Qui aurait cru qu'une simple provocation des musulmans à Alger donnerait naissance à une si grande manifestation?
En effet, tout avait commencé le 09 décembre 1960, tout près du monoprix de Belcourt et du stade Bialèse, où une bagarre avait eu lieu entre des manifestants européens encouragés par le service actions urbaines du capitaine Bernard et des musulmans. Une altercation qui allait se poursuivre quelques heures après à Ruisseaux, Kouba et à la Casbah. Ensuite, c'était autour du 10 décembre où, la manifestation était mieux organisée suite à l'encadrement des éléments actifs du FLN tout en agitant l'emblème national et en scandant un «vive le FLN», «L'Algérie algérienne». Un rassemblement qui avait étonné tout les Européens qui n'avaient jamais douté un instant qu'ils n'étaient pas chez eux. Ces pieds noirs qui voulaient toujours que l'Arabe reste un sujet au service d'une poignée d'Européens. Une appartenance aux Gaulois qui faisait d'eux des nobles. Des personnes nées pour jouir des plaisirs de la vie du moment que l'Arabe et l'Africain étaient là, pour les servir et s'occuper des enfants, du jardin et du troupeau. Et voilà que l'aube du 11 décembre 1960 déchire le voile de la peur en donnant l'occasion en premier lieu à la femme Algérienne de défiler. C'était vers le centre de cette capitale si triste depuis plus d'un siècle. Une ville en détresse que les youyous de femmes n'avaient plus embaumé ses entrailles et que les sourires avaient quitté les visages des rues. Alger la blanche avait retrouvé son souffle de Houri et sa joie de vierge. Alger était redevenue la citadelle imprenable et la tour en colère. Les coeurs pouvaient maintenant rire, les âmes fuir et les langues rêver. Alger avait mis sa robe blanche pour recevoir ses hôtes. Les yeux en larmes et le coeur battant. Elle était si heureuse pour tous les démunis qui étaient en deuil depuis l'arrivée de ces visiteurs poussés par la famine et qui avaient trop abusé de la gentillesse des autochtones. Des êtres dotés d'un savoir faire et qui étaient réputé pour l'hospitalité et qui n'aimaient pas l'odeur du sang, ni le langage des armes. Alger ne pouvait plus croire ce spectacle qui s'offrait à ses yeux, où la jeune fille algéroise qui à peine adolescente, offrait son corps de poupée à sa ville et à ses frères. Alger la capitale ne pouvait oublier le courage des jeunes et des vieux qui ne voulaient plus de la misère imposée par ces colons qui n'avaient qu'un voeu, celui de rester et de faire de ce pays une prison pour fous. Une Algérie, où l'Arabe restera Arabe même s'il avait le grade d'un colonel.
Si aujourd'hui, le peuple algérien revient au passé, c'est juste pour éclairer les jeunes des intentions de cette puissance coloniale à l'instinct criminel. Une puissance qui participe même de nos jours, avec ses avions et ses génies de la guerre pour soit disant aider les peuples à bâtir des démocraties. Cette France qui vient juste de favoriser le lynchage d'un ex président d'Etat, qui méritait un procès et un jugement. Un homme qui méritait le respect juste par humanité et qui devrait avoir un peu de dignité et les photos et les vidéos sur le net prouvent le sadisme et la haine qui malheureusement animent les coeurs. Une France qui nie toujours en bloc son passé taché de sang, de massacres d'enfants et de femmes. Un passé rouillé par les cris de tous ces humains tués bêtement. Des êtres qui n'avaient ni armes, ni bombes, ni des épées, mais juste des paroles. Une France qui oublie ses crimes et qui joue la femme victime. Une France qui aimait les tortures et les cris des martyrs. Une puissance coloniale qui avait tout fait pour réprimer la volonté d'un peuple qui avait temporisé plus d'un siècle avant de prendre les armes pour sauver son honneur. Un peuple qui avait tout fait pour une cohabitation des coeurs, des corps, des esprits et surtout des âmes. Un peuple qui ne voulait plus jouer le rôle du portefaix, alors que les temps avaient changé et que le moment était venu pour un réel partage des richesses des terres et des biens. Mais les colons avaient cette idée de supériorité et d'intelligence de l'Européen sur l'indigène. La France avait trop compté sur la force pour dompter les Algériens et les marquer par le feu comme il est coutume chez les éleveurs de cocher le cheptel. Elle avait tout préparé depuis la mort des héros de la capitale. La France avait préparé un plan qui consisté à saboter tout le travail déjà bien fait par le FLN en essayant de favoriser les négociations avec des hommes lettrés. Il y avait l'idée à l'époque de Robert Lacoste qui voulait détruire la lutte armée algérienne par le biais de figures de proue des personnalités algériennes qui étaient au sénat ou au parlement comme Chérif Benhabilès, Ali Checkal, Barabrok et Sid Kara. Une issue que les français avait tenté d'utiliser pour mettre fin à la puissance du feu du FLN qui certes n'avait pas assez d'armes et d'argent pour terminer la lutte. Cependant, les militaires algériens avaient confiance en Dieu et en eux-mêmes, car les revendications étaient légitimes et le spectre de la peur n'était qu'un moment déjà passé et qui n'inquiétait guère les moudjahidine qui étaient passé à la vitesse supérieure après la mort de tous les grands chefs de FLN de la période de 1957 à 1960. Une période qui avait donné naissance au premier gouvernement provisoire de la république algérienne. Un gouvernement provisoire mais qui était le seul apte à décider du sort du peuple algérien. Un gouvernement qui avait la tâche de diriger les opérations militaires à l'intérieur du pays et de tenter de soulever le cas de la liberté de l'Algérie du joug de l'impérialisme. Un gouvernement présidé par un Ferhat Abbas qui était un pharmacien en laboratoire ou en officine, mais un politicien dur et fine. Un homme qui avait l'amour de l'Algérie dans son âme et qui ne voulait ni les biens ni les honneurs, mais juste vivre loin des regards moqueurs de ces colons qui avaient trop abusé de leur statut de nation civilisée.
En effet, la révolution algérienne était une réponse à tous les tourments qui anéantissaient les rêves des milliers d'intellectuels algériens qui avaient cru aux promesses des livres et des slogans vides et perfides que la France avait exhibé à l'époque. La révolution algérienne était un choix imposé après le refus du dialogue et surtout les menaces de châtiments pour tous les élèves qui n'avaient pas compris la leçon du jour qui disait que les arabes étaient nés pour servir et non pas pour gouverner. Une leçon que les plus brillants des enfants du peuple algérien avaient reçu comme une insulte et subitement le mythe de la France ami du peuple était tombé en miettes. L'icône sacrée de la France était redevenue celle d'une ogresse hideuse, puante et suceuse de sang. Une France qui avait divisé le peuple pour régner. Elle avait juré d'ôter les doigts à tous les pseudos écrivains qui oseraient réveiller le peuple. Elle avait juré aussi de faire exécuter ou exiler tous les instruits qui s'opposeraient à ses dessins et qui tenteraient de la contre dire ou de semer le doute sur ses bonnes intentions. Elle avait aiguisé ses ongles et brossé ses dents pour avaler tous les méchants qui prétendaient vouloir la chasser de chez elle. La suite des événements était douloureuse pour les enfants qui avaient pris les armes et qui avaient écouté la voie du coeur qui n'avait plus peur de mourir du moment qu'il allait rejoindre les maître du monde. Les pionniers de la lutte sacrée avaient presque tous lu les ouvrages du député français Paul Vigné d'Octon «la gloire du sabre» en 1900 et «la sueur du burnous» en 1911. Deux oeuvres qui résument l'horreur de la présence de la France en Afrique. Deux témoignages qui mettent à nu les propos mensongers de tous les hommes de lettres comme Victor Hugo et Guy de Maupassant qui avaient été induits en erreur par les généraux de l'armée française qui visait les richesses et qui n'accordait aucune importance à la sauvagerie occasionnée aux autochtones qui vivaient libres et qui soudain, ils étaient chassés comme du gibier. Ces hommes libres qui étaient brûlés vifs en 1845 par Pélissier à l'intérieur d'une grotte au Dahra. Un siècle plus tard, ils étaient 45.000 algériens à subir les coups de folie d'une poignée de colons. Quelques émeutes et voilà que la chasse à l'Arabe était lancée par les hautes instances de lEtat français qui avait autorisé la formation des milices armées qui avaient pour but d'anéantir tous les indigènes. Une répression musclée et surtout aveugle, car les bourreaux étaient dès fois des adolescents qui avaient à peine 14 ou 15 ans. L'indigène n'avait pas le droit à un procès et les femmes et les jeunes filles étaient violées avant de les jeter dans des fosses communes. Mêmes les chiens avaient participé à l'horreur en volant des jambes ou des bras à des corps d'algériens abattus mais mal enterrés.
C'était un coup fatal pour les consciences et un acte de folie qui mérite une réplique pareille qui sèmera le doute et la crainte dans tous les coeurs de cette population qui certes n'était pas entièrement coupable, mais il fallait que cette France quitte l'Algérie. Le divorce était la seule issue favorable pour les deux camps. Le départ de la France était la solution désirée pour mettre fin à ce chaos. Les amis de Ben Boulaid avaient tous compris le message et il était temps de renverser les choses et de faire basculer la France elle-même dans le doute. Un premier Novembre déclenche la mèche et des sacrifices obligent les méchants à sombrer dans la démence. Et voilà le retour du Général De Gaulle qui reprend les commandes et qui essayent de ruser, mais son discours du 02 décembre 1960 n'avait pas eu l'impact voulu. Un discours qui avait pour but le maintien des Européens qui vivaient en Algérie. Un slogan qui préconisait l'indépendance de l'Algérie, mais qui offrait tous les droits aux français qui vivaient chez nous. Une Algérie algérienne. Cependant, le peuple algérien qui était majoritaire voulait une Algérie musulmane et surtout le départ des colons et des pieds noirs qui n'étaient pas chez eux. Une déclaration qui avait suscité de vifs débats et qui avait poussé certains auteurs célèbres à ne plus pouvoir choisir entre une lutte légitime d'un peuple outragé et une mère coupable de meurtre et de génocide. Les manifestations du 11 décembre 1960 étaient la gifle qui avait fait tant de mal à une France orgueilleuse et capricieuse. Une France fatiguée par une guerre où elle perdait chaque jour des centaines de soldats. Une France entêtée, essoufflée par des combattants qui tombaient aux batailles, mais qui étaient remplacés la nuit même par une relève toute fraiche et prête à quitter ce monde si bas pour un monde meilleur. Les manifestations du 11 décembre 1960 étaient la preuve concrète du choix des algériens qui avaient hurlé haut et fort qu'ils n'avaient que le FLN comme unique porte parole et que le GPRA avait l'aval de les représenter à l'ONU. En effet, ces émeutes du 11 décembre 1960 avaient permis aux membres du GPRA d'être les représentants du dossier de l'Algérie à l'ONU en date du 20 décembre 1960.
Une bataille tactique était emportée par le FLN et la lutte armée était plus rude avec l'isolement des moudjahidine qui n'avaient plus d'armes, ni d'argent pour terminer le combat. Les deux dernières années étaient plus difficiles à gérer et les généraux avaient doublé de férocité pour dissuader les cavaliers de l'ombre à terminer la tâche entamée par les aïeules. Deux années de famine et de supplice que les algériens avaient enduré sans dire un mot. Les âmes étaient aux paradis, les esprits chez un Cadi et les coeurs ne chantaient que «Bladi ya Bladi». En effet, les algériens voulaient tous mourir que de vivre sous un air de haine après la chute des masques et surtout le visage hideux que la France avait montré aux colonisés. Les esprits étaient chez un juge pour trancher et séparer les deux peuples d'une guerre sale. En fin, un brin d'espoir animait tous les coeurs d'un possible départ des Français qui n'étaient pas tous impliqués dans les meurtres, mais qui pour leur propre sécurité ils devaient quitter les larmes aux yeux ce paradis au soleil tendre et tiède. Un juillet 1962 est là et la guerre d'Algérie était terminée avec un goût de sang après les massacres de l'OAS. Une guerre où les chiffres exactes ne sont toujours pas arrêtés, car les mines enfouies sous terre tuent toujours de nos jours et les effets de la radioactivité suite aux explosions des bombes atomiques dans notre sud présentent toujours un danger pour les algériens.
Et malgré tout un passé noir, la France officielle de nos jours refuse toujours de demander un pardon pour tous les innocents qui étaient exécuté sans jugement. Des martyrs qui n'ont plus besoin de mots, mais le registre de l'Histoire n'oublie hélas rien.
Tout est inscrit noir sur blanc. La France avait adopté une conduite d'une femme ivre aux pays des hommes libres qui avaient une culture, des vivres et le Coran comme livre. Alors, elle doit porter toute sa vie un habit noir et prier matin et soir pour toutes les folies commises quand elle avait tous les pouvoirs. Elle devrait comme Orphée faire un retour en arrière pour juste dire pardon et Dieu merci les algériens n'ont besoin ni d'or, ni d'argent, mais juste une reconnaissance d'un tort et que même symbolique, il réconfortera les naufragés de la mort.
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par Boutaraa Farid
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