Les hirondelles de Kaboul: quand la poésie de l’aquarelle questionne les parts les plus sombres du genre humain
En cette seconde semaine de 2020, sortait en DVD à ne pas manquer: Les hirondelles de Kaboul, un long métrage d’animation réalisé par Zabou Breitman (actrice, comédienne et réalisatrice, notamment de Se souvenir des belles choses en 2002) et Elea Gobbe-Mevellec (animatrice pour divers projets d’animation dont Le chat du Rabbin et Ernest et Celestine).
Le nom de cette œuvre donne un sentiment de « déjà entendu » car ce film adapte le premier opus de la célèbre trilogie de Yasmina Khadra (sur la thématique de l’hyper terrorisme). Sept ans après l’adaptation live de L’attentat, second roman de cette saga (complétée par Les sirènes de Bagdad), réalisé par Ziad Doueiri, les mots de l’écrivain algérien sont ainsi une nouvelle fois transposés sur grand écran.
Fort, poignant, captivant, original, ce film digne d’un documentaire d’ARTE est dynamique et authentique. Must-see! Analyse complète dans l’article: ‘Tehéran Tabou à Anima: nouveau Persepolis et témoignage bouleversant sur la liberté sexuelle et les droits des femmes… et des hommes!‘.
La violence des faits racontés dans cette œuvre est allégée par le dé-cadrage des séances choquantes et par la poésie des aquarelles. Malgré cet apaisement, la force de l’histoire crée un certain mal-être.
Le brio du duo de réalisatrices se trouve au cœur même de ce choix: ne rien montrer de violent, en prenant le parti du dessin animé pour faire réfléchir.
Il y a dans cette œuvre une dichotomie entre l’image et l’idée.
Si les sujets sont durs (lapidation, tyrannie, intégrisme, révolte, endoctrinement, liberté et droit de la femme, étouffement de la connaissance et de la liberté d’expression,…), les images hypnotisent et transportent dans un ailleurs.
La technique de l’aquarelle offre aussi une possibilité d’esseuler les personnages hors des décors et du temps du récit pour créer un instant de questionnement et de retour sur soi.
L’approche philosophique des Hirondelles de Kaboul est elle-même multiple. Dépassant les clivages manichéens, ce long métrage pose la question du bien et du mal sans pour autant se transformer en un champ de joutes rhétoriques insipides.
Les questions de l’altérité et de la vulnérabilité d’autrui si chères aux théories Levinassiennes gardent une place centrale dans l’histoire écrite par Yasmina Khadra et porté à l’écran par le duo Breitman/Gobbe-Mevellec.
Alors que l’esthétisme et l’intellectualisme de cette œuvre devrait suffire à convaincre tout cinéphile et/ou n’importe quel passionné de littérature et de beaux mots, ce dessin animé est agrémenté des voix de grands noms du 7e art dont Simon Abkarian (que l’on a retrouvé l’an dernier dans le film Rebelles d’Allan Maduit) et de Swan Arlaud (Petit Paysan, Grâce à Dieu, Perdrix).
Les hirondelles de Kaboul
De Zabou Breitman et Elea Gobbe-Mevellec
D’après Yasmina Khadra
Avec les voix de Simon Abkarian, Hiam Abbass, Swann Arlaud et Zita Hanrot
Animation, Drame
France
80 minutes
https://branchesculture.com/2020/01/13/les-hirondelles-de-kaboul-dessin-anime-yasmina-khadra-zabou-breitman-elea-gobbe-mevellecquand-la-poesie-de-laquarelle-permet-de-questionner-les-parts-les-plus-sombres-du-genre-humain/
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