Critique
Soixante ans après l’indépendance de l’Algérie, le documentaire Algériennes en France, l’héritage, diffusé mercredi 2 novembre à 22 h 45 sur France 2, retrace les parcours de quatre femmes illustrant un pan de l’histoire franco-algérienne.
Djamila, Samia, Dalila et Fadila n’ont que des prénoms, comme des anonymes, leur patronyme ne sera dévoilé qu’en fin de documentaire. Elles sont pourtant tout sauf des êtres ordinaires. La réalisatrice Bouchera Azzouz jette la lumière sur ces invisibles de l’histoire qui n’est évidemment pas qu’une affaire d’hommes, même si cette évidence peine encore à en être une.
Avec leur volonté de fer, leur combat pour l’émancipation, leur quête de justice, leur recherche de vérité sur les pans cachés et les pages les plus noires de l’histoire franco-algérienne, ces femmes, filles d’immigrés algériens, se sont forgé une destinée et une identité à double appartenance.
Des femmes « debout », comme le dit Dalila Kerchouche de sa mère, qui extirpa sa famille de onze enfants des camps de harkis où ils furent enfermés dix ans dans le dénuement. Ou comme ces femmes qui manifestent le 20 octobre 1961 pour réclamer des nouvelles de leurs maris disparus depuis la répression meurtrière du 17 octobre et qui crient à l’adresse des policiers : « On n’est pas là pour rigoler. »
Guerrières invisibles
Djamila Amrane, la doyenne de 88 ans, était une combattante. Pas seulement pour porter l’argent, et parfois des armes, pour le FLN pendant la guerre, mais aussi pour mener sa vie malgré l’adversité, pour divorcer d’un mari violent en Algérie – où ils fuirent après avoir été obligés de quitter le territoire français quelques jours avant l’indépendance de l’Algérie – avant de revenir en France avec ses cinq enfants.
Toutes à leur manière sont des guerrières, s’extirpent des conservatismes familiaux où elles puisent aussi la force d’agir. Samia Messaoudi, qui consacre sa vie à lutter contre les injustices et à faire la lumière sur le 17 octobre 1961. Dalila Kerchouche, qui a brisé la chape de honte et de silence sur l’histoire familiale relatée dans Mon père ce harki. Ou Fadila Mehal, d’abord en quête de cette Algérie qu’elle traîne comme un membre fantôme avant de jouer des coudes pour s’émanciper. Chapeau bas à ces héroïnes de la petite histoire.
https://www.la-croix.com/Culture/Algeriennes-France-lheritage-battantes-filles-dimmigres-2022-11-02-1201240343
.
Les commentaires récents