L’intolérance touche désormais les élites, tel est le terrible constat que fait la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), dans un rapport remis au nouveau Premier ministre.
Paris De notre correspondant
Que dit le rapport de la CNCDH ? Le racisme et l’intolérance ne se sont jamais aussi bien portés en France, et ont de beaux jours devant eux. Face à la montée inexorable du chômage et l’aggravation de la crise économique, les musulmans et les Roms deviennent les boucs émissaires : «Cette montée des périls économiques trouve, hélas, un écho dans la sphère politique et intellectuelle, et au sentiment d’instabilité économique s’arrime alors un sentiment d’insécurité qui provoque une perte de repères, loin de l’esprit fraternel, de ce bien-vivre ensemble, de cet universel qui transcende nos différences. Emerge alors une peur d’être envahi, d’être dissous dans cet autre que l’on ne veut pas connaître», affirme Christine Lazerges, présidente de la CNCDH.
Pendant longtemps, le terme islamophobie a été rejeté par des politiques (Manuel Valls), associations féministes (Caroline Fourrest), car il serait, selon eux, un moyen de s’attaquer à la liberté d’expression. Pour la CNCDH, il est devenu incontournable. «Le terme présente un fort potentiel évocateur, il est incisif et clair. La puissance du mot rend visible un phénomène grave. Le terme islamophobie vient mettre en lumière un racisme latent, qui se veut imperceptible, caché sous les dehors acceptables de la liberté d’expression». Signe de la sensibilité du sujet, Matignon, tutelle de l’organisme consultatif, a différé la réception du rapport annuel à après les municipales.
Les chiffres sont tous rouge écarlate. Selon le sondage réalisé par BVA pour accompagner le rapport, 68% des Français pensent que si l’intégration ne fonctionne pas, la faute incombe aux étrangers «qui ne se donnent pas les moyens de s’intégrer». Autre indice préoccupant, la «tolérance» des Français aurait baissé de 12 points depuis 2009. «Cette baisse touche désormais toutes les minorités et est exprimée par toutes les sensibilités politiques».
En français facile, cette intolérance ne concerne plus l’extrême droite ou la droite extrême, mais bien tout le champ politique, la gauche comprise. Les actes antimusulmans augmentent de plus de 10 points. «C’est préoccupant, car cette hausse concerne plus les actions (dégradations, homicides, menaces, etc.) que les menaces (propos, tracts, etc.)». «Ce climat préoccupant se traduit par un recul persistant de la tolérance depuis 2009. Malgré cela, la France demeure tout de même — à rebours des effets grossissants des médias et des réseaux sociaux — une terre d’accueil au sein de laquelle les manifestations et le sentiment racistes restent globalement stables, les unions mixtes toujours plus nombreuses, le dialogue interculturel s’instaure, ou mieux, s’ancre ici et là. Dans les écoles, les enfants s’enrichissent de leurs différences et prouvent que la France sait rester fidèle à ses valeurs», conclut Christine Lazerges.
Lire le rapport dans son intégralité :
http://fr.scribd.com/doc/215668601/CNCDH-Racisme-2013-Basse-Def-1
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