Roman de Abdelhamid Benhedouga (Traduit de l'arabe par Marcel Bois). Enag Editions, Alger 2002,206 pages, 325 dinars
Bachir ! Un tout nouveau instituteur dans un bled perdu, à la terre ingrate, dont la seule partie fertile et utile est exploitée par un riche propriétaire qui a pu survivre à la guerre et s'adapter l'indépendance venue.
En face, une population encore traumatisée par la guerre de libération nationale (avec ses opportunistes qui ont su tirer leur épingle du jeu et qui font montre d'excès de zèle nationaliste), vivant chichement et ignorant tout des aspects de la nouvelle modernité dont la scolarisation des enfants, la gestion équitable de l'eau, le respect des lois de la République. Entre mosquée et café maure... une vie de fatalistes.
L'instituteur, ancien moudjahid qui plus est (ce que les gens ignoraient parce qu'il ne l'a pas clamé) est révolté par une telle situation darriération socioculturelle et d'inconscience politique, soucieux seulement et avant tout d'apporter des changements. Pas facile!
Se greffe à cette malaventure les restes tragiques d'une vieille histoire d'amour... qui finira, malgré tout, assez bien et, comme dans tout bon roman de l'époque, en dehors du talent indéniable de l'auteur, on ne pouvait s'attendre à moins de la part d'un homme aussi engagé idéologiquement et socialement et aussi généreux que Benhadouga qui signait là son premier roman (en arabe, en 1974).
L'Auteur: Né en 1925, Abdelhamid Benhadouga a fréquenté l'école publique et l'école coranique dans son village. Après une solide éducation familiale (père imam), ce natif de Mansourah (BBA), ira poursuivre ses études à Constantine (El Ketania), puis à la Zitouna de Tunis. Hésitant entre la littérature et la religion, c'est son engagement au sein du MTLD qui va l'aider à trancher.
Il se retrouve au centre de l'action nationaliste comme représentant du MTLD en Tunisie et responsable des étudiants algériens dans ce pays. De retour en Algérie, Benhadouga va travailler pour l'ORTF et la BBC. Recherché par la police, il se rend en France avant de rejoindre «La Voix de l'Algérie», la radio du FLN à Tunis. Après des études radiophoniques et un stage de réalisateur radio en France, il se consacre en Tunisie à des études d'art dramatique, ce qui lui permettra d'accomplir un travail colossal peu connu du public : la production de plus de 200 pièces de théâtre radiophoniques. Il investit la littérature par le journalisme, avec «El-djazaïr bayn el-ams wal youm» (L'Algérie entre hier et aujourd'hui), recueil d'articles publié en 1958, qui sera suivi de «Dhilaloun djazaïri» (Ombres algériennes), recueil de nouvelles publié à Beyrouth en 1960.
Comme beaucoup d'écrivains, Abdelhamid Benhadouga commence par des articles de presse, des nouvelles, de la poésie («El-arwah achaghira» - Âmes vacantes, SNED, 1967), avant de publier son premier roman. Pour un début, ce fut un coup de maître. «Rih El-Djanoub» (Le Vent du Sud), SNED, 1971, va connaître un grand succès et sera traduit en français, néerlandais, allemande et espagnol. Ce roman décrit la société rurale algérienne, avec ses conditions de vie difficiles et ses espoirs. Le second roman, «Nihayat el-ams» (La fin d'hier, SNED, 1974),ci-dessus présenté, sera également traduit en français par Marcel Bois qui en fera de même pour «Wa ghaden yawm djadid» - «Demain sera un nouveau jour» (Al Andalous, 1992).Il a été aussi Dg de l'Enal (Entreprise nationale du livre, issue de la Sned), président du Conseil national de la Culture et en 1992, Vice-président du Conseil Consultatif national puis président, Rada Malek ayant rejoint le Hce. Il est mort à Alger le 21 octobre 1996.
Extraits: Le colonialisme nous a mis les bâtons dans les roues. Mais, il ne faut tout de même pas lui faire endosser toutes nos insuffisances, pas plus qu'il ne faut faire du destin le grand responsable de notre pauvreté (p 22),Le temps n'existe pas pour un monde endormi. Le café et le village étaient tombés en catalepsie (p 38), Les enfants de l'indépendance n'étaient pas beaux à voir et recevaient une éducation lamentable; ils grandissaient dans une atmosphère lugubre. Les mosquées, jadis gardiennes de la culture, devenaient maintenant les refuges de l'ignorance et freinaient le progrès. Si on devait les conserver, il fallait les rénover, y compris dans leur architecture (p 49), Devant ce manque de conscience politique, les associations d'anciens moudjahidine, au lieu de distribuer pensions et titres, auraient mieux fait d'assurer à leurs membres une formation solide. C'était aussi le rôle du Parti. Mais le Parti?... (p115)
Avis : Une tranche de notre histoire contemporaine romancée... et un éveil plus que douloureux... l'ignorance des hommes étant plus difficile à changer que le bloc de granit. Une traduction claire. Une écriture fluide et lisible... et, surtout, qui va droit aux cœurs des lecteurs qui se sentiront, encore aujourd'hui, tous concernés. A noter que c'est, peut-être, le seul écrivain don't personne, à droite comme à gauche, ne conteste la valeur littéraire des œuvres et les qualités de l'homme. C'est aussi un visionnaire... car ayant assez vite compris que le nœud de la problématique en Algérie.....c'est le «guebli», le Vent du Sud.
Citations: Un village sans école n'avait pas plus de sens que des tuyaux sans eau (p 35), Le mot Dieu n'a de sens que par rapport à l'épanouissement de l'homme (p 39), Les gens se laissent guider plus facilement par les sentiments que par l'intelligence (p 49), Quand les hommes se font dieux, ils offrent le visage de l'orgueil et de la violence: il n'y a plus qu'un dieu, la force déchaînée (p 66), Ils avaient bien de la chance, les anciens pour qui la terre était plate, et qui croyaient rejoindre Dieu au-delà des limites connues. L'homme, en découvrant que les horizons terrestres débouchaient sur des espaces infinis, avait perdu un sérieux espoir de libération (p136), Une année passe vite pour un homme libre, mais le prisonnier n'en voit jamais arriver la fin (p183)
Le Vent du Sud.
Un roman de Abdelhamid Benhedouga (Traduit en français par Marcel Bois). ENAG Editions. Alger 2002 (Fiche de lecture déjà présentée. Pour rappel. Extraits. Fiche de lecture complète in www.almanach-dz.com)
Un immense roman datant d'une époque non moins immense, les années 70. Celle de Houari Boumediène et des 3 R (Révolution industrielle, Révolution agraire et Révolution culturelle).
Et que certains vieillards revisitent encore en la sublimant. Mais que les moins de 40 ans (à peine 12 ans en 1970) ne peuvent pas comprendre. Il est vrai qu'on leur a livré une histoire contemporaine du pays à travers des mythes, bien souvent mystificateurs ou, alors, à travers des critiques subjectives ou partisanes.
Editée en 1971, la première œuvre de Benhadouga a préfiguré le nouveau roman national de la nouvelle Algérie, à un tournant décisif de son évolution, encore jeune (moins d'une décennie d'indépendance), partagée entre le passé et le futur, entre les tabous et les ruptures, la jeunesse et les anciens, la ville et la campagne, le silence et la vérité (sur les trahisons !) , l'amour et l'intérêt.
A l'époque, le roman avait fait un «tabac» sous l'œil intéressé d'un pouvoir qui cherchait à s'allier les élites... toutes langues confondues (l'ouvrage ayant été rapidement traduit en français par Marcel Bois).
Avis : A re-lire. Ou, à lire et à faire lire. Un «best-seller» des années 70, mais qui reste, surtout au niveau de sa lecture sociale, d'une brûlante actualité.
Phrase à méditer: «Il a été socialiste, il est socialiste, le socialisme... Le socialisme est la forme nominale du verbe ! Tout le monde parle de socialisme en ignorant que c'est la forme nominale du verbe»
Les dirigeants israéliens devraient tirer les leçons de la victoire du peuple algérien contre l’oppression coloniale.
De jeunes Algériens défilent devant les facultés d’Alger, brandissant des drapeaux algériens, le 2 juillet 1962, au lendemain du référendum d’autodétermination sur l’indépendance de leur pays (AFP/photo d’archives)
Il y a peu, l’Algérie a célébré ses 60 ans d’indépendance après plus d’un siècle de colonialisme français. La guerre génocidaire française contre le peuple algérien a fait selon des estimations algériennes plus de 1,5 million de morts et de blessés.
Les Français ont dépeint leur conquête de l’Algérie comme un retour de l’Empire romain et la reconquête des territoires romains. En 1962, l’Algérie comptait plus d’un million de colons français – un neuvième de la population algérienne.
Des cinq colonies européennes établies dans des pays arabes, seules l’Algérie et la Palestine sont encore colonisées au début des années 1960
En privé, Charles de Gaulle s’inquiétait, en cas de non-indépendance de l’Algérie, que la France soit incapable d’« absorber 10 millions de musulmans qui deviendraient bientôt 20 millions, puis 40 millions ». Il craignait que la France cesse d’être ce qu’elle est – « un peuple européen de race blanche, de culture gréco-latine et de religion chrétienne » – et que les églises soient remplacées par des mosquées.
Déjà, il mettait en garde un député gaulliste : « Vous vous voyez marier vos filles à des Arabes ? »
L’indépendance aurait amené l’égalité entre les colons et les Algériens indigènes, mais les colons ne voulaient pas de ça. Horrifiés par la perspective de l’égalité et la perte des privilèges raciaux et coloniaux, ils ont opté pour un retour en France, où leur privilège blanc serait préservé.
Des cinq colonies européennes établies dans des pays arabes depuis le XIXe siècle (Tunisie, Libye, Maroc, Algérie et Palestine), seules l’Algérie et la Palestine sont encore colonisée au début des années 1960.
Une colonie à terre
Lorsque l’Algérie a été libérée en 1962, l’opinion publique arabe jubilait : une colonie européenne était à terre, plus qu’une ! La colonie italienne de Libye avait été la première à tomber lors de la Seconde Guerre mondiale.
En 1911, les Italiens ont envahi les territoires ottomans de « Tarablus al-Gharb » (traduit par les Italiens « Tripolitaine »), Barqa (rebaptisée « Cyrénaïque ») et Fezzan ; et ils se sont mis à appeler ce territoire, à la suite du géographe Federico Minutilli, par son ancien nom gréco-romain : « Libia ». L’Italie a immédiatement annexé la Libye et s’est lancée dans une colonisation de peuplement.
Comme les Français, les Italiens présentaient leur colonisation comme un « retour » aux anciens territoires de l’Empire romain. La Libye était désignée comme la « quatrième côte » de l’Italie. La colonisation s’est accélérée sous le régime fasciste et, en 1940, on dénombrait plus de 110 000 colons, soit 12 % de la population.
Quand les alliés ont vaincu les Italiens, ceux-ci avaient déjà provoqué la destruction à grande échelle de villes et villages, sans mentionner les famines et les maladies, qui, couplées aux meurtres de masse des résistants libyens, ont éliminé près des deux tiers de la population libyenne.
Malika Rahal : « La puissance de 1962 donne l’impression que l’Algérie vit dans un présent permanent »
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À la fin de la guerre, il restait environ 50 000 colons italiens. La Libye a obtenu officiellement son indépendance en 1951. Le nouveau statut juridique des colons exigeait qu’ils choisissent la nationalité italienne ou libyenne avant 1960. Rejetant totalement l’égalité et la perte de privilèges raciaux et coloniaux, la majorité d’entre eux sont partis. En 1970, ceux qui étaient restés avaient été rapatriés en Italie.
En ce qui concerne la Tunisie, elle a obtenu son indépendance en 1956, cinq ans après la Libye, à la suite d’une combinaison de guérilla anticoloniale et de négociations. La Tunisie était occupée par la France depuis 1881 et des dizaines de milliers de colons s’étaient installés dans le pays.
En 1956, on comptait 180 450 colons français et 66 909 colons italiens. Au moins la moitié des colons étaient alors nés en Tunisie. Mais en 1957, la moitié des colons français avait quitté le pays. Refusant une fois de plus d’accepter l’égalité avec la population native, les colons avaient commencé à partir rapidement. En 1970, ils n’étaient pas plus de 18 000 colons français et 7 000 colons italiens, dont la plupart allait partir dans les années suivantes.
Le Maroc, que la France a envahi et occupé en 1907, a obtenu son indépendance en mars 1956, même mois que la Tunisie, après une longue lutte anticoloniale.
En 1952, le Maroc recensait 539 000 Européens. Les colons ont commencé à perdre leurs privilèges dans la décennie qui a suivi. Rejetant toute égalité, la plupart sont rentrés en France, où leurs privilèges raciaux étaient préservés.
Une alliance étroite
Étant donné qu’elles étaient les deux dernières puissances coloniales européennes dans le monde arabe, la France et Israël ont noué une alliance étroite pour coordonner la préservation de leurs colonies.
Comme la France et l’Italie, les sionistes juifs européens prétendaient être les descendants des anciens hébreux de Palestine et ne faire que « retourner » sur leurs terres ancestrales. Israël, qui a établi une majorité juive en chassant la majorité du peuple palestinien en 1948, a voté contre la résolution 1952 de l’ONU reconnaissant les autodéterminations tunisienne et marocaine.
L’alliance militaire de la France avec Israël et son hostilité envers le président égyptien Gamal Abdel Nasser s’est renforcée, en particulier quand le dirigeant égyptien est devenu synonyme de force derrière le Front national de libération (FNL) algérien.
Cela se combinait à l’antisoviétisme des socialistes au pouvoir en France, Nasser s’étant rapproché de l’URSS en 1955 après avoir été snobé par l’administration Eisenhower, qui conditionnait leurs bonnes relations à la normalisation des relations entre l’Égypte et Israël.
Le nationalisme panarabe socialiste était fustigé par les Français comme réactionnaire et cherchant à rétablir les gloires « islamiques ». À l’inverse, le panjudaïsme du sionisme européen, qui cherchait à recréer les gloires « judaïques » des Hébreux palestiniens, dont on a fait les ancêtres des convertis européens au judaïsme, était dépeint comme progressif et socialiste.
Par exemple, l’institution coloniale ashkénaze juive du kibboutz n’était pas vue comme un exemple de socialisme de la race des maîtres mais comme une alternative progressiste au stalinisme. À cette époque, la France fournissait à Israël des avions de combat modernes Mystère IV, utilisés contre l’Égypte en 1956.
L’alliance entre la France et Israël
Malgré les négociations secrètes entre les Français et les dirigeants du Front de libération nationale (FLN) basés au Caire, l’armée française a mené, le 22 octobre 1956, le deuxième acte de piraterie aérienne de l’histoire.
Les Français ont intercepté au-dessus de l’Algérie un appareil transportant les dirigeants politiques du FLN qui ralliaient le Maroc à Tunis, parmi lesquels Ben Balla, pour l’une de ces réunions secrètes. Les cinq dirigeants capturés du FLN n’ont pas été relâchés avant 1962.
Les généraux français expliquaient que leur alliance avec Israël faisait partie du combat contre les Algériens, et contre Nasser
Et les Français ont adopté la tactique de détournement d’avion de leurs alliés, car le premier acte de piratage aérien a été la capture par Israël d’un avion civil de Syrian Airways en décembre 1954. Les pirates israéliens ont forcé l’avion à atterrir à l’aéroport de Lydda et ont retenu ses passagers en otage, exigeant la libération de cinq prisonniers de guerre israéliens en Syrie, une pratique dans laquelle les Israéliens ont continué à exceller pendant les décennies suivantes.
Dans ce contexte, la France a lancé son invasion de l’Égypte avec les Britanniques et les Israéliens en 1956, aventure qui s’est achevée sur leur défaite et n’a fait qu’accroître la popularité de Nasser.
Frantz Fanon, qui avait rejoint le FLN, expliquait les motivations de la France : « L’expédition de Suez visait à frapper la tête de la révolution algérienne. L’Égypte, accusée de diriger la lutte du peuple algérien, a été bombardée de manière criminelle. »
L’alliance précoce de la France avec Israël s’est renforcée en 1952 lorsque son ambassade a ouvert à Tel Aviv. Que les deux pays demeurent les seules colonies européennes en territoire arabe était capital dans leurs calculs.
La France et l’Algérie ont des perceptions inconciliables de l’histoire
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Les généraux français expliquaient que leur alliance avec Israël faisait partie du combat contre les Algériens, et contre Nasser. Une grande partie des renseignements reçus par Paris sur les expéditions d’armes égyptiennes au FLN venait d’Israël, ce qui a permis à la France en octobre 1956 d’arraisonner l’Athos, navire battant pavillon soudanais qui transportait des armes pour le FLN, dans les eaux internationales au large du Maroc. L’alliance était telle qu’Israël a même participé à des manœuvres militaires conjointes avec la France sur le territoire algérien.
Après son séjour de treize mois en tant que gouverneur général de la France en Algérie, Jacques Soustelle a participé à la création et la direction du lobby pro-Israël Alliance France-Israël en 1956. Cela faisait suite à l’invasion tripartite de l’Égypte.
Pendant ce temps, le grand rabbin de France a fait pression sur le New York Times pour le compte des Français contre l’indépendance algérienne et a obtenu la « promesse d’un rédacteur du New York Times de continuer à soutenir fidèlement la ligne française lors des débats à l’ONU ».
En 1958, Soustelle a enjoint non seulement Israël mais les communautés juives du monde à soutenir l’apartheid colonial français en Algérie : « Nous croyons que, étant donné l’influence que non seulement Israël mais, par-dessus tout, les communautés juives à travers le monde exercent sur l’opinion internationale, les fruits de cette alliance nous seront bénéfiques. » Soustelle a rejoint l’organisation coloniale terroriste Organisation Armée Secrète (OAS) en 1960 pour combattre l’indépendance algérienne.
Adoption des tactiques israéliennes
Cette alliance n’a pas seulement fourni des armes et une formation aux militaires israéliens, elle a permis aux Français eux-mêmes d’apprendre les techniques israéliennes, notamment celle du « bombardement de convoi » ensuite utilisée par la France en Algérie.
Les officiers français ont été envoyés en Israël pour apprendre les techniques de guerre psychologique. Le général Maurice Challe, commandant en chef des forces armées françaises en Algérie (1958-1960), insistait sur le fait que les Israéliens étaient de « véritables artistes » dans la gestion des Palestiniens.
Challe espérait faire du kibboutz raciste le modèle de son programme de pacification en Algérie, mais l’indépendance a empêché son projet de se concrétiser. Des missions d’études israéliennes se sont rendues en Algérie pour apprendre comment les Français utilisaient les hélicoptères pour combattre la guérilla algérienne.
Challe, comme d’autres généraux amis d’Israël, a participé à la tentative ratée de coup d’État des colons en avril 1961 contre le gouvernement français et a été poursuivi par un tribunal militaire. Le témoignage d’au moins un participant au coup d’État manqué précise que ses responsables s’attendaient à un soutien du « Portugal, de l’Afrique du Sud, de [certains pays de] l’Amérique du Sud, et peut-être d’Israël ».
L’OAS a renoncé à son antisémitisme traditionnel pour établir un front populaire antimusulman. Les membres de l’OAS faisaient valoir qu’accorder l’indépendance à l’Algérie s’inscrivait dans une conspiration internationale visant à « étrangler l’État d’Israël » et respirait l’antisémitisme. N’étant pas en reste, le Premier ministre d’Israël David Ben Gourion avait conseillé aux Français en 1958 de ne pas faire confiance aux Algériens arabes, « qu’importe leur degré d’assimilation ».
Des Algériens juifs opposés à Israël ont contribué financièrement à la libération de leur pays et ont rejoint ses rangs
Mécontent de son isolation en tant que dernière colonie européenne dans le monde arabe, Israël a fourni un soutien logistique aux colons français, notamment un appui à Soustelle, qui avait le soutien de Ben Gourion et a été financé par de riches Américains de confession juive, de droite et pro-israéliens qui s’opposaient à de Gaulle et à l’indépendance algérienne.
Des Algériens juifs opposés à Israël ont contribué financièrement à la libération de leur pays et ont rejoint ses rangs, notamment des médecins et des avocats.
En 1956, les Algériens juifs contre la colonisation ont salué les déclarations officielles du FLN à l’attention des dirigeants de la communauté juive proclamant leur appartenance à la nation algérienne. Des petits groupes d’Algériens juifs ont affirmé en réponse qu’ils ne faisaient qu’un avec leurs compatriotes musulmans et qu’ils soutenaient de tout leur cœur la libération.
D’autres groupes ont néanmoins formé des commandos juifs algériens et se sont organisés à Oran contre les musulmans algériens. Ils souhaitaient la partition de la colonie en fonction des « races ».
Ils se seraient inspirés dans leur quête de la politique du gouvernement israélien. Israël a réquisitionné au moins un juif algérien, qui avait rejoint l’OAS, dans son réseau d’espions. Il s’agissait de l’un des dirigeants de l’OAS, Jean Ghenassia, qui avait des contacts avec des agents israéliens, ce qui lui a valu d’être ensuite poursuivi par les Français.
Encerclement de l’Algérie
Après l’indépendance, l’Algérie est devenue le plus grand partisan de la résistance mondiale au colonialisme, en Palestine et à travers l’Afrique : en Angola, au Mozambique, en Afrique du Sud, en Namibie et en Rhodésie (aujourd’hui Zambie et Zimbabwe).
Entre l’Algérie et la Palestine, il y a bien plus que de la politique
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Bien que mal avisée, la réunion organisée par les dirigeants algériens lors des célébrations du 60e anniversaire de l’indépendance du pays en juillet entre le dirigeant du Hamas Ismaël Haniyeh et le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, qui collabore avec Israël, était motivée par le soutien continu de l’Algérie à la lutte palestinienne.
Ces dernières années, la normalisation des relations d’Israël avec le Maroc et le Soudan ainsi que son travail en coulisses pour normaliser ses relations avec la Tunisie et certains dirigeants libyens font partie de sa stratégie pour encercler l’Algérie, qui refuse catégoriquement d’abandonner la lutte palestinienne et de normaliser ses relations avec Israël.
La terreur ressentie par les Israéliens après la victoire du peuple algérien était telle que le plus important général d’Israël, Ariel Sharon, conservait un exemplaire du récit classique de la lutte algérienne écrit par Alistair Horne, Histoire de la guerre d’Algérie, sur sa table de chevet.
Peut-être que d’autres dirigeants israéliens devraient tirer les leçons de la libération algérienne.
- Joseph Massad est professeur d’histoire politique et intellectuelle arabe moderne à l’Université Columbia de New York. Il est l’auteur de nombreux livres et articles, tant universitaires que journalistiques. Parmi ses ouvrages figurent Colonial Effects: The Making of National Identity in Jordan ; Desiring Arabs ; et, publié en français, La Persistance de la question palestinienne (La Fabrique, 2009). Plus récemment, il a publié Islam in Liberalism. Son travail a été traduit dans une douzaine de langues.
Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que leur auteur et ne reflètent pas nécessairement la politique éditoriale de Middle East Eye.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
Joseph Massad is professor of modern Arab politics and intellectual history at Columbia University, New York. He is the author of many books and academic and journalistic articles. His books include Colonial Effects: The Making of National Identity in Jordan; Desiring Arabs; The Persistence of the Palestinian Question: Essays on Zionism and the Palestinians, and most recently Islam in Liberalism. His books and articles have been translated into a dozen languages.
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Joseph Massad
Mercredi 17 août 2022 - 11:29 | Last update:5 months 3 weeks ago
Deux séismes dévastateurs (7,8 et 7,5) suivis de dizaines de répliques frappent la Turquie et la Syrie: l'Algérie solidaire !
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : selon un rapport de l'Autorité des Désastres et des Urgences (AFAD) publié en novembre 2020, 70% de la Turquie sont situés sur une zone sismique active. Dix-huit séismes de magnitude supérieure à 7 sur l'échelle de Richter y ont été répertoriés depuis 120 ans et plus de 75% des pertes et dommages qu'a subis le pays au 20e siècle étaient dus à des tremblements de terres.
Certains scientifiques considèrent que le phénomène de la rupture sismique est chaotique et ne peut pas être prévu. Un petit séisme va avoir lieu, puis, de temps en temps, il va générer de manière brutale un gros séisme.
Mais, semble-t-il, trois jours avant lesdits séismes, le sismologue néerlandais Frank Hoogerbeets, du Solar System Geometry Survey (SSGEOS), avait prévu la catastrophe. «Tôt ou tard, il y aura un séisme d'une magnitude d'environ 7,5 dans cette région (centre-sud de la Turquie, Jordanie, Syrie, Liban)», a-t-il écrit sur Twitter le 3 février.
Cette information a été, par la suite, confirmée par «Earthquake News Everyday» sur Facebook ce dimanche 5 février, soit un jour avant le drame, donnant ainsi plus de détails sur la catastrophe.
Les partisans de la méthode VAN exultent !
Rappelons qu'il s'agit d'une méthode mise au point par les trois scientifiques grecs Varotsos, Alexopoulos et Nomicos. Elle consiste à enregistrer les courants électriques naturels circulent dans le sous-sol et à détecter leurs anomalies, qui sont souvent des signes précurseurs de séismes.
Il n'en reste pas moins qu'il est admis que les séismes sont imprévisibles et il n'y a que la prévention qui vaille en matière notamment de respect des règles de l'urbanisme.
Il y a un peu plus de 30 ans d'ailleurs, Haroun Tazieff, le célèbre vulcanologue français avait alerté sur le danger représenté par les constructions sauvages, le long du littoral algérien. Personne n'avait voulu écouter cet éminent expert étranger passé ministre et décédé depuis, qui séjourna en Algérie juste après le séisme d'El-Asnam, pour y donner quelques conférences sur l'origine des tremblements de terre et la manière d'en limiter les dégâts, notamment humains, sachant qu'on ne peut pas, dans l'absolu, les prévenir.
Si l'on avait pris compte de ses recommandations, ont dit certains, le bilan des victimes des séismes de Boumerdes en 2003 et d'Alger en 2014 auraient été, peut-être, moins lourds.
Mais comme on dit, à chaque chose malheur est bon et un chroniqueur l'a affirmé récemment « malgré les dégâts, les séismes ont cet avantage, ils révèlent souvent les contradictions des constructions humaines, celles de l'échafaudage des bâtiments ou celles de l'explication magique ! ».
Le terrible séisme qui vient de frapper la Turquie et la Syrie nous renvoie à notre propre fragilité, celle d'un pays exposé à tout instant à un séisme ravageur : les experts sont unanimes, dans les tréfonds du sol algérien existent de multiples failles sismiques pouvant à tout moment devenir actives, soit légèrement, ce qui est le cas la plupart du temps, soit de manière violente, ce qui arrive parfois, comme à El Asnam, Boumerdès...
Le problème n'est pas dans l'existence de failles sismiques, la nature est ainsi faite, ni dans leur activation, quasi difficilement identifiable. Il réside dans la prévention, c'est-à-dire la sensibilisation de la population pour l'acquisition de comportements de sauvegarde au moment de la catastrophe et dans la mise en place par les pouvoirs publics de normes techniques les plus sévères en matière de bâti. Et enfin, dans les moyens humains et matériels à déployer au niveau des secours lors des catastrophes. Des pays, tels que le Japon, ont pu combiner ces trois éléments et rendre ainsi l'exposition aux séismes la moins coûteuse en vies humaines et en dégâts matériels. En Algérie, on est loin du compte : si quelques leçons ont pu être tirées des séismes de ces dernières décennies, d'autres à venir - et ils interviendront à coup sûr - seront ravageurs lorsqu'ils dépasseront une certaine intensité.*
Et les séismes qui se sont produits en Turquie et en Syrie ne seraient pas, hélas, les derniers d'autant plus qu'ils viennent dramatiquement mais opportunément rappeler le péril imminent qui menace toutes ces populations du bassin méditerranéen en général mais aussi celles occupant levieux bâti d'El Hamri, Gambetta, des Casbah d'Alger, de Constantine, ou encore d'Annaba, qui ont dû, très certainement, ressentir, dans leur tête et leurs tripes, l'onde de choc.
Elles survivent toutes dans ces quartiers populaires où jadis, il faisait bon vivre mais aujourd'hui, ce sont des lieux funestes où des familles entières étouffées par les grabats de leurs immeubles et la bêtise humaine rendent l'âme, entre deux tremblements de terre, une inondation et surtout le sentiment d'avoir été abandonnées par ceux-là mêmes qui avaient la responsabilité de les prendre en charge et de les secourir.
Et ce n'est pas faute pour elles de les avoir alerté sur la précarité de leur situation et du péril planant sur leur tête.
La précarité de ces habitations de céans et d'ailleurs a atteint un seuil alarmant : le parc immobilier national, selon les professionnels, est constitué de 7 millions de logements dont 1,5 million d'unités menaçant ruine !
De plus il diminue, inexorablement, suite aux catastrophes naturelles et se réduit aussi par la faute de l'occupant qui néglige l'entretien de son habitation, qu'elle lui soit propre ou qu'elle relève du patrimoine public.
L'absence d'entretien, les attaques climatiques additionnées aux adaptations décidées de manière unilatérale par les occupants qui, non seulement s'approprient les espaces communs, mettent aussi en péril la vie de leurs colocataires en s'autorisant, pour certains, des constructions illicites sur les terrasses, au vu et au su de tout le monde, élus locaux compris, ajoutent à la précarité du vieux bâti.
On l'aura compris, il ne suffit pas aujourd'hui prétendre régler la crise du logement en construisant des nouvelles cités, il y a aussi urgence à assurer la maintenance de ce qui existe déjà !
Il est important de comprendre que tout logement ou équipement a une durée de vie et qu'il est sujet, périodiquement, à une usure qu'il y a lieu de prendre en charge dans le cadre d'un programme concret de survie et de réhabilitation, avait souligné le Collectif National des Experts Architectes (CNEA) dans son livre blanc révélé en 2011.
Il avait proposé alors la création d'un « carnet de santé du bâtiment » ainsi que la mise en place « d'un fond national de l'amélioration de l'habitat et le lancement d'un programme de réhabilitation d'un vieux bâti ».
A croire que le responsable de ce collectif prêchait dans le désert puisque les choses sont restées en l'état dans nos villes usées et ravagées par tant de catastrophes naturelles et leurs lots de morts et de blessés.
Hérité de la colonisation le vieux bâti fait peur ! Il fera encore couler beaucoup de larmes, d'encre, de peinture, de plâtre, de promesses et d'argent facilement gagné par ces « bricoleurs » s'improvisant entrepreneurs en bâtiment !
Le professeur A.Chelghoum vient de le déclarer, « le pays regorge d'experts y compris dans la sphère privée qui ne demandent qu'à être associés dans cette crise ; il est temps pour les pouvoirs publics de déclencher une opération sérieuse d'expertise globale de tous les vieux bâtis, ce qui permettrait d'aboutir à une opération de réhabilitation, de renforcement ou de confortement selon les résultats de chaque expertise ».
L'ignorance fait plus de dégâts dans un pays où l'acquisition d'une culture sismique aurait dû se faire jour depuis le tremblement de terre d'El Asnam.
Autre sujet, l'affolement qui suit le séisme se révèle, en définitive, plus meurtrier que le tremblement de terre en lui même ; des personnes peuvent mourir parce qu'elles voulaient survivre ; dans un moment de folle panique, elles sont amenées à se défenestrer et le professeur Khiati de la Forem l'a bien expliqué « la peur dans ce genre de circonstances est tout à fait légitime, même si elle peut être contenue et structurée ; un séisme, lorsqu'il se produit, dans un laps de temps et durant cette période, l'individu ne contrôle plus ses réactions encore moins ses gestes ; il est désemparé parce que tout simplement il n'a reçu aucune formation dans ce sens ».
Si les Algériens étaient sensibilisés sur les procédures à respecter en cas de tremblement de terre, ils ne chercheraient pas l'issue fatale, poursuivit l'expert !
En fait, tout le monde est responsable et personne n'est coupable dans cette affaire, ni l'école encore moins la protection civile qui auraient pu, pour le moins, prendre quelques initiatives utiles !
Au Japon, il y a 30 à 40 séismes par an, mais cela ne suscite ni panique, ni affolement car les Japonais sont éduqués, formés et sensibilisés pour faire face à ce phénomène naturel ! Dans ce pays les experts et la population s'attendent depuis des années au « Big One ! », un tremblement de terre aussi important que celui qui a touché le pays en 1923 faisant plus de 140 000 victimes.
Entrainés depuis l'enfance les Japonais savent qu'ils doivent couper l'électricité, l'eau et le gaz et se précipiter sous une table, dès la première secousse tellurique. Au cas où ils se retrouveraient prisonniers des décombres, certains ont pris des kits de survie pour tenir jusqu'à l'arrivée des secours et les écoliers disposent d'un casque de protection dans leur casier ; pour vous dire, les nôtres d'écoliers ne disposent même pas de casiers !
En 2009, près de 800 000 personnes dans le pays, dont le Premier ministre, ont participé au grand exercice annuel et national de prévention, à la date anniversaire du grand tremblement de terre de 1923. Régulièrement, les camions de simulation sismique sont installés dans les rues dans le but de sensibiliser la population aux effets du tremblement de terre.
Le nôtre de camion a été étrenné une ou deux fois, avec force caméras, et depuis on ne l'a plus revu !!!
Le Japon a le système d'alerte le plus évolué dans le monde même s'il n'est pas parfait, mais un bâtiment a plus de chance de s'écrouler si les responsables locaux ont triché sur les matériaux de construction pour récupérer de l'argent au passage, a indiqué un journaliste ; ce type de scandale s'est, notamment, produit en 2008, après le séisme de Suichuan en Chine, qui avait entrainé la destruction de plusieurs écoles.
Il s'est aussi produit chez nous à Boumerdes, où des cités flambant neuf se sont affaissées comme des châteaux de cartes ; on n'a jamais retrouvé les boites noires et les responsables courent toujours !
Le séisme frappe et la bêtise tue et tuera encore si des enseignements ne sont pas tirés du dernier séisme : il faut procéder à la destruction de tous ces immeubles périlleux pour disposer dans certains quartiers urbains d' « aires de rassemblement » pour les habitants, au cas où d'autres immeubles menaceraient de s'écrouler il faut tout revoir des normes des constructions parasismiques non pas pour arriver au niveau du Japon où les édifices sont montés sur vérins, ressorts, rails ou roulements à bille et soutenus par des amortisseurs ou haubans ce qui leur permet de faire face aux catastrophes naturelles mais pour au moins faire respecter les dosages de béton et rendre obligatoire le permis de construire!
Il faut tout revoir au CRAAG, au CTC, chez les entreprises de réalisation.
Il faut redynamiser cette « Délégation aux risques majeurs » en lui confiant plus de prérogatives notamment en matière réglementaire.
Il faut être, dorénavant, exigeant en matière de qualité des produits et équipements destinés à l'habitat.
Il faut revoir tous les programmes des écoles de formation et exiger une remise à niveau de tous les professionnels qui sont sur le marché de l'architecture et de l'urbanisme.
Il faut engager une véritable politique de réaménagement du territoire, réviser le Schéma National d'Aménagement du Territoire (SNAT), oublier les projets mort-nés des pseudo-villes nouvelles de Sidi Abdellah et Boughzoul et construire des villes modernes où il fera bon vivre avec de grands espaces de rassemblement, des aires de stationnement et de loisirs.
Il faut tenir compte des enseignements de tous ces séismes passés pour réviser et enrichir le Règlement Parasismique Algérien (RPA).
Il faut réfléchir à la mise en place « d'un ministère de la Protection civile et de la Population ».
Il faut, il faut, il y a tellement de choses à faire qu'on ne sait plus, en fait, s'il faut : donner la priorité à la révision des plans ORSEC (800 communes en seraient dépourvues et des centaines d'autres doivent impérativement procéder à sa révision) ou changer ces responsables qui ont prouvé leur incompétence à prendre en charge ne serait-ce que le vieux bâti d'Alger, d'Oran et d'ailleurs, car comme il a été affirmé par un éditorialiste « c'est eux l'épicentre du problème ! ».
C'est là un véritable changement de paradigme qu'il faudrait engager, collectivement, et sans tardiveté pour reprendre ce bon mot de Cherif Rahmani auteur, par ailleurs, d'un excellent article** dans lequel il alerte sur les risques encourus par la « Mare nostrum » en plus de ceux décrits supra.
D'espace de contact et de rencontre, la Méditerranée est en train de basculer et de devenir une zone de tensions politiques, économiques et culturelles.
Les conflits multiples, ethniques, religieux et géostratégiques qui minent son équilibre, avec leurs lots d'exils, de violences et de tragédies (cf. drame dans l'enclave espagnole de Melilla) n'en sont que les signes avant-coureurs !
Pour conclure, rappelons qu'une réunion des «Présidents de l'Union africaine pour la Protection Civile et la Gestion des Risques de Catastrophes », présidée par Brahim Merad, le ministre de l'Intérieur, des Collectivités locales et de l'Aménagement du territoire a permis aux participants de discuter de la proposition de l'Algérie relative à « la création d'un mécanisme régional contre les risques majeurs ».
*Ces fléaux qui menacent l'Algérie par Ali Bahmane (El Watan)
**La Méditerranée, une région vulnérable fortement exposée aux dérèglements climatiques par Cherif Rahmani Ambassadeur des déserts et des terres arides - Membre du Panel des éminentes personnalités du MAEP
par Cherif Ali
Jeudi 9 février 2023
Jeudi 9 février 2023http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5318740
L’image a fait le tour de la toile, ce mardi. L’image d’une fillette syrienne qui a accueilli les secouristes avec le sourire, après avoir passé 17 heures sous les décombres. 17 heures où elle a veillé sur son petit frère, le protégeant de sa frêle personne, de l’immense dalle qui menaçait de les écraser.
Un sourire de soulagement et un sourire de la satisfaction du devoir accompli !
Bravo fillette… Et merci pour cette leçon de courage !
Alors que le monde semble oublier que la terre a tremblé au Levant, l'Algérie n'a pas hésité un instant à venir en aide à cette population en détresse. Une position ferme et courageuse loin de toute autre considération politique.
«Lorsque la fraternité vous manque, vous la trouverez chez l'Algérie. Elle se précipite à la rescousse.» Ce beau message est un tweet du général libanais, Jamil Sayyed, qui a rendu un vibrant hommage à l'Algérie pour son intervention humanitaire et fraternelle afin de venir en aide à la population syrienne touchée par un terrible tremblement de terre. L'homme politique et ex- directeur général de la Sûreté générale libanaise soutient que «la position algérienne n'a pas de prix, elle n'a pas peur des intimidations de l'Occident ni est attirée par les instincts de l'Orient». Jamil Sayyed ne s'arrête pas là. Il rappelle que le pays au million et un demi-million de martyrs ne s'aligne qu'avec la justice. «Que ce soit pour la cause palestinienne ou en aidant la Syrie et son peuple», soutient-il dans le même tweet. «Avec l'Algérie, on se rend compte que l'arabisme n'est pas un slogan creux, mais plutôt une position d'honneur à une époque d'humiliation», a-t-il conclu dans un post qui a été retweeté plus de 700 fois et aimé par plus de 7000 personnes. Les internautes de tout le Monde arabe, particulièrement la Syrie, ont réagi à ce message. Ils saluent unanimement la posture indéfectible de l'Algérie avec les peuples dans la détresse. Les «Tahya El Djazaïr» ont fusé de partout sur ce réseau social. Comme, d'ailleurs, dans les rues syriennes en général, et Alep en particulier. Dans des vidéos qui font le «buzz» sur les réseaux sociaux, on peut voir que les Syriens ont accueilli les sauveteurs algériens comme des héros. À l'image de ce quinquagénaire, les larmes aux yeux, qui a pris dans ses bras un agent de la Protection civile. Un grand moment d'émotion qui résume le sentiment qui règne en Syrie après que l'Algérie est venu au chevet de ce peuple frère. Car, comme l'a dénoncé un chroniqueur de la radio française Europe 1, «la terre a tremblé en Syrie mais personne ne tremble pour les Syriens «.
Le pays effondré par 12 ans de guerre se retrouve à faire face à une nouvelle tragédie. Néanmoins, les Occidentaux qui ont provoqué ce massacre de plus d'une décennie n'ont pas levé le petit doigt pour venir en aide aux populations, qu'ils disaient pourtant vouloir «protéger «en mars 2011! À entendre leur réaction et l'envoi de l'aide internationale, c'est comme s'il n' y a pas eu de séisme au ««Levant». Le monde a abandonné des enfants, femmes et hommes ensevelis sous des décombres qui tentaient de s'en sortir avec les moyens du bord. Ils ont faim, il fait froid. Des milliers de personnes attendent d'être sauvées, des familles attendent au moins de retrouver les corps de leurs proches pour faire leur deuil. Cela ne semble pas faire «frémir «le monde. Personne n'a osé lever l'embargo dicté par les grandes puissances. Sauf l'Algérie. Un pays avec une culture humaniste qui ne prend pas en considération les aspects politiques quand il s'agit de vies humaines. Comme avec la Turquie, elle n'a pas hésité un instant à envoyer des vivres et des secours.
L'aide algérienne est la première a être arrivée dans les deux pays. Les présidents syrien et turc ont appelé Abdelmadjid Tebboune pour remercier les Algériens pour leur solidarité. Bachar Al Assad a insisté sur la position noble, fraternelle et solidaire de notre pays. ««J'exprime ma reconnaissance pour la solidarité intrinsèque du peuple algérien, d'autant que l'Algérie est le premier pays à répondre à l'appel à l'aide», a-t-il soutenu. La presse syrienne a aussi insisté sur cela, mettant en avant les liens forts qui unissent les deux pays. Elle a rappelé comment l'Algérie n'a jamais délaissé le peuple syrien durant la tragédie qu'il vit depuis 2011. La presse arabe a également fait l'écho de la position algérienne. Elle a salué ce courage et cette humanité qui est, selon elle, la marque de fabrique des ««Djazaïri». Surtout qu'elle a mis en avant le fait que des cargos de l'aviation algérienne atterrissent tous les jours remplis de médicaments, lait pour enfants, de couvertures, tentes et de l'eau minérale. Ils ont été octroyés par l'État algérien. Néanmoins, le peuple est aussi en train de se mobiliser pour ses frères de Syrie. Des campagnes ont été lancées sur les réseaux sociaux afin de recueillir des dons pour une population en détresse qui lui est si proche, malgré l'éloignement géographique. Le coeur des Algériens bat pour la Syrie. La Mecque des révolutionnaires assume parfaitement ses principes de solidarité avec les peuples. L'Algérie n'abandonnera jamais ses fondements. La Syrie est l'un d'eux...
Les peuples tunisien et algérien commémorent ce mercredi 08 février 2023, le 65e anniversaire des événements de Sakiet Sidi Youssef, où le sang tunisien et algérien se sont mêlés. Ces événements sanglants resteront dans l’Histoire comme le symbole de la lutte commune et de la solidarité effective entre les deux pays frères.
Le 8 février 1958, Sakiet Sidi Youssef a été le théâtre événements violents dans le contexte de la guerre d’Algérie. 25 avions de combat français ont attaqué le village tunisien se trouvant à quelques kilomètres de la frontière algérienne, tuant plusieurs dizaines de civils et provoquant des tensions entre la Tunisie et la France.
Les bombardements de Sakiet Sidi Youssef, ont, en effet, visé des civils tuant faisant plus de 70 morts et 130 blessés.
L'Algérie a annoncé mercredi le rappel pour consultations de son ambassadeur en France, accusant des diplomates d'avoir procédé à "l'exfiltration clandestine et illégale" via la Tunisie de la militante et journaliste algérienne Amira Bouraoui.
C'est un nouveau soubresaut dans l'histoire des relations entre Paris et Alger. Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a décidé, mercredi 8 février, de rappeler "pour consultations" son ambassadeur en France, à la suite de "l'exfiltration" de la militante et journaliste Amira Bouraoui via la Tunisie, lundi soir, a annoncé la présidence dans un communiqué.
Soulignant que l'Algérie a, via une note officielle, "protesté fermement contre l'exfiltration clandestine et illégale d'une ressortissante algérienne" vers la France, le président Abdelmadjid Tebboune a ordonné le rappel en consultations de l'ambassadeur d'Algérie en France, Saïd Moussi, avec effet immédiat", a précisé la présidence.
Arrêtée vendredi en Tunisie, d'où elle risquait d'être expulsée vers l'Algérie, l'opposante politique Amira Bouraoui a finalement pu embarquer lundi soir sur un vol à destination de la France.
Cette Franco-Algérienne faisait l'objet d'une interdiction de sortie du territoire en Algérie. Elle avait été interpellée par la police tunisienne alors qu'elle cherchait à prendre un avion pour la France. Une juge l'avait remise en liberté lundi mais elle avait ensuite été emmenée par des policiers tunisiens avant d'obtenir la protection du consulat français à Tunis.
Selon le quotidien français Le Monde, elle a été "accueillie quelques heures à l'ambassade de France" avant d'obtenir "du président tunisien Kaïs Saïed l'autorisation de rejoindre la France".
"Grand dommage" aux relations algéro-françaises.
Peu avant le rappel de l'ambassadeur algérien à Paris, le ministère algérien des Affaires étrangères a indiqué avoir exprimé mercredi, dans une note officielle à l'ambassade de France "la ferme condamnation par l'Algérie de la violation de la souveraineté nationale par des personnels diplomatiques, consulaires et de sécurité relevant de l'État français".
Ces personnels "ont participé à une opération clandestine et illégale d'exfiltration d'une ressortissante algérienne dont la présence physique sur le territoire national est prescrite par la justice algérienne", a précisé le ministère dans un communiqué.
Dans cette note officielle, l'Algérie a rejeté ce développement "inadmissible et inqualifiable" qui cause "un grand dommage" aux relations algéro-françaises.
Après un coup de froid depuis l'automne 2021, Paris et Alger avaient scellé un net réchauffement de leurs relations à l'occasion d'un déplacement du président français Emmanuel Macron en août dernier. Les deux chefs d'État avaient alors signé en grande pompe une déclaration commune pour relancer la coopération bilatérale.
En octobre, c'est la Première ministre française Élisabeth Borne, accompagnée d'une quinzaine de ministres, qui s'était rendue à Alger pour concrétiser la réconciliation entre les deux pays par des accords dans l'industrie, la création de start-up, le tourisme et la culture.
"De retour très vite" en Algérie
Amira Bouraoui, médecin de formation âgée de 46 ans, s'est fait connaître en 2014 avec son engagement dans le mouvement 'Barakat' qui a mené une campagne contre le quatrième mandat du président défunt, Abdelaziz Bouteflika.
Elle a tenté plusieurs fois de quitter l'Algérie ces derniers mois pour rendre visite à son fils établi en France, mais en vain, selon le site du média algérien radio M où elle animait depuis septembre une émission politique.
Amira Bouraoui a remercié "tout ceux qui ont fait en sorte qu'(elle) ne (se) retrouve pas une autre fois derrière les barreaux", mercredi sur sa page Facebook, citant les ONG Amnesty International et Human Rights Watch (HRW), les journalistes et les personnels consulaires de l'ambassade de France en Tunisie.
Elle a assuré que son départ pour la France n'est pas "un exil" et qu'elle sera "de retour très vite" en Algérie.
Mercredi soir, des médias algériens ont par ailleurs annoncé l'interpellation de Mustapha Bendjama, rédacteur en chef du journal Le Provincial à Annaba (est), non loin de la frontière avec la Tunisie.
Avant son arrestation, il a dit à des collègues avoir été contacté au préalable par la police lui demandant "des informations sur la sortie d'Amira Bouraoui du territoire" et leur avoir répondu n'avoir "rien à voir avec cette affaire".
L’activiste franco-algérienne Amira Bouraoui est tirée d’affaire, semble-t-il. Sous le coup d’une condamnation à deux ans de prison par un tribunal algérien, elle a fui le pays et mis le cap sur Tunis. Là elle a décidé d’embarquer pour la France, avec son passeport français, les autorités l’en ont empêchée. Décision a été prise de la renvoyer chez le voisin et frère algérien. C’était sans compter sur la débauche d’énergie de ses avocats…
Amira Bouraoui, 46 ans, médecin de formation, est maintenant «sous la protection des autorités françaises», a confié son avocat François Zimeray. Elle est «libre et en bonne santé», a ajouté son avocat tunisien, Hashem Badra, cité par Le Figaro hier lundi 6 février dans la soirée.
Me Zimeray s’est également «félicité de la mobilisation des autorités françaises» pour sa cliente, sous le coup d’une interdiction de quitter le territoire tunisien. Rappelons qu’elle a débarqué vendredi dernier à Tunis. Après son arrestation elle a été incarcérée, une détention provisoire qui a pris fin hier, après son passage devant une juge. Elle a été remise en liberté, en attendant une autre comparution ce 23 février…
Pourtant pour on ne sait quelle raison elle a été conduite vers un poste de la police des frontières à Tunis pour «être expulsée vers Alger» hier dans la soirée, a déploré son avocat tunisien. Le ministère de l’Intérieur a refusé de commenter cette affaire.
«Ma cliente a fait l’objet d’une tentative d’enlèvement et de séquestration de la part de certaines autorités dépositaires de la force publique en Tunisie, à la demande des autorités algériennes», s’était indigné François Zimeray, ancien ambassadeur de France au Danemark.
«J’ai fait savoir cet après-midi que je n’hésiterais pas à déposer une plainte au parquet de Paris pour enlèvement-séquestration si elle n’était pas immédiatement libérée sachant que, en droit français, la détention arbitraire commise par un agent dépositaire de la force publique est un crime. Et que lorsque ce crime est commis à l’étranger sur un citoyen français, les tribunaux français sont compétents», avait-il ajouté.
D’après une responsable du bureau de l’ONG Human Rights Watch à Tunis, «en aucun cas» il ne fallait remettre Amira Bouraoui à «un pays où elle a été emprisonnée et fait l’objet d’une série de poursuites pour son militantisme pacifique et ses opinions».
«Connue depuis son engagement dans le mouvement ‘Barakat’ en 2014 qui a mené une campagne contre le quatrième mandat du président défunt, Abdelaziz Bouteflika, elle a tenté plusieurs fois de quitter le territoire national ces derniers mois pour rendre visite à son fils établi en France, mais en vain», d’après le site du média algérien Radio M où elle pilotait depuis septembre un programme politique.
A noter que la militante avait fait de la prison en 2020, dans le cadre de plusieurs affaires délictueuses. Après sa libération en juillet 2020 elle a de nouveau eu maille à partir avec la justice, pour «offense» à l’Islam dans un post incendiaire sur sa page Facebook.
Rachid Hami évoque la mort d'un jeune militaire lors d'un bizutage et les relations complexes entre deux frères. Un film bouleversant incarné par deux acteurs remarquables : Karim Leklou et Shaïn Boumedine.
Les récits d'immigration et de fratrie inspirent décidément les cinéastes français en ce début d'année. La semaine dernière, Léonor Serraille, dans le subtil « Un petit frère », examinait les relations entre une mère et ses deux fils venus de Côte d'Ivoire. Aujourd'hui, c'est au tour de Rachid Hami (déjà auteur d'un premier film en 2017 : « La Mélodie ») d'évoquer le destin de deux frères installés avec leur mère dans l'Hexagone au début des années 1990 pour fuir les réalités sanglantes de la guerre civile en Algérie et l'influence désastreuse d'un père violent.
La Grande Muette
Dans le bien nommé « Pour la France », le cinéaste ouvre son récit par un drame : la mort, lors d'un « rituel d'initiation » (autrement dit, un bizutage), d'un étudiant de l'école de Saint-Cyr : Aïssa. Pourquoi ce décès absurde ? Quelles sont les responsabilités de la hiérarchie militaire dans la mort de ce garçon de 23 ans prêt à tous les sacrifices pour honorer son pays d'adoption : la France ? Son frère aîné, Ismaël, mène l'enquête. Cette dernière ne va pas concerner que les dissimulations de la Grande Muette, qui cherche à étouffer la désolante affaire. Si Ismaël souhaite connaître les circonstances qui ont entraîné le décès de son frère et lui offrir des funérailles avec les honneurs militaires, le héros, ravagé par la douleur, effectue surtout un vertigineux voyage dans sa mémoire pour tenter de mieux comprendre les choix et la personnalité profonde du disparu. Ismaël se souvient ainsi de quelques étapes fondamentales de sa vie avec Aïssa : leur enfance en Algérie dans une famille dysfonctionnelle, leur arrivée dans l'Hexagone, un séjour de quelques mois à Taïwan où le frère cadet s'était installé avec sa compagne…
Le film donne à voir des fragments de ce parcours et dépeint les relations souvent conflictuelles entre deux hommes à la fois infiniment proches et radicalement différents. Aïssa, ce brillant étudiant, était un modèle de sérieux et de discipline, alors qu'Ismaël, hanté par une colère sourde, a toujours évolué dans les marges et peine à trouver sa voie dans son existence brinquebalante.
L'identité en question
Rachid Hami met en scène le combat d'Ismaël pour la vérité et ses relations ambivalentes avec son frère avec une maîtrise et une pudeur d'autant plus impressionnantes que cette histoire est… la sienne, lui qui a perdu son frère militaire en 2012 dans des circonstances similaires à celles racontées par le film. Sans complaisance ni sensiblerie, le cinéaste, avec une rigueur implacable, remonte le cours d'une enquête et d'une histoire familiale complexes. En filigrane, tout comme Léonor Serraille dans « Un petit frère », il signe un film profond et dépourvu de clichés sur des sujets sensibles : l'intégration et le sentiment d'appartenance à la communauté nationale.
Rachid Hami a été acteur avant de passer à la réalisation - il a notamment joué dans « L'Esquive », d'Abdellatif Kechiche - et cette première vie professionnelle l'a de toute évidence inspiré pour diriger les deux comédiens principaux de « Pour la France » : Shaïn Boumedine (l'acteur de « Mektoub My Love », du même Kechiche) dans la peau d'Aïssa et Karim Leklou (vu notamment dans « BAC Nord », de Cédric Jimenez) dans celle d'Ismaël. La réussite de ce film bouleversant sur deux personnages ennemis des assignations et qui, selon la formule du cinéaste, « refusent de se laisser enfermer dans les réflexes identitaires », doit beaucoup à cet exceptionnel duo d'acteurs.
POUR LA FRANCE
film français
de Rachid Hami.
Avec Karim Leklou, Shaïn Boumedine, Lubna Azabal… 1 h 53.
Olivier De Bruyn
Quelles clés pour s’adapter dans un environnement complexe ?
Comment réagir face aux défis de la transition énergétique ? Comment se positionner dans un environnement économique et politique instable ? Comment exploiter au mieux les opportunités d’innovation dans chaque secteur ? Au quotidien, à travers nos décryptages, enquêtes, chroniques, revues de presses internationales et éditos, nous accompagnons nos abonnés en leur donnant les clés pour s’adapter à un environnement complexe.
Cinéma : « Pour la France », requiem pour un frère mort à Saint-Cyr
Dans ce film lumineux et sans haine en salles ce mercredi, le cinéaste Rachid Hami retrace l’histoire de son jeune frère mort noyé lors d’un exercice militaire absurde en 2012. Une odyssée familiale sur vingt ans, de l’Algérie en proie à l’islamisme aux arcanes de l’armée française.
Dans «Pour la France», le cinéaste Rachid Hami retrace l’histoire de son jeune frère saint-cyrien mort lors d’un «bahutage», un bizutage collectif qui se donne des airs d’opération commando. LP/Delphine Goldsztejn
Par Yves Jaeglé
Le 7 février 2023 à 12h13
Une nuit d’octobre 2012, un jeune saint-cyrien se noie en traversant un étang glacé du Morbihan, alourdi par son équipement militaire, lors d’un exercice stupide de « bahutage » — un bizutage collectif qui se donne des airs d’opération commando — au cours duquel la traversée d’un premier groupe de recrues avait déjà failli se terminer tragiquement. Ce sous-lieutenant s’appelait Jallal Hami, avait échappé gamin à l’
Etudiant noyé à Saint-Cyr : qui est responsable de la mort de Jallal ?
Jallal Hami, élève officier à Saint-Cyr, est décédé dans la nuit du 29 au 30 octobre 2012. DR
2947 jours. Cela fait huit ans que les proches de Jallal Hami, mort noyé, attendent ce procès. « C'est inadmissible! Est-ce pour nous aider à oublier les fautes des responsables et diluer leurs peines? », s'interroge son frère Rachid. Après plusieurs années
Par Solenne Durox, correspondante à Rennes (Ille-et-Vilaine)
Le 23 novembre 2020 à 05h56, modifié le 23 novembre 2020 à 08h05
Dans la deuxième ville d’Ukraine, à 80 kilomètres de la ligne de front, et malgré les bombardements qui se poursuivent, on réfléchit déjà à la reconstruction de la cité historique.
Ce matin, Ina, une femme élégante de 60 ans environ, est venue regarder le ballet des tractopelles qui déblayent les gravats de son immeuble. Immobile, le regard perdu dans la contemplation de leur labeur. De son appartement au huitième étage, cette ancienne ingénieure du bâtiment pouvait voir l’ensemble de la Saltivka, une gigantesque cité-dortoir bâtie par les Soviétiques, au nord-est de Kharkiv. « Tout était vert, répète-t-elle, il y avait des arbres partout. » Aujourd’hui, il ne reste de son appartement qu’un trou béant.
Alors que la guerre ne semble pas vouloir finir, le maire, Ihor Terekhov, envisage de reconstruire les 4 500 maisons et immeubles détruits depuisl’invasion russe. Après tout, le plan pour le développement de Londres n’a-t-il pas été imaginé dès 1943, au milieu des bombardements allemands ? « Moi, je ne veux pas me souvenir de cette catastrophe », confie Ina, qui a vécu trente ans dans ce qu’elle décrit comme le « paradis de Saltivka », avec ses jardins d’enfants et ses supermarchés au pied des barres d’immeubles. C’est ici qu’elle s’est mariée, que ses enfants ont fait leurs premiers pas. Mais un jour de mars 2022, elle a dû fuir précipitamment son logement, en laissant derrière elle ses vêtements, ses photos, toutes les reliques de sa vie quotidienne. Aujourd’hui, devant le cimetière de béton, Ina fait le deuil de ses souvenirs.
Les tranchées creusées pour défendre le nord de la deuxième plus grande ville d’Ukraine se remplissent de détritus, à leur tour recouverts d’un manteau de neige. En septembre dernier, à la surprise du monde entier, les Ukrainiens ont repoussé les Russes, desserrant l’étau qui étranglait Kharkiv. Le front s’est désormais figé à 80 kilomètres du centre-ville. Mais le calme des rues, dont les bruits sont étouffés par les flocons, est trompeur. La nuit, les sirènes retentissent, et parfois une bombe tombe.
Pendant que je refermais la fenêtre de ma chambre, un missile russe a explosé 500 mètres plus loin, tuant un homme dans son appartement. Et le 5 février, deux missiles S-300 sont tombés sur l’université, causant 5 blessés.Alors Kharkiv retient son souffle en attendant l’anniversaire de l’invasion du pays. Il y a quelques jours, Vadim Skibitsky, chef adjoint des services de renseignements ukrainiens, a prévenu qu’une division de chars russes avait été déployée en Biélorussie, peut-être pour lancer un nouvel assaut vers la ville…
Réfugiée dans le sous-sol de l’immense synagogue chorale de Kharkiv, comme une centaine d’autres juifs dont les maisons ont été détruites, Irina, 18 ans, traumatisée, ne sort plus à l’extérieur. Jeune fille pâle, à la longue tresse rousse, elle caresse gravement un petit chat roux comme elle, tenu en laisse. Assise sur le lit double qu’elle partage avec sa mère et sa grand-mère, elle nous raconte sa vie rétrécie de confinement. En deuxième année d’architecture d’intérieur, elle suit ses cours en ligne. Lorsque les coupures d’électricité interrompent les leçons, elle passe le temps en brodant des perles sur des tapisseries. Elle regarde des films d’amour ou policiers sur son portable. Et elle s’est aussi mise à apprendre le coréen : « Mais celui de la Corée du Sud, précise-t-elle en souriant. J’aime tellement la K-pop ! A un moment, j’avais appris l’espagnol parce que je regardais souvent les matchs du Barça, mais ça m’a passé… »
Tous ses amis ont quitté la ville au début de la guerre. Beaucoup sont partis en Israël. La synagogue avait affrété des bus pour Kiev ou Chisinau, capitale de la Moldavie. « Nous avons aidé plus de 4 000 personnes à quitter la ville », m’a annoncé le rabbin Chaïm Levinson en m’accueillant avec le sourire – mais sans me serrer la main, conformément à sa conception « intégrale », pour ne pas dire radicale, de la religion juive. « Notre synagogue est la deuxième plus grande d’Europe, après celle de Budapest », a-t-il ajouté avec fierté, en nous invitant à le suivre pour la visiter.
Construite entre 1909 et 1913, la synagogue combine les styles néo-roman et néo-gothique avec des influences d’architecture islamique : une sorte de vue imaginaire « des immenses murs de l’ancienne Jérusalem ». Immense, la synagogue l’est effectivement : plus de 2 000 mètres carrés contenant un temple, une bibliothèque, des salles d’étude, des logements et un cinéma. Il y eut même voici quelques années, avant que le mouvement hassidique n’en reprenne le contrôle, une salle de kickboxing !
« Toute ma vie je serai de Kharkiv »
Iaroslav, un trentenaire parlant un français élégant, n’a pas quitté d’une semelle lerabbin depuis notre arrivée. Il est là pour aider à organiser la vie des réfugiés. Quand ce travail sera fini, il pense quitter Kharkiv à son tour. « Toute ma vie je serai de Kharkiv, mais j’ai besoin d’un avenir », m’avoue-t-il en fumant une cigarette sur le perron. « Je pense partir m’installer en France, sans doute dans le Marais. Même si j’ai un peu peur : ici, en Ukraine et à Kharkiv, les juifs ne courent aucun danger, tu ne risques rien si tu portes une kippa, ce qui n’est pas le cas en France… Mais je choisirai un bon quartier », précise-t-il en riant.
Le plus ancien bâtiment religieux de Kharkiv, presque aussi ancien que la ville elle-même, est la cathédrale de l’Intercession de la Sainte-Mère de Dieu, dans le monastère de Pokrov. Ce chef-d’œuvre turquoise de l’art baroque slave, dont la construction fut entamée en 1659 par les Cosaques, nécessita trente ans de travaux. Sur l’église d’hiver au rez-de-chaussée s’empilent au premier étage une église d’été, puis trois dômes dorés en forme de bougies. L’ensemble est entouré par un chemin de ronde d’où les défenseurs pouvaient transpercer de flèches leur ennemi. Car dans cette ville frontière, au milieu des vastes plaines incertaines, la cathédrale faisait partie de la forteresse.
Sur les murs, les icônes où coule le sang vermeil des martyrs retrouvent du sens, et s’animent à nouveau sous la prière des fidèles plongés dans la guerre. Comme la prière d’Olga, ancienne professeure de littérature russe, qui aimerait que les massacres s’arrêtent. Elle veut la paix, mais pas une paix qui justifierait l’autodafé des grands auteurs : Pouchkine, Dostoïevski ou son favori, Lermontov. « C’est comme s’amputer d’une partie de soi-même ! Il devrait y avoir une frontière étanche entre la politique et la littérature », soupire la vieille dame qui, aujourd’hui, ne lit plus que les Evangiles.
C’est bien l’avis de Nestor, le pope du monastère, qui bénit les paroissiens qui s’agenouillent pour lui embrasser la main. Il est ukrainien, assure-t-il avec des yeux qui sont comme un ciel limpide, mais son monastère est encore dépendant du patriarcat de Moscou, contrairement à beaucoup d’autres qui ont tranché tout lien avec la Russie, provoquant un schisme religieux aussi profond que la rupture politique. Alors, que répond-il à ses fidèles qui l’interrogent sur Dieu au moment où cette guerre jette des orthodoxes contre des orthodoxes ? « Tout vient de Dieu. » La même réponse que le rabbin…
Dès la tombée de la nuit, les cafés et les restaurants se remplissent, comme pour conjurer le sort. Gastro bar, wine bar, steak bar, healthy bar où l’on décline les jus d’avocat et de goyave, il y en a pour tous les goûts. Dans la salle de gym qui surplombe l’avenue Nauki, on gravit en cadence les marches des machines de fitness jusqu’au couvre-feu de 23 heures. Quelques passants aux portefeuilles garnis chinent chez l’antiquaire de la rue Sumska, longue artère aux immeubles néoclassiques du XIXe siècle.
Des jeunes font la queue devant le cinéma
Au Toy Samyy Baranets, luxueux restaurant géorgien situé au rez-de-chaussée d’un bâtiment contemporain, les convives dégustent leurs khinkalis (raviolis géorgiens) en profitant de la vue sur l’impressionnante place Svobody – où le palais de l’administration régionale fut frappé par un missile au tout début de l’invasion russe. Au bout de cette place s’élève le complexe Derzhprom, une suite d’immeubles reliés entre eux par des ponts. Un chef-d’œuvre du constructivisme, achevé en 1928, qui reste d’une modernité stupéfiante et une source d’inspiration pour les architectes du monde entier. Dans le multiplexe du Nikolsky Mall, le grand centre commercial qui a récemment rouvert après avoir été bombardé, des jeunes font la queue pour voir « Knock at the Cabin » ou bien « Avatar 2 ». Cette fois la séance sera interrompue par les sirènes, mais ce n’est que partie remise : ils pourront revenir sans repayer, et le film reprendra là où il a été coupé.
Dans le sous-sol du Dublin Pub, une longue salle voûtée tapissée de posters pop, de sous-bocks du monde entier et de quelques pompes rutilantes, des militaires en permission sont attablés, en groupe, ou avec une fiancée à qui ils parlent les yeux dans les yeux en lui tenant la main. Et puis il y a les civils. L’ambiance n’est pas exubérante ; elle n’est pas non plus morose. Il faut bien vivre, même si l’on meurt en masse sur le front à deux heures de route d’ici.
Maksim Rosenfeld m’y attend, une pinte de Guinness épaisse comme du bitume posée devant lui. Barbe fournie, chevelure dégarnie, ce quadragénaire est rond comme son rire. Maksim est historien de l’art, et surtout amoureux de sa ville. C’est comme ça qu’il se présente : « Je suis un enfant de Kharkiv. » Après deux livres à succès, il a produit plusieurs vidéos sur sa chaîne YouTube. On le voit marcher dans les rues avec un gilet pare-balles, tout en expliquant la valeur patrimoniale des bâtiments détruits par les bombardements russes :
« 68 bâtiments historiques ont été endommagés. Des édifices publics ou des immeubles particuliers, comme la vingtaine de maisons du centre. »
Mais Maksim ne se complaît pas dans la lamentation ; il se projette déjà dans la reconstruction. « Pas après la guerre, me reprend-il, après la victoire ! » Selon lui, si une grande partie des bâtiments doit faire l’objet d’une « rénovation stricte dans le respect des règles de l’Unesco », quelques-uns pourraient bénéficier d’une « réinterprétation à la Viollet-le-Duc », et certains pourraient se voir « doter d’un apport contemporain », qui transformerait le traumatisme en « mémorial ». Il réfléchit : « Comme le Reichstag à Berlin. » C’est ce qu’il préconise pour le palais de l’administration régionale de la place Svobody, ou pour le palais de justice.
Kharkiv, la ville de l’avant-garde
Le patrimoine architectural de Kharkiv est déjà riche de son éclectisme : les styles baroque, classique, Art déco, constructiviste, moderniste se mélangent autant que les façades aux couleurs vives, jaune, vert, bleu, rouge… « Si Lviv est la ville de la fête, Dnipro celle du business, Odessa de la Riviera, Kharkiv est la ville de l’avant-garde », explique Maksim. C’est ici que des architectes comme Alexander Ginzburg et Auguste Perret, ou lesculpteur Ivan Kavaleridze, se sont épanouis. L’historien choisit astucieusement ses exemples : ces trois-là ont étudié à Paris…
Maksim poursuit son raisonnement : « Si Kharkiv est la cité de l’avant-garde, c’est parce qu’elle est une ville frontière. Lors de sa fondation en 1654, elle départageait le khanat tatar du tsarat de Russie. Aujourd’hui, elle ne doit plus seulement être considérée comme la frontière entre l’Ukraine et la Russie, mais comme la frontière entre notre passé et nos projets futurs. » Parmi ceux-ci, Maksim cite celui du célèbre architecte britannique Norman Foster : « Il a proposé un manifeste pour une reconstruction radicale de Kharkiv. Nous lui avons répondu : “Bien sûr, viens !” Des projets avec le MIT et Harvard ont aussi été évoqués. Cela dit, je ne pense pas que nous devrions suivre l’exemple de Beyrouth, qui a fait table rase de son passé après la guerre pour rebâtir une toute nouvelle capitale. Je plaide même pour que nous conservions les immeubles soviétiques, bien qu’ils soient haïs par une partie de la population. Nous devons avant tout réfléchir à la manière dont cette reconstruction rencontrera les besoins réels des gens. »
« Dès que possible, je rentrerai »
Un homme en treillis militaire nous interrompt pour saluer Maksim. Je crois, au milieu du bruit ambiant, entendre le surnom d’« Oier ». Il semble connu à Kharkiv pour être chanteur. Quel style de musique ? Je ne le saurai pas. Il est pressé ; écrit son numéro sur mon carnet ; peut-être parlerons-nous demain. Quand je le recontacte le lendemain, il a encore moins de temps devant lui : il vient d’apprendre que son unité repart à Bakhmout ; il doit finir de préparer son paquetage et faire ses adieux, me dit-il au téléphone.
La ville comptait 1,4 million d’habitants avant l’invasion russe. Elle s’est vidée. Puis, peu à peu, avec l’éloignement du front et des bombardements, les habitants sont revenus. Ils sont de nouveau près de 1,1 million. C’est pour répondre à leurs besoins qu’il faut reconstruire. En sortant du pub, pendant que j’attends mon Uber dont le prix décuple à l’approche du couvre-feu puisque tout le monde rentre au même moment, j’échange quelques mots avec Olena. Elle a 22 ans. Elle est née à Kharkiv mais s’apprête à s’exiler en Irlande. N’est-ce qu’une coïncidence devant la porte de ce bar, qui porte le nom de Dublin ? Elle rit. « Pour l’instant, il n’y a plus d’avenir pour moi, ici. » Mais reviendra-t-elle, un jour ? « Bien sûr ! Je suis de Kharkiv et dans quelques années, dès que possible, je rentrerai pour contribuer au retour à la vie de ma ville. »
Mon chauffeur, Arsenty, conduit un 4x4 BMW blanc dont la lunette arrière a été remplacée par des bandes de Scotch : en mars, un obus russe a explosé en bas de sa rue. Sa femme et son fils se sont réfugiés en Allemagne. Chauffeur, c’est un métier de débrouille. A un carrefour, la police nous arrête ; le contrôle s’éternise ; je m’interroge. Il ne me concerne pas : les policiers vérifient que l’assurance d’Arsenty est en ordre. Comme on veille à ce que les automobilistes continuent de payer leur ticket de stationnement. Dans chaque sphère de la vie sociale comme de la vie publique - (une enquête parlementaire vient d’être lancée pour faits de corruption dans la livraison de matériel militaire), l’Etat tient bon en Ukraine.
Les internautes critiquent l’illustration qui prend à la légère la catastrophe qui a coûté la vie à des milliers de personnes et en a blessé des dizaines de milliers.
Le dessin minimaliste en noir et blanc représente une voiture renversée parmi des bâtiments détruits (Twitter)
Le « dessin du jour » partagé sur son compte Twitter est une caricature du dessinateur Juin montrant un bâtiment endommagé, une voiture renversée et un tas de gravats avec pour légende : « Même pas besoin d’envoyer de chars ! »
Les internautes reprochent au journal de se moquer de la catastrophe, qui a coûté la vie à des milliers de personnes et en a blessé bien d’autres.
Ils estiment que cette illustration est « insensible », « de mauvais goût » et va au-delà du seuil accepté des « blagues intelligentes et de l’humour noir ».
L’éminent imam, Omar Suleiman, du Yaqeen Institute for Islamic Research, a également commenté la publication sur Twitter, affirmant que la caricature « déshumanise » les musulmans en tant que victimes de « à tous points de vue ».
« Des rats d’égout, tous autant que vous êtes »
De nombreux Twittos, y compris des personnalités de la télévision et des influenceurs, ont commencé à inonder le message original d’une contre-image où on voit « Charlie Hebdo » écrit sur un rouleau de papier toilette, dans le même style que le journal.
« La marque française de papier toilette Charlie Hebdo s’y remet avec son habituel regard “aiguisé” sur l’actualité [sic] », a tweeté quelqu’un.
« Votre siège a connu une tragédie et vous avez inventé un slogan “Je suis Charlie”. Deux pays connaissent une tragédie et vous produisez un gribouillis irrespectueux. Vous êtes des rats d’égout, tous autant que vous êtes. »
D’autres internautes font aussi référence à la campagne « Je suis Charlie » de 2015. Une commentatrice politique turque a tweeté que les Turcs avaient été prompts à soutenir les marches en faveur de la liberté d’expression après l’attentat au siège du magazine à Paris en 2015.
Deux frères, Saïd et Chérif Kouachi, revendiquant agir au nom du groupe islamique al-Qaïda, avaient pénétré de force dans les bureaux de Charlie Hebdo et ouvert le feu, tuant douze personnes et en blessant onze autres.
Traduction : « Plus de 5 000 personnes sont mortes. Beaucoup d’autres attendent sous les décombres, gelés. Des milliers de personnes sont toujours à la recherche de leur famille et de leurs amis. Ma famille fait ses sacs et les cages de transport des chats sont prêtes à partir par crainte d’une autre secousse. Est-ce de l’humour ? de l’art ? Est-ce là l’humanité ? Hypocrites »
Traduction : « La seule source de revenus de ce journal est l’islamophobie. Le jour où il commencera à imprimer des faits, il cessera d’exister. Le revenu des mendiants de rue est plus propre que ce journal. B*t*rds immoraux. »
Certaines personnalités politiques, comme Ibrahim Kalin, porte-parole de la présidence turque, s’en sont également pris à la caricature sur Twitter.
« Barbares modernes ! Étouffez dans votre haine et vos rancunes », a-t-il tweeté.
45 pages de commentaires
Alors que le public turc a largement condamné le dessin, certains ont choisi de l’interpréter alternativement.
Un commentaire sur le réseau social turc Ekşi Sözlük a appelé les lecteurs à se concentrer sur les victimes du tremblement de terre et la réponse à apporter.
« Au lieu de critiquer un magazine, critiquez ce qui s’est passé et ce qui n’est pas fait au sujet du tremblement de terre. Nos concitoyens sont morts, sont en train de mourir et mourront, mais vous allez ouvrir un sujet sur un magazine. Avez-vous l’intention de changer l’ordre du jour, de diriger l’indignation dans une autre direction ? », a commenté un internaute.
Cette plateforme, qui permet aux utilisateurs de publier des commentaires anonymes sur des sujets spécifiques, comptait 45 pages de commentaires sur la page consacrée à la caricature au moment de la publication de cet article.
Le double tremblement de terre, qui s’est produit lundi, a causé d’immenses dégâts, les opérations de sauvetage étant toujours en cours. L’Organisation mondiale de la santé a déclaré que le bilan définitif pourrait atteindre les 20 000 morts.
Par
Ayah El-Khaldi
Published date: Mercredi 8 février 2023 - 13:52 | Last update:53 mins 22 secs ago
Je ne vous demande pas d’être propalestiniens mais au moins d’être objectifs et de cesser de cautionner les crimes de l’occupation israélienne
Un Palestinien pleure la mort de l’une des neuf victimes tuées lors d’un raid israélien sur le camp de réfugiés de Jénine en Cisjordanie le 26 janvier 2023 (AFP/Jaafar Ashtiyeh)
Je vous adresse cette lettre en tant que professeur de français à l’université de Gaza, moi qui enseigne à mes étudiants les principes de la démocratie et de la liberté d’expression, moi le simple citoyen palestinien qui vis le blocus, la souffrance et l’horreur dans cette prison à ciel ouvert qu’est Gaza.
J’ai suivi votre couverture et votre analyse des derniers événements tragiques dans les territoires palestiniens et, comme d’habitude, vous avez recouru avec insistance à des termes qui montrent votre partialité : attaque palestinienne terroriste dans une synagogue à Jérusalem, escalade des violences dans la région, violence sans précédent, missiles palestiniens, réponse de l’armée israélienne, partie annexée de Jérusalem, représailles, etc., autant d’expressions qui montrent que vous êtes globalement alignés sur le récit israélien.
Sans prononcer un seul mot sur le massacre israélien à Jénine la veille qui a fait neuf morts palestiniens dont deux enfants et une femme âgée ainsi que des dizaines de blessés, sans oublier la destruction de cinq maisons et un club social et sportif dans cette ville de Cisjordanie occupée souvent attaquée par les soldats israéliens, ni sur les quinze raids israéliens sur la bande de Gaza le même jour avec des bombardements intensifs qui ont horrifié la population civile vers 3 heures du matin, ni des mesures atroces de l’occupation israélienne contre les civils palestiniens au quotidien.
Une réalité que personne ne pourra cacher
De plus, pendant ces événements, vous n’avez pas donné l’occasion aux Palestiniens ou aux sympathisants français de la cause palestinienne de s’exprimer sur cette situation, au contraire, vous avez donné la parole aux proches de la partie israélienne, et parfois au porte-parole officiel de l’armée israélienne ou du gouvernement israélien.
Vous avez oublié que l’attentat s’est déroulé dans une colonie israélienne illégale au regard du droit international.
En vous enfermant dans cette politique de soutien inconditionnel à une occupation illégale, vous participez au maintien d’une situation aussi injuste qu’explosive
Permettez-moi de vous dire qu’en vous enfermant dans cette politique de soutien inconditionnel à une occupation illégale, vous participez au maintien d’une situation aussi injuste qu’explosive. Car, vous le savez, le nouveau gouvernement israélien d’extrême droite a un projet : annexer les terres de Cisjordanie qu’il n’a pas encore colonisées, chasser un maximum de Palestiniens, y compris en les tuant.
Dans les territoires palestiniens occupés, il y a une réalité que personne ne pourra cacher, il y a une occupation qui opprime et assassine les civils palestiniens, il y a des colonies illégales installées dans des territoires reconnus occupés par les Nations unies, il y a la démolition des maisons palestiniennes à Jérusalem et en Cisjordanie occupées, des colons israéliens qui détruisent des tentes de bédouins dans la vallée du Jourdain, des soldats israéliens qui détruisent des villages construits avec l’argent de la France et de l’Europe, des incursions militaires dans des villes palestiniennes autonomes, des colons qui déracinent des oliviers appartenant aux Palestiniens.
Il y a des exactions de l’armée d’occupation et des colons israéliens tous les jours dans tous les territoires palestiniens sans aucune réaction de vos antennes.
Depuis le début de cette année, 35 Palestiniens ont été assassinés en Cisjordanie occupée par des colons et soldats israéliens. Et en 2022, ce sont au moins 220 Palestiniens qui ont été assassinés par des soldats ou civils israéliens.
Arrestations arbitraires de jeunes et d’enfants, barrages et check-points qui rendent la vie de tout un peuple très compliquée.
Un harcèlement systématique.
Les provocations incessantes sur l’esplanade de la mosquée al-Aqsa par des ministres israéliens et des colons avec la protection de l’armée israélienne, sans réactions de votre part.
Une couverture médiatique biaisée
En tant que professeur de français à l’université de Gaza, comment puis-je justifier cela devant mes étudiants qui me disent toujours que les médias français ont pris le parti des Israéliens ?
Vous négligez l’existence d’un large mouvement de solidarité avec le peuple palestinien et sa juste cause en France, notamment le peuple français et ses diverses associations.
Israël-Palestine : glossaire des termes problématiques utilisés par les médias
Vous n’utilisez jamais le mot « apartheid » ; or des organisations internationales comme Amnesty International ont qualifié le gouvernement israélien de régime d’apartheid et les crimes commis par l’occupation de crimes de guerre.
Les prisonniers palestiniens, vous n’en parlez jamais, ce sont 5 000 prisonniers politiques toujours détenus dans les geôles israéliennes dans des conditions très difficiles, parmi eux des personnes âgées et malades qui sont derrière les barreaux depuis plus de 30 ans, parmi eux des enfants et des femmes.
Même l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri, qui a passé des années en détention administrative illégale dans différentes prisons israéliennes, et qui a été expulsé fin 2022 de sa ville natale de Jérusalem vers la France, vous n’osez pas l’inviter pour parler de sa souffrance et de celle de ces prisonniers.
Le blocus de Gaza dure depuis plus de seize ans, mais vous parlez de la bande de Gaza uniquement quand il y a des roquettes lancées par la résistance.
Tout cela, vous ne pouvez pas l’ignorer.
Le temps n’est-il pas venu d’évoquer la réalité telle qu’elle est ?
Il y a des exactions de l’armée d’occupation et des colons israéliens tous les jours dans tous les territoires palestiniens sans aucune réaction de vos antennes
Heureusement qu’il existe des médias alternatifs, les réseaux sociaux qui informent les citoyens sur la situation actuelle dans les territoires palestiniens occupés en toute objectivité.
Je ne vous demande pas d’être propalestiniens mais au moins d’être objectifs.
Nous sommes pour une paix juste et durable, une paix qui passera avant tout par l’application des décisions internationales et par la création d’un État palestinien libre et indépendant.
Je terminerai ma lettre par ces mots :
Tous les citoyens du monde, de toutes origines, attachés au respect des droits de l’homme, du droit international et de la justice dénoncent sans relâche l’occupation des territoires palestiniens qui perdure depuis des décennies et qui menace gravement la paix dans le monde.
Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que leur auteur et ne reflètent pas nécessairement la politique éditoriale de Middle East Eye.
Ziad Medoukh est un professeur de français, écrivain et poète palestinien d’expression française. Titulaire d’un doctorat en sciences du langage de l’Université de Paris VIII, il est responsable du département de français de l’Université al-Aqsa de Gaza et coordinateur du Centre de la paix de cette université. Il est l’auteur de nombreuses publications concernant la Palestine, et la bande de Gaza en particulier, ainsi que la non-violence comme forme de résistance. Il a notamment publié en 2012 Gaza, Terre des oubliés, Terre des vivants, un recueil de poésies sur sa ville natale et son amour de la patrie. Ziad Medoukh a été fait chevalier de l’ordre des Palmes académiques de la République française en 2011. Il est le premier citoyen palestinien à obtenir cette distinction. En 2014, Ziad Medoukh a été nommé ambassadeur par le Cercle universel des ambassadeurs de la paix. Il a remporté le premier prix du concours Europoésie en 2014 et le prix de la poésie francophone pour ses œuvres poétiques en 2015.
Ziad Medoukh
Mardi 31 janvier 2023 - 10:03 | Last update:1 week 1 day ago
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