L'Occident, la France en particulier, se trouve sous le choc d'une Afrique qui lui tourne le dos. C'est ce qu'il en coûte quand on veut le beurre et l'argent du beurre. Selon un constat franco-français, la France qui avait bien un statut de partenaire privilégié en Afrique, a perdu ses derniers bastions ces trois ou quatre dernières années. «Aujourd'hui le Niger, hier le Mali, la Centrafrique, le Burkina Faso ont rejeté la France, les forces françaises, les entreprises françaises», relève une lettre ouverte signée par une centaine de sénateurs français, adressée au président Macron, et publiée par Le Figaro sous le titre «Après la Françafrique, sommes-nous condamnés à l'effacement de la France en Afrique?»
Les signataires de cette lettre font remarquer encore que «ce mouvement en Afrique subsaharienne se propage avec des manifestations et des actes anti-français jusque dans les pays réputés proches de nous, comme la Côte d'Ivoire ou le Sénégal», évoquant également des problèmes avec les pays nord-africains comme l'Algérie, la Tunisie et le Maroc. Pour résumer l'échec total de la politique française en Afrique, les sénateurs français soulignent dans leur lettre ouverte qu'»aujourd'hui, la Françafrique d'hier est remplacée par la Russafrique militaire, par la Chinafrique économique ou l'Américafrique diplomatique. Et que dire, malheureusement, de la régression de la Francophonie par rapport à la langue anglaise?». Et finir par se demander s'il ne serait pas temps de»remettre à plat notre vision de l'Afrique et de son lien avec la France», «alors que l'Afrique, continent ami, ne semble plus comprendre la France, et conteste de plus en plus son rôle et sa présence».
Les Africains ont un lien avec la France, il n'y a qu'à voir le nombre de demandeurs de visas, qui n'a certainement pas son pareil dans le monde, et il y a en parallèle un nombre de refus qui n'a pas son égal dans toutes les chancelleries. La France peut-elle garder sa place de partenaire privilégié en Afrique tout en s'éloignant des Africains ? Ces derniers lui rendent-ils la pareille en manifestant leur hostilité à sa présence sur leur sol ? Les sénateurs français n'ont pas tort de se demander s'il ne serait pas temps de remettre à plat la vision qu'a la France de l'Afrique. Et, elle doit commencer par traiter d'égal à égal avec les Africains, sans compter sur ses relais locaux, qui se sont éloignés de leurs peuples en favorisant leur intérêt personnel, et qui ont fini par précipiter sa sortie, de plusieurs pays du continent, par la petite porte. La France n'a-t-elle pas su mesurer la rapidité des changements d'équilibres internationaux, ainsi que l'évolution des sociétés africaines plus ouvertes, désormais, sur un monde devenu un petit village grâce aux technologies de l'information et de la communication (TIC) ? Plusieurs pays qui ont flairé les bonnes affaires, ont lancé ces dernières années de vastes offensives sur le continent, notamment la Chine, la Turquie, la Russie et le Japon, et ont fini par bouleverser les équilibres géostratégiques, naguère très avantageux pour les pays européens, souvent anciens colonisateurs. Car, si la France perd pied en Afrique, c'est toute l'Europe qui vacille. Y a-t-il encore quelque chose à rattraper, ou est-ce la fin d'une ère ?
par Abdelkrim Zerzouri
Jeudi 10 aout 2023
http://www.lequotidien-oran.com/?news=5323038
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