Une œuvre mémorielle sur la Bataille d’Alger
L’historialité d’Alger vient de s’enrichir des mémoires de Abdelfatah El-Haouari, qu’il a dédiés à Ammar Ali (1930-1957), eu égard à l’intitulé Ali La Pointe qu’il a publié à compte d’auteur (2020). Natif de l’ancien Orléansville, l’auteur était âgé de 19 ans lorsqu’il a rejoint l’Armée de libération nationale (ALN).
Arrêté et écroué à la maison d’arrêt d’El-Asnam, il s’est lié d’amitié avec Mohamed Ketrouci, qui lui narrait les hauts faits du commando Ali-Khodja de la Wilaya IV et que Abdelfatah El-Haouari s’est juré de léguer à la postérité. L’œuvre mémorielle se veut un retour dans le brasier de la “Bataille d’Alger”, que l’historicité d’Alger doit au “milieu”.
C’est là le défi de l’auteur d’évoquer l’odieux épisode de la cité du vice qu’a ébauché sciemment l’administration coloniale française. Hardi dans son récit, l’auteur du livre Le Commando Ali Khodja et l’attaque de la côte 616 (éd. Casbah) réévalue l’itinéraire non voulu par d’anonymes “Ya Ouled” qui s’étaient pris dans les rets de l’univers sinistre du gangstérisme, au motif qu’ils étaient exclus de l’école de Jules-Ferry.
En ce temps-là, Ali La Pointe, ou le “petit boxeur des bas-fonds de La Casbah”, a adhéré à la règle de la rue : “La devise est de se débrouiller, ou crever.” Et c’est ainsi que le maraudage d’une boule de pain était l’égale d’une bombance pour l’indigène.
Et à défaut de s’identifier à des héros ou des idoles en vogue du grand écran, ces Ya Ouled n’avaient d’yeux que pour les “houzia” (les caïds) qui défiaient l’uniforme. Sur ce point, les z’niqat (ruelles) étaient sous le joug punitif des racketteurs de tout acabit qui roulaient des épaules et exhibaient l’arme à la ceinture, à l’instar des gangs Hammiche, Hocine dit “P’tit Boxeur”, Tintin, les frères Hoya, ainsi que Hacène le Bônois et sa légendaire El-Âanabia.
Dans cette optique, la pègre s’était partagée La Casbah, chacune au prorata de sa force de frappe. D’où l’idée machiavélique du commissaire Tomy et d’André Achiary (1909-1983) d’opposer ces malfrats aux fidaïn du “Nidham” qu’il accuse d’inquisition.
“Si le FLN gagne, adieu, la belle vie, pas d’alcool, pas de cigarettes, pas de femmes, pas de stupéfiants, tout sera balayé. Vous finirez le restant de vos jours à faire les mendiants”, qu’il disait le sanguinaire Achiary, le sous-préfet de Guelma en 1945 et l’auteur de l’attentat à la bombe de la rue de Thèbes, dans la Haute-Casbah, le 10 août 1956, qui a fait 73 morts.
Mais c’était compter sans Arbadji Abderrahmane, Hamadi Omar dit Si Mohamed et Ammar Ali dit Ali La Pointe qui éliminèrent tour à tour le mac dit Bud Abbott le 29 mars 1956 au 17, rue Héliopolis, puis Hassen El-Âanabi dans “l’opération Milieu”. Et au lendemain de la purge, le “Nidham” a acquis un contingent de fidaïn rompus au maniement des armes, grâce au message dit à chaque “maffiosi” : “Tu remets ton arme et tu te retires du milieu.
Si tu veux rejoindre le FLN, tu seras le bienvenu. Si tu ne veux pas, reste en dehors de tout. Plus de boissons, plus de femmes, plus de jeux. C’est le premier avertissement.” Autant dire que le récit de ce natif d’El-Asnam est étayé des confidences de son compagnon de geôle Ketrouci Mohamed, dit Si Tahar l’Indochine.
Mais pas que, du fait que l’auteur dévoile enfin le nom du fidaï Benhamdi Badèche qui a éliminé Amédée Froger, le maire de Boufarik : “Il devient presque le Ali La Pointe de la cité Mahieddine.” Reste que le récit de Abdelfatah El-Haouari en collaboration avec Abdenour Dzanouni est passionnant, puisqu’il narre l’épopée de l’historique zone autonome d’Alger en mettant la lumière sur les non-dits.
Par Nourreddine LOUHAL
le 26-08-2020
https://www.liberte-algerie.com/culture/une-oeuvre-memorielle-sur-la-bataille-dalger-344426
Mort d'Ali la Pointe, fidèle de Yacef Saadi :
http://www.histoire-en-questions.fr/guerre%20algerie/alger-deuxieme-ali%20la%20pointe.html
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