Frantz Fanon, un psychiatre et militant révolutionnaire engagé dans la lutte pour l'indépendance de l'Algérie et dans le combat international contre le colonialisme.
Frantz Fanon est né le 20 juillet 1925 à Fort-de-France en Martinique. Dans Peau noire, masques blancs publié en 1952, il évoquait, dans des termes saisissants, les souffrances qu'il avait endurées lorsqu'il était arrivé en métropole pour faire ses études de médecine (sa hantise d'être jamais reconnu sur le plan professionnel par ses collègues blancs, les humiliations subies (quand certaines femmes blanches refusaient de danser avec lui dans les bals populaires, par exemple).
En 1953, il put exercer son métier de psychiatre en devenant médecin-chef d'une division de l'hôpital psychiatrique de Blida-Joinville en Algérie. Sans doute parce qu'il avait lui-même subi ce genre de violence symbolique, il combattit alors fermement les thèses de son collègue Antoine Porot, le chef de file de l'École algérienne de psychiatrie. "Hâbleur, menteur, voleur et fainéant, le Nord-Africain musulman se définit comme un débile hystérique, sujet, de surcroît, à des impulsions homicides imprévisibles" ; voilà ce qu'écrivait cet éminent représentant de la psychiatrie française.
Frantz Fanon, un psychiatre en Algérie qui renoncera à sa nationalité française
Fanon ne se contenta pas de critiquer verbalement ces stéréotypes racistes. Il innova dans sa pratique médicale en proposant de nouvelles méthodes, comme la "sociothérapie" et la "psychothérapie institutionnelle", qu'il adapta à la culture des patients musulmans algériens. Il put ainsi montrer que c'est bien plutôt la domination française qui avait fait de l'homme colonisé un être infantilisé et opprimé. Cette expérience professionnelle permet de comprendre pourquoi, en 1954, dès le début de la guerre d'Algérie, Fanon noua des contacts avec des militants du FLN. Deux ans plus tard, il démissionna de son poste de médecin-chef, ce qui provoqua son expulsion d'Algérie en janvier 1957. Il décida alors de renoncer à sa nationalité française pour se définir comme un citoyen algérien. En mars 1960, il fut nommé ambassadeur du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) au Ghana. Malheureusement, atteint d'une leucémie, il dut mettre un terme précoce à son engagement politique (...)
Bibliographie :
Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, Le Seuil, 1952.
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Comment Fanon est-il devenu le défenseur de la violence politique ? Peu avant sa mort, il rencontre Sartre et passe trois jours à Rome sans presque dormir, qui aboutissent à la préface par le philosophe des "Damnés de la terre". Livre référence pour tous les peuples en quête d’émancipation.
Né en 1925 à Fort-de-France et en
terré en 1961 en Algérie, Frantz Fanon pourrait faire partie d’un temps révolu, le temps des colonies. On aimerait pouvoir remiser soigneusement sa pensée sur l’étagère des témoignages d’une histoire passée comme une relique, comme la trace ténue d’une histoire lointaine, cicatrisée. Ses écrits, de Peau noire et Masques blancs aux Damnés de la terre font pourtant toujours écho de manière incendiaire aux relations raciales du XXIe siècle.
Né aux Antilles françaises dans l’entre-deux-guerres, Frantz Fanon est devenu l’emblème de la décolonisation à travers son engagement dans la guerre d’Algérie aux côtés du FLN. Le problème avec Frantz Fanon ce sont les multiples mythes qui surgissent à son évocation : le psychanalyste, qu’il n’était pas, l’élève d’Aimé Césaire, pas plus, le virulent défenseur d’une violence politique vengeresse, pas tout à fait.
Aujourd’hui, le nom de Frantz Fanon résonne à l’échelle planétaire, une référence incontournable lorsqu’on évoque la condition noire et la violence coloniale qui explose après la Deuxième Guerre mondiale. Dans l’embrasement des années 60 et 70 Fanon est là, dans les têtes. Inspirateur de nombreux combats, des Black Panthers aux Palestiniens en passant par les militants anti-apartheid d’Afrique du Sud, il reste un des penseurs révolutionnaires qui a marqué de son empreinte la fin des empires coloniaux et l’analyse des relations interraciales.
Comment est-il devenu le défenseur de la violence politique ? A la veille de sa mort, Fanon rencontre un des auteurs qui l’ont accompagné dans la construction de sa pensée : Jean-Paul Sartre. Trois jours à Rome sans presque dormir, sous l’œil méfiant de Simone de Beauvoir, qui aboutissent à la préface des Damnés de la terre, le dernier livre de Fanon devenu dès sa publication une référence pour tous les peuples en voie de libération.
Trois jours à Rome et peut-être aussi l’histoire d’un malentendu.
Avec : Frédéric Ciriez, Alice Cherki, Aurélia Michel, James Toner, Victor Permal, Achille Mmembe, Michel Giraud, Mireille Fanon-Mendès-France, Sarah Fila Bakabadio, Pap N’Diaye, Elaine Mokhtefi, François Gèze, Jean Khalfa, Magali Bessone et Romuald Fonkoua.
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