Livres
1. Lakhdar Bentobbal. Mémoires de l'intérieur. Récit mémoriel par Daho Djerbal. Chihab Editions, Alger 2021, 399 pages, 1.200 dinars
On aimera ou on n'aimera pas. Mais on ne peut que respecter et saluer le travail effectué par Daho Djerbal. Un travail qui a commencé fin décembre 1980 et achevé en juillet 1986. Un travail à chaque fois soumis à l'appréciation critique de Bentobbal.
Les Auteurs : - Maître de conférences en histoire contemporaine (Université d'Alger). Directeur de la revue «Naqd», depuis 1993.
- Lakhdar Bentobbal (8 janvier 1923-21 août 2010), originaire de Mila, militant de la lutte d'indépendance dès l'âge de 15 ans, membre du Ppa dès 1940, membre du Groupe des «22», Chef de la wilaya II, ministre de l'Intérieur du Gpra, un des négociateurs des Accords d'Evian.
Avis : Enfin, une approche (universitaire donc assurément scientifique) de l'écriture de l'histoire de la guerre de libération nationale, une écriture algérienne, en ce sens qu'elle va à la rencontre des acteurs algériens, d'abord du Mouvement national ensuite du Fln et de l'Aln. Une écriture «à balles réelles».
Citations : «D'après ce que j'ai appris, une génération ne retrouve jamais une occasion historique qu'elle a perdue une première fois (....). Une génération n'a jamais fait deux révolutions et (qu') une génération qui a raté le rendez-vous de l'histoire n'a jamais vu l'histoire revenir sur ses pas (L. B. p 249), «Quand la révolution a grandi, même le concepteur s'est trouvé prisonnier des lois, il n'était lui-même plus libre par rapport aux lois qu'il avait conçues (....). Quand l'organisation ne s'impose pas, c'est le règne de la force pure, le fort s'impose au faible et c'est le peuple qui en fin de compte subit le plus grand préjudice (....). Si celui qui porte les armes devient l'élément principal, cela débouche sur un Etat dont les fondements reposent sur la force pure et non sur la loi» (L. B., p 268).
2 . Les galets de Sidi Ahmed. Recherche historique de Aziz Mouats (préface de Brahim Zeddour / postface de Olivier Le Cour Grandmaison. Image de couverture : Samira Mouats). Editions El Qobia, Alger 2021, 274 pages, 1.000 dinars)
Un récit ? Un roman ? Une histoire découpée en séquences filmiques ? Un peu de tout, de tout un peu, mais certainement un pan entier de la vie d'une population longtemps opprimée par la colonisation française (125 ans) et qui se révolte le 20 août 1955, tentant de tout balayer sur son passage. Avec les moyens de bord et beaucoup de volonté et de foi. Une révolte populaire embras(s)ant la quasi-totalité de la région de Skikda.
L'Auteur : Aziz Mouats, né en 1950 à Skikda, est de formation agronome. Installé à Mostaganem, après ses études à l'Ita, il a été, fort longtemps, journaliste.
Avis : A lire, à relire et à faire lire. Une fenêtre ouverte sur l'océan (démontée) de l'histoire de la guerre de libération nationale.
Citation : «Pour rechercher la vérité, il vaut mieux ne pas cultiver la moindre rancœur ni moindre amertume» (p 192).
3 . La crise du discours religieux musulman. Le nécessaire passage de Platon a Kant. Essai de Lahouari Addi.Editions Frantz Fanon, Boumerdès 2020, 1.000 dinars, 392 pages
Premier constat : le monde musulman en général et le discours religieux musulman connaissent une crise culturelle profonde... Second constat : la domination européenne à travers la colonisation, entre autres, a révélé la crise.
Troisième constat : il faut rechercher la cause de la crise, selon l'auteur, dans l'histoire intellectuelle de la culture religieuse au cours de laquelle l'orthodoxie officielle avait interdit la philosophie comme activité intellectuelle autonome.
L'Auteur : D'abord enseignant durant vingt années à l'Université d'Oran. Professeur de sociologie politique du monde arabe (Sciences-po, Lyon) et professeur invité d'universités américaines. Auteur de plusieurs ouvrages et articles parus dans des revues académiques.
Avis : Pas un essai de philo. Mais une réflexion formulant une hypothèse assez audacieuse dont le point de départ est une communication sur Mohammed Abdou. Une œuvre pas à la portée de tous. L'«entre soi», le défaut de nos intellos, le non décollage de l'édition nationale (non spécialisée). Donc, une approche qui gagnerait à être vulgarisée à travers une écriture non académique et à être traduite en arabe.
Citation : «Dieu enverra à cette communauté tous les cent ans quelqu'un pour lui renouveler sa religion», avait dit le Prophète. Les sociétés musulmanes ont raté, à ce jour, quatorze réformes (p 64).
4 . Déflagration des sens. Roman de Karim Akouche. Editions Frantz Fanon, Alger 2021, 213 pages, 700 dinars
Pour le supporter, il faut déjà le connaître et avoir lu ou vu ses productions. Intenable, mais il vous réconcilie avec votre «moi» profond, celui qui n'ose jamais entièrement s'exprimer ou dire ou même (ceci dit pour les plus «allumés») faire.
Kamal Storah alias Kâmal Sûtra (!?), 40 ans, nous raconte sa vie. Sa vie en Algérie, sa vie en France, sa vie privée et publique et, surtout sa vie intérieure. La vie d'un homme «en colère» ! Un homme «cinglé» mais libre !
L'Auteur : Né en Algérie («quelque part» en Kabylie) en 1978, ingénieur de formation, romancier, poète, dramaturge, journaliste-chroniqueur. Un mélange de Kerouac et Boris Vian. Déjà, plusieurs ouvrages édités au Canada et en Algérie.
Avis : Pour ne pas changer, la vérité, rien que la vérité, toute la vérité, même la plus crue, la plus crasse de celle qui «pique» les langues et les oreilles. Une «bombe littéraire» (Kader B. Le Soir d'Algérie), il n'a pas tort. Attention donc aux éclats !
Citation : «L'histoire qu'on a écrite à la place du peuple est une imposture» (p 29).
5. Massinissa. La légende berbère. Roman (historique) d'Auguste Ngomo. Editions La Pensée, Tizi Ouzou, 2020, 302 pages, 850 dinars
Au commencement, il y a le demidieu Hercule mort quelque part en Espagne. Sa puissante armée, composée de divers peuples, désormais sans chef charismatique se dispersa... et un groupe de soldats constitué de Mèdes, de Perses et d'Arméniens, recherchant une terre d'accueil accostèrent sur les côtes nord de l'Afrique. Ils s'y installèrent. Les Perses vers l'Ouest et rencontrant les Gétules, peuple local, firent alliance et se donnèrent le nom de Numides (les Nomades). Les Mèdes et les Arméniens firent alliance avec les Libyens, ils devinrent les «Maures». Plus tard, cela a donné deux grands royaumes concurrents : à l'Ouest, le royaume des Massaesyles gouverné par le roi Syphax et à l'Est, le royaume des Massyles gouverné par le roi Gaïa, fils du roi Zelalsan, fils d'Iles et père du prince Massinissa, fils de la reine Telli. Celui qui allait changer l'histoire de l'Empire romain. Une légende berbère venait de naître.
L'Auteur : Né en 1970 à Bitam (Gabon). Maîtrise de gestion (Angers), DESS en gestion et management des organisations (Nantes), longue carrière professionnelle en France et au Gabon, actuellement fonctionnaire international au sein de l'Union africaine.
Avis : Enfin, de l'histoire «vivante», en souhaitant que l'auteur étende son œuvre à d'autres héros maghrébins et africains.
Citations : «Les légendes servent à unir les peuples mais pas à gouverner des royaumes» (p 15), «Ce qui est important, ce n'est pas ce qui t'arrive, mais ce que tu fais de ce qui t'arrive» (p 80).
6. Éclats de vie. Mémoires synaptiques. Récit de Mustapha Maaoui. Casbah Éditions, Alger 2021, 476 pages, 1.000 dinars
L'auteur est venu au monde en 1946 mais son histoire commence en juin à Bône en 1900, avec Brahim, un solide gaillard de 45 ans (enfant du douar Melilla, du côté de Roknia), s'exilant à Damas. Puis, on a Mohamed Salah (le «père fondateur»), le petit neveu, orphelin de père et qui n'a pu, hélas, malgré son goût des études et sa soif de savoir, être scolarisé. Son beau-père, un khodja -interprète du côté de Jemmapes (la maman remariée à un lointain cousin, comme le voulaient les us et coutumes de l'époque) préférant l'envoyer surveiller ses troupeaux. La suite -avec la descendance dont l'auteur - est un long et laborieux voyage à travers le pays. Désormais, pour ceux qui ne l'ont pas bien connu ou seulement l'ont aperçu ou entendu parler de lui, durant les années 60-70 et après, on sait tout de «Didine Maaoui », vie privée y compris. Ils en apprendront aussi beaucoup sur l'ambiance des hôpitaux, sur les opérations chirurgicales, sur les maladies, sur les erreurs médicales, sur l'«exploitation» des résidents...
L'Auteur : Né en août 1946 à Batna. Médecin, professeur de chirurgie (Alger). Avis : Un fleuve impétueux de souvenirs... Une famille, une vie... Des noms et lieux. Des événements et des rencontres. L'Algérie en chair et en sang (R. Boudjedra) et un récit passionné et passionnant. De l'érudition qui va de la littérature et la poésie à la musique en passant par la peinture et la sculpture.
Citations : «Dans le drame qui se joue au déclenchement d'une maladie, il y a trois personnages : le malade soigné, la maladie et les soignants» (p 314), «Dans la relation médecin-malade, ce n'est pas tant ce qu'on dit au patient mais plutôt la capacité d'écoute que l'on peut avoir qui compte» (p 385).
7. Mémoires d'un gardien de but. Témoignage de Mehdi Cerbah (par Sid Ahmed Bouaddou et préface de Hamid Tahri). Apic éditions, Alger 2021, 186 pages, 800 dinars.
Cerbah témoigne et raconte... Mehdi se livre et se raconte... Certes, on a déjà lu des ouvrages consacrés à des sportifs algériens de haut niveau (Rachid Mekhloufi, Abdelhamid Zouba et Hacène Lalmas les footballeurs, Salima Souakri la judoka, Abdelkader Ould Makhloufi, le boxeur...), mais, à mon humble avis de lecteur, mais aussi d'ancien (petit) footballeur (et gardien de but), je n'ai jamais été autant ému.
L'Auteur : Né à Alger en 1953, un des plus remarquables gardiens de but du football algérien et une carrière nationale et internationale très riche ayant marqué les générations des années 70/80.
Avis : Des cris du cœur ! Et, droit au but. Prenant. Emouvant. Se lit d'un trait par tous, sportifs ou non, footballeurs ou non, jeunes et vieux, car la belle aventure d'un homme faisant et aimant (toujours) passionnément son métier.
Citation: «Se murer dans un long silence, c'est permettre aux fossoyeurs de s'approprier des honneurs qui ne leur sont pas dus, et au temps d'effacer et faire oublier les sacrifices et les exploits consentis par toute une génération» (Sid Ahmed Bouaddou).
8 . Un jour idéal pour mourir. Roman de Samir Kacimi (traduit de l'arabe par Lotfi Nia). Editions Barzakh, Alger 2020, 118 pages, 600 dinars
Halim Bensadek est journaliste, mal payé (quand ce n'est pas payé du tout), surexploité par son employeur, célibataire rêvant d'épouser sa «fiancée» Nabila Mihanik (qui, elle-même «fricote» en douce avec un cousin véhiculé), entretenant un père éternellement criblé de dettes, une sœur célibataire et un frère chômeur, devant payer le loyer de l'appartement sous-loué dans une cité populaire et quasi abandonné.
L'Auteur : Né en 1974 à Alger, études de droit, avocat puis journaliste, auteur de plusieurs romans.
Avis : Une description précise, sans fard -loin d'être «misérabiliste»- de la réalité telle que vécue par nos «damnés», les exclus, les «sans-dents», les marginaux et les «mahgourine», si près de nous, mais si mal connus.
Citation : «Quand on est en prison, les souvenirs prolifèrent comme des moisissures empoisonnées, se ramifient, prennent racine» (p 61).
9 . J'ai rêvé l'Algérie. Témoignages, fictions et récits. Ouvrage collectif : écrits de plusieurs auteurs algériens. Editions Barzakh (et Fondation Friedrich Ebert Algérie), Alger 2020, 190 pages. Diffusion gratuite.
Seize auteurs pour quatorze textes de la fiction et du rêve, des témoignages et des récits.
Fruits d'une rencontre, suite à un projet d'atelier d'écriture (non tenu pour cause de Covid-19) réunissant des individus de divers horizons culturels (journalisme, écriture, psychologie, architecture, management, sociologie, médecine, cinéma, pharmacie...), certains déjà expérimentés, d'autres ayant un rapport amateur à l'écriture mais tous liés par le rêve d'une Algérie autre.
Les Auteurs : Chawki Amari, Wiame Awres, Salah Badis, Hajar Bali, Atiqa Belhacene, Khadidja Boussaïd, Habiba Djahnine, Bouchra Fridi, Sarah Haïdar, Arab Izar, Feriel Kessaï, Zaki Kessaï, Louisa Mankour, Mohamed Larbi Merhoum, Akçil Ticherfatine, Samir Toumi
Avis : Une très bonne initiative, assez louable venant d'un «mécène» bien que je ne sois pas d'accord avec la «distribution gratuite» du livre (comme cela se pratique durant des campagnes publicitaires, promotionnelles et de propagande et c'est ce qu'on faisait dans les années 60 et 70).
Citations : «Je prends le parti d'écrire «je» et d'écrire avec le «je». A l'automne de ma vie, je réalise que le «nous» m'a étouffé. Que le «nous» est étouffant. Non que je sois nombriliste, pas du tout, mais juste parce que j'existe» (Arab Izar, p 142), «Si on se comprend, on échange, si on échange, on apprend, si on apprend, on avance» (Akçil Tichirfatine p 179).
10. D'amour et de guerre. Roman de Akli Tadjer. Casbah Éditions, Alger 2021, 331 pages, 1.200 dinars
Les années 30 en Grande Kabylie. Une belle histoire d'amour qui pousse et fleurit à l'ombre des innocences et des espérances. L'histoire de Zina -la fille de Hadj Moussa, un soumis au caïd El Hachemi, un véritable salaud- et de Adam. Zina est la plus belle fille de Bousoulem et le deuxième fils du caïd la convoitait. Adam, lui, est un orphelin de père -un ancien combattant de la Première Guerre mondiale, revenu avec une jambe en moins et l'ingratitude de l'armée française en plus- et de mère (gangrène pour l'un et typhus pour l'autre) alors en pleine enfance est élevée par une tante. Après un long exil forcé, c'est donc le retour au pays avec l'espoir de faire enfin sa vie dans son palais de Bousoulem avec Zina. Une autre histoire va commencer !
L'Auteur : Né en 1954 à Paris. Auteur de onze romans (et d'un essai à succès : «Qui n'est pas raciste, ici ?», Lattès 2019) dont trois adaptés à la télévision : «Les ANI du Tassili», «Le Porteur de cartable» et «Il était une fois... peut-être pas». Plusieurs livres à succès dont «Le Porteur de cartable», «La meilleure façon de s'aimer» et «La Reine du tango» (2006) ont reçu le Prix Nice Baie des Anges. Ses romans sont traduits dans de nombreux pays.
Avis : La guerre, mais aussi l'Histoire de la mentalité coloniale..., du racisme..., de l'antisémitisme... et de la collaboration française durant l'occupation nazie. Et, surtout apprendre à survivre par amour.
Citations : «La guerre tue les rêves de jeunesse mais pas seulement, elle te mine de l'intérieur, c'est la déprime. Trouver la force de lutter contre elle pour ne pas sombrer dans la folie est une épreuve de chaque instant» (p 99), «L'argent achète tout, même la dignité des plus pauvres» (p 292).
11. Mémoires. La fierté comme viatique, 1967-1987 (tome II). Récits de Saïd Sadi. Editions Frantz Fanon, Boumerdès 2021, 558 pages, 1.500 dinars.
Après avoir terminé la lecture du tome I, on savait que l'aventure du «Fils du pauvre» n'était pas terminée. Et, comme promis, voilà donc la suite (mais pas la fin, espérons-le) qui nous est fournie.
L'Auteur : Né le 26 août 1947, médecin psychiatre... Militant, déjà très jeune, pour la langue et la culture berbères, les Droits de l'homme et les libertés démocratiques. Il fonde, en février 1989, le Rcd, parti social-démocrate laïc qu'il présidera jusqu'en mars 2012. Il a été député (Apn) et, aussi, candidat à l'élection présidentielle.
Avis : Un «pavé» très riche, trop riche en informations, en événements et en révélations..., qui se lit d'un seul trait... On attend avec impatience et curiosité un tome III (1988-2012 ?) mais, par pitié, en moins épais et se limiter à l'essentiel.
Citations : «L'homme public qui n'avait pas une grande culture historique ne pouvait être d'une grande utilité. L'histoire commande de toujours appréhender le passé, car ce qui a existé influence toujours ce qui est ou qui va advenir. Le responsable est tenu de construire sa réflexion en référence à la mémoire des peuples s'il veut éviter les désagréments des réactions exacerbées dont les conséquences sont toujours délétères sur les grands enjeux» (p 237), «Un damné de la terre qui s'accoutume à sa condition est un esclave qui s'ignore» (p 302).
12. Dans le ciel, des oiseaux et des étoiles. Roman de Ali Mouzaoui. Editions Frantz Fanon, Boumerdès, 2021, 256 pages, 700 dinars
Thirga, un village haut perché sur les montagnes de Kabylie. Perdu et presque oublié. Toute son histoire (représentative de bien de nos douars et autres lieux-dits du pays... pour certains jusqu'à nos jours) durant la colonisation, juste après et bien après. A travers la courte saga d'une famille petite par la taille (le père, Idir, un moudjahid dur et pur, un oncle, Salah, devenu harki, une cousine handicapée (muette), Sadia, violée par les soldats de l'armée française, une mère, Ouenza, toujours amoureuse du mari et attendant son retour du maquis, et, surtout, un fils, Arezki, n'ayant connu son papa que sous l'image du héros de guerre, celui qui a été le compagnon fidèle..., fidèle jusqu'à la mort et après, à son chef, le «Colonel», alors mort au combat).
C'est aussi, l'histoire d'une région (du pays ?) qui a vu une partie de son indépendance, chèrement acquise, dans le sang, les larmes et les drames, «récupérée» par des opportunistes, des combattants du dernier quart d'heure.
L'Auteur : Cinéaste (diplômé de l'Institut supérieur du cinéma de l'Urss), plusieurs films dont «Si Mohand-ou-Mohand», «Les ramiers blancs», «Les piments rouges», «Mouloud Feraoun», «Le Menteur»... et auteur de deux romans (L'Harmattan, 2005), «Thirga au bout du monde» et «Comme un nuage sur la route» (Ed. F. Fanon, 2020).
Avis : Toujours cette écriture (l'influence de l'écriture cinématographique ?) qui «erre» comme ses héros entre la fidélité, la tradition, la révolte difficilement contenue, l'amour de la nature, le travail de la terre... Ici, c'est l'Algérie profonde, celle des moudjahidine vrais (et de leurs héritiers) n'acceptant pas les «mauvais» nouveaux pouvoirs.
Citations : «La mémoire des morts vit par le cœur des vivants (....). Un monument rétrécit les combats, enferme les héros dans des blocs de béton. Les stèles entretiennent le mensonge. Les faux cultes constituent un point de ralliement pour des marchands d'héroïsme au rabais» (p 222).
13. L'illusion de l'identité. Essai de Malika Challal (préface de Mohamed Koursi). Editions Médias Index, Alger 2021. 123 pages, 500 dinars
Malika Challal est une Algérienne qui ne se pose plus de questions en matière d'identité. En tout cas, elle a décidé de ne plus la chercher... car elle l'avait, grâce aux événements et aux circonstances vécus... «soigneusement préparés par la providence», trouvée : «Désormais, je la vivais, je suis ce que je suis, je fais partie de la Kabylie, de l'Algérie, du monde arabe, du monde tout entier et je n'ai pas besoin de vivre avec l'hostilité envers quelqu'un ! Je préfère par contre aimer, aimer les autres qui me ressemblent. Ils me ressemblent tous en fin de compte». C'est tout dit !
L'Auteure : Enseignante en sciences physiques au secondaire, retraitée depuis 2010, éditrice depuis 2014.
Avis : Ni analyse politique, ni analyse sociale, ni une œuvre académique..., tout simplement une libre expression citoyenne algérienne. «Un essai trempé dans l'encre de la sincérité». (Mohamed Koursi, préface) et qui se lit d'un trait.
Citations : «L'art tisse des liens entre les peuples, et comme par magie, il pénètre au fond des âmes apeurées pour les apaiser, il efface les hostilités et ouvre les cœurs» (p 43), «L'homme n'engendre pas seul sa propre pensée et ses convictions, il y a toute cette magie, ces interférences; ces rencontres, ces coups du hasard, mêlés à sa propre chimie, son empreinte personnelle, qui font de lui et de sa pensée, ce qu'ils sont, ce qu'ils deviennent et ce qu'ils seront» (p 55), «Le mariage, c'est aussi celui des idées» (p 101).
14. Insoumises. Roman de Saad Khiari. Casbah Editions, Alger 2021, 246 pages, 850 dinars
Deux femmes dans un univers d'hommes. Dans un bled perdu («un village en passe de devenir une petite ville»). Avec, tout autour, plein d'hommes-mâles vivant les relations inter-genres comme si le monde alentour n'avait pas évolué depuis des siècles. Bien sûr, la révolution de Novembre avait bouleversé les rapports, la femme devenue combattante pour la libération du pays mais, hélas, la décennie noire, avec ses islamistes et ses terroristes (d'un autre temps et d'un autre monde) avait ramené la société au plus bas de son évolution.
L'Auteur : Cinéaste, diplômé de l'Idhec (Paris), collaborateur de quotidiens et de magazines, plusieurs ouvrages («Le soleil n'était pas obligé», prix Escale Littéraire 2018 et «Le fils du caïd», 2019).
Avis : Un ouvrage écrit comme un scénario de film : un thème, peu de sujets, deux personnages principaux... Que de plans ! Et une fin (presque) heureuse sur fond de drame. Lecture parfois trop hachée.
Citations : «Il est éminemment injuste de juger sévèrement les incartades sexuelles de la femme ou ses comportements non conventionnels alors que les aventures de l'homme sont versées au compte de la virilité et lui donnent l'occasion d'énumérer ses conquêtes tel un chasseur de gibier dénombrant ses trophées» (p 106), «Faire le bien, cela n'a de sens que si c'est un acte désintéressé; quand on n'attend rien en retour. Ce n'est pas distribuer le superflu et l'inutile; c'est profiter ensemble des bienfaits dont on est comblé. Le partage, ce n'est pas la distribution des restes du festin; c'est le bonheur de découvrir ensemble la fortune du pot» (p 125).
15. La fabuleuse histoire de la Coupe d'Afrique du Nord. Les carnets secrets de la séduisante mauresque, 1930-1956. Ouvrage documentaire de Ahmed Bessol Lahouari et Nazim Bessol. Media Sports Editions, Alger, 2021, 206 pages, 1.300 dinars
Elle est née en 1930..., le jour de la célébration du centenaire de la présence coloniale en Algérie..., un centenaire douloureux pour les musulmans d'Algérie ! Elle, c'est la sculpture qui orne la nouvelle Coupe d'Afrique du Nord de football (englobant l'Algérie colonisée, le Maroc et la Tunisie sous protectorat..., le tout avec cinq ligues : Tunisie, Constantinois, Algérois, Oranie, Maroc).
Les Auteurs : Bessol père et fils, tous deux journalistes sportifs, déjà auteurs de plusieurs ouvrages spécialisés, tout particulièrement dans le football. Le père est (comme son défunt père, Bessol Mohamed, membre fondateur de l'Usmo, alors joueur-entraîneur et Sg du club) un ancien footballeur (international junior et accession du Mco en Nationale «Une»). Il fut journaliste à «La République», à l'«Aps». Il anime, avec son fils, la revue «Botola»...
Avis : Pour la première fois, un livre d'histoire du foot en Algérie -fourmillant de détails- à partir d'une épreuve concernant certes directement la «présence coloniale» mais qui à travers cela a démonté un mécanisme au départ d'exclusion lequel, par la suite, récupéré par des hommes (joueurs, entraîneurs, en Algérie même ou en tant que professionnels en France) et/ou des équipes, a préparé le terrain au sport -en particulier le foot , vu sa popularité et l'engagement des supporteurs- comme arme de combat lorsqu'il s'est agi de libérer le pays.
Citations : «Je (la Coupe) sers d'alibis aux clandestins politiques recherchés par la police. Pour se déplacer, rien de plus facile pour eux que de prendre le train ou le bus des supporters dans lesquels, les militants n'hésitent pas à transporter de gros sacs où l'on est censé trouver de la nourriture pour le voyage alors qu'il s'agit de tracts et des armes (...). Les clubs (musulmans) sont sollicités pour multiplier les matches amicaux entre frères maghrébins» (p 130).
par Belkacem Ahcene-Djaballah
Jeudi 30 decembre 2021
Livres 1. Lakhdar Bentobbal. Mémoires de l'intérieur. Récit mémoriel par Daho Djerbal. Chihab Editions, Alger 2021, 399 pages, 1.200 dinars
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