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Le cinquantième anniversaire de la mort d’Albert Camus offre des opportunités pour découvrir ou redécouvrir celui qui fut à la fois romancier, philosophe, journaliste et homme de théâtre.
C’est aussi l’occasion pour certains de revenir sur la difficile question de la position de Camus pendant la guerre d’Algérie.
L’écrivain ne s’est pas engagé aux côtés des militants nationalistes algériens qui réclamaient l’indépendance.
Si Camus ne l’a pas fait, c’est d’abord parce qu’il condamnait la violence et les méthodes des ultras.
C’est ensuite parce qu’il est né en Algérie, que sa mère y vivait encore et qu’il aimait ce pays au point d’imaginer qu’il aurait été possible d’y faire vivre deux peuples si la France coloniale n’avait pas humilié les indigènes et avait réalisé des réformes en temps voulu.
Cet amour de l’Algérie va pour Camus, et cela peut choquer, jusqu’à refuser de nommer ces indigènes « les algériens » (terme qu’il destine à la population née dans le pays et qui englobe les pieds noirs) pour les appeler « les arabes ».
Mais cet amour de l’Algérie ne vas pas jusqu’à amener Camus, l’homme de gauche, à épouser le mot d’ordre de l’indépendance.
Cette posture ambiguë est confirmée par l’attitude de Camus lorsque, apostrophé lors d'une conférence à Stockholm sur son silence durant la guerre par un jeune algérien alors qu’il venait de recevoir le Nobel, il lui répond « je crois à la justice, mais je défendrai ma mère avant la justice», comme si la protection de sa mère (et plus largement le rêve maintes fois caressé d’un Etat à deux peuples) valait bien la colonisation d’un peuple.
Encore que le Président Bouteflika reconnaissait en 2006 qu'une telle réplique traduisait finalement un sentiment profondément algérien.
Moi qui ai milité jeune au PSU (j'avais 20 ans), le parti qui s’était créé en 1960 en faveur de l’indépendance de l’Algérie à la suite des égarements de la gauche socialiste et communiste (ils votèrent l’un et l’autre en 1956 les pouvoirs spéciaux à Guy Mollet, l’homme de la répression en Algérie),je n’aurais pas partagé la position de Camus et j’en aurais même été probablement révolté.
Peut-on dire pour autant que Camus a trahi les valeurs dont il se réclamait ?
Outre le fait que ceux qui ne sont pas nés en Algérie, ne pouvaient pas se mettre à sa place, la trahison est toujours « aussi fuyante que lâche » pour reprendre l’expression de l’écrivain espagnol Javier Marias tandis que Camus a complètement et avec courage assumé ses propos.
Comme il les assumés publiquement lorsqu’il a dénoncé courageusement la liberté bafouée dans les camps soviétiques.
Enfin, sa condamnation de la violence dans l’action politique reste sans aucun doute un point marquant de la morale politique qu’il entendait fonder et qui fait encore aujourd’hui la force et la modernité d’Albert Camus.
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http://jeanmarieallain.over-blog.fr/article-albert-camus-et-la-guerre-d-algerie-42864629.html
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