time when other writers in Europe, among them the very greatest, are condemned to silence, and even at a time when the country of his birth is going through unending misery?
Of course Camus could not have known as he spoke these words that most of his writing career was in fact behind him. Over the next two years, he published articles and continued to write, produce, and direct plays, including his own adaptation of Dostoyevsky’s The Possessed. He also formulated new concepts for film and television, assumed a leadership role in a new experimental national theater, and continued to campaign for peace and a political solution in Algeria. Unfortunately, none of these latter projects would be brought to fulfillment. On January 4th of 1960, Camus died tragically in a car accident while a passenger in a vehicle driven by his friend and publisher Michel Gallimard, who also suffered fatal injuries. The author was buried in the local cemetery at Lourmarin, a village in Provencal where he and his wife and daughters had lived for nearly a decade.
Upon hearing of Camus’ death, Sartre wrote a moving eulogy in the France-Observateur, saluting his former friend and political adversary not only for his distinguished contributions to French literature but especially for the heroic moral courage and “stubborn humanism” which he brought to bear against the “massive and deformed events of the day.”
2. Literary Career
According to Sartre’s perceptive appraisal, Camus was less a novelist than a writer of philosophical tales and parables in the tradition of Voltaire. This assessment accords with Camus’ own judgment that his fictional works were not true novels (Fr. romans), a form he associated with the densely populated and richly detailed social panoramas of writers like Balzac, Tolstoy, and Proust, but rather contes (“tales”) and recits (“narratives”) combining philosophical and psychological insights.
In this respect, it is also worth noting that at no time in his career did Camus ever describe himself as a deep thinker or lay claim to the title of philosopher. Instead, he nearly always referred to himself simply, yet proudly, as unecrivain – a writer. This is an important fact to keep in mind when assessing his place in intellectual history and in twentieth-century philosophy. For by no means does he qualify as a system-builder or theorist or even as a disciplined thinker. He was instead (and here again Sartre’s assessment is astute) a sort of all-purpose critic and modern-day philosophe: a debunker of mythologies, a critic of fraud and superstition, an enemy of terror, a voice of reason and compassion, and an outspoken defender of freedom – all in all a figure very much in the Enlightenment tradition of Voltaire and Diderot. For this reason, in assessing Camus’ career and work, it may be best simply to take him at his own word and characterize him first and foremost as a writer – advisedly attaching the epithet philosophical for sharper accuracy and definition.
3. Camus, Philosophical Literature, and the Novel of Ideas
To pin down exactly why and in what distinctive sense Camus may be termed a philosophical writer, we can begin by comparing him with other authors who have merited the designation. Right away, we can eliminate any comparison with the efforts of Lucretius and Dante, who undertook to unfold entire cosmologies and philosophical systems in epic verse. Camus obviously attempted nothing of the sort. On the other hand, we can draw at least a limited comparison between Camus and writers like Pascal, Kierkegaard, and Nietzsche – that is, with writers who were first of all philosophers or religious writers, but whose stylistic achievements and literary flair gained them a special place in the pantheon of world literature as well. Here we may note that Camus himself was very conscious of his debt to Kierkegaard and Nietzsche (especially in the style and structure of The Myth of Sisyphus and The Rebel) and that he might very well have followed in their literary-philosophical footsteps if his tuberculosis had not side-tracked him into fiction and journalism and prevented him from pursuing an academic career.
Perhaps Camus himself best defined his own particular status as a philosophical writer when he wrote (with authors like Melville, Stendhal, Dostoyevsky, and Kafka especially in mind): “The great novelists are philosophical novelists”; that is, writers who eschew systematic explanation and create their discourse using “images instead of arguments.” (The Myth of Sisyphus, p.74.)
By his own definition then Camus is a philosophical writer in the sense that he has (a) conceived his own distinctive and original world-view and (b) sought to convey that view mainly through images, fictional characters and events, and dramatic presentation rather than through critical analysis and direct discourse. He is also both a novelist of ideas and a psychological novelist. And in this respect he certainly compares most closely to Dostoyevsky and Sartre, two other writers who combine a unique and distinctly philosophical outlook, acute psychological insight, and a dramatic style of presentation. (Like Camus, Sartre was a productive playwright, and Dostoyevsky remains perhaps the most dramatic of all novelists, as Camus himself seems to have realized, having adapted both The Brothers Karamazov and The Possessed for the stage.)
4. Works
Camus’ reputation rests largely on the three novels published during his lifetime (The Stranger, The Plague, and The Fall) and on his two major philosophical essays (The Myth of Sisyphus and The Rebel). However, his body of work also includes a collection of short fiction (Exile and the Kingdom), an autobiographical novel The First Man, a number of dramatic works (most notably Caligula, The Misunderstanding, and The Just Assassins), several translations and adaptations (including new versions of works by Calderon, Lope de Vega, Dostoyevsky, and Faulkner), and a lengthy assortment of essays, prose pieces, critical reviews, transcribed speeches and interviews, articles, and works of journalism. A brief summary and description of the most important of Camus’ writings is presented below as preparation for a larger discussion of his philosophy and world-view, including his main ideas and recurrent philosophical themes.
a. Fiction
The Stranger (1942) – From its cold opening lines, “Mother died today. Or maybe yesterday; I can’t be sure,” to its bleak concluding image of a public execution set to take place beneath the “benign indifference of the universe,” Camus’ first and most famous novel takes the form of a terse, flat, first-person narrative by its main character Meursault, a very ordinary young man of unremarkable habits and unemotional affect who, inexplicably and in an almost absent-minded way, kills an Arab and then is arrested, tried, convicted, and sentenced to death. The neutral style of the novel – typical of what the critic Roland Barthes called “writing degree zero” – serves as a perfect vehicle for the descriptions and commentary of its anti-hero narrator, the ultimate “outsider” and a person who seems to observe everything, including his own life, with almost pathological detachment.
The Plague (1947) – Set in the coastal town of Oran, Camus’ second novel is the story of an outbreak of plague, traced from its subtle, insidious, unheeded beginnings through its horrible, all-encompassing, and seemingly inescapable dominion to its eventual climax and decline, all told from the viewpoint of one of the survivors. Camus made no effort to conceal the fact that his novel was partly based on and could be interpreted as an allegory or parable of the rise of Nazism and the nightmare of the Occupation. However, the plague metaphor is both more complicated and more flexible than that, extending to signify the Absurd in general as well as any calamity or disaster that tests the mettle of human beings, their endurance, solidarity, sense of responsibility, compassion, and will. At the end of the novel, the plague finally retreats, and the narrator reflects that a time of pestilence teaches “that there is more to admire in men than to despise.” But he also knows “that the plague bacillus never dies or disappears for good,” that “the day would come when, for the bane and the enlightening of men, it would rouse up its rats again” and send them forth yet once more to spread death and contagion into a happy and unsuspecting city.
The Fall (1956) – Camus’ third novel, and the last to be published during his lifetime, is, in effect, an extended dramatic monologue spoken by M. Jean-Baptiste Clamence, a dissipated, cynical, former Parisian attorney (who now calls himself a “judge-penitent”) to an unnamed auditor (and thus indirectly to the reader). Set in a seedy bar amid the night-life of Amsterdam, the work is a small masterpiece of compression and style: a confessional (and semi-autobiographical) novel, an arresting character study and psychological portrait, and at the same time a wide-ranging philosophical discourse on guilt and innocence, expiation and punishment, good and evil.
b. Drama
Caligula (1938, first produced 1945). “Men die and are not happy” – such is the complaint against the universe pronounced by the young emperor Caligula, who in Camus’ play is less the murderous lunatic, slave to incest, narcissist and megalomaniac of Roman history than a theatrical martyr-hero of the Absurd, a man who carries his philosophical quarrel with the meaninglessness of human existence to a kind of fanatical but logical extreme. Camus himself described his hero as a man “obsessed with the impossible” and willing to pervert all values and if necessary destroy himself and all those around him in the pursuit of absolute liberty. Caligula was Camus’ first attempt at portraying a figure in absolute defiance of the Absurd, and through three revisions of the play over a period of several years he eventually achieved a remarkable composite by adding touches of Sade, of revolutionary nihilism, of the Nietzschean Superman, of his own version of Sisyphus, and even of Mussolini and Hitler, to his original portrait.
c. Essays, Letters, Prose Collections, Articles, and Reviews
Betwixt and Between (1937) – This short collection of semi-autobiographical, semi-fictional, philosophical pieces might be dismissed as juvenilia and largely ignored if it were not for the fact that it represents Camus’ first attempt to formulate a coherent life-outlook and world-view. The collection, which in a way serves as a germ or starting point for the author’s later philosophy, consists of five lyrical essays. In “L’Ironie” (“Irony”), a reflection on youth and age, Camus asserts, in the manner of a young disciple of Pascal, our essential solitariness in life and death. In “Entre Oui et Non” (“Between yes and no”) he suggests that to hope is as empty and as pointless as to despair. Yet he goes beyond nihilism by positing a fundamental value to existence-in-the-world. In “La Mort dans l’ame” (Death in the soul”) he supplies a sort of existential travel review, contrasting his impressions of central and eastern Europe (which he views as purgatorial and morgue-like) with the more spontaneous life of Italy and Mediterranean culture. The piece thus affirms the author’s lifelong preference for the color and vitality of the Mediterranean world, and especially North Africa, as opposed to what he perceives as the soulless cold-heartedness of modern Europe. In “Amour de vivre” (“Love of life”) he claims there can be no love of life without despair of life and thus largely re-asserts the essentially tragic, ancient Greek view that the very beauty of human existence is largely contingent upon its brevity and fragility. The concluding essay, “L’Envers et l’endroit” (“Betwixt and between”), summarizes and re-emphasizes the basically Romantic themes of the collection as a whole: our fundamental “aloneness,” the importance of imagination and openness to experience, the imperative to “live as if . . . .”
Noces (Nuptials) (1938) – This collection of four rhapsodic narratives supplements and amplifies the youthful philosophy expressed in Betwixt and Between. That joy is necessarily intertwined with despair, that the shortness of life confers a premium on intense experience, and that the world is both beautiful and violent – these are once again Camus’ principal themes. “Summer in Algiers,” which is probably the best (and best-known) of the essays in the collection, is a lyrical, at times almost ecstatic, celebration of sea, sun, and the North African landscape. Affirming a defiantly atheistic creed, Camus concludes with one of the core ideas of his philosophy: “if there is a sin against life, it consists not so much in despairing as in hoping for another life and in eluding the implacable grandeur of this one.”
The Myth of Sisyphus (1943) – If there is a single non-fiction work that can be considered an essential or fundamental statement of Camus’ philosophy, it is this extended essay on the ethics of suicide (eventually translated and repackaged for American publication in 1955). For it is here that Camus formally introduces and fully articulates his most famous idea, the concept of the Absurd, and his equally famous image of life as a Sisyphean struggle. From its provocative opening sentence (“There is but one truly serious philosophical problem, and that is suicide”) to its stirring, paradoxical conclusion (“The struggle itself toward the heights is enough to fill a man’s heart. One must imagine Sisyphus happy”), the book has something interesting and challenging on nearly every page and is shot through with brilliant aphorisms and insights. In the end, Camus rejects suicide: the Absurd must not be evaded either by religion (“philosophical suicide”) or by annihilation (“physical suicide”); the task of living should not merely be accepted, it must be embraced.
The Rebel (1951) – Camus considered this work a continuation of the critical and philosophical investigation of the Absurd that he began with The Myth of Sisyphus. Only this time his concern is not the ethics of suicide, but the problem of murder. After introducing the view that an authentic life inevitably involves some form of conscientious moral revolt, he ends up arguing that only in rare, and in very narrowly defined, instances can political violence be morally justified. Camus’ critique of revolutionary violence and terror in this work, and particularly his caustic assessment of Marxism-Leninism (which he accused of sacrificing innocent lives on the altar of History), touched nerves throughout Europe and led to his celebrated feud with Sartre and other French leftists.
Resistance, Rebellion, and Death (1957) – This posthumous collection is of interest to students of Camus mainly because it brings together an unusual assortment of his non-fiction writings on a wide range of topics, from art and politics to the advantages of pessimism and the virtues (from a non-believer’s standpoint) of Christianity. Of special interest are two pieces that helped secure Camus’ worldwide reputation as a voice of liberty: “Letters to a German Friend” (a set of four letters originally written during the Nazi Occupation) and “Reflections on the Guillotine” (a denunciation of the death penalty cited for special mention by the Nobel committee and eventually revised and re-published as a companion essay to go with fellow death-penalty opponent Arthur Koestler’s “Reflections on Hanging”).
5. Philosophy
“More a writer than a philosopher.”
(Assessment penciled on Camus’ dissertation by his dissertation adviser.)
To re-emphasize a point made earlier, Camus considered himself first and foremost a writer (un ecrivain). And at various times in his career he also accepted the labels journalist, humanist, novelist, and even moralist. However, he apparently never felt comfortable identifying himself as a philosopher – a term he seems to have associated with rigorous academic training, systematic thinking, logical consistency, and a coherent, carefully defined doctrine or body of ideas.
This is not to suggest that Camus lacked ideas or to say that his thought cannot be considered a personal philosophy. It is simply to point out that he was not a systematic, or even a notably disciplined, thinker and that, unlike Heidegger and Sartre, for example, he showed very little interest in metaphysics and ontology (which seems to be one of the reasons he consistently denied that he was an existentialist). In short, he was not much given to speculative philosophy or any kind of abstract theorizing. His thought is instead nearly always related to current events (e.g., the Spanish War, revolt in Algeria) and is consistently grounded in down-to-earth moral and political reality.
a. Background and Influences
Though he was baptized, raised, and educated as a Catholic and invariably respectful towards the Church, Camus seems to have been a natural-born pagan who showed almost no instinct whatsoever for belief in the supernatural. Even as a youth he was more of a sun-worshipper and nature lover than a boy notable for his piety or religious faith. On the other hand, there is no denying that Christian literature and philosophy served as an important influence on his early thought and intellectual development. As a young high school student Camus studied the Bible, read and savored the Spanish mystics St. Theresa of Avila and St. John of the Cross, and was introduced to the thought of St. Augustine (who would later serve as the subject of his baccalaureate dissertation and become – as a fellow North African writer, quasi-existentialist, and conscientious observer-critic of his own life – an important lifelong influence).
In college Camus absorbed Kierkegaard (who, after Augustine, was probably the single greatest Christian influence on his thought). He also studied Schopenhauer and Nietzsche (undoubtedly the two writers who did the most to set him on his own path of defiant pessimism and atheism). Other notable influences include not only the major modern philosophers from the academic curriculum – from Descartes and Spinoza to Bergson – but also, and just as importantly, philosophical writers like Stendhal, Melville, Dostoyevsky, and Kafka.
b. Development
The two earliest expressions of Camus’ personal philosophy are his works Betwixt and Between (1937) and Nuptials (1938). Here he unfolds what is essentially a hedonistic, indeed almost primitivistic, celebration of nature and the life of the senses. In the Romantic poetic tradition of writers like Rilke and Wallace Stevens, he offers a forceful rejection of all hereafters and an emphatic embrace of the here and now. There is no salvation, he argues, no transcendence; there is only the enjoyment of consciousness and natural being. One life, this life, is enough. Sky and sea, mountain and desert, have their own beauty and magnificence and constitute a sufficient heaven.
The critic John Cruikshank termed this stage in Camus’ thinking “naïve atheism” and attributed it to his ecstatic and somewhat immature “Mediterraneanism.” “Naïve” seems an apt characterization for a philosophy that is romantically bold and uncomplicated, yet somewhat lacking in sophistication and logical clarity. On the other hand, if we keep in mind Camus’ theatrical background and preference for dramatic presentation, there may actually be more depth and complexity to his thought here than meets the eye. That is to say, just as it would be simplistic and reductive to equate Camus’ philosophy of revolt with that of his character Caligula (who is at best a kind of extreme or mad spokesperson for the author), so in the same way it is possible that the pensees and opinions presented in Nuptials and Betwixt and Between are not so much the views of Camus himself as the poetically heightened observations of an artfully crafted narrator – an exuberant alter ego who is far more spontaneous and free-spirited than his more naturally reserved and sober-minded author.
In any case, regardless of our assessment of the ideas expressed in Betwixt and Between and Nuptials, it is clear that these early writings represent an important, if comparatively raw and simple, beginning stage in Camus’ development as a thinker and that his views at this point differ markedly from his more mature philosophy in several noteworthy respects. In the first place, the Camus of Nuptials is still a young man of twenty-five, aflame with youthful joie de vivre. He favors a life of impulse and daring as it was honored and practiced in both Romantic literature and in the streets of Belcourt. Recently married and divorced, raised in poverty and in close quarters, beset with health problems, this young man develops an understandable passion for clear air, open space, colorful dreams, panoramic vistas, and the breath-taking prospects and challenges of the larger world. Consequently, the Camus of the period 1937-38 is a decidedly different writer from the Camus who will ascend the dais at Stockholm nearly twenty years later.
The young Camus, that is to say, is more of a sensualist and pleasure-seeker, more of a dandy and aesthete, than the more hardened and austere figure who will endure the Occupation while serving in the French underground. He is a writer passionate in his conviction that life ought to be lived vividly and intensely – indeed rebelliously (to use the term that will take on increasing importance in his thought). He is also a writer attracted to causes, though he is not yet the author who will become world-famous for his moral seriousness and passionate commitment to justice and freedom. All of which is understandable. After all, the Camus of the middle 1930’s had not yet witnessed and absorbed the shattering spectacle and disillusioning effects of the Spanish Civil War, the rise of Fascism, Hitlerism, and Stalinism, the coming into being of total war and weapons of mass destruction, and the terrible reign of genocide and terror that would characterize the period 1938-1945. It was under the pressure and in direct response to the events of this period that Camus’ mature philosophy – with its core set of humanistic themes and ideas – emerged and gradually took shape. That mature philosophy is no longer a “naïve” atheism, but on the contrary a very reflective and critical brand of unbelief. It is proudly and inconsolably pessimistic, but not in a polemical or overbearing way. It is unbending, hard-headed, determinedly skeptical. It is tolerant and respectful of world religious creeds, but at the same time wholly unsympathetic to them. In the end it is an affirmative philosophy that accepts and approves, and in its own way blesses, our dreadful mortality and our fundamental isolation in the world.
c. Themes and Ideas
Regardless of whether he is producing drama, fiction, or non-fiction, Camus in his mature writings nearly always takes up and re-explores the same basic philosophical issues. These recurrent topoi constitute the key components of his thought. They include themes like the Absurd, alienation, suicide, and rebellion that almost automatically come to mind whenever his name is mentioned. Hence any summary of his place in modern philosophy would be incomplete without at least a brief discussion of these ideas and how they fit together to form a distinctive and original world-view.
i. The Absurd
Even readers not closely acquainted with Camus’ works are aware of his reputation as the philosophical expositor, anatomist, and poet-apostle of the absurd. Indeed as even sit-com writers and stand-up comics apparently understand (odd fact: Camus has been used to explain episodes of Seinfeld and The Simpsons), it is largely through the thought and writings of the French-Algerian author that the concept of absurdity has become a part not only of world literature and twentieth-century philosophy, but of modern popular culture as well.
What then is meant by the notion of the absurd? Contrary to the view conveyed by popular culture, the absurd, (at least in Camus’ terms) does not simply refer to some vague perception that modern life is fraught with paradoxes, incongruities, and intellectual confusion. (Although that perception is certainly consistent with his formula.) Instead, as he himself emphasizes and tries to make clear, the absurd expresses a fundamental disharmony, a tragic incompatibility, in our existence. In effect, he argues that the absurd is the product of a collision or confrontation between our human desire for order, meaning, and purpose in life and the blank, indifferent “silence of the universe.” (“The absurd is not in man nor in the world,” Camus explains, “but in their presence together. . . it is the only bond uniting them.”)
So here we are: poor creatures desperately seeking hope and meaning in a hopeless, meaningless world. Sartre, in his essay-review of The Stranger provides an additional gloss on the idea: “The absurd, to be sure, resides neither in man nor in the world, if you consider each separately. But since man’s dominant characteristic is ‘being in the world,’ the absurd is, in the end, an inseparable part of the human condition.” The absurd, then, presents itself in the form of an existential opposition. It arises from the human demand for clarity and transcendence on the one hand and a cosmos that offers nothing of the kind on the other. Such is our fate: we inhabit a world that is indifferent to our sufferings and deaf to our protests.
In Camus’ view there are three possible philosophical responses to this predicament. Two of these he condemns as evasions; the other he puts forward as a proper solution.
Our first choice is blunt and simple: physical suicide. If we decide that a life without some essential purpose or meaning is not worth living, we can simply choose to kill ourselves. Camus rejects this choice as cowardly. In his terms it is a repudiation or renunciation of life, not a true revolt.
Choice two is the religious solution of positing a transcendent world of solace and meaning beyond the Absurd. Camus calls this solution “philosophical suicide” and rejects it as transparently evasive and fraudulent. To adopt a supernatural solution to the problem of the absurd (for example, through some type of mysticism or leap of faith) is to annihilate reason, which in Camus’ view is as fatal and self-destructive as physical suicide. In effect, instead of removing himself from the absurd confrontation of self and world like the physical suicide, the religious believer simply removes the offending world, replacing it, via a kind of metaphysical abracadabra, with a more agreeable alternative.
Choice three (in Camus’ view the only authentic and valid solution) is simply to accept absurdity, or better yet to embrace it, and to continue living. Since the absurd in his view is an unavoidable, indeed defining, characteristic of the human condition, the only proper response to it is full, unflinching, courageous acceptance. Life, he says, can “be lived all the better if it has no meaning.”
The example par excellence of this option of spiritual courage and metaphysical revolt is the mythical Sisyphus of Camus’ philosophical essay. Doomed to eternal labor at his rock, fully conscious of the essential hopelessness of his plight, Sisyphus nevertheless pushes on. In doing so he becomes for Camus a superb icon of the spirit of revolt and of the human condition. To rise each day to fight a battle you know you cannot win, and to do this with wit, grace, compassion for others, and even a sense of mission, is to face the Absurd in a spirit of true heroism.
Over the course of his career, Camus examines the Absurd from multiple perspectives and through the eyes of many different characters – from the mad Caligula, who is obsessed with the problem, to the strangely aloof and yet simultaneously self-absorbed Mersault, who seems indifferent to it even as he exemplifies and is finally victimized by it. In The Myth of Sisyphus Camus traces it in specific characters of legend and literature (Don Juan, Ivan Karamazov) and also in certain character types (the Actor, the Conqueror), all of whom may be understood as in some way a version or manifestation of Sisyphus, the archetypal absurd hero.
[Note: A rather different, yet possibly related, notion of the absurd is proposed and analyzed in the work of Kierkegaard, especially in Fear and Trembling and Repetition. For Kierkegaard, however, the absurd describes not an essential and universal human condition, but the special condition and nature of religious faith – a paradoxical state in which matters of will and perception that are objectively impossible can nevertheless be ultimately true. Though it is hard to say whether Camus had Kierkegaard particularly in mind when he developed his own concept of the absurd, there can be little doubt that Kierkegaard’s knight of faith is in certain ways an important predecessor of Camus’ Sisyphus: both figures are involved in impossible and endlessly agonizing tasks, which they nevertheless confidently and even cheerfully pursue. In the knight’s quixotic defiance and solipsism, Camus found a model for his own ideal of heroic affirmation and philosophical revolt.]
ii. Revolt
The companion theme to the Absurd in Camus’ oeuvre (and the only other philosophical topic to which he devoted an entire book) is the idea of Revolt. What is revolt? Simply defined, it is the Sisyphean spirit of defiance in the face of the Absurd. More technically and less metaphorically, it is a spirit of opposition against any perceived unfairness, oppression, or indignity in the human condition.
Rebellion in Camus’ sense begins with a recognition of boundaries, of limits that define one’s essential selfhood and thus must not be infringed – as when the slave stands up to his master and says in effect “thus far, and no further, shall I be commanded.” This defining of the self as at some point inviolable appears to be an act of pure egoism and individualism, but it is not. In fact Camus argues at some length to show that an act of conscientious revolt is ultimately far more than just an individual gesture or an act of solitary protest. The rebel, he writes, holds that there is a “common good more important than his own destiny” and that there are “rights more important than himself.” He acts “in the name of certain values which are still indeterminate but which he feels are common to himself and to all men.” (The Rebel, 15-16.)
Camus then goes on to assert that an “analysis of rebellion leads at least to the suspicion that, contrary to the postulates of contemporary thought, a human nature does exist, as the Greeks believed.” After all, “Why rebel,” he asks, “if there is nothing permanent in the self worth preserving?” The slave who stands up and asserts himself actually does so for “the sake of everyone in the world.” He declares in effect that “all men – even the man who insults and oppresses him – have a natural community.” Here we may note that the idea that there may indeed be an essential human nature was actually more than a “suspicion” as far as Camus himself was concerned. Indeed for him it was more like a fundamental article of his humanist faith. In any case it represents one of the core principles of his ethics and is one of the things that sets his philosophy apart from existentialism.
True revolt, then, is performed not just for the self but in solidarity with and out of compassion for others. And for this reason, Camus is led to conclude, that revolt too has its limits. If it begins with and necessarily involves a recognition of human community and a common human dignity, it cannot, without betraying its own true character, treat others as if they were lacking in that dignity or not a part of that community. In the end it is remarkable, and indeed surprising, how closely Camus’ philosophy of revolt, despite the author’s fervent atheism and individualism, echoes Kantian ethics with its prohibition against treating human beings as means and its ideal of the human community as a kingdom of ends.
iii. The Outsider
A recurrent theme in Camus’ literary works, which also shows up in his moral and political writings, is the character or perspective of the “stranger” or outsider. Mersault, the laconic narrator of The Stranger, is the most obvious example. He seems to observe everything, even his own behavior, from an outside perspective. Like an anthropologist, he records his observations with clinical detachment at the same time that he himself is warily observed by the community around him.
Camus came by this perspective naturally. As a European in Africa, an African in Europe, an infidel among Moslems, a lapsed Catholic, a Communist Party drop-out, an underground resister (who at times had to use code names and false identities), a “child of the state” raised by a widowed mother (who was illiterate and virtually deaf and dumb), Camus lived most of his life in various groups and communities without really being of them. This outside view, the perspective of the exile, became his characteristic stance as a writer. It explains both the cool, objective (“zero-degree”) precision of much of his work and also the high value he assigned to longed-for ideals of friendship, community, solidarity, and brotherhood.
iv. Guilt and Innocence
Throughout his writing career, Camus showed a deep interest in questions of guilt and innocence. Once again Mersault in The Stranger provides a striking example. Is he legally innocent of the murder he is charged with? Or is he technically guilty? On the one hand, there seems to have been no conscious intention behind his action. Indeed the killing takes place almost as if by accident, with Mersault in a kind of absent-minded daze, distracted by the sun. From this point of view, his crime seems surreal and his trial and subsequent conviction a travesty. On the other hand, it is hard for the reader not to share the view of other characters in the novel, especially Mersault’s accusers, witnesses, and jury, in whose eyes he seems to be a seriously defective human being – a kind of hollow man at best; at worst a monster of self-centeredness and insularity. That the character has evoked such a wide range of responses from critics and readers – from sympathy to horror – is a tribute to the psychological complexity and subtlety of Camus’ portrait.
Camus’ brilliantly crafted final novel, The Fall, continues his keen interest in the theme of guilt, this time via a narrator who is virtually obsessed with it. The significantly named Jean-Baptiste Clamence (a voice in the wilderness calling for universal clemency and forgiveness) is tortured by guilt in the wake of a seemingly casual incident. While strolling home one drizzly November evening, he shows little concern and almost no emotional reaction at all to the suicidal plunge of a young woman into the Seine. But afterwards the incident begins to gnaw at him, and eventually he comes to view his inaction as typical of a long pattern of personal vanity and as a colossal failure of human sympathy on his part. Wracked by remorse and self-loathing, he gradually descends into a figurative hell. Formerly an attorney, he is now a self-described “judge-penitent” (a combination sinner, tempter, prosecutor, and father-confessor), who shows up each night at his local haunt, a sailor’s bar near Amsterdam’s red light district, where, somewhat in the manner of Coleridge’s Ancient Mariner, he recounts his story to whoever will hear it. In the final sections of the novel, amid distinctly Christian imagery and symbolism, he declares his crucial insight that, despite our pretensions to righteousness, everyone is guilty. Hence no human being has the right to pass final moral judgment on another.
In a final twist, Clamence asserts that his acid self-portrait is also a mirror for his contemporaries. Hence his confession is also an accusation – not only of his nameless companion (who serves as the mute auditor for his monologue) but ultimately of the hypocrite lecteur as well.
v. Christianity vs. “Paganism”
The theme of guilt and innocence in Camus’ writings relates closely to another recurrent tension in his thought: the opposition of Christian and pagan ideas and influences. At heart a nature-worshipper, and by instinct a skeptic and non-believer, Camus nevertheless retained a lifelong interest and respect for Christian philosophy and literature. In particular, he seems to have recognized St. Augustine and Kierkegaard as intellectual kinsmen and writers with whom he shared a common passion for controversy, literary flourish, self-scrutiny, and self-dramatization. Christian images, symbols, and allusions abound in all his work (probably more so than in the writing of any other avowed atheist in modern literature), and Christian themes – judgment, forgiveness, despair, sacrifice, passion, etc. – permeate the novels. (Mersault and Clamence, it is worth noting, are presented not just as sinners, devils, and outcasts, but in several instances explicitly, and not entirely ironically, as Christ figures.)
Meanwhile alongside and against this leitmotif of Christian images and themes, Camus sets the main components of his essentially pagan world view. Like Nietzsche, he maintains a special admiration for Greek heroic values and pessimism and for classical virtues like courage and honor. What might be termed Romantic values also merit particular esteem within his philosophy: passion, absorption in being, sensory experience, the glory of the moment, the beauty of the world.
As a result of this duality of influence, Camus’ basic philosophical problem becomes how to reconcile his Augustinian sense of original sin (universal guilt) and rampant moral evil with his personal ideal of pagan primitivism (universal innocence) and his conviction that the natural world and our life in it have intrinsic beauty and value. Can an absurd world have intrinsic value? Is authentic pessimism compatible with the view that there is an essential dignity to human life? Such questions raise the possibility that there may be deep logical inconsistencies within Camus’ philosophy, and some critics (notably Sartre) have suggested that these inconsistencies cannot be surmounted except through some sort of Kierkegaardian leap of faith on Camus’ part – in this case a leap leading to a belief not in God, but in man.
Such a leap is certainly implied in an oft-quoted remark from Camus’ “Letter to a German Friend,” where he wrote: “I continue to believe that this world has no supernatural meaning . . . But I know that something in the world has meaning – man.” One can find similar affirmations and protestations on behalf of humanity throughout Camus’ writings. They are almost a hallmark of his philosophical style. Oracular and high-flown, they clearly have more rhetorical force than logical potency. On the other hand, if we are trying to locate Camus’ place in European philosophical tradition, they provide a strong clue as to where he properly belongs. Surprisingly, the sentiment here, a commonplace of the Enlightenment and of traditional liberalism, is much closer in spirit to the exuberant secular humanism of the Italian Renaissance than to the agnostic skepticism of contemporary post-modernism.
vi. Individual vs. History and Mass Culture
A primary theme of early twentieth-century European literature and critical thought is the rise of modern mass civilization and its suffocating effects of alienation and dehumanization. By the time Camus was establishing his literary reputation, this theme had become pervasive. Anxiety over the fate of Western culture, already intense, escalated to apocalyptic levels with the sudden emergence of fascism, totalitarianism, and new technologies of coercion and death. Here then was a subject ready-made for a writer of Camus’ political and humanistic views. He responded to the occasion with typical force and eloquence.
In one way or another, the themes of alienation and dehumanization as by-products of an increasingly technical and automated world enter into nearly all of Camus’ works. Even his concept of the Absurd becomes multiplied by a social and economic world in which meaningless routines and mind-numbing repetitions predominate. The drudgery of Sisyphus is mirrored and amplified in the assembly line, the business office, the government bureau, and especially in the penal colony and concentration camp.
In line with this theme, the ever-ambiguous Merseault in The Stranger can be understood as both a depressing manifestation of the newly emerging mass personality (that is, as a figure devoid of basic human feelings and passions) and, conversely, as a lone hold-out, a last remaining specimen of the old Romanticism – and hence a figure who is viewed as both dangerous and alien by the robotic majority. Similarly, The Plague can be interpreted, on at least one level, as an allegory in which humanity must be preserved from the fatal pestilence of mass culture, which converts formerly free, autonomous, independent-minded, human beings into a soulless new species.
In his reflections on this theme, Camus differs from most other European writers (and especially from those on the Left) in viewing mass reform and revolutionary movements, notably Marxism, as representing at least as great a threat to individual freedom as industrial capitalism. Throughout his career he continued to cherish and defend old-fashioned virtues like personal courage and honor that other Left-wing intellectuals tended to view as reactionary or bourgeois.
vii. Suicide
Suicide is the central subject of The Myth of Sisyphus and serves as a background theme in Caligula and The Fall. (In Caligula the mad title character, in a fit of horror and revulsion at the meaninglessness of life, would rather die – and bring the world down with him – than accept a cosmos that is indifferent to human fate or that will not submit to his individual will. In The Fall, a stranger’s act of suicide serves as the starting point for a bitter ritual of self-scrutiny and remorse on the part of the narrator).
Like Wittgenstein (who had a family history of suicide and suffered from bouts of depression), Camus considered suicide the fundamental issue for moral philosophy. However, unlike other philosophers who have written on the subject (from Cicero and Seneca to Montaigne and Schopenhauer), Camus seems uninterested in assessing the traditional motives and justifications for suicide (for instance, to avoid a long, painful, and debilitating illness or as a response to personal tragedy or scandal). Indeed he seems interested in the problem only to the extent that it represents one possible response to the Absurd. His verdict on the matter is unqualified and clear: the only courageous and morally valid response to the Absurd is to continue living. “Suicide is not an option.”
viii. The Death Penalty
From the time he first heard the story of his father’s literal nausea and revulsion after witnessing a public execution, Camus began a vocal and lifelong opposition to the death penalty. Executions by guillotine were a common public spectacle in Algeria during his lifetime, but he refused to attend them and recoiled bitterly at their very mention.
Condemnation of capital punishment is both explicit and implicit in his writings. For example, in The Stranger Merseault’s long confinement during his trial and his eventual execution are presented as part of an elaborate, ceremonial ritual involving both public and religious authorities. The grim rationality of this process of legalized murder contrasts markedly with the sudden, irrational, almost accidental nature of his actual crime. Similarly, in the Myth of Sisyphus, the would-be suicide is contrasted with his fatal opposite, the man condemned to death, and we are continually reminded that a sentence of death is our common fate in an absurd universe.
Camus’ opposition to the death penalty is not specifically philosophical. That is, it is not based on a particular moral theory or principle (such as Cesare Beccaria’s utilitarian objection that capital punishment is wrong because it has not been proven to have a deterrent effect greater than life imprisonment). Camus’ opposition, in contrast, is humanitarian, conscientious, almost visceral. Like Victor Hugo, his great predecessor on this issue, he views the death penalty as an egregious barbarism – an act of blood riot and vengeance covered over with a thin veneer of law and civility to make it acceptable to modern sensibilities. That it is also an act of vengeance aimed primarily at the poor and oppressed, and that it is given religious sanction, makes it even more hideous and indefensible in his view.
Camus’ essay “Reflections on the Guillotine” supplies a detailed examination of the issue. An eloquent personal statement, with compelling psychological and philosophical insights, it includes the author’s direct rebuttal to traditional retributionist arguments in favor of capital punishment (such as Kant’s claim that death is the legally appropriate, indeed morally required, penalty for murder). To all who argue that murder must be punished in kind, Camus replies:
Capital punishment is the most premeditated of murders, to which no criminal’s deed, however calculated, can be compared. For there to be an equivalency, the death penalty would have to punish a criminal who had warned his victim of the date on which he would inflict a horrible death on him and who, from that moment onward, had confined him at his mercy for months. Such a monster is not to be encountered in private life.
Camus concludes his essay by arguing that, at the very least, France should abolish the savage spectacle of the guillotine and replace it with a more humane procedure (such as lethal injection). But he still retains a scant hope that capital punishment will be completely abolished at some point in the time to come: “In the unified Europe of the future the solemn abolition of the death penalty ought to be the first article of the European Code we all hope for.” Camus himself did not live to see the day, but he would no doubt be gratified to know that abolition of capital punishment is now an essential prerequisite for membership in the European Union.
6. Existentialism
Camus is often classified as an existentialist writer, and it is easy to see why. Affinities with Kierkegaard and Sartre are patent. He shares with these philosophers (and with the other major writers in the existentialist tradition, from Augustine and Pascal to Dostoyevsky and Nietzsche) an habitual and intense interest in the active human psyche, in the life of conscience or spirit as it is actually experienced and lived. Like these writers, he aims at nothing less than a thorough, candid exegesis of the human condition, and like them he exhibits not just a philosophical attraction but also a personal commitment to such values as individualism, free choice, inner strength, authenticity, personal responsibility, and self-determination.
However, one troublesome fact remains: throughout his career Camus repeatedly denied that he was an existentialist. Was this an accurate and honest self-assessment? On the one hand, some critics have questioned this “denial” (using the term almost in its modern clinical sense), attributing it to the celebrated Sartre-Camus political “feud” or to a certain stubbornness or even contrariness on Camus’ part. In their view, Camus qualifies as, at minimum, a closet existentialist, and in certain respects (e.g., in his unconditional and passionate concern for the individual) as an even truer specimen of the type than Sartre himself.
On the other hand, besides his personal rejection of the label, there appear to be solid reasons for challenging the claim that Camus is an existentialist. For one thing, it is noteworthy that he never showed much interest in (indeed he largely avoided) metaphysical and ontological questions (the philosophical raison d’etre and bread and butter of Heidegger and Sartre). Of course there is no rule that says an existentialist must be a metaphysician. However, Camus’ seeming aversion to technical philosophical discussion does suggest one way in which he distanced himself from contemporary existentialist thought.
Another point of divergence is that Camus seems to have regarded existentialism as a complete and systematic world-view, that is, a fully articulated doctrine. In his view, to be a true existentialist one had to commit to the entire doctrine (and not merely to bits and pieces of it), and this was apparently something he was unwilling to do.
Yet a further point of separation, and possibly a decisive one, is that Camus actively challenged and set himself apart from the existentialist motto that being precedes essence. Ultimately, against Sartre in particular and existentialists in general, he clings to his instinctive belief in a common human nature. In his view human existence necessarily includes an essential core element of dignity and value, and in this respect he seems surprisingly closer to the humanist tradition from Aristotle to Kant than to the modern tradition of skepticism and relativism from Nietzsche to Derrida (the latter his fellow-countryman and, at least in his commitment to human rights and opposition to the death penalty, his spiritual successor and descendant).
7. Significance and Legacy
Obviously, Camus’ writings remain the primary reason for his continuing importance and the chief source of his cultural legacy. But his fame is also due (and that in no small part and to a degree unusual among writers and intellectuals) to his exemplary life. He truly lived his philosophy. And thus it is in his personal political stands and public statements as well as in his books that we can find his views clearly articulated. In short, he bequeathed not just his words but also his actions. Taken together, those words and actions embody a core set of liberal democratic values – including tolerance, justice, liberty, open-mindedness, respect for personhood, condemnation of violence, and resistance to tyranny – that can be fully approved and acted upon by the modern intellectual engagé.
On a purely literary level, one of Camus’ most original contributions to modern discourse is his distinctive prose style. Terse and hard-boiled, yet at the same time lyrical, and indeed capable of great, soaring flights of emotion and feeling, Camus’ style represents a deliberate attempt on his part to wed the famous clarity, elegance, and dry precision of the French philosophical tradition with the more sonorous and opulent manner of 19th century Romantic fiction. The result is something like a cross between Hemingway (a Camus favorite) and Melville (another favorite); or between Diderot and Hugo. For the most part when we read Camus we encounter the plain syntax, simple vocabulary, and biting aphorism typical of modern theatre or noir detective fiction. However, this base style frequently becomes a counterpoint or springboard for extended musings and lavish descriptions almost in the manner of Proust. And here we may note that this attempted reconciliation or union of opposing styles is not just an aesthetic gesture on the author’s part. It is also a moral and political statement as well. It says, in effect, that the life of reason and the life of feeling need not be opposed; that intellect and passion can, and should, operate together.
Perhaps the greatest inspiration and example that Camus provides for contemporary readers is the lesson that it is still possible for a serious thinker to face the modern world (with a full understanding of its contradictions, injustices, brutal flaws, and absurdities) with hardly a grain of hope, yet utterly without cynicism. To read Camus is to find words like justice, freedom, humanity, and dignity used plainly and openly, without apology or embarrassment, and without the pained or derisive facial expressions or invisible quotation marks that almost automatically accompany those terms in public discourse today.
At Stockholm Camus concluded his Nobel acceptance speech with a stirring reminder and challenge to modern writers. “The nobility of our craft,” he declared, “will always be rooted in two commitments, both difficult to maintain: the refusal to lie about what one knows and the resistance to oppression.” He left behind a body of work faithful to his own credo that the arts of language must always be used in the service of truth and the service of liberty.
8. References and Further Reading
Barthes, Roland. Writing Degree Zero. New York: Hill and Wang, 1968.
Bloom, Harold, ed. Albert Camus. New York: Chelsea House, 1989.
Brée, Germaine. Camus. New Brunswick, NJ: Rutgers University Press, 1961.
Brée, Germaine, ed. Camus: A Collection of Critical Essays. Englewood Cliffs, NJ: Prentice-Hall, 1962.
Cruickshank, John. Albert Camus and the Literature of Revolt. London: Oxford University Press, 1959.
Cruickshank, John. The Novelist as Philosopher. London: Oxford University Press, 1959.
Kauffman, Walter, ed. Religion from Tolstoy to Camus. New York: Harper, 1964.
Lottman, Herbert R. Albert Camus: A Biography. Corte Madera, CA: Gingko Press, 1997.
Malraux, Andre. Anti-Memoirs. New York: Holt, Rinehart, and Winston, 1968.
Thrody, Philip. Albert Camus, 1913-1960. London: Hamish Hamilton, 1961.
Sartre, Jean-Paul. “Camus’ The Outsider.” In Situations. New York: George Braziller, 1965.
Todd, Olivier. Albert Camus : A Life. New York: Alfred A. Knopf, 1997.
Retour en images sur les cinq cérémonies qui ont marqué l’Histoire.
Albert Einstein, Nobel de physique reçoit son prix à Stockholm, 1921 - Photo Capture d'écran DR/Youtube
Albert Einstein, Nobel de physique, 1921
En 1921, le physicien théoricien Albert Einstein est récompensé par le prix Nobel de physique pour son explication sur la loi de l'effet photoélectrique. Ses travaux ont révolutionné la physique et sa formule E=mc² est devenue la plus célèbre équation du monde.
Albert Camus, Nobel de littérature, 1957
On célèbre cette année le centenaire de la naissance d’Albert Camus. L’auteur de l’Etranger a été lauréat du prix Nobel de littérature en 1957 « pour l'ensemble d'une oeuvre qui met en lumière, avec un sérieux pénétrant les problèmes qui se posent de nos jours à la conscience des hommes ». Ce militant engagé dans la Résistance française décédera trois ans plus tard, dans un accident de la route qui le tue sur le coup.
Martin Luther King, Nobel de la paix, 1964
Martin Luther King est seulement âgé de 35 ans lorsqu’il reçoit cette distinction suprême, le 14 octobre 1964, un an après son célèbre discours « I have a dream » à Washington D.C, un message d'espoir qui résonne dans le monde entier. Le pasteur noir américain est récompensé pour son combat pacifiste pour les droits civiques des Noirs. « J'accepte le Prix Nobel de la Paix au moment même où vingt-deux millions de Noirs américains sont engagés dans une bataille créatrice pour mettre fin à la longue nuit de la ségrégation » déclara-t-il lors de son discours à Oslo.
Nelson Mandela, Nobel de la paix, 1993
Il y a tout juste dix ans, le 10 décembre 1993, Nelson Mandela et le président sud-africain Frederik de Klerk recevaient conjointement le prix Nobel de la paix pour « leur travail pour l'élimination pacifique du régime de l'apartheid et pour l'établissement des fondations d'une Afrique du Sud nouvelle et démocratique ». Emprisonné pendant 27 ans, « Madiba » a été récompensé pour avoir mis fin au régime d'apartheid en Afrique du Sud et pour avoir mené le pays vers la démocratie. Lors de la cérémonie de remise du Nobel, à Oslo, Nelson Mandela a rendu hommage à Frederik de Klerk « qui a eu le courage d'admettre qu'un mal terrible avait été fait à notre pays et à notre peuple avec l'imposition du système de l'apartheid ».
Robert Edwards, prix Nobel de médecine, 2009
En 2010, le Nobel de médecine a été décerné au scientifique britannique Robert Edwards, 85 ans, pour ses travaux sur la fécondation in vitro. Aujourd’hui professeur émérite à la prestigieuse université de Cambridge, Robert Edwards a été récompensé pour avoir « rendu possible le traitement de la stérilité qui affecte une large proportion de l'humanité et plus de 10 % des couples dans le monde »
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