Qui était Genséric, qui conquit l’Afrique du Nord en 429 ?
Le roi Vandale Genseric, était originaire de la Dacie et Pannonie. Il faisait partie d’une tribu des Germains orientaux, comprenant des Silings et des Hasdings. Bâtard d’un esclave, il est décrit comme « boiteux, mais fort, ascétique dans son régime, intrépide au combat, furieux dans ses colères, cruel dans l’inimitié, mais doué d’un génie insurpassable, à la fois pour la négociation et pour la guerre ».
Après avoir ravagé la Gaule, l’Espagne jusqu’en Andalousie (Vandalousie)1, les Vandales assoiffés de conquêtes, vaincus et défaits en Espagne par le roi Wisigoth Wallia, passent en Afrique en 429.
Parvenus en Afrique, avec ses 80 000 guerriers et leurs familles, femmes et enfants, les Vandales, flanqués des Alain sont rejoints par les Maures, (impatients de secouer la domination romaine), ainsi que par les hérétiques donatiques, persécutés par les Chrétiens orthodoxes.
La ville d’Hiponne (Bône) soutint un siège où le vieux St-Augustin, évêque d’Hippone, exhortait la population à résister.
Pendant 14 mois, la ville soutint le siège. Genséric se retira pour rencontrer et vaincre une autre armée romaine qu’il écrasa, si bien que l’ambassadeur de l’Empereur Valentinien signa une trêve reconnaissant les conquêtes des Vandales en Afrique.
Une trêve fut observée, relâchant l’attention des Romains. Genseric, profitant de l’occasion, jugea le moment favorable et fonça sur Carthage qu’il conquit en 439, où il organisa une mise à sac méthodique, minutieuse de la ville, dans le but de s’enrichir, mais non de détruire.
Les biens des notables et du clergé catholique furent saisis, leurs propriétaires bannis ou réduits à l’esclavage. Les soldats de Genseric pratiquaient la torture pour faire avouer aux habitants de Carthage où ils cachaient leur argent ou leur or.
Genseric était dans la force de l’âge lorsqu’il prit Carthage. Il était, en outre, un administrateur compétent et il rendit prospère l’Afrique du Nord en voie de déclin.
Guerrier dans l’âme, il se remit à guerroyer. Reprenant la tradition maritime des Carthaginois, il se fit construire une flotte puissante grâce à laquelle il put pratiquer la piraterie. Il prit la mer et ravagea les côtes espagnoles. Après l’Espagne, il s’en prit à l’Italie et la Grèce. Les Îles Baléares, la Corse, la Sardaigne et la Sicile, tombées entre ses mains, devinrent des bases pour la piraterie.
Toute la Méditerranée occidentale le craignait, les populations terrorisées à l’idée de voir pointer à l’horizon sa flotte, car l’on ne savait jamais où ses bateaux « chargés de cavalerie », allaient débarquer ; jamais dans l’histoire de Rome, une piraterie si effrénée n’avait eu cours dans la Méditerranée occidentale.
L’Empereur de Rome finit par conclure une paix avec le roi Vandale. Il offrit à Genseric sa fille en mariage. Amollis par leur nouveau style de vie, après la mort de Genseric, ses successeurs n’avaient aucune de ses prédispositions à la guerre et son esprit d’organisation. En moins de deux ans, Bélisaire2 détruisit l’État Vandale. En partie déportés en Asie Mineure, les Vandales disparurent de l’Histoire.
Si l’invasion vandale marqua les esprits avec Genseric et la conquête de l’Afrique du Nord, l’invasion arabe, deux siècles plus tard, marqua le Maghreb d’un sceau indélébile.
Khaled et ses cavaliers, seulement 7 ans après la mort de Mahomet soumettaient l’Occident.
Le Maghreb ne représentait qu’une partie du monde islamique.
Plus à l’Est, l’Égypte. Décadente depuis la disparition de l’ère pharaonique, elle vit renaître une gloire éphémère sous l’Islam.
L’Égypte depuis les Pharaons possédait des ports et des bases navales : la puissance arabe avait besoin d’une flotte ; l’Égypte exportait du blé à Constantinople, et vers l’Arabie.
Le gouvernement byzantin d’Égypte, employait des mercenaires arabes comme auxiliaires de police. Ces mercenaires pour les conquérants arabes ne représentaient aucun obstacle à leur expansion.
De leur côté, les Chrétiens monophysites, embourbés dans leurs querelles doctrinales, subissaient les persécutions de Byzance. Aussi, reçurent-ils à bras ouverts, les envahisseurs musulmans, les aidèrent à prendre Memphis en Égypte, les guidèrent dans Alexandrie. La ville tomba aux mains d’Amr3, après un siège de 23 mois, en l’an 641.
Amr, émerveillé par les richesses d’Alexandrie écrivit au Calife Omar : « Il est impossible d’énumérer les richesses de cette grande cité, ou de décrire sa beauté… elle contient 4000 palais, 400 bains, 400 théâtres ».
Amr empêcha ses soldats de piller, mais il établit un impôt à la ville conquise. Il proclama « la liberté de culte pour tous », ce qui déplut fortement aux Monophysistes, pourtant ses alliés et constamment en guerre avec les Orthodoxes byzantins.
Amr fit construire des bâtiments religieux. La mosquée d’Amr commencée en 642, fut rebâtie au Xe siècle. Le minaret en forme de ziggurat et dans le tombeau d’Ibn Tulun, se trouvent des arcs en forme de fer à cheval.
Les querelles byzantines, loin de s’éteindre, les Arianistes, Donatistes, Monohysites, firent place à d’autres querelles mahométanes, aussi vives entre les Sunni et les Ismaïli.
Les Fatimides étayaient leur pouvoir en réunissant les Ismaïlites en une « grande loge aux initiations compliquées et aux degrés hiérarchiques ; les membres étaient employés à l’espionnage et à l’intrigue politique ; les formes de l’ordre se transmirent à Jérusalem et à l’Europe et influencèrent fortement l’organisation, le rituel, et le costume des Templiers, des Illuminés, et des autres confréries secrètes du monde occidental ».
L’Islam au Maghreb.
Lorsque les Arabes envahirent au VIIe siècle l’Afrique du Nord et que l’Islam prit pied au Maghreb, ils se heurtèrent à la résistance farouche des Berbères.
Les Berbères pratiquaient le Christianisme et le Judaïsme.
Or, la résistance la plus irréductible fut menée par les communautés juives berbères autochtones.
Il semblerait que les Chrétiens n’opposèrent pas de grande résistance à la religion nouvelle, ils furent rapidement absorbés par l’Islam.
L’Islam laissait son empreinte et un style de vie à toutes les cités du pays, aux régions d’accès facile, par contre dans les régions montagneuses moins accessibles, l’Islam influençait les croyances, mais pas les mœurs restées fidèles au passé.
Au contact des populations berbères, l’Islam se particularisa, c’est sans doute la raison pour laquelle on parle d’un Islam « maghrébin ». Il échappa aux querelles doctrinales qui avaient cours en Orient, et le schisme des premiers Idrisides, des Fatimides.
Le Kharijisme subsista au Mzab et plus à l’est à Djerba « deux buttes témoins » n’ayant pas pris part aux luttes avec les doctrinaires qui les entouraient.
Le Maghreb tout entier suivit les règles d’une seule école : le Malékisme.
Seuls, les descendants des Turcs établis en Algérie et en Tunisie adhéraient à l’école hanéfite, répartie dans les villes principales d’Algérie et de Tunisie.
A l’écart des querelles théologiques, l’Islam au Maghreb prenait une « tournure anthropomorphique ».
L’on y pratiquait le culte des saints, les visites aux tombeaux vénérés, l’on y fêtait une fois par an, le moussen.
Chez les Berbères, les saints étaient associés aux éléments de la nature, arbres, sources, nuées, etc. (restes de paganisme des premiers temps) influencés par les peuplades germaniques nordiques païennes, les Romains, les Grecs, carthaginois, de la période pré-chrétienne.
Les Berbères y étaient restés fidèles, l’orthodoxie musulmane admettait cet animisme de âges anciens… dans les croyances aux djnouns – (génies).
l’Islam maghrébin était animé d’un mysticisme populaire. Dans les campagnes, ce fut dans « l’esprit des gens à la Foi simple et ardente et non dans le cerveau subtil des théologiens et des juristes, que cette religion du coeur a pris naissance ».
Cette religion s’organisa en confréries religieuses. Certaines, de tailles modestes, d’autres célèbres, comme les « Aïassaouia ».
Le rôle des confréries au Magrheb a été très important, jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, avec la révolte des Derqawa contre les Turcs.
L’islam maghrébin était statiques. Sa doctrine et sa pratique ne changeaient pas.
Et lorsque le Wahhabisme fut, au XVIIIe siècle un mouvement très important dans le monde islamique, il ne trouva aucun écho au Maghreb, malgré « les efforts du Sultan du Maroc, Mohammed Ibn Abdallah, adepte du Wahhabisme.
Ce ne fut pas le moindre des paradoxes, plus l’Islam s’enracinait au Maghreb, plus il se repliait sur lui-même, perdant le contact avec les communautés d’Orient.
1 Vandalousie : cette région d’Espagne portait le nom de ses envahisseurs vandale.
2Bélisaire : Général byzatin, sous l'Empereur Justinien.
3Amr : Général musulman.
par
mardi 14 juin 2022
https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/origines-et-aspects-meconnus-de-la-242185
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