L’histoire d’une après-midi qui va marquer la France : l’affaire du métro Charonne. Ce jour-là, 9 personnes qui manifestaient pour l’indépendance de l’Algérie ont été tuées lors de violences policières.
8 février 1962, Paris. Sur le Boulevard Voltaire, la tension est en train de monter. Des milliers de français veulent se rassembler pour la paix et l’indépendance de l’Algérie, qui est encore une colonie française. Un tract, distribué depuis quelques jours dit : “Tous en masse, ce soir à 18h30, Place de la Bastille”. Il est signé de toutes les organisations syndicales, et aussi notamment du parti communiste. Le long du Boulevard Voltaire, la situation se tend. Les policiers tentent de disloquer le cortège qui n’a pas encore réussi à se former.
Cela fait des semaines que l’ambiance est électrique, à Paris. La Guerre d’Algérie touche à sa fin et la situation politique est complexe, explosive. Entre gouvernement français que Charles de Gaulle manœuvre fermement, le Front de Libération nationale (le FLN) qui milite pour l’indépendance de l’Algérie et l’OAS, armée secrète qui veut maintenir l’Algérie française.
La répression du 17 octobre 1961 : des dizaines de morts, noyés dans la Seine
En octobre 1969, 3 mois et demie plus tôt, les autorités françaises ont décrété un couvre-feu qui s’applique uniquement aux maghrébins de Paris, parmi lesquels le FLN est très implanté. Le 17 octobre le FLN appelle à une manifestation, un boycott du couvre-feu. Des hommes, des femmes, des enfants sortent en cortège. La répression va être sanglante, cette nuit-là. Le nombre de morts fait encore l’objet de controverses, aujourd’hui : entre 48 et 200 personnes, notamment noyées dans la Seine. On le sait aujourd’hui lors de l’automne 1961, les passages à tabac d’Algériens par la police se sont intensifiés. Les victimes, à l’époque, tentent de témoigner.
Nous sommes à la fin de la Guerre d’Algérie. Les accords entre autorités françaises et algériennes sont en train de se négocier. Et le conflit politique s’est importé dans les rues de Paris. L’OAS (organisation de l’armée secrète), proche de l’extrême-droite veut maintenir l’Algérie française, alors que tout indique qu’elle va prendre son indépendance. L’OAS mène une série d’attentats dans Paris : des plastiquages. Une trentaine d’explosions ont lieu en quelques semaines. Contre l’appartement de Jean-Paul Sartre, par exemple... Un dernier attentat de l’OAS dirigé contre André Malraux, alors Ministre de la culture blesse grièvement une petite fille de 4 ans.
Les forces de l’ordre ont reçu l’ordre de disperser tout rassemblement
Les syndicats et le parti communiste appellent à la manifestation le 8 février 1962. Et ce jour-là, les forces de police sont terriblement tendues. Elles ont reçu l’ordre de disperser tout rassemblement. C’est en tout cas ce qu’elles ont compris. Les cortèges ont à peine le temps de se rassembler qu’ils se font disloquer. Boulevard Voltaire, 4000 manifestants se retrouvent pris en tenaille entre deux unités de police. Rapidement, les policiers donnent l’assaut. Ils viennent des deux extrémités du boulevards. Les manifestants ne peuvent s'échapper que par les ruelles latérales, se cacher dans les entrées d’immeuble ou dans les bouches de métro de la station Charonne qui se trouvent le long du Boulevard. C’est là que va se jouer le drame.
Longtemps, les autorités françaises ont soutenu que les grilles de la station de métro étaient fermées, que les victimes étaient mortes écrasées. Aujourd’hui, on sait que ces grilles étaient ouvertes et que les victimes sont mortes sous les coups de policiers ou lors de bousculades. 9 manifestants ont perdu la vie. 250 personnes ont été blessées. Le soir-même, le ministre de l’intérieur, Roger Frey, interdit toute manifestation. Le lendemain, Paris voit arriver une marée humaine dans ses rues. Un mois plus tard, le 18 mars 1962, les accords d’Evian mettent fin à la guerre d’Algérie et à 132 années de colonisation française.
RTBF La Première
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