Alors que l’assassinat de Samuel Paty, professeur d’histoire-géo décapité le 16 octobre à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) par un assaillant terroriste a ému toute la France, «Jours de gloire» rend hommage «à l’engagement et au travail de tous (les) enseignants». «Jamais je n'aurais pu imaginer que "Jours de Gloire" puisse être autant d'actualité aujourd'hui. Jamais je n'aurais pu imaginer que notre pays puisse connaître une telle violence. Mais, je réalise à quel point ce projet est la meilleure réponse face à la barbarie : notre unité, la force de notre héritage commun et celles de nos convictions seront toujours plus fortes», explique Sébastien Boudria.
Avant la sortie officielle de cet album, certains morceaux ont d'ores et déjà été dévoilés en raison de cette actualité. Le rappeur Oxmo Puccino a par exemple repris la lettre aux Instituteurs et Institutrices (1888) de Jean Jaurès, et -M-, de son vrai nom Matthieu Chedid, interprète la lettre à Monsieur Germain d’Albert Camus, que le prix Nobel de littérature a écrit en 1957 à son enseignant
Abdelhakim Sefrioui, le 29 décembre 2012, lors d'une arrestation pendant une manifestation non-autorisée, à Paris. (MIGUEL MEDINA / AFP)
A mes yeux, Mr Sefrioui, vous êtes le commanditaire de cet acte barbare. Vous avez instrumentalisé la violence qu’il y avait dans le sang de ce jeune tchétchène de 18 ans qui, assurément, n’avait même pas commencé à structurer le début d’une réflexion propre et surtout, enfant ayant été éduqué par la guerre, était habité d’une violence sans limite. Vous prétendez défendre l’Islam mais vous êtes le premier complice de l’Islamophobie en France. Vous prétendez protéger vos enfants, mais vous condamnez leur avenir et vous les emprisonnez dans la geôle de votre ignorance crasse. Au regard du discours que vous avez tenu et qui montre tout de votre bêtise, je m’en vais vous expliciter avec pédagogie et bienveillance la médiocrité de votre interprétation très personnelle de l’Islam. Un Islam dévoyé à la gloire de votre égo pathologique. J’espère que jamais votre conscience ne vous laissera en paix avec vous-même. J’espère que vos enfants sauront se défaire des tentacules intellectuelles malveillantes dont vous les entrelacez pour mieux étouffer leur liberté. Je vous souhaite Assalamu alaykum, Mr Sefrioui, en vain je pense.
Tout d’abord, il semble important que vous sachiez, Monsieur, que je suis né en terre d’Islam : mes parents étaient musulmans et j’ai grandi dans un environnement où l’éducation musulmane était la norme. À la maison, il y avait deux écoles, l’Islam de mon père et celui de ma mère. D’un côté, un Islam de l’invective, d’une fausse érudition pervertie, de frustrations mal digérées, un Islam Tartuffe au service de pervers narcissiques qui entendent rayonner en maintenant une emprise malsaine sur leurs proches, leurs femmes, leurs enfants.
De l’autre, il y avait l’Islam de ma mère qui reposait avant tout sur une profonde humilité, une peur du néant post-mortem, la certitude de devoir faire le bien et de respecter les autres, un Islam qui reposait sur un amour profond pour ses enfants et sur le vœu déterminé qu’ils aient un avenir paisible.
Deux parcours : mon père était né en Algérie et avait grandi là-bas, dans un petit village des montagnes kabyles, dont le mode de vie plus qu’harmonieux était comme figé dans le temps. À 11 ans, en pleine guerre d’Algérie, son père l’emmena lui, ses 13 frères et sœurs en France. Mon grand-père travaillait à l’usine et fit tout ce qu’il pouvait pour que ses enfants se construisent un avenir. Tous étaient scolarisés à l’école de la république. Mais, devant le comportement décevant de ses enfants, mon grand-père décida d’en ramener certains en Algérie pour les remettre sur le bon chemin. C’est ainsi que mon père, après son service militaire, commença une carrière professionnelle en Algérie. L’Algérie était son pays, ses ambitions étaient algériennes, son avenir s’éteindrait là-bas. Son seul lien avec la France, c’était finalement cette femme qu’il avait épousé pour obtenir la carte d’identité et les enfants qu’elle lui donna.
Cette femme, elle, était une enfant d’immigrés née en France. Une première génération comme on dit. Mon grand-père était ainsi fier de travailler à la mine et de faire vivre à la force de son poignet toute sa famille. Ma mère, contrairement à mon père, avait épousé le rêve de son père de s’installer en France : elle était travailleuse, s’intéressait aussi bien à la culture française qu’à celle de son pays d’origine, tout en restant fidèle aux préceptes musulmans que ses parents lui avaient inculqués. Elle n’avait aucune velléité, aucune rancœur, aucune pensée guerrière ou revancharde. Pour elle, l’équation était simple : il fallait bien se comporter, respecter les autres, selon les préceptes de l’Islam, et surtout travailler. Elle ne s’adapta pas à l’environnement de la cité dans laquelle nous grandîmes : alors que mon père, après la grasse matinée quotidienne, passait son temps à faire de la politique, à diligenter les affaires de la famille, à dénoncer les cochons de français, elle venait nous chercher pour ne pas que l’on traîne dehors, prête à se battre avec les caïds du quartier pour ne pas qu’ils traînent avec nous, pour ne pas que l’on finisse dealer.
Être musulmane pour ma mère, c’était avoir peur du bon dieu, de ne pas faire le mal pour ne pas avoir de malheur, s’agenouiller devant le transcendantal en signe de petitesse et d’humilité. Pour mon père, c’était clamer haut et fort sa supériorité, sa certitude d’avoir raison sur tout.
Je vous connais Mr Sefrioui. Je vous connais même très bien, vous me faites penser à ce père qui, à travers ma mère, moi et mes frères, ne souhaitait qu’une chose: enfermer ses proches dans un passé mal digéré, dans un fantasme obsessionnel d’une grandeur volée, assouvir sa soif de vengeance envers une France colonisatrice, une France qui n’a jamais su reconnaître sa grandeur, la grandeur des maghrébins, de l’Islam, cet Islam politique qui est le bras armé de l’ignorance haineuse que certains brandissent pour s’exonérer de leur propre bêtise. Car, derrière votre prose grandiloquente Mr Sefrioui, à votre dépit, on ne sent que la détresse intellectuelle d’une personne associable qui se vend comme érudit. Cette prose grandiloquente, autant qu’haineuse, que vous vomissez sur les réseaux sociaux et même sur la place publique dit tout du mal dont vous souffrez : un égo pathologique qu’une trop grande paresse et une fierté mal placée empêche d’être satisfait.
Qui êtes-vous Monsieur Sefrioui ? Vous êtes un imam autoproclamé en France. Êtes-vous vraiment Imam ? La seule organisation qui vous a reconnu ce titre fut créée par vous et n’existe plus, même si vous vous en réclamez encore. Vous n’êtes pas plus imam que vous n’avez été enseignant en informatique pendant 15 ans comme vous le prétendez. Vous êtes un affabulateur. Qu’êtes-vous donc alors Mr Sefrioui ? Vous n’êtes qu’un fardeau pour les sociétés contemporaines. Qui étiez-vous au Maroc avant de venir en France ? Un fardeau déjà. Comme en France, vous avez bien tenté de vous construire une carrière politique. Au Maroc, on rigole moins avec les clowns dans votre genre. C’est d’ailleurs pour cela que vous en êtes parti malgré vos grandes ambitions politiques, le Maroc ne voulait pas de vous et de votre parti de prédicateurs haineux. Vous trouviez alors une femme pour venir exercer vos talents d’orateur incompris en France. S’improviser grand prédicateur auprès d’une population où de nombreuses personnes sont en détresse sociale et culturelle, quand soi-même on vient d’un pays arabophone musulman et que l’on maîtrise mieux que les autochtones la langue française, qui est très bien enseignée dans les pays africains, c’est effectivement tellement facile, bien plus facile qu’au Maroc où vous auriez fini en prison. Pourquoi travailler : on s’est marié à une française, on lui fait des enfants, on perçoit les aides sociales. On a ainsi tout le temps de faire de la politique dans la rue, de montrer à tous comment on s’exprime aussi bien en arabe qu’en français, en leur disant bien sûr ce qu’ils veulent entendre, ce que vous n’avez cessé de faire de la rue Jean-Pierre Timbaud à République.
C’est d’ailleurs très intéressant de savoir que c’est justement rue Jean Pierre Thimbaud que vous faisiez vos premières armes en France. Ce quartier de la capitale qui va des buttes Chaumont, berceau des frères Kouachi, jusqu’à République en passant par Belleville et sa cité blanche, est l’endroit le plus révélateur de la fantasmagorie qui ensanglante notre pays depuis les attentats de Charlie Hebdo. Je suis monté à Paris à la suite de mes études. Après avoir payé très cher des logements insalubres loués par des marchands de sommeil, j’eus la chance d’obtenir un logement HLM à la cité blanche à Belleville, à deux pas de République. 350 euros pour 50 m² alors que je payais jusque-là 6 à 700 euros pour 20 m². Je vivais cela comme un privilège, au début. Très vite, je déchantai car, malgré ce privilège social de pouvoir ainsi loger en plein Paris pour un loyer plus que modeste, l’environnement était pollué par une bande de Greemlins qui se prenaient pour des blacks panthers à l’américaine vivant à Harlem. Et comme aux Etats-Unis, dans ce scénario bas du front, il y avait la Nation de l’Islam qui venait prospérer sur le désarroi intellectuel, la violence et la misère affective. Là, il n’était pas question de misère matérielle, cette excuse n’avait ici aucun fondement : on était à Paris, la richesse était partout, les opportunités à deux pas du métro Thimbaud. Pas question non plus de problème d’intégration, de Ménilmontant à Barbès, il n’est pas au monde d’endroits plus cosmopolites. Pourtant, une certaine jeunesse se complaisait dans cette comédie qui consistait à se faire passer pour un déshérité, pour une victime d’injustice, de racisme, alors même que tous les possibles s’offraient à eux. Cela s’explique en partie par le fait que ces enfants de la république ont été enfermés très tôt dans une pensée auto-destructrice: détester tout ce qu’il y a en soit de français, d’occidental, de sensibilité romantique, de rêve d’un avenir paisible et sans histoires. Et ce sont vous, les prédicateurs de cage d’escalier qui les enfermez dans cette vie vouée à l’échec ou à la mort, vous les imposteurs, qui n’ayant pas prospéré chez eux, viennent en France vivre conjointement paresse et rêves de grandeur. Votre discours vous dénonce Mr Sefrioui.
Quel est ce discours ? Intéressons-nous d’abord à l’un de ces nombreux discours que vous avez distillé sur les places de Paris. Vous êtes en effet un militant pro-Palestinien très engagé. Cela n’est en rien un mal. Je suis moi-même fermement opposé à la politique Israélienne depuis la mort d’Izaak Rabbin alors qu’un processus de paix était en gestation. J’ai été indigné par l’élection d’ Ariel Sharon puis de Netanyaou et par le sort réservé aux enfants palestiniens. Nous sommes nombreux de par le monde à être indignés par ce crime contre l’humanité dont est coupable l’extrême droite israélienne. Mais l’extrême droite israélienne n’est pas Israel: de nombreux israéliens dénoncent aussi les exactions commises par l’armée israélienne. Et Israel n’est pas les juifs, peuple qui, par son histoire, a dû passer son temps à fuir le racisme et qui s’est ainsi installé dans le monde entier. Mais vous êtes incapable de saisir ces éléments Mr Sefrioui, d’ailleurs, on pourrait vous les démontrer un à un, vous n’en voudriez toujours pas, car, ce que vous souhaitez, vous, c’est la guerre. Que souhaiterait un vrai musulman, un parent pour les enfants palestiniens ? Qu’ils n’aient pas à prendre les armes, qu’ils puissent vivre normalement, se construire un avenir. Que souhaitez-vous, vous Mr Sefrioui ? La guerre sans compromis. Vous vous permettez même de faire la leçon aux dirigeants palestiniens qui font tout ce qu’ils peuvent pour défendre un Etat Palestinien et un avenir pour leurs enfants. Qui êtes-vous Mr Sefrioui pour dire aux dirigeants des pays arabes quel est le chemin vers une paix durable et bénéfique pour tous, Israéliens et Palestiniens. Quel est votre fait d’arme ? Vous parlez de tout avec prétention mais qu’avez-vous fait pour les enfants palestiniens, à part quelques missions humanitaires qui avaient avant tout vocation à démontrer votre grandeur ? Qu’attendez-vous pour aller vivre en Palestine et prendre les armes ? C’est tellement plus facile de faire le beau parleur en France. Tellement plus simple d’inciter des gamins en perdition à faire la guerre. Vous êtes un lâche qui exhorte des enfants à se battre alors que vous avez passé votre vie à chercher une bonne planque, au Maroc ou en France.
Venons-en au discours que vous avez tenu pour dénoncer Samuel Paty. Samuel Paty était enseignant. À ce titre, il respectait les programmes et traitait des sujets qui figuraient dans ces programmes, dont la liberté d’expression. Quelle modalité choisir pour évoquer la liberté d’expression ? Devant des élèves qui sont happés par les séries Netflix et les réseaux sociaux, leur parler de l’assassinat de Jean Jaurès ou de l’exil de Victor Hugo, pourquoi pas...Mais, il semble tellement plus intéressant, passionnant, stimulant pour ces élèves d’évoquer des sujets qui les concernent, des sujets d’actualités. Pouvoir parler avec eux des attentats de Charlie, des caricatures, eux qui, pour une part ne se sentaient pas Charlie et étaient dénoncés pour cela...Au moins, parvenir à un consensus qui, sans les exhorter à être Charlie, à apprécier ces caricatures, les inviterait à accepter qu’on ne tue pas les gens parce qu’ils ne sont pas musulmans, et qu’à ce titre, ils ne se sentent pas concernés par les règles qui régissent la vie des musulmans et donc peuvent se permettre de moquer Mahomet, les musulmans, comme on l’a toujours fait en France, pour Jésus, les prêtres, les rabbins. Que souhaitez-vous Mr Sefriouoi, vous et vos copains qui vous prenez pour des prophètes ? Imposer vos règles religieuses à tous, en lieu et place des lois françaises ? Imposer vos règles musulmanes à 95 % de la population française qui n’est pas musulmane ? Imposer votre lecture moyenâgeuse du Coran aux 5 millions de musulmans français ? Moi, par exemple, je ne suis pas musulman malgré l’éducation que j’ai reçue. Ce n’est pas faute d’avoir été conditionné par mon père et les imams autoproclamés du quartier dans lequel j’ai grandi. L’Islam, Mr Sefrioui, à votre grande damne, à vous et à vos homologues islamophobes d’extrême droite, n’est pas un gène que l’on se transmet. Vous pouvez tenter de conditionner ces enfants en leur faisant taper la tête contre un Coran 1000 fois par jour, la foi est une affaire personnelle. Et, à moins de vouloir réduire vos enfants à de simples animaux domestiques que l’on dresserait, vous ne pourrez jamais les obliger, et encore moins en France, à être musulmans. Vous ne pourrez pas plus les enfermer dans cette interprétation moyenâgeuse de l’Islam. Vous et les parents qui ont dénoncé le cours de Samuel Paty devez comprendre cela : votre prosélytisme éducationnel a plus de chance de rendre l’Islam trop étroit aux yeux de ces enfants et de les en éloigner que de les convaincre de l’opportunité de suivre vos pas Mr Sefrioui. Et si par malheur pour eux, ils s’enfermaient dans la haine et le séparatisme que vous proposez, ils ne seront jamais en paix en France car nous ne cesserons jamais de vivre comme on y a toujours vécu, avec le blasphème comme étendard de la liberté d’expression. Blasphèmes contre les institutions, Blasphèmes contre les religions, Blasphème contre toutes les sortes de prison.
Pensez-vous être un exemple pour ces enfants ? Pensez-vous qu’ils rêvent de devenir comme vous ? Nous, enseignants, notre rôle n’est pas de leur proposer comme avenir de devenir des prophètes de cages d’escaliers. Et comme nous, enseignants, pensons que les musulmans de France sont aussi capables de devenir Avocat, Ingénieur, Médecin, Chefs d’entreprises, en conciliant leur foi de musulman et le cadre démocratique dans lequel s’inscrit la France, nous avons pour mission de leur transmettre, de leur expliquer la société française, ses mœurs, son cadre juridique, son histoire passée ou plus récente. Ces caricatures font partie de l’Histoire de France, c’est vous et tous les prédicateurs de cages d’escaliers qui avez fait entrer ces caricatures dans l’Histoire. C’est vous, les nouveaux prétendants aux Hadits conquérantes et sanglantes, qui avez rendu ces dessins sacrés en trucidant les auteurs de Charlie Hebdo, pour des dessins, de simples dessins, qui en plus avaient vocation à dire que les musulmans n’étaient pas tous des terroristes et que l’Islam n’exigeait pas d’eux qu’ils se comportent comme des barbares. Mais vous n’avez rien compris à ces dessins que pourtant vous souhaitez brûler. Jamais ces dessins n’auraient été autant diffusés sans vous, sans la publicité sanglante que vous leur faites. Si blasphème il y a, vous êtes alors les premiers complices de ce blasphème et de son rayonnement, et plus vous continuerez à vouloir nous imposer votre tyrannie plus égotique que prophétique, plus ces caricatures diffuseront de par le monde. N’est-ce pas là la plus belle des morales ? Une morale qui mériterait bien une Hadit.
En tant qu’enseignant en sciences, je n’aurai de cesse de leur expliquer qu’en France, on distingue la science et la croyance, les faits factuels et éprouvés, des prophéties trop souvent fantasmées. Je n’aurai de cesse de leur démontrer, au grand damne des religions, de toutes les religions, que la Terre a 4,6 Milliards d’années, que l’homme descend du singe et qu’il n’a aucune destiné divine et que, s’il ne se rend pas rapidement compte de sa petitesse, Allah Akbar, il disparaîtra de cette planète. La plupart des musulmans de France ont compris les règles du jeu et s’en accommodent très bien: ils font des études, deviennent de grands acteurs, de grands footballeurs, des avocats, des médecins et des chercheurs de renom. D’ailleurs, eux ne vous considèrent pas. Pis, ils sont encore plus sévères à votre encontre que toute l’extrême droite française. Car, à leurs yeux, à mes yeux, vous faites du mal aux musulmans de France en ordonnant qu’ils demeurent dans l’ignorance, l’exclusion et la précarité. Très tôt, j’ai cessé d’être musulman, trop attiré par la science, par l’Astronomie, par Darwin, par la musique et la littérature française, par Brel et Brassens...Très tôt, j’ai été en conflit avec mon père et avec les imams autoproclamés de cage d’escalier comme vous, Mr Sefrioui. Lors de nos échanges, j’étais affligé des mystifications débiles que ces prédicateurs faisaient entrer dans la cervelle des gamins acculturés avec lesquels je grandissais: Neil Armstrong serait devenu musulman en posant le pied sur la Lune car il aurait alors entendu la prière musulmane venant de La Mecque, le commandant Cousteau lui-même serait devenu musulman lorsqu’il découvrit une source d’eau douce en méditerranée seulement décrite dans le Coran...Comment faire entrer des conneries aussi énormes dans la tête d’enfants et souhaiter leur bien ? Comment prétendre vouloir les protéger quand on fait tout pour les empêcher de se servir de leur cerveau et d’éveiller leur esprit ? Comment même en faire des musulmans pieux en avortant même le début d’une réflexion propre et sérieuse ? Heureusement, pour la France et pour les musulmans de France, vous n’êtes que la frange misérabiliste d’un Islam pour les nuls, vous êtes les Thénardiers de l’Islam, des sortes de nécrophages de destins trop tôt condamnés.
Car, c’est bien cela le plus ridicule dans votre discours qui dénonce Samuel Paty: vous parlez au nom des musulmans de France ! Pour qui vous prenez-vous ? Pour le prophète lui-même ? Dans ce cas, vous blasphémez bien plus que toutes les caricatures de Charlie Hebdo. Avez-vous été élu ? Non. Avez-vous au moins été formé ? Non, plus. Ce n’est pas faute de faire des vidéo Youtube, de twitter frénétiquement, d’haranguer la foule place de la république... Votre auditoire est insignifiant tant sur la place publique que sur les réseaux sociaux.
Vous ne parlez qu’au nom de vous-même Mr Sefrioui et de votre ambition mégalomaniaque. Cette Fatwa contre notre collègue était votre moment de gloire. Personne ne vous écoutait sur la Palestine, cette affaire était une opportunité pour enfin exister et faire prospérer vos ambitions politiques. Vous vous foutez de ces enfants et même des familles qui ont été, d’après vous, choquées par le cours de Samuel Paty. Vous dites que les enfants musulmans se sont sentis humiliés ? Qu’auraient dit alors de vrais imams, des sages de l’Islam ? S’en fiant à Allah, ils auraient expliqué que Dieu seul savait quel est ce chemin par lequel chacun passe et que si épreuve il y a, c’est Allah qui leur impose pour éprouver leur foi. Tout au pire, ils les auraient invités à s’éloigner de la culture française et à inscrire leur fille dans une école confessionnelle. Pour votre information, Mr Sefrioui, le prophète Muhammad a passé sa vie à, justement, trouver des compromis avec les autres religions pour permettre à l’Islam de se répandre. Il a même fait reposer le début de son règne à Médine, sur une entente avec les tribus juives qui lui ont permis de prendre le pouvoir et d’installer l’Islam. C’est d’ailleurs la Sahifa, la constitution de Médine, qui grave dans le marbre le respect des autres religions, qui représente le plus la pensée du prophète Muhammad, pour la simple raison qu’il s’agit du texte islamique le plus ancien et qu’il a été écrit du vivant de Muhammad. Ce texte invite à la cohabitation intelligente des communautés d’alors, quand vous, vous prêchez la guerre de tous contre tous. Est-ce utile de vous parler, alors que je soupçonne votre ignorance d’être volontaire et perverse, du pacte d’Hudaybiyya conclu avec les païens de La Mecque d’alors, pacte conclu pour obtenir la paix ? Vous ne comprenez rien à l’Islam Mr Sefrioui, mais il est tellement facile de se faire passer pour érudit devant des cerveaux désemparés.
Al Anfal-8-61 : « Et s’ils inclinent à la paix, incline vers celle-ci (toi aussi) et place ta confiance en Allah, car c’est Lui l’Audient, l’Omniscient. ».
Samuel Paty était un être paisible. Il ne faisait que faire son travail d’enseignant, travail pour lequel nous sommes salariés. Notre mission est dirigée vers la paix, la paix des hommes, de toutes les communautés, de tous les individus. Notre combat est d’assurer, à tous les enfants que l’on nous confie, un avenir paisible en France. Le cours sur la liberté d’expression de Samuel Paty était un message de paix : permettre à ces enfants musulmans de sortir du cours pour ne pas se sentir offensés ou au contraire d’assister à l’exposition de ces caricatures, c’est les respecter, leur offrir une liberté dont vous et vos acolytes entendent les priver. Samuel Paty ne faisait qu’offrir à ces enfants la possibilité d’exprimer leurs opinions sur un sujet qui nous divise, car ce n’est que par la communication qu’un vivre ensemble sera envisageable. Cherchait-il à dénoncer l’Islam ou à dénigrer les musulmans ? En aucun cas et d’ailleurs là encore, relisez le coran, vous n’y retrouverez un verset interdisant la représentation du prophète Muhammad, qui d’ailleurs accepta à plusieurs reprises d’être représenté. Cette règle débile vient de Hadit, rédigée par des égo pathologiques dont vous vous inspirez. Mais être Musulman veut dire suivre la vie du prophète, pas celle de pervers mégalomaniaques trop ambitieux, déclinée dans les Hadit. Et quand bien même, vos règles interdiraient la représentation du prophète, ce sont vos règles, celles de quelques dizaines, peut-être centaines de milliers de musulmans rigoristes. Ce ne sont pas et ne seront jamais nos règles à nous français de toutes les confessions. Vous n’avez pas à me dire comment faire mon travail d’enseignant. Vous n’avez pas, ni vous, ni aucun parent, à me dire quel support j’ai le droit ou non d’utiliser. Je suis plus que suspicieux quant aux diatribes qui vous servent de prêche auprès des enfants auxquels nous essayons de donner un avenir, quand vous, vous rêvez de les envoyer à la mort. Pour autant, je ne viens pas dénoncer vos prêches haineuses, je ne viens pas vous agresser, je n’invite pas les français à venir vous égorger. Pourtant vos prêches sont bien plus violents que ne le seront jamais les caricatures de Charlie Hebdo. Notre intention, à nous enseignants, c’est que ces enfants vivent en paix. Samuel Paty travaillait en Banlieue, c’était son choix et, comme beaucoup de mes collègues qui travaillent en banlieues, il le faisait car il pensait qu’il était important d’être là pour ces enfants, pour leur offrir un horizon. L’utilisation qu’il a fait de ces dessins avait justement vocation à leur ouvrir un horizon intellectuel, à les inviter à une tolérance quant à la satyre qui est une tradition séculaire française, et même plus, un droit fondamental. Sans cette tolérance nécessaire vis à vis de nos libertés en tant que citoyen français, ces enfants s’enfermeront dans une opposition frontale et violente qui ne leur permettra pas de s’épanouir et de vivre paisiblement en France.
Et c’est bien cela que vous souhaitez Mr Sefrioui, l’affrontement. Et vous usez de ces gamins paumés, comme de ce jeune Tchétchène, comme d’une armée. En cela, vous êtes le plus grand complice de l’Islamophobie, car jamais les musulmans ne pourront vivre en paix en France tant que des politiciens de votre genre détourneront l’Islam pour leur ambition personnelle. Ce gamin Tchétchène a crié Allah Akbar. Vous êtes bien trop limité intellectuellement pour comprendre la profondeur de cette expression ainsi que celle de la prière musulmane. Dieu est grand, signifie que nous les hommes, et même son messager, ne sommes rien, sommes tout petits. S’agenouiller en direction du tout puissant est un signe de soumission à la toute puissance, à laquelle nous n’aurons jamais accès. Si ce gamin tchétchène avait appris cela, s’il avait été accompagné par des vrais musulmans et non des politiciens de maisons de quartiers, jamais il n’aurait eu la prétention de s’autoproclamer martyrs, d’infliger la sentence à la place du tout puissant. Humble, il s’en serait remis à Allah. Aujourd’hui, des parents ont vu leur enfants de 18 ans se faire abattre après avoir commis un acte d’une barbarie et d’une lâcheté sans pareil face à une personne sans défense. Aujourd’hui, les gamins que vous prétendiez défendre et qui ont dénoncé auprès de vous cet enseignant, auront une responsabilité dans la mort de Samuel Paty. Souhaitons-leur de trouver le chemin de la paix intérieure. Quant à vous Mr Sefrioui, vous et tous les prédicateurs de France et de Navarre, allez-vous-en. Il y a de nombreux pays dans lesquels vos enfants ne seront jamais agressés par un dessin, par un baiser à la télévision, par les mots liberté, égalité, fraternité, par l’idée des droits de la femme et de l’enfant. Vous avez tué Samuel Paty. Avant lui, vous avez tué de nombreux autres innocents qui vivaient en paix. Nous continuerons pourtant à faire des caricatures, de Mahomet, des Imams, des rabbins, des prêtres, nous continuerons à enseigner la liberté d’expression, l’égalité des sexes et la liberté des femmes, nous continuerons à trouver beau le sexe et à ne croire en rien d’autre qu’à l’urgence de vivre paisiblement, pour ne pas mourir dans l’horreur. Si votre présence dans notre pays a vocation à nous priver de cette paix, nous vous invitons aux bannissements, nous nous cotiserons pour vous payer votre billet d’avion aller, sans retour, et même s’il le faut votre installation. Partez, laissez nos enfants tranquilles. Ne voyez aucune haine dans mes propos Mr Sefrioui et autres prédicateurs, je vous souhaite, d’ailleurs, d’assumer vos responsabilités et de trouver la paix intérieure, loin de nous, de notre pays, la France... Même si je doute que ce soit là votre dessein, Assalamu alaykum Mr Sefrioui.
Publié le 21/10/2020
Auteur(s): Jean Mohamed de la Bastille pour FranceSoir
Ce texte écrit il y a qq semaines. Je comptais le partager en novembre. Je le dédie à la vie et à tous les profs qui ont été ma chance. Et à cet homme tué hier et que je n'oublierai pas.
El Harrachi et Lennon
Les croyances affûtent leurs couteaux et l'être n'est plus que barbaque jeté à la loterie du paradis où coule tant de sang
Ça emmerde qui que sur ma guitare je joue El Harrachi et Lennon? Que j'aime jusqu'à l'os la France et l'Algérie? Par dessus toutes les guerres, par amour de tous les morts.
Qu'on se le dise : j'ai deux langues maternelles : celle de ma mère-mère, celle de ma mère- l'école. Soyons précis : arabo-berbère ( pas la Haute lettrée de Tlemcen importée des érudits de Grenade et Seville, mais la vernaculaire comme on dit avec mépris, alliage d'arabe déformé et de berbère, de français, de maltais, une lumière de dialecte sur la plaine de Remchi où poussent les amandes qu' on ouvre d'une pression des doigts, pas l'Algérois, loin du parler de Béjaïa) et française ( deuch'nord puis ma rolap de Seine Saint Denis avant qu'on le baptise 9 3, puis la gouaille du 11ème côté avenue Parmentier, puis oh là là...la langue savante devant laquelle oh là là)
Le boulevard Richard Lenoir circule dans mon sang et croise la rue Didouch
Mes fils sont les prénoms des deux rives. De toutes les rives.
Dis-moi, comment fait-on pour lire le monde et les êtres.
Toi qui tues, combien de coups assènes-tu dans le corps de la vie
Mais la vie...
Je me souviens de toi quand tu m'as dit ne t'égare pas, méfie-toi de la vie, je me souviens quand tu m'as dit tu es perdu, quand au chant du muezzin tu venais accomplir ta chorégraphie bigote à la porte de mon père et au vu du village, je me souviens de tes yeux de triomphe quand j'ai refusé d'être de ta meute endjellabée et de toutes tes arlequinades de dévot, je me souviens être resté avec mon père l'imam à qui tu voulais apprendre le vrai du texte, mon père a posé son front et ses années de foi sur le tapis en direction du mihrab de son coeur et a prié pour toi, moi je suis resté sous la clim du salon, heureux de l'entendre psalmodier en lisant Freud, Dieu est en effet plus grand que toi puisqu'il chante dans un vieil homme et me laisse lire l'homme de Vienne, et le vieil homme a plié un siècle de son corps, c'est ainsi qu'il veut lire et écrire, tant de voix dans son souffle, tant de mondes
Et toi qui me lis, viens me parler, le brouillard fendu, dans la langue qui nous relie, l'inaltérable qui saute par dessus les mots et se dit aux yeux et à la peau, la langue des débuts, celle du bébé nu riant aux éclats quand frémissent les feuilles du bouleau et que pédalent ses jambes soulevées de joie
Et si nous étions nus. De tout
Ne me perds pas, ne fais pas de moi un territoire perdu, une pensée insoluble : c'est ce que veulent les bombes de croyances. Trouve d'autres éclats
Regarde-moi comme le témoin du possible, lis comme on puise dans les yeux et la chorégraphie des corps, quand un silence, un clignement de cils libèrent la présence liminaire, l'amorce d'un homme vers l'autre, quand le plus près ouvre sur le lointain, sans mièvrerie, au frotté des arêtes, mais ouvre et s'éprouve. Puise, oh puise, prélève patiemment dans une marche lente embrassant les grains du réel : à chaque fois il y aura la chance d'une phrase découverte se donnant à l'autre phrase. Nous sommes l'un à l'autre notre faille, à l'échancrure il faut peu que la plaie ne soit une source.
e credo des islamistes : isoler pour mieux fanatiser afin de fermer toutes les portes à la modernité. D. R.
Le besoin métaphysique est un réveil inné à la vie qui surgit, fatalement, dès l’aube de la conscience humaine. Ce sentiment précoce, de l’éternelle question qui se pose à nous avec des termes simples – qui suis-je ? Où vais-je ? – déroute continuellement la raison. Cette appétence, vieille comme le monde, de savoir qui on est vraiment provient des profondeurs obscures du silence de soi, sans qu’on sache les causes pressantes de cette problématique. Cette quête existentielle est plus difficile, aujourd’hui, dans un contexte ardu, où les repères se délitent et où les identités se précisent, de plus en plus, en nombre en s’agrégeant les unes aux autres.
Ce sursaut naturel, édifiant, commun à la nature humaine draine dans son sillage une recherche maintenue, à travers des réflexions personnelles, par mimétisme social ou par héritage implicite du milieu familial, des moments de doutes et de certitudes avant de se forger une opinion sur le mystère de sa propre existence et son orientation spirituelle. Ce curieux réflexe qui s’impose à nous, légitimement, nous place dans une recherche intrinsèque, intime et presque inconsciente sur la réalité des intérêts qui conditionnent notre vie terrestre.
Une pensée permanente, curieuse et angoissante, préoccupe, depuis toujours, la conscience de l’homme sur les sombres méandres du gouffre du néant qui guette la vie et ne lui laisse, en apparence, aucun espoir pour prétendre à la survie de son âme éternelle. La nature humaine fut, de tout temps, perdue face aux tourments des mystères qui entourent le monde réel. La raison fut impuissante de concevoir, tant bien que mal, une réponse claire pour rassurer les mortels sur leurs destinées éphémères, indéfinies et abstraites.
En somme, l’homme avait toujours tenté, sans arriver jusque-là, à vaincre, le vide qui le sépare de la vérité avec son propre destin après la mort. Même l’illusion imaginaire ne put combler, avec certitude, notre incapacité à contrôler notre bref destin.
Aucune philosophie n’est arrivée à se projeter pour apaiser les âmes, en dehors de la foi qui se rattache, avec un excès de zèle, aux certitudes des religions. Malheureusement, la conscience humaine reste incapable d’apporter une réponse scientifique unanime pour satisfaire l’angoisse de la mort. Nous sommes un élément de la nature doté du privilège d’une conscience éveillée, incapable de se définir par elle-même. Elle se perd dans les mystères, des liens ténébreux, des vastes espaces inconnus de notre univers. La jeunesse algérienne est privée de cet élan de recherche intellectuelle et spirituelle, pourtant nécessaire, pour lui garantir l’équilibre mental. Elle est interceptée au berceau et à l’école fondamentale pour la formater à suivre aveuglement les concepts imposés d’un islam détourné de sa vocation première : la paix de l’âme.
Les sentiments relayés par les mystères de la vie et la mort se définissent selon deux visions opposées : l’une admet le ressenti d’une éternité divine sans fin ; la croyance, l’autre ; l’esprit critique, une vision entachée de scepticisme, avec un regard singulier et pragmatique, se réalise autour du concept d’un monde lié à un pur hasard sans avenir. L’option de la vie sans avenir probant après la mort inquiète assurément. Si une partie, à l’image des sociétés musulmanes, croit au sacré et s’accroche, définitivement, sans se poser de questions, sur le message divin des religions, pour se rassurer et bénéficier de l’existence d’un destin meilleur dans l’au-delà, l’autre partie se résigne à vivre dans le doute, en construisant sa propre moralité, ses lois et ses philosophies inspirées du réel, en acceptant la mort comme le péril de la vie ; une fin sans suite.
La meilleure façon d’assurer le bien-être et l’équilibre intellectuel de l’être humain, c’est de le libérer pour lui permettre d’évoluer, sereinement, selon sa propre perception des choses. Chacun doit apporter sa propre réponse pour réguler la peur viscérale, qui est en lui, face à une vie incertaine et une mort qui nous propulse, sans raison, vers les contours opaques du néant. La culture objective de la mort, qui apporte la quiétude, est ignorée dans notre société islamisée.
La spiritualité est un sentiment universel ; les religions s’emparent de la fragilité de ce sentiment pour offrir les dogmes qui encadrent la vérité temporelle, spirituelle et éternelle.
L’islam est une religion comme les autres, qui se distingue, en imposant, comme principe unaire, un modèle de vie unique, qui ne peut être valable que s’il est défini autour des valeurs édictées par le Coran et son complément : la charia. En somme, aucune pensée nouvelle, aucune création sous toutes ses formes, aucune idée politique et sociétale ne doit porter le sceau de vérité, si elle n’est pas étoffée, inspirée ou issue des concepts islamiques. L’islam est un tout, une vision binaire ; tout ou rien. On ne peut accepter de retirer, renier, mettre en cause ou en doute la véracité infinitésimale de son tout véridique.
On entre dans l’islam et on n’en sort jamais. Le musulman est convaincu de la suprématie de l’islam sur les autres religions. Et, convaincu de sa suffisance, vraie ou supposée, que toutes les vérités scientifiques, sociétales et spirituelles associées à la vie sur terre et dans le ciel sont révélées dans le Coran. On peut résumer facilement cette partie du dogme musulman par : vivre dans un espace musulman clos, en autarcie, en rejetant toutes les idées venant de l’extérieur. Cette nouvelle lecture de l’islam, au demeurant insidieuse, portée par les islamistes radicaux, venant du Golfe, pervertit l’esprit attractif de l’islam des lumières.
Le salafisme, une expression nouvelle de l’islam radicalisé, s’empare de l’aubaine pour instaurer ses propres lois, en corrompant le message universel de base, d’un islam tolérant.
Ce fondamentalisme édulcoré par des formules fleuries pour flatter l’égo des musulmans fragiles monopolise tous les moyens des puissants médias, à travers le monde, des riches monarchies du Moyen-Orient. Ils déversent, inlassablement, une propagande fallacieuse et belliqueuse, à travers l’humanité entière, pour justifier l’archaïsme qui mine la grande détresse de la civilisation arabe. Ils n’hésitent pas à proférer, toute honte bue, les insanités du type : l’islam, c’est l’unique vraie religion. L’homme est né musulman et, tôt ou tard, ceux qui sont dans l’erreur des autres religions retrouveront le chemin de la vérité qui se trouve dans l’islam. Le musulman est fier de ce qu’il est, et non de ce qu’il fait.
L’islamiste consomme passivement, sans se sentir offusqué, ce que le mécréant invente. Sa fierté lui suffit pour gagner le Paradis éternel. Il n’a pas, alors, à se soucier de faire des efforts pour maîtriser les sciences et participer à parfaire l’harmonie du futur d’une humanité de bien-être et de paix. On gonfle le torse, pour affirmer haut et fort, sur tous les toits, sur un ton qui défie la raison, qu’un monde meilleur réservé uniquement aux fidèles d’Allah les attend dans l’Au-delà, au Paradis. Le salafiste cherche à imiter les mœurs, les us et les coutumes des musulmans de l’hégire et mène une vie au chaud, sans efforts, dans les mosquées. Pour lui, le travail structurant, la modernité et l’innovation sont les biens exclusifs des impies.
On sacralise la langue arabe au même titre que le Coran, en lui accolant le titre de la langue d’Allah, pour pousser vers le monolinguisme et faire obstacle, par la ruse, à l’épanouissement des autres langues vecteurs du savoir. La langue française et la langue amazighe sont menacées de disparition par une société arabisée à l’excès, islamisée avec force et fanatisée par les extrémistes qui veulent en découdre avec l’ordre mondial construit sur les bases du génie, débordant, des mécréants. En désignant, sciemment, comme adversaire la langue française, les islamistes visent, sournoisement, en réalité la langue amazighe. Le piège est bien pensé, bien ficelé par les esprits chagrins et lugubres des conservateurs irréductibles. Si la langue française disparaît de l’espace culturel algérien, la langue amazighe connaîtra une déchéance systématique. Les salafistes le savent très bien, en proposant l’idée farfelue, pour affaiblir la position de la langue française, en la remplaçant par l’anglais.
Cette façon de concevoir la religiosité, indispensable à la paix de l’âme, dressera, un jour, les gens les uns contre les autres et détournera les jeunes du véritable message universel de l’islam. Cette philosophie est la source de l’intégrisme accoudé aux piliers de l’ignorance des fervents salafistes des mosquées. Leur credo : isoler pour mieux fanatiser afin de fermer toutes les portes à la modernité. L’islam politique, par le truchement d’une armada de concepts religieux mystifiés et trompeurs, construit ses programmes politiques verbeux afin de s’emparer du pouvoir et parachever l’Etat islamique en Algérie.
Les vœux politiques des pays du Golfe commencent à prendre forme en islamisant, à outrance, la société algérienne. Aujourd’hui, l’Algérie est le pays le plus arabisé et le plus islamisé des pays du monde arabe. Paradoxalement, trente ans en arrière, l’Algérie était le pays berbère le moins arabisé et le plus disposé à la laïcité dans le monde arabe.
Il nous faut, au contraire, davantage d’esprit d’ouverture, de tolérance et du vivre-ensemble dans nos sociétés pour relever le défi de la modernité afin de rattraper notre retard technologique. Nous sommes capables de cet élan en tirant profit de la richesse de la belle diversité qui anime notre société. Nous venons de démontrer que l’islam porte en son sein le refus de la laïcité, il nous faut, donc, nous engager, un peu plus, dans une lutte acharnée pour l’instituer dans la nouvelle Constitution, en remplaçant l’article 2 par celui de la laïcité. C’est notre dernier rempart avant que notre pays ne soit de nouveau, définitivement, colonisé par les Saoudiens et les Qataris.
Les concepts de cet islam militant, avec des slogans guerriers biens huilés, aident la duplicité du pouvoir en Algérie.
En instituant, sous la pression des Arabo-musulmans, l’islam comme religion d’Etat (article 2), les pouvoirs successifs commettent l’irréparable, en donnant un statut religieux à un Etat dont le caractère multiculturel de sa population impose, plutôt, d’instaurer la laïcité. L’islam religion d’Etat s’installe en s’opposant à toute évolution sociétale, non inspirée du dogme islamique. Depuis, la société algérienne est bloquée par le piège d’un islam qui ignore, à dessein, l’accompagnement de l’évolution des sociétés modernes des pays développés.
Toutes les lois qui gèrent l’espace public et privé de la société algérienne sont d‘inspiration religieuse, conformément aux commandements édictés par la charia. Le piège se referme sur une société qui se meurt, à petit feu, en peinant à se moderniser.
«Il vous appartient à vous, acteurs de la Révolution algérienne, de vous impliquer directement dans l'écriture de l'histoire. Si vous ne le faites pas, d'autres le feront à votre place. Alors ne vous plaignez pas s'ils la détournent et la déforment.» Mao Tse Toung à Djamila Bouhired.
Ces jours-ci je relis, avec beaucoup de plaisir comme toujours, «Culture et impérialisme» d'Edouard Saïd. Le grand texte du professeur palestinien de littérature comparée à la Columbia university m'a inspiré et le présent article et son titre - En fait il s'agit d'un article que j'ai publié en 2013 dans El-Djazair.Com que je remets au gout du jour. Edward Saïd a décrit le monde câblé dans lequel nous vivons comme en mesure de porter l'impérialisme là où aucune armée ne pourrait le porter. Il soutient, dans ce cadre, que les Occidentaux, qui ont quitté physiquement leurs colonies d'Afrique et d'Asie, font tout pour les garder comme marchés et comme sites stratégiques sur leur carte idéologique pour continuer à les dominer moralement et intellectuellement.
Les principales sources d'information, à la fois pour la consommation publique et officielle, comprennent les médias grand public, les médias alternatifs, les universités, et les groupes et centres de réflexion. Mais alors que les médias en ligne se développent pour remplacer les formes traditionnelles par lesquelles le public forme sa compréhension du monde, beaucoup commencent maintenant à constater de première main la pertinence des propos de Saïd, soutenant que le contrôle de la pensée moderne dépend de la communication subliminale, ou les messages qui influencent nos perceptions sont diffusés de manière invisible, inaperçue, avec une compréhension ou plutôt une sensibilisation minimale à ce qui se passe et pourquoi. A cet effet, Internet est devenu le moyen ultime de contrôle social parce qu'il est volontaire, addictif, et enveloppé de l'illusion personnelle de la modernité et de la liberté.
Arrêtons-nous un instant sur des exemples concrets. Convenons d'abord que toutes les guerres de l'histoire ont étés déclenchées suite au préalable à des actes de désinformation délibérés. C'est ainsi que durant la période qui a précédé la guerre d'agression contre l'Irak (2 août 1990 au 28 février 1991) les médias américains ont tristement pris la tête en encadrant le débat sur les prétendus armes de destruction massive du gouvernement irakien non pas comme une question de savoir si elles existaient ou non, mais comme une question de savoir où elles été cachés et que faire pour les détruire.
Chez nous beaucoup de gens semblent perdre le sens de ce qui est bien et de ce qui est mal, et de ce que cela signifie que de se comporter avec respect et dignité envers les autres. Nous voyons la malice, l'apathie et la brutalité monter à des niveaux très dangereux, surtout parmi nos jeunes. Loin d'être des acteurs impartiaux de ces développements, le Net et les chaines TV satellitaires étrangères ont, en fait, joué un rôle central pour accroître ces tensions et préparer le public à s'attendre au pire. Beaucoup de nos jeunes ne semblent pas pouvoir briser leur transe, briser leur programmation, et ils croient sincèrement à tout ce que les médias modernes leur dictent sans aucune analyse critique. Pire, ils agissent en conséquence. Bien sûr ces médias, redevables à l'agenda du « New colonialisme », semblent préoccupés non seulement par des considérations d'ordre géoéconomiques, mais aussi et surtout par quelque chose qui affecte la fabrique ou le façonnage même de notre société elle-même. Ainsi l'assertion selon lequel le journalisme cherche simplement à informer sur le monde - non à le changer - s'avère une grandiose supercherie ou plutôt un mythe démystifié par le mythologue lui-même.
Pour lutter contre cette violence par le Net tout un arsenal répressif a été mis en place dans notre pays, notamment la loi n° 20-05 du 28 avril 2020. Aussi un décret régissant l'exercice de la presse électronique a été adopté récemment par notre Gouvernement. C'est pour cela, pour reprendre une formule de M. Benmehidi, que « La réaction des amateurs du désordre ne s'est pas fait attendre. Dès l'annonce de l'adoption par le gouvernement d'un décret régissant désormais l'exercice de la presse électronique en Algérie, des « ensembles flous » tirant profit, des années durant, de la clandestinité procurée par un vide juridique, ont scandé leur mécontentement. » Mais attention en dépit de sa nécessité la loi est, à elle seule, inefficace pour juguler ce phénomène. En dépit de leur nécessité les lois et règlements prouvent chaque jour leur limite, et compter naïvement sur ces seuls mécanismes pour protéger les Etats-nations contre les nouvelles formes d'agression dans le Cyberspace c'est exactement la même chose que de dire que ces Etats n'ont pas besoin d'entretenir des Armées du moment que les lois et conventions internationales les protègent !
Nous vivons dans un monde globalisé
Dans le monde globalisé d'aujourd'hui où le niveau d'échanges immatériels n'a jamais été égalé et où les informations circulent à la vitesse de la lumière, un combat global au niveau des idées entre les nations s'est imperceptiblement installé. Ainsi, Il est clair que la capacité de nos instances gouvernementales à communiquer de manière crédible avec les différentes opinions, locales et étrangères, est indispensable à la réalisation des objectifs et projets nationaux. La maîtrise des techniques de communication, dont il est question ici, par les autorités publiques porte sur la perception par l'opinion des informations communiquées et son utilisation pour modifier le contexte de l'action.
La principale idée qui ressort ici est que nos responsables ne peuvent pas convenablement diriger sans bien communiquer. En temps de crise ou tension, et même en période normale, l'absence - ou la mauvaise - de communication crée un vide que d'autres acteurs étrangers s'empressent de combler pour diffuser leurs propres interprétations, qui de toute évidence servir leurs intérêts propres. La généralisation d'emploi des technologies de l'information et de la communication (TIC) a, d'une part accentué la situation précédemment mentionnée, et d'autre part donné plus d'impacts à l'interprétation au détriment des faits réels. L'effet de communication devient lui-même une source importante d'action. On peut relever que la réalité, quand bien même elle nous est acquise ou favorable, n'est souvent pas ce qui compte le plus au point de vue opérationnel ou pratique. Ce qui compte, c'est plutôt la perception que se font les différents publics de cette réalité.
De manière générale, en tant qu'institution ou organisation, la qualité de nos relations avec les différents publics, domestiques et étrangers, dépend de la qualité de notre manière de communiquer par le biais des médias. Au vingt et unième siècle le public s'informe 7j/7j-24h/24h à partir d'une très large gamme de sources, nationales et étrangères. Dans cet environnement hyper chargé d'informations savoir communiquer est devenu plus que fondamental pour les gouvernements - tirer avantage des moyens de communication aux fins de capter l'attention des publics, de les sensibiliser et même de les orienter.
Parmi les grands objectifs en rapport avec la communication stratégique on peut citer : Accroître la légitimité et la crédibilité des stratégies, politiques ou actions nationales ; amoindrir la légitimité et la crédibilité des stratégies, politiques ou actions des adversaires et compétiteurs ; convaincre des audiences sélectionnées de prendre des actions spécifiques en appui à des objectifs nationaux ; amener des adversaires et des compétiteurs à prendre des actions spécifiques ; fortifier nos alliances avec les partenaires, etc.
La guerre des idées a toujours existé
Soyons clair, la guerre des idées ou guerre cognitive existe depuis la nuit des temps, ce qui est par contre nouveau ce sont les moyens qui y sont utilisés, i.e. l'emploi massif des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Ces moyens ont donné une impulsion défiant toute réalité à la communication de masse.
L'Algérie est, malgré elle, engagée aujourd'hui dans la grande guerre des idées, opposant dans un jeu complexe et multiforme l'ensemble des acteurs ayant un poids dans les relations internationales. En effet, des opérations cognitives ont constamment ciblé notre nation en raison de son identité politique, ses valeurs et ses potentialités économiques - on entend par « opération de communication, un processus incluant le développement, l'implémentation et l'évaluation d'actions et de messages publiques en vue de l'appui à des politiques, intérêts, et objectifs de long terme. »
Je voudrais ici revenir sur l'agression de janvier 2013 de l'Impérialisme occidental par l'entremise du Terrorisme internationale contre notre pays à In Amenas. Il faut noter que l'intervention éclaire des unités de l'ANP - caractérisée par une appréciation juste du contexte géopolitique, une minutieuse préparation ainsi qu'une audacieuse exécution - a été amplement suivie et commentée en temps réel à travers le monde. Jusqu'au jour d'aujourd'hui on continue à étudier ce cas d'école dans les grandes académies militaires à travers le monde. En plus de son caractère d'opération militaire classique menée avec brio, l'intervention elle-même a été conçue au préalable comme une « opération de communication » d'envergure servant surtout à dissuader toute tentative d'agression étrangère future contre notre pays.
Il est utile de rappeler, aussi, que c'est durant notre Glorieuse guerre de libération que la communication stratégique a été appréciée à sa juste valeur et utilisée par les dirigeants algériens comme un instrument vital de leur stratégie de combat contre l'occupant. A cette période critique de notre histoire nos responsables se sont convaincus de l'extrême utilité de la dimension psychologique de la guerre quant à l'issue de cette dernière.
Paradoxalement, au moment où les techniques et technologies de la communication de masse offrent d'énormes possibilités, les actions nationales en la matière ne sont pas à la hauteur des potentialités et possibilités de notre grand pays. L'identification conceptuelle et opérationnelle de la guerre cognitive à une mission réservée, avec une certaine connotation «d'activité noire» a aboutit à sa déconnection et à son isolement par rapport aux autres activités gouvernementales classiques. Le résultat est que la guerre cognitive n'est pas traitée comme une priorité en termes de personnel, de budget, de formation, d'équipement, d'organisation et de doctrine. Une autre raison qui fait que cette discipline est négligée par nos gouvernants est qu'ils croient à tort que les effets ou les gains des affrontements au niveau des idées et des concepts sont au mieux marginaux. Une planification et une conduite effectives d'opérations de communication par nos gouvernants sont obstruées aussi par les biais organisationnels au sein de la bureaucratie nationale elle même.
En conséquence, la détermination des causes profondes de résistance à un emploi efficient des instruments propres à la guerre cognitive au sein de nos institutions doit être considérée comme une priorité. Il existe comme une sorte d'inhibition culturelle à l'encontre de tout ce qui a trait au domaine des affrontements politiques et psychologiques. Un effort soutenu doit être déployé afin d'aboutir à une prise de conscience collective quant à la nécessaire participation avec intelligence à ce genre de conflits.
Il est utile de préciser que l'article traite la question de la communication essentiellement du point de vue de la polémologie. Traditionnellement la guerre politique désigne les opérations, couvertes ou ouvertes, conçues pour supporter les politiques, les projets ou les objectifs nationaux. Elle a lieu en temps de paix, de crise et de guerre. Elle constitue un savoir faire acquis et pratiqué par les Etats et les organisations. Aujourd'hui encore, la pénétration et la subversion politico-psychologique contre d'autres pays ainsi que contre des organisations et des mouvements internationaux demeurent une caractéristique majeure de l'environnement stratégique internationale. Les opérations politiques et psychologiques ne sont pas seulement dirigées contre les adversaires.
Non seulement les nations neutres, mais aussi les nations amies et alliées constituent des cibles très importantes. Elles peuvent êtres ouvertes ou couvertes, mais dans les deux cas elles doivent fournir au public ciblé des raisons plausibles et convaincantes pour l'amener à s'identifier à des objectifs prédéterminés.
La « guerre politique » est une catégorie générale d'activités englobant trois fonctions : « l'action politique », « la diplomatie coercitive » et « la guerre politique couverte ». En général, la première de ces fonctions est exécutée par le personnel diplomatique, la seconde par les personnels militaire et diplomatique, la troisième par le personnel des services secrets. L'action politique a trait à certaines activités incluant la diplomatie multilatérale, le support à des forces et parties politiques étrangers, et le support à ou le travail avec des associations internationales. La diplomatie coercitive fait référence à la diplomatie et présuppose l'emploi - ou la menace d'emploi - de la force armée pour l'achèvement d'objectifs politiques. La guerre politique couverte correspond aux opérations de soutien aux révoltes et insurrections, contre les alliances ennemies, d'influence, et de propagande noire.
Les «opérations psychologiques - PSYOP» sont les activités classiques d'actions psychologiques ouvertes ou couvertes réservées en principe aux militaires. Elles peuvent avoir lieu en temps de paix ou de guerre/conflit au niveau tactique, opérationnel ou stratégique. Les «PSYOP de consolidation» ou les «actions civiles - CA» servent à sécuriser la loyauté et la coopération des populations civiles dans les zones de combat. Les «affaires publiques - PA» sont des activités d'information et de formation des troupes en vue de les protéger contre les actions psychologiques ennemies.
La «communication internationale» concerne l'information ainsi que la formation et la culture au niveau international à travers notamment les chaînes TV, Internet et la presse imprimée ainsi que les programmes d'Etat à Etat, culturels et de formation. Elle concerne aussi les affaires humanitaires et l'aide internationale - l'aide économique et au développement, l'assistance humanitaire lors de désastres et de famines, l'assistance technique, etc. Une question reste controversée - celle de savoir dans quelle mesure les activités culturelles et de formations serviront-t-elles réellement les buts politiques assignés au niveau stratégique? Il en est de même de la question de l'autonomie des opérations d'information par rapport aux autres instruments de la stratégie nationale. Malgré que ces opérations aient principalement un aspect humanitaire, elles ont aussi un aspect politique et psychologique. Elles servent, sur le long terme, d'instruments à la diplomatie et à la stratégie.
L'aspect psychologico-politique est à la base de tout emploi des instruments politiques, économiques et militaires de la puissance nationale. L'issue des négociations politiques de toutes sortes dépendent pour beaucoup d'une profonde compréhension de la psychologie individuelle et de groupe de la partie adverse. De même, l'exercice du commandement militaire implique l'évaluation du niveau psychologique et de la vulnérabilité du commandement ennemi et de ses forces - la déception est au cœur de l'art militaire. La puissance militaire et économique donne du poids à la puissance politique, qui peut être exploitée de diverses manières pour faire avancer les objectifs nationaux.
La communication est à la base de toute action stratégique
La communication stratégique contribue à la fabrication d'une bonne image de notre pays auprès des opinions nationales et internationales, et ainsi à la capacité de persuasion et d'influence de nos gouvernants auprès de ces opinions. Mais attention la création d'une bonne image du pays n'est pas une fin en soi, elle doit servir à l'atteinte des objectifs culturels, diplomatiques, économiques, sociaux ou sécuritaires tracés par nos hauts responsables.
A tout acteur - un individu, une organisation, ou un pays - est associée malgré lui, pour le meilleur ou pour le pire, une image. Le meilleur est atteint quand l'acteur s'active à élaborer une bonne image de lui-même pour la projeter aux différents publics ciblés. Le pire est subi quand l'acteur laisse au gré du hasard et des circonstances la construction de son image, ou pis encore quand ce sont les compétiteurs et les adversaires qui l'élaborent pour lui. Exprimé autrement, on peut dire qu'il n'existe pas d'événements économiques, sociaux, politiques ou sécuritaires dont les effets sur la réalité soient indépendants de l'interprétation qui en est faite. En conséquence, donner du sens aux faits réels est indéniablement l'une des formes de la guerre moderne. En d'autres termes, le management des perceptions vis-à-vis des événements réels constitue une dimension fondamentale des nouveaux affrontements mondiaux.
La communication, elle-même, dépend de nos manières d'emploi des médias traditionnels (chaînes TV, stations radios, presse imprimée) et des nouveaux, i.e. les nouvelles technologies de l'information et de la communication (Internet, sites Web, réseaux sociaux, Chaînes TV sur Internet, téléphonie mobile, etc.). L'Algérie sera toujours confrontée à une multitude de défis au niveau intérieur, régional et international. Aussi, il lui est nécessaire de disposer de médias nouveaux et traditionnels puissants. Or il ne peut exister de médias puissants sans l'existence au minimum de sites web et de chaînes de télévisions, publiques et privées, puissantes. En l'absence de ces dernières, les sites et chaînes satellitaires étrangers, surtout celles hostiles à notre pays, pénètrent les foyers algériens en vue de dénaturer notre image et de menacer nos intérêts. A ce propos, un sondage Immar d'avril 2019 répartissait les populations algériennes quotidiennement exposées aux médias, comme suit : téléspectateurs : 18 millions ; internautes : 17 millions ; médias sociaux : 15,5 millions ; auditeurs : 3 millions ; lecteurs : 2,6 millions.
Mais, comme déjà relevé, les actions de communication sont à double tranchant - elles peuvent servir à l'atteinte des politiques et projets nationaux, mais elles peuvent aussi servir les desseins d'acteurs ennemis ou concurrents mal intentionnés. Plus globalement, des pays tiers sont tentés au moyen de la communication de : Primo, mener des actions d'influence culturelles et politiques pour entamer la stabilité et la cohésion sociales de notre pays ; Secundo, mener des actions d'influence économique ou d'intelligence économique pour imposer à notre pays leurs produits et services, et ainsi nous maintenir dans une situation de dépendance économique et de sous-développement.
L'arrivée à maturité des technologies de l'information et de la communication pose un problème de choix stratégique à nos responsables. Le rôle des médias, publics et privés, dans les affrontements présents et à venir est tel, qu'aucun Etat ne songera sérieusement à s'engager dans un quelconque conflit sans leur apport et appui. Il faut souligner, ici, le rôle des chaînes de télévision satellitaires lors des affrontements armées - en Afghanistan, Irak, , Yémen, Syrie , Libye - du début de ce siècle, où les publics n'ont pas eu vent de la réalité des agressions guerrières impérialistes, mais une version des faits fabriquée par les spin doctors des pays agresseurs.
L'emploi par certaines puissances étrangères des technologies de communication dans le cadre d'attaques informationnelles contre nos intérêts politico-économiques constitue un nouveau défi pour l'Algérie, qui appelle une vigoureuse réponse, somme toute nécessaire et légitime, de la part de notre gouvernement. En fait, l'Algérie peut se battre avec succès dans la guerre des idées, néanmoins elle doit pour cela, se fixer des objectifs clairs et s'appliquer à les concrétiser avec détermination et courage. Elle doit consentir un effort constant de long terme sur la voie du développement de son arsenal communicationnel en faisant appel à toutes les compétences. La construction de la puissance politique et culturelle de notre nation implique la conjugaison de toutes les forces.
Analyse et recommandations
L'article, ne prétendant pas épuiser la problématique, suscitera sûrement quelques questions de fond : Comment l'Algérie peut intelligemment répondre aux challenges et défis de la communication stratégique? Quelles opportunités existent pour l'Algérie dans ce domaine lui permettant de faire prévaloir ses propres intérêts? Quelles sont les leçons à tirer du passé? Quelle est la situation actuelle? Quels sont les obstacles conceptuels, politiques, culturels et bureaucratiques à une planification et à un emploi efficace de nos potentialités humaines et technologiques en matière de communication stratégique? Mais à ce stade, il est permis d'avancer quelques recommandations :
1/ Afin d'assurer une planification et une conduite organisées en matière de communication stratégique, il est impératif de consolider le leadership national en la matière. En effet, la direction, la planification, et la coordination des opérations de communication doit être en tout temps de la responsabilité des plus hautes instances gouvernementales.
2/ L'intérêt national serait mieux sauvegardé en impulsant les recherches et les études en matière de communication stratégique : Elaborer régulièrement des études et analyses en rapport avec la sécurité nationale au profit des décideurs, portant sur les opinions publiques globaux, les idées et tendances, les tendances des médias importants locaux, régionaux et internationaux ainsi que leurs influences sur les opinions, les développements en technologies des informations et communication, etc.
3/ L'institution d'une formation en «communication stratégique» au profit des décideurs de haut rang dont les postes de responsabilité ou l'activité réclament des connaissances en la matière. Cette formation procurera à nos hauts fonctionnaires des connaissances sur les ressorts des nouveaux médias, la guerre cognitive, les opérations psychologiques et la communication stratégique ainsi que des connaissances aux fins de l'atteinte des objectifs nationaux.
4/ Renforcer les missions du Ministère des affaires étrangères dans le domaine de la diplomatie publique - construction de relations réceptives à notre culture et à nos valeurs avec les publiques d'autres nations à travers l'échange de personnes, d'expériences et d'idées. La diplomatie publique cherche aussi à influencer les attitudes de ces publics pour les amener à supporter les objectifs et les intérêts de notre pays.
5/ Renforcer les capacités nationales dans le domaine des communications propre à l'intelligence et aux affrontements économiques par, notamment, le renforcement des actions de nos représentations à l'étranger dans leurs activités de promotion de la production nationale, des actions offensives en direction de nos populations les incitant à privilégier l'achat de produits nationaux, l'accroissement de la présentation de nos produits et services dans les foires et les manifestations économiques internationales, etc.
6/ Développer davantage les capacités nationales en matière d'industrie spatiale par, d'une part la mise en orbite de nouveaux satellites algériens de communication, et d'autre part l'accroissement des compétences et expertises en matière de technologies spatiales.
7/ Accroître les capacités nationales en matière de production d'informations et de statistiques économiques en termes de qualité et de quantité, ainsi qu'en matière de management de l'information et de la connaissance.
8/ Accroître substantiellement l'aide financière et l'accompagnement au profit des journaux électroniques, des sites web et des chaines TV privés nationaux.
*Ancien cadre du Ministère de la Défense Nationale et de l'ex. Ministre de la Prospective et des Statistiques, Actuellement consultant-formateur en management.
par Kamel Garoui
Ancien cadre du Ministère de la Défense Nationale et de l'ex. Ministre de la Prospective et des Statistiques, Actuellement consultant-formateur en management.
A chaque fois qu'un acte criminel perpétré est relié de près ou de loin à des motivations religieuses pour ne pas dire islamiques surtout quand l'horreur le dispute à la consternation comme ce fut le cas pour la condamnable décapitation de l'enseignant Samuel Paty par un refugié tchétchène, toute la communauté musulmane de France se retrouve dans de beaux draps, contrainte de vivre avec la peur au ventre durant tout le temps que le crime en question occupe les esprits et les médias surtout. Alors, tout ce qui a un lien avec la religion musulmane devient (ir)réellement le point de mire de la nation éplorée, musulman pratiquant ou pas, barbu ou rasé de près, vêtu de qamis ou col blanc, burkini ou bikini, intello ou simple ouvrier d'usine, naturalisé ou simple résident, nouveau débarqué ou beur de l'ultime génération, utile à la France ou pas, baptisé ou arborant son prénom musulman comme un stigmate en l'occurrence, laïc, agoniste, déiste ou athée, tous sont coupables d'appartenir à la confession musulmane même s'ils s'égosillent à longueur d'année à apporter de l'eau au moulin de la République.
Tous se recroquevillent durant tout le temps que la tension est maintenue au summum, ils rasent les murs, se font tout petits, pestent contre le coreligionnaire qui a réveillé les démons patents du racisme et de l'islamophobie. On veut se renier, se convertir momentanément au christianisme, au judaïsme ou encore au bouddhisme pour être fréquentable, innocent et intégrable. La peur au ventre ne laisse point de place aux délices de la nourriture, aux lumières de Paris ; on étouffe dans ce décor tout à coup redevenu gothique et l'on voit partout des policiers prêts à bondir sur vous pour vous inculper d'homicide de Français. On s'impose un couvre-feu, on s'autocensure et se confine à loisir. Les victimes de Charlie Hebdo refont surface et leur journal redevient prisé, très vendable et les sinistres caricatures par qui l'islamophobie croit triompher sont (re)prises d'assaut et exhibées lors des rassemblements et les hommages subséquents.
La peur au ventre fait oublier la démocratie et les droits de l'homme, vous donne envie de réécrire l'histoire, replonger dans le passé avant l'affaire de l'éventail et envisager une vie en terre natale sans déchirement ni reniement. Tant que la tension est à son paroxysme, on s'en veut d'être là, on se trouve lâche de s'être expatrié, d'être proie aux caprices du destin. La nostalgie vous happe et en rajoute à la peur au ventre qui est l'unique lot de tous ceux qui sont liés de près ou de loin à l'islam là-bas. Il ne faut surtout pas se montrer dans les rassemblements où l'on rend hommage au défunt, il ne faut pas non plus se joindre aux pétitionnaires et signer je suis prof' car le nom aux consonances musulmanes est plausiblement rejeté, car en pareilles circonstances il ne fait bon être musulman dans l'hexagone. Même les nouveaux convertis adoptent un profil bas et vivent eux aussi avec la peur au ventre en dépit du bleu qu'ils ont dans les yeux.
2020 10 22 par Hatem Youcef
http://www.lequotidien-oran.com/?news=5294843
Complaisances
Généralement opposés à toute atteinte au principe sacro-saint de la liberté d'expression, de nombreux pays considérés comme berceau de la démocratie et des libres penseurs commencent à réaliser que le chaos n'est jamais bien loin quand on lâche la bride au discours, notamment en cette ère de généralisation de l'outil technologique qui offre une tribune ouverte aux bons et aux mauvais esprits. Ainsi, ces pays commencent à le dire sans ambages, le tri de l'information sur les réseaux sociaux, voire la censure purement et simplement de certains contenus jugés dangereux, haineux, surtout, sont indispensables. Pas sans faire de vagues, bien sûr, au sein d'une certaine classe politique qui continuait à plaider mordicus pour une liberté d'expression absolue avant que ses voix ne se font très discrètes, pour ne pas dire s'éteindre totalement, depuis qu'on parle uniquement de la censure de contenus qui propagent la radicalisation islamiste, qui font l'apologie du terrorisme ou propagent une haine toujours drapée de l'islamisme radicale ou encore quand il s'agissait d'interdire les contenus niant l'holocauste.
Malgré une certaine évolution, donc, dans le sens d'un nécessaire balisage réglementaire, le discours ou l'expression à bannir obéit à un choix très sélectif, pratiquement lié à celui développé par les islamistes radicaux et les réseaux qui font l'apologie du terrorisme. Des pays musulmans, dont l'Algérie, qui ont été les premiers à souffrir de l'exploitation religieuse à des fins apocalyptiques et engager une lutte sans répit, sur tous les fronts, contre ce visage haineux de l'islamisme radical et la barbarie terroriste, n'ont pas échappé aux critiques émanant de ces mêmes pays qui, aujourd'hui, trouvent qu'il faut agir pour neutraliser les islamistes radicaux.
Sans contrebalancer dans la même direction des donneurs de leçons, reconnaissant sincèrement la souveraineté des Etats à établir leur propre législation, il serait quand même plus équitable de faire preuve de plus d'égard aux musulmans qui ne sont pas tous des chantres de la radicalité ni des terroristes en force. Car, comme le rappelle le dernier odieux attentat de l'enseignant décapité en France, à chaque crime terroriste on fait subir aux musulmans le calvaire, leur déniant outrageusement jusques et y compris la liberté du culte. La liberté d'expression, comme toute liberté, s'arrête là où commence la liberté de l'autre. Seule la liberté d'expression dans le respect mutuel des valeurs religieuses et culturelles des autres peut construire un monde libre et harmonieux.
A quoi arrivera-t-on, au nom de la liberté d'expression, si chaque groupe commence à exposer des caricatures humiliantes sur les croyances religieuses, culturelles ou historiques des peuples ? Tout acte terroriste étant injustifiable et condamnable sous toutes ses formes, la liberté de publier des caricatures du prophète Mohamed (QSSL) pourrait dans l'esprit de cette liberté d'expression prônée autoriser la publication de caricatures autant humiliantes de tous les autres prophètes, ainsi que Bouddha, les vaches et la Shoah. En 2001, la destruction (en Afghanistan) par les talibans d'un symbole religieux culturel, en l'occurrence les statues géantes de Bouddha, avait provoqué un tollé international et a été unanimement condamnée. Liberté pour les uns d'humilier un symbole religieux, interdiction pour les autres de détruire des statues qui n'ont pas lieu d'exister dans leur croyance religieuse ?!
«La Maquisarde» de Nora Hamdi questionne la place des femmes en temps de guerre dans ce huis-clos carcéral entre une paysanne et une Française pro-FLN, résistante sous l’Occupation.
En 1956, dans l’est de la Kabylie, pendant la guerre d’Algérie, la jeune Neïla (Sawsan Abès) fuit son village ratissé par les soldats français et se réfugie auprès d’un groupe de maquisards. Faite prisonnière par l’armée coloniale au cours d’un combat, elle est enfermée dans un camp d’internement où s’organisent la torture et l’exécution de femmes algériennes, et partage sa cellule avec une infirmière française, Suzanne (Emilie Favre-Bertin), engagée du côté du FLN. La Maquisarde de Nora Hamdi se concentre dès lors sur le huis-clos de leur dialogue, la rencontre entre une très jeune paysanne soudain projetée dans la guerre, et une Française un peu plus âgée, marquée par l’expérience de son engagement, quelques années plus tôt, dans la résistance contre l’occupation nazie et la collaboration. C’est leur alliance, leur entente profonde, le temps de quelques jours suspendus à un sort incertain, qui intéresse Nora Hamdi, et elle filme cette situation comme un morceau d’histoire à écrire, esquissé sur fond de multiples trahisons : celle, au présent du film, d’une «France libre» redevenue république, vite repartie torturer et tuer en Algérie, ou celle, au futur et en filigrane, d’une Algérie indépendante qui oubliera vite la place centrale des femmes dans les combats de la décolonisation (comme la France, d’après le personnage de Suzanne, l’oubliait après 1945 dans ceux de la Résistance).
Le film est avant tout un appel à repenser cette histoire imbriquée, et il fictionne cet appel dans une forme convenue, téléfilmique - en même temps que son petit budget de cinéma guérilla, autoproduit, lui donne cet aspect non industriel, spontané et obstiné, voire généreux, existant sans avoir été commandé par aucune chaîne de télévision réelle. la Maquisarde, en ce qui concerne l’attention concrète qu’un film porte ou non à ses personnages, flotte dans une sorte d’abstraction, d’intention, où les idées priment sur les plans, les gens et les choses ; reste que ces idées, le film travaille sous nos yeux à se les faire, à leur débroussailler un chemin à travers les contradictions violentes de l’histoire distincte et commune de deux pays, et y semble poussé par une nécessité absolue. Si, d’après l’écrivain Heiner Müller, «la torture est plus facile à apprendre que la description de la torture»,la Maquisarde refuse de reculer devant la difficulté de décrire, et s’y atelle avec les moyens du bord.
Ninja’ anti-terrorist unit in Algiers, Algeria on October 28, 1993. (Photo by Pool MERILLON/TURPIN/Gamma-Rapho via Getty Images)
C'st la presse impérialiste qui a mis au devant de l’actualité la situation algérienne, en ce deuxième semestre de 1993. Le cycle macabre de la répression et des assassinats intégristes a connu des moments plus importants, et la tentative, jusqu’à son éviction fin août 1993, d’échapper au diktat du Fonds monétaire international (FMI) par le populiste Bélaïd Abdesselam a passé inaperçu hors du pays. Mais il y a plus préoccupant que l’assassinat de deux dizaines d’intellectuels francophones et l’enlèvement de trois français dans un pays qui compte les morts et les déportés par milliers, les torturés par centaines, les condamnations à mort par dizaines. Les hommes ne naissent décidément pas égaux.
En acceptant de promulguer un code des investissements en faveur des impérialistes et de supprimer à la fin de l’année le comité ad hoc qui contrôlait les importations, le régime algérien est maintenant assuré de la solidarité d’un large front “humanitaire” international contre les intégristes.
La fuite en avant dans la répression après la mise en place du Haut comité d’Etat (HCE) et l’arrêt des élections du 26 décembre 1991 étaient d’abord accueillis par le silence. Impuissance du camp intégriste, absence d’une troisième force malgré le succès du rassemblement du 2 janvier 1992 à l’appel du Front des forces socialistes (FFS), tel était le cadre politique à l’époque.
Puis, on s’est habitué à la routine macabre de l’assassinat quotidien de gendarmes du rang et de leurs proches, au rite odieux des aveux télévisés des coupables présumés très vite arrêtés, aveux trop rapides pour ne pas laisser craindre de sévices physiques. La Ligue de défense des droits de l’homme parle de dizaines de cas de tortures. Le chemin de l’horreur a eu ses grands carrefours. L’assassinat de Boudiaf, président du HCE, en juin 1992, qui réveillait la crainte de la guerre civile et du chaos, sortait le pouvoir de son isolement et lui permettait de recueillir l’adhésion des partis modernistes et de secteurs des masses populaires.
Les chemins de l’horreur
L’attentat à la bombe de l’aéroport et le spectacle odieux de débris humains faisait basculer l’opinion contre le Front islamique du salut (FIS). Le meurtre de l’ancien ministre de l’Enseignement supérieur, le sociologue Liabes, au printemps 1993, marquait le début des attaques contre les civils qui ont généralisé la peur.
Puis, c’est la mort absurde d’intellectuels francophones, de l’écrivain et journaliste Tahar Djaout au professeur de psychiatrie Boucebci qui a alerté les intellectuels et les Etats européens.
Alors que le pouvoir et ses amis pensaient en avoir fini avec les attentats et déclaraient le “dernier quart d’heure arrivé”, (reprenant la formule célèbre d’un gouverneur général pendant la guerre d’Algérie) il y a eu de nouvelles victimes, parmi elles, le journaliste Smail Yefsah, dont la mort a causé une émotion unanime.
Complot soudanais ou iranien, entreprise néocoloniale de la France, actions de déstabilisation de services secrets algériens et de la “mafia politico-financière”, opération israélienne, les commentateurs modernistes se sont égarés bien souvent. Les milieux intégristes mettaient en avant la fiction d’une armée islamique commandée par “le général Chebouti” appuyé sur une diplomatie civile basée à l’étranger.
En réalité, les branches armées du FIS, comme El-takfir wal Hijra, ont été pour l’essentiel démantelées par la répression préventive de juin 1991 pendant l’état de siège et au lendemain de l’arrêt des élections. Les désertions de militaires ont été rares. Dans l’immense mouvance militante du FIS, quelques milliers d’activistes se sont impliqués dans des opérations militaires désordonnées sans coordination réelle, même si certains chefs militaires comme Layada ont émergé.
Parce que l’intégrisme est un mouvement essentiellement urbain, sans grande base rurale, il n’a pas pu stabiliser de maquis. Les implantations dans les montagnes proches d’Alger, notamment à l’est au Zbarbar dans la région de Lakhdaria et au sud dans la montagne de Chréa sont le fait d’éléments extérieurs venus de la ville rançonner la population locale. La preuve en est que la région kabyle, quasi unanimement hostile au mouvement intégriste, est souvent citée comme maquis. L’inaccessibilité de certaines zones montagneuses a encouragé les groupes intégristes à se réfugier, tel les anciens d’Afghanistan découverts à Bougaa en petite Kabylie, dans une région que les dispositifs policiers ne prenaient pas en compte.
Les groupes armés islamistes
Si on excepte quelques embuscades, et les rares opérations d’ “envergure”, attentats contre Boudiaf, contre Kasdi Merbah, l’un des hommes les mieux gardés du pays, ou la tentative contre le général Nezzar, ministre de la Défense, les actions entreprises sont des assassinats de civils ou de gendarmes isolés sur leur itinéraire quotidien. On déclare trois mille morts depuis deux ans ; parmi eux, il y a autant de chauffeurs de taxi que de journalistes ; il y a notamment plusieurs dizaines de délégués communaux désignés pour remplacer les municipalités FIS dissoutes.
Ces attentats sont le fait de petits groupes autonomes se reconnaissant dans Layada Chébouti et dans le Mouvement islamique armé (MIA). C’est l’émir du groupe qui prend les décisions et désigne les cibles. L’impuissance sur le plan militaire conduit à privilégier les cibles faciles : gendarmes prenant leur café, fonctionnaires allant faire leurs courses, responsable sortant de son appartement dans une cité populaire. Cette violence assassine devenue banale se tourne vers des cibles plus sensibles susceptibles de provoquer la médiatisation maximale. Selon la police, les assassinats d’intellectuels et de journalistes seraient presque tous l’oeuvre macabre d’un seul groupe dont le chef, Ras el Ghorab, court toujours. Récemment, les Groupes islamiques armés (GIA) et le mouvement de Mekhloufi, déserteur de l’armée, se sont à leur tour spécialisés dans ce type d’opérations.
Sur le plan strictement militaire, les intégristes ne constituent pas une menace. L’attaque d’un petit poste militaire à Bougzoul au sud d’Alger ne s’est pas répétée ailleurs. C’est au plan politique que le pouvoir s’inquiète. Même si la violence intégriste fait l’objet d’une réprobation générale, elle n’en terrorise pas moins le population qui se réfugie dans une prudente neutralité. Et si l’on attribue si souvent les assassinats à des forces occultes au sein du pouvoir, c’est aussi pour éviter d’affronter les intégristes de son quartier.
Les attentats obligent les policiers et d’une façon générale les représentants de l’Etat à déserter leur domicile et leur quartier et à ne se montrer que nombreux et bien protégés. Pour assurer la présence et l’autorité de l’Etat, il faut des barrages et des ratissages qui provoquent la grogne, aussi le pouvoir n’en abuse-t-il pas.
Aux surenchères des éradicateurs – ces ex-démocrates nouveaux pieds-noirs qui demandent que les quartiers populaires, tous fiefs intégristes, soient écrasés -, le pouvoir répond qu’il ne veut pas nourrir politiquement et socialement un mouvement qu’il combat militairement. A l’inverse, l’inconséquence des intégristes provoque leur discrédit. Jugés coupables de l’insécurité, on ne leur pardonnera pas de s’attaquer à des faibles, à des sans grades ou à des voisins de palier et les centaines de hold-up, les usines incendiées leur coûteront cher, politiquement parlant.
Les récents ratissages monstres dans les quartiers d’Alger, démonstration de force sans grande efficacité répressive, ne suscitent aucune protestation tant ils semblent rassurants et justifiés par la situation.
L’impasse économique
Pour les gouvernements qui se sont succédé depuis la montée intégriste, la même équation reste à résoudre. Comment mettre en place “l’économie de marché” exigée par le FMI et souhaitée par les classes possédantes locales sans effondrer l’économie. Car il n’est pas question d’élargir le cercle du désespoir social dont se nourrit l’intégrisme.
Le problème est qu’avec 7 à 9 milliards de dollars de remboursement annuels qui représentent plus de 70 % des recettes d’exportation, le régime a besoin de crédits massifs chaque année. Les deux tiers des produits alimentaires sont importés et l’ensemble des secteurs économiques dépend d’importations vitales de pièces détachées. Dévaluer le dinar provoque un accroissement de la misère et un mécontentement qu’engrange l’intégrisme (1).
Libéraliser les importations comme l’exige le FMI provoquerait comme en Allemagne de l’Est et en Pologne l’effondrement immédiat d’un secteur industriel, certes dépendant et peu performant mais non négligeable. Il n’y aurait plus d’avenir pour les aciers, les camions, téléviseurs, wagons, engins de travaux publics algériens, aucun espoir pour le textile et la chaussure, déjà sévèrement concurrencés par le trabendo, cette contrebande massive par les valises des voyageurs. Et c’en serait fini de ces complexes industriels de milliers de travailleurs qui structurent le paysage social du pays.
Aussi les différents gouvernements n’ont fait que des promesses sur ce terrain, reportant le saut dans le vide. Le gouvernement Ghozali n’a dû sa survie qu’à l’injection de capitaux impérialistes dans l’exploitation pétrolière dont ils avaient été écartés depuis les nationalisations de 1971.
Guerre civile larvée
C’est ce refus du coût social de la libéralisation à marche forcée, en pleine guerre civile larvée, qui explique la désignation par les militaires de Bélaïd Abdesselam, le père de l’industrialisation des années 70, au lendemain de la mort de Boudiaf. Dans l’opposition, Bélaïd proposait, à contre-courant des réformateurs libéraux, une économie de guerre qui se satisferait d’importations minimales sans continuer à emprunter. Chef du gouvernement, il met de l’eau dans son vin. Il ne s’agit plus que d’hiberner de trois à cinq ans en réduisant au mieux les importations, en attendant que le service de la dette se réduise à moins de 40% des recettes d’exportations.
L’Algérie a versé 26 milliards de dollars en quatre années, intérêt et capital pour une dette dont le montant ne cesse de progresser, passant de 24 à plus de 26 milliards (dette militaire non incluse). Bélaïd comptait s’en sortir avec le doublement des capacités d’exportations en gaz naturel prévu pour 1996. Justement le FMI et les créanciers ne pouvaient le laisser atteindre ce rivage.
Les Français notamment exigeaient que l’Algérie en passe par le rééchelonnement pour que les conditions posées soient claires et que ne soit laissée aucune échappatoire. Au gouvernement algérien qui demandait qu’il soit tenu compte de sa situation de bon payeur, Camdessus (?) rétorque en ricanant : « Qui paye ses dettes s’enrichit, mais le FMI n’aidera que ceux qui ont un programme de réformes ». Entendez bien sûr, un programme de suicide économique et de capitulation devant les maîtres impérialistes.
Dans un discours fleuve qui réveille l’anti-impérialisme enfoui dans la conscience des masses algériennes, Bélaïd conte par le menu les entretiens avec Camdessus : une dévaluation qui diviserait par deux les revenus populaires, une exigence d’équilibre budgétaire qui interdirait au gouvernement de financer les entreprises publiques toutes déficitaires, une ouverture du marché national et un avantage financier dérisoire de 1,5 milliard de dollars de plus puisque les crédits déjà obtenus seraient supprimés dès l’accord de rééchelonnement.
Les promesses d’ouverture de zones franches et de facilités aux investisseurs étrangers ne se concrétisent pas, option affichée d’un libéralisme piloté et prudent, tout cela mécontente le FMI.
Chute de Bélaïd …
Assiégé par les assauts des libéraux qui, de Aït Ahrned qui le taxe de bolchevisme au patronat qui l’accable d’une campagne virulente dans les colonnes des nombreux journaux “indépendants” utilisant même les services de la bureaucratie syndicale, Bélaïd a été rejeté par les classes possédantes depuis l’impôt sur le patrimoine qu’il osait proposer dans un pays habitué à ne rançonner que les salariés. Pourtant, son autoritarisme l’isole des masses travailleuses dont il contient et réprime l’expression et qu’il afflige de mesures disciplinaires draconiennes dans les entreprises d’Etat. Par ailleurs son incapacité à relancer l’économie ne donne aucun motif d’espoir aux masses populaires et à la jeunesse au chômage.
Son populisme sans le peuple ne pouvait réussir. Et la baisse du prix du baril cet été le prive de 1,4 milliard de dollars de recettes escomptées. Son style cassant heurtait tous les interlocuteurs et l’isole à un moment où le pouvoir traverse une phase délicate : l’approche de la fin du “mandat” du HCE. Il a été limogé à quelques mois de cette échéance de décembre 1993. Le gouvernement de son successeur Redha Malek s’efforce de rassurer les créanciers et les classes possédantes. La nomination de Benachenhou, ancien fonctionnaire du FMI, comme ministre de l’économie, est un gage d’apaisement.
Partisan du libéralisme, qu’il préfère non désindustrialisant dans ses doctes rêveries de professeur d’économie, il préconise d’aller vers le rééchelonnement de la dette. Mais dans le monde réel, on ne lui laisse pas le choix et les militaires ne peuvent accepter le chaos social à la veille de la mise en place de la succession au HCE. Aussi le mot tabou de rééchelonnement est exclu et tant les médias nationaux que les créanciers impérialistes abandonnent leur campagne frénétique et s’inquiètent du sort des masses algériennes. Mais ce qui nous gêne n’est pas tant le rééchelonnement comme report de remboursement que les conditions humiliantes dans lesquelles il aura lieu et leurs conséquences dramatiques.
Un plan d’ajustement est déjà en cours. Un code des investissements est promulgué offrant des avantages fiscaux appréciables, la garantie de rapatriement des capitaux, des facilités administratives sans aucune contrepartie de réinvestissement ou autre, il autorise des zones franches qui par définition affranchissent l’investisseur impérialiste de respecter les lois du travail, de payer l’impôt et de solliciter quelque autorisation que ce soit. La libéralisation des importations est annoncée pour la fin de l’année et le dinar serait dévalué. Bien sûr, le ministre de l’Economie reste discret depuis son retour de Washington. Il s’agit surtout de ne pas empêcher les partis qui “dialoguent” en ce moment avec le pouvoir de continuer à discuter du sexe des anges et de la désignation d’instances destinées à faire de la figuration dans la période à venir.
… et ajustement structurel
L’artifice juridique conçu en janvier 1992, consistait en la désignation d’une structure collégiale, le HCE, pour achever le mandat du président démissionnaire. Hors son mandat s’achève fin décembre 1993 et les militaires savent qu’il ne peuvent toujours pas affronter victorieusement les urnes.
Il a donc été décidé d’une “transition” de 3 à 5 ans qui continuerait l’ordre anti-démocratique actuel. A cette différence près qu’il n’y a plus d’artifice juridique. Cette parenthèse explicitement hors du cadre de la constitution, a intérêt à s’entourer du maximum de caution morale. Référendum, conférence des partis, structure de surveillance de la transition l’accessoire est admis à la discussion. Entre les “éradicateurs” républicains qui refusent le risque d’un référendum et demandent l’interdiction des partis islamistes, et les “réconciliateurs”- qui avec le FLN, le FFS d’Aït Ahmed, Ben Bella et les islamistes modérés de Hamas et d’Ennahda demandent des gestes d’ouverture du pouvoir et l’association du FIS au dialogue – une lutte inégale fait rage. Les éradicateurs, au poids électoral dérisoire, disposent néanmoins de l’appui de la presse.
Il y va, bien sûr, de la crédibilité des institutions de l’après-HCE. Pour l’instant, le HCE et la Commission nationale du dialogue composée de plusieurs généraux et dignitaires du régime s’en sort bien. Dans leurs communiqués, ils disent avoir reçu 41 partis, qui seraient tous d’accord pour le bien et les grands principes sacrés de la nation. Par contre, on ne sait toujours pas si les concessions de pure forme seront suffisantes pour arracher l’adhésion du FFS et de quelques autres à la Conférence nationale qui se prépare.
Le front social se réveille
La crise politique et le climat morbide provoquent bien évidemment un repli des lutte sociales. Les secteurs qui s’engagent dans un processus revendicatif malgré l’état d’urgence et les circulaires draconiennes, sont vite découragés par une nouvelle vague d’assassinats de civils. C’est le cas à cette rentrée des enseignants du supérieur en grève nationale pendant qu’on enterre Yefsah, c’est ce qui conduit les travailleurs de la maintenance d’Air Algérie à retirer leur préavis de grève. Mais c’est tout de même par centaines qu’on compte les conflits sociaux comme cette longue grève de l’EBA.
Mais soudain, cela s’accélère, grève nationale des fonctionnaires, préavis de grève pour le 6 décembre de l’ensemble de la zone industrielle de Rouiba qui regroupe des dizaines de milliers de travailleurs, grève nationale d’une semaine des travailleurs de l’éducation, appels de structures syndicales pour une journée de protestation, campagne contre le paiement de la dette. Benhammouda, secrétaire général de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), naguère instrument des campagnes libérales contre Bélaïd, engage une campagne contre le remboursement de la dette « que se sont appropriées les couches dirigeantes ». Si ce n’était le discrédit d’une direction syndicale qui s’est compromise dans l’appel au coup d’Etat et dans le soutien à chacun des gouvernements qui se sont succédé et les vagues de répression syndicale qui ont grandement contribué à éclaircir les rangs des adhérents, l’UGTA serait le cadre de la recomposition politique dans le mouvement de masse et offrirait une perspective.
Le chemin est encore long. Raison de plus pour ne pas perdre une minute et s’engager avec tous ceux qui veulent résister au plan du FMI, résister à l’agression libérale et bâtir une alternative au service des démunis, au service de l’humanité.
Alger, 26 novembre 1993 Chawki Salhi
07/09/2020
Article de Chawki Salhi paru dans Inprecor, n° 375, décembre 1993, p. 4-6
Documentaire "Les escadrons de la mort: L'École Française" qui explique les techniques utilisé par les gouvernements pendant les Guerres Civiles. Technique utilisé par l'Armée algérienne et le DRS pendant la Guerre Civile des années 90
France 3 Iroise - Témoignages Appelés Guerre d'Algérie
Interviews en longueur de Laurent Laot, Yvon Cuzon et Jean Miossec. Ils témoignent sur l'importance de "libérer la parole" des appelés de la guerre d'Algérie. Ils participent le 5 février 2014 à un débat à Landerneau. 20h30 salle municipale
Deux formidables romans inspirés d’une histoire familiale heurtée par la guerre d’Algérie paraissent cet été. Ils témoignent sans nostalgie de ce que furent la vie quotidienne et le départ de ceux que l’on a longtemps appelés «pieds noirs».
La guerre d’Algérie est devenue un thème incontournable des rentrées littéraires. Le temps aurait pu faire son œuvre et panser les plaies, il n’a fait que léguer les traumatismes aux enfants ou petits-enfants des principaux acteurs de ces années sombres même si, désormais, les blessures sont moins à vif. La parole et les souvenirs se libérant, les nouvelles générations éprouvent le besoin de raconter ou revisiter sous forme de fiction ce qui leur semble être un élément fondateur de l’histoire familiale, voire une pièce maîtresse de leur propre histoire. On se souvient du magnifique Un loup pour l’homme, de Brigitte Giraud (Flammarion, 2017) qui racontait l’histoire du père de l’autrice, appelé en Algérie, du très beau l’Art de perdre, d’Alice Zeniter (Flammarion, 2017) qui retraçait l’histoire du grand-père harki de l’écrivaine ou du foisonnant Dans l’épaisseur de la chair, de Jean-Marie Blas de Roblès (Zulma, 2017), qui narrait sous forme d’épopée l’histoire familiale algérienne. Même le roman noir a fini par s’emparer du sujet avec, notamment, Tu dormiras quand tu seras mort, de François Muratet (Joëlle Losfeld, 2018) qui met en scène un Français musulman dirigeant une section de commando de chasse composée de harkis, personnage complexe inspiré par le beau-père de l’auteur.
Cet automne n’échappe pas à la règle avec la parution de deux formidables récits inspirés d’une histoire familiale fracassée ou au moins heurtée par la guerre d’Algérie. Avec le Tailleur de Relizane (Stock) et Alger, rue des Bananiers (Verdier), Olivia Elkaim et Béatrice Commengé nous font revivre ces années de bonheur puis de déception et de terreur qui ont précédé, pour les Français du pays, l’indépendance de l’Algérie. Dans des genres très différents, plus romanesque et affectif pour Elkaim, plus littéraire pour Commengé, ces deux autrices livrent là un témoignage précieux sur ce que furent la présence française en Algérie et la vie quotidienne de ceux que l’on a longtemps appelés «pieds noirs».
Arrachement
Le tailleur de Relizane, c’est Marcel, le grand-père d’Olivia Elkaim, magnifique personnage tout en retenue et en humanité. Une nuit d’octobre 1958, au troisième étage d’un immeuble de Relizane, une commune située sur la route reliant Alger à Oran, Marcel est tiré du sommeil par une poignée d’hommes qui lui enfilent un sac sur la tête, lui lient les mains et le jettent dans un camion pour l’emmener vers une destination inconnue. Il est convaincu qu’il va être exécuté par des hommes du FLN. Viviane, sa femme, est désespérée. Ce n’est pas qu’elle l’aime, mais elle ne saurait pas vivre sans lui, elle a déjà bien du mal à gérer ses deux garçons, Pierre (le père d’Olivia Elkaim) et Jean. Elle déteste son corps lourd et son visage ingrat, et plus encore ce Relizane où Marcel l’a entraînée, «plaine aride, désert brûlant huit mois de l’année qui l’obligeait à se changer deux fois par jour et à dormir enroulée dans des draps mouillés. Elle devrait supporter cette Cayenne soumise aux invasions de sauterelles, de moustiques gros comme le pouce et où sévissaient encore le choléra et les épidémies de typhoïde». Ce n’est pas pour rien que Relizane, en berbère, signifie «colline brûlée».
Marcel ne sera pas exécuté. Si l’on est venu le chercher en pleine nuit, c’est pour lui demander de tailler des costumes aux combattants, très belle scène introductive. Et aussi pour lui conseiller de prendre comme apprenti le neveu du chef, Reda. Il devra juste garder secrets les détails de cette nuit-là. Et, plus tard, quand la situation se tendra à Relizane et que certains Français seront agressés voire tués, Marcel et sa famille bénéficieront d’une sorte de protection tacite du FLN jusqu’au moment où, la guerre battant son plein, une voix anonyme conseillera à Marcel, par téléphone, de quitter au plus vite le pays car il n’est plus possible de le protéger.
L’arrachement à cette terre natale est terrible mais bien pire encore l’accueil réservé à Marcel et sa famille dans l’Hexagone. Là, ils sont considérés comme moins que rien, des animaux tout juste bons à vivre dans une cave insalubre parmi les rats. C’est une des grandes forces du récit d’Olivia Elkaim, elle décrit sans fioritures le mépris voire la haine suscités alors par les pieds-noirs chassés d’Algérie, un climat dont on peine aujourd’hui à imaginer la lourdeur. «Un jour, je partageais un repas avec mon père et il m’a dit : "Tu sais, ce qu’on a vécu à notre arrivée ici, c’était le quart-monde", je savais qu’ils avaient été logés dans une cave mais je n’imaginais pas que cela avait été si horrible», nous a expliqué Olivia Elkaim. Pourquoi avoir ressenti, à un peu plus de 40 ans, le besoin d’écrire ce livre ? «J’ai occulté l’histoire familiale pendant de nombreuses années car j’étais étouffée par la nostalgie de mes grands-parents et de mon père, et surtout par ce folklore «pied-noir», un mot que je ne supporte pas : Arcadi, Enrico Macias, le couscous-boulettes… Je voulais être une Parisienne parfaite et non me sentir sale car considérée littéralement comme une pied-noir. Je suis allée jusqu’à épouser ce que mon grand-père appelait un "blanc-bec", l’inverse d’un pied-noir, et quand je me suis retrouvée seule avec mes deux enfants, cet exil intérieur a convoqué l’exil de mes grands-parents. J’avais en tête ce proverbe algérien, "si tu ne sais pas d’où tu viens, tu ne sais pas où tu vas", j’ai voulu comprendre d’où je venais et j’ai découvert l’histoire de mon grand-père. Il est mort en 2010 et je le pleure encore.» Pour cette autrice et journaliste à la Vie, que sa spécialisation dans la bioéthique a beaucoup aidée à réfléchir à la vie et à la mort, le refoulé personnel concernant l’Algérie est sans doute à l’image du refoulé collectif sur cette guerre en France.
Regret
Le récit de Béatrice Commengé est tout autre car sciemment dénué de toute nostalgie. C’est presque un exercice d’anthropologie littéraire, très littéraire, on a envie de souligner toutes les phrases tant elles sont belles. Tout part de la bibliothèque de son père, transportée de la villa d’Alger à la maison du Périgord où l’auteure vit une grande partie du temps désormais. «Cette "bibliothèque du couloir" comme on l’appelait dans la famille, était en réalité toute une vie ressuscitée, cette courte vie de l’Algérie française, écrit-elle. Le hasard m’avait fait naître sur un morceau de territoire dont l’histoire pouvait s’inscrire entre deux dates, comme sur une tombe : 1830-1962. Une histoire qui, comme toutes les histoires, aurait pu ne pas avoir lieu. Tel un corps, l’Algérie française était née, avait vécu, était morte. Née et morte dans la douleur du sang versé.» L’émotion affleure parfois, derrière la description d’un lieu ou d’une personne aimée mais on sent que l’auteure veut la tenir à distance. Contrairement à Olivia Elkaim, Béatrice Commengé a vécu l’Algérie française où elle est née en 1949 et surtout, contrairement aux grands-parents et au père d’Olivia Elkaim, ses parents n’ont pas été chassés du pays puisqu’ils sont partis en 1961, un an avant le grand départ des pieds-noirs. «Je n’aurais pas pu écrire ce livre, avec cette joie de vivre qu’il retrace, si mon père n’avait pas eu le flair de partir plus tôt, nous a-t-elle confié. Et puis cela a coïncidé pour moi avec la fin de l’enfance, en quittant l’Algérie je me suis dit que je serai apatride et donc libre. J’ai eu l’immense chance d’avoir des parents qui avaient le goût du bonheur, surtout mon père.»
Béatrice Commengé n’écrit qu’une quinzaine de lignes par jour et cela se sent, chaque phrase est ciselée lentement, précautionneusement. «Je suis partie des lieux. Ce que j’ai cherché, c’est la singularité totale. J’ai conçu ce livre comme une série de tableaux pour essayer d’atteindre une sorte d’objectivité. Dans cette histoire, il n’y a pas les bons et les méchants, je ne voulais aucun jugement.» Pas de jugement, pas de nostalgie, mais le regret tout de même que son père n’ait pas eu le temps de lire ce livre. Olivia Elkaim, elle, a presque vécu en direct la lecture du Tailleur de Relizane par son père : pleurs d’émotion, remerciements… jusqu’au moment où celui-ci est tombé sur la quatrième de couverture qui précise qu’Olivia Elkaim est «d’origine algérienne». «"On n’est pas d’origine algérienne !"s’est-il exclamé alors que ses ancêtres sont nés là-bas et lui aussi, s’étonne l’autrice. Pour moi, c’est une façon de nier cette partie de lui-même.» Autre génération, autre ressenti.
Durant l’été dernier, Gaïd Salah, exhibant tous les attributs d’un dictateur militaire, trônait effectivement à la tête de l’Etat, tandis que presque tout « le gang » de Bouteflika, était soit en prison, soit sur le point d’y entrer. Voici le dernier volet de notre série sur l’Algérie signée par Jeremy Keenan
Sous la pression croissante du hirak, Bouteflika démissionna le 2 avril et il fut remplacé par le chef d’Etat par interim Abdelkader Bensalah, qui devait reporter l’élection du 18 avril au 4 juillet. Deux jours plus tard, Gaïd Salah ordonnait le limogeage immédiat du général Tartag, qui avait comploté contre lui avec Saïd Bouteflika et Mediène. A la fin du mois, une brochette d’oligarques et d’anciens ministres de Bouteflika étaient arrêtés sur les ordres de Gaïd Salah pour corruption. Début mai, Saïd Bouteflika, Mediène et Tartag furent arrêtés, poursuivis pour avoir sapé l’autorité de l’armée et pour conspiration contre l’autorité de l’Etat. Ils furent rejoints à la prison El Harrach, une semaine plus tard, par les anciens Premiers ministres Abdelmalek Sellal et Ahmed Ouyahia et une dizaine d’anciens ministres de Bouteflika, qui purgent actuellement de long peines de prison ou ont fui le pays.
A l’été, Gaïd Salah, exhibant désormais tous les attributs d’un dictateur militaire, trônait effectivement à la tête de l’Etat, tandis que presque tout « le gang » de Bouteflika, comme Gaïd Salah les appelait désormais, était soit en prison, soit sur le point d’y entrer. Même si les élections du 4 juillet ont dû être reportées à cause de la marée d’opposition émanant du hirak, Gaïd Salah ne pouvait plus être délogé. Vers la moitié de l’été, il fut clair qu’il n’avait aucune intention de soutenir le hirak et qu’il insistait pour que les élections présidentielles se tiennent le 12 décembre, que le hirak soit d’accord ou pas.
Par une coïncidence extraordinaire, le premier jour d’emprisonnement de Mediène fut le début d’une chaîne d’événements rapide qui devait conduire à la mort de Gaïd Salah.
Tandis que les condamnations de Saïd Bouteflika, Mediène et Tartag à quinze ans de prison, le 24 septembre 2019, six ans et huit mois après l’attaque d’ In Amenas et quatre ans après le limogeage de Mediène, peuvent apparaître comme la sanction du pouvoir de Gaïd Salah à son zénith, cela ne dura pas très longtemps. Par une coïncidence extraordinaire, le premier jour d’emprisonnement de Mediène fut le premier d’une chaîne d’événements rapide qui devait conduire à la mort de Gaïd Salah.
Nommé ministre de la Justice en août, Belkacem Zegmati commença à enquêter sur les affaires de Bahaeddine Tliba. Tliba avait répliqué en faisant valoir son immunité parlementaire mais le 25 septembre, Zegmati ordonna la levée de son immunité et lui ordonna de comparaître pour répondre à des questions sur des soupçons de corruption. A ce moment-là, certains émirent l’hypothèse que Gaïd Salah avait, peut-être, abandonné Tliba. Cependant, on sut après coup que le général Bouazza Ouassini (désormais emprisonné), le protégé de Gaïd Salah, qui avait été rapidement propulsé à la tête du Directorat de la Sécurité intérieure (DSI) et du contre-espionnage, avait l’oreille de Zegmati et complotait contre Gaïd Salah, dans le but final, semble-t-il, d’être nommé à sa place.
Comprenant que le piège se refermait sur lui, Tliba prit la fuite pour la Tunisie fin septembre, tout en mandatant Saïd Bensedira, depuis Londres, comme porte-parole. A partir de la Tunisie, Tliba prit la mer pour Malte, fit l’acquisition d’un passeport Schengen et se débrouilla pour se rendre en Irlande. Il comptait dès lors, grâce aux bons offices de Bensedira, demander l’asile politique au Royaume Uni, soutenant qu’il était persécuté en Algérie à cause de son opposition aux régimes Bouteflika et Gaïd Salah. Peu après, Bensedira menaça de publier des rapports établis par Tliba détaillant les crimes commis par la famille Gaïd Salah. Bensedira fit savoir que Tliba était prêt à témoigner sur la participation des fils de Gaïd Salah dans la mort mystérieuse, en novembre 2014, de Mohamed Mounib Sendid, le wali (préfet) d’Annaba, et dans beaucoup d’autres crimes. Bensedira rendit aussi publique une vidéo menaçant de révélations explosives à partir des documents en possession de Tliba.
Tliba devait être stoppé. Les services secrets algériens réussirent à le piéger et le faire revenir de Malte en Tunisie, où il fut enlevé et ramené en Algérie sous bonne garde.
Une telle publication pouvait gravement porter atteinte à l’Algérie et à son armée. Tliba devait être stoppé. Les services secrets algériens réussirent à le piéger et le faire revenir de Malte en Tunisie, où il fut enlevé et ramené en Algérie sous bonne garde à la prison El Harrach.
Pour Gaïd Salah, le jeu était terminé. Le choc du départ de Tliba et des menaces de Bensedira, qui atteignirent Gaïd Salah pendant qu’il se trouvait à Oran, étaient de trop. On dit qu’il tomba malade puis fut hospitalisé. Selon le ministère de la Défense, il souffrait d’hypertension. Certains évoquèrent un accident vasculaire cérébral. Des généraux proches de Gaïd Salah, y compris Bouazza Ouassini dans son double jeu, Saïd Chengriha, qui devait remplacer Gaïd Salah en tant que chef d’état-major de l’armée et Abdelhamid Ghriss, secrétaire général du ministère de la Défense, étaient conscients des dégâts que les révélations de Tliba pouvaient causer à l’armée et à l’Algérie. Ils comprirent que Gaïd Salah devait quitter ses fonctions et ils commencèrent à préparer son retrait.
Gaïd Salah mourut le 23 décembre, officiellement d’une crise cardiaque, onze jours après l’élection présidentielle qu’il avait convoquée. Parmi les cinq candidats approuvés par le régime, Gaïd Salah avait jeté son dévolu sur Abdelmajid Tebboune. Mais Tebboune n’était pas le choix de Ouassini. Il était un ami de Gaïd Salah et, en tant qu’ancien Premier ministre, bien trop conscient du fonctionnement du régime pour être facilement manipulé par Ouassini. Pour cette raison, Ouassini préférait que l’élection soit truquée en faveur d’Azzedine Mihoubi, sans charisme ni expérience et supposément homosexuel. Un accord aurait été conclu entre Azzedine Mihoubi et Ouassini en faveur du départ de Gaïd Salah et de son remplacement par Ouassini. Le complot faillit réussir. A midi, les premiers résultats plaçaient Mihoubi loin devant les autres candidats. Toutefois, quand Gaïd Salah eut vent du complot d’Ouassini, il intervint immédiatement et ordonna que Tebboune soit déclaré vainqueur et Ouassini placé en résidence surveillée. Bien que la participation officielle ait été annoncée à 39,3%., elle se situait plutôt, selon les rapports des observateurs et les témoignages recueillis dans le pays, autour de 8%. Les Algériens avaient boycotté l’élection, comme ils avaient promis de le faire depuis le début. Tebboune fut, quoi qu’il en soit, investi en force en tant que dernier Président en date, illégitime et fantoche, de l’Algérie.
Les huit mois depuis l’investiture de Tebboune ont connu des développements significatifs, notamment l’apparition de la pandémie de COVID-19 et, comme on pouvait s’y attendre, une restructuration quasi complète des services de renseignement. Les hommes nommés par Gaïd Salah ont été remplacés par beaucoup de « professionnels » ayant travaillé avec Mediène, qui avaient été chassés par Gaïd Salah. Peut-être symboliquement, tandis que Bouazza Ouassini reste incarcéré en attendant le début d’un nouveau procès, le général Hassan devrait être libéré prochainement. Mediène lui-même, bien qu’officiellement toujours emprisonné, serait désormais en un lieu « beaucoup plus confortable » et en contact avec plusieurs de ses anciens officiers supérieurs qui conseillent désormais la Présidence Tebboune et occupent les positions les plus élevées dans les services de renseignement. Tandis qu’In Amenas conduisit à la « de-mediènisation » du système, les huit mois de la Présidence de Tebboune ont vu sa « re-mediènisation ».
Malgré la propagande de Tebboune sur sa volonté de dialogue avec ce qu’il appelle le « hirak béni », ses services de renseignement « re-mediènisés », plus brutalement professionnels, ont utilisé le prétexte de la crise du COVID-19 pour accroître la répression, le harcèlement, l’intimidation et l’emprisonnement des activistes du hirak, des journalistes indépendants et autres opposants réels ou imaginaires du régime.
Alors que la crise politique et économique s’amplifie et que la répression s’intensifie, la question primordiale est : où va désormais l’Algérie ?
Sauf miracle, l’économie se dirige inexorablement vers la banqueroute. Les réserves de change du pays seront épuisées vers la fin 2021.
Le retour du hirak, quand l’Algérie s’ouvrira à nouveau, vraisemblablement en septembre, donnera des indications sur sa stratégie. Il est possible qu’il encourage une désobéissance civile ciblée. Quant au régime, il est confus et sur la défensive. Quelle est, selon lui, la plus grande menace sur son existence : le peuple algérien ou l’économie ? Des deux, la trajectoire de l’économie est sans doute la plus prévisible. Sauf miracle, elle se dirige inexorablement vers la banqueroute. Les réserves de change du pays seront épuisées vers la fin 2021. Alors, malgré les protestations de souveraineté de Tebboune, un administrateur, que ce soit la Banque Mondiale, le FMI, la Russie, la Chine ou une bonne fée, devra entrer en lice. La banqueroute, quelle que soit la forme qu’elle prendra, sera une bénédiction déguisée pour la plupart des Algériens, en marquant le point final du régime, ainsi privé de toute crédibilité ou légitimité. De ces cendres, une nouvelle Algérie pourra renaître.
In Amenas fait désormais partie de l’histoire; sa couverture, au moins jusqu’à aujourd’hui, a été totale. Tamouret reste un secret bien gardé. Peu, si ce n’est aucun autre événement en Algérie, à l’exception des massacres des années 1990, n’a révélé les contradictions du régime avec autant de sévérité : l’infiltration, la manipulation et l’utilisation des groupes terroristes et la mascarade de la guerre globale contre le terrorisme ; le conflit entre la Présidence, l’armée et les services de renseignement ; la lutte entre les clans; l’absence d’enquête judiciaire dans un pays qui s’enorgueillit de sa Loi Fondamentale et de sa conformité avec les conventions judiciaires internationales, de façon seulement virtuelle apparemment ; et la bavure d’une prise d’otages créée de toutes pièces, aboutissant au meurtre des otages pour masquer sa propre culpabilité.
In Amenas fut le point le plus bas de l’histoire contemporaine de l’Algérie, dont elle n’a pas pu se relever. Et l’on peut se demander si la situation d’aujourd’hui serait différente si In Amenas n’avait pas existé. Les événements politiques extraordinaires de ces sept dernières années – l’ascension et la chute des généraux Gaïd Salah, Bouazza Ouassini, Ait Ouarabi (« Hassan ») et de plusieurs autres qui ne sont pas mentionnés ici –ne peuvent s’expliquer sans In Amenas. Par ailleurs, si les services de renseignement étaient restés sous la coupe de Mediène, il est peu vraisemblable que le pays aurait atteint le niveau de chaos qui a permis l’émergence du hirak, bien que le hirak aurait certainement été déclenché, tôt ou tard, par un autre concours de circonstances. Ceci n’est que spéculation. Toutefois, deux choses n’auraient pas changé : la nature fondamentalement répressive du système de sécurité algérien ainsi que l’économie du pays, deux dynamiques qui ont semé depuis longtemps les graines de leur propre destruction.
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