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Voici l’histoire de mon père, Sidi Mammar Hocine, de mes cousins et de mes oncles avec quelques photos datant de la Guerre de Libération nationale.
Sidi Mammar Hocine est né le 29 mai 1914 à Bou Hinoun (wilaya de Tizi Ouzou). Officier de liaison, en 1942 il était déjà militant de la cause nationale au sein du PPA/MTLD et membre de l’OS. Il était l’homme de confiance et le confident de Krim Belkacem et du colonel Ouamrane. Avant le déclenchement de la Guerre de Libération, il avait vendu deux parcelles de terrain pour contribuer à l’achat d’armes. Très discret, au déclenchement de la Révolution, le 1er novembre 1954, il est parti avec le colonel Ouamrane et quelques militants du côté de la Wilaya IV.
D’après Amar Dris, ancien militant de la cause nationale, une réunion s’est tenue à Aguergour, entre Bouhinoun et Betrouna. Ils attendaient la réponse de Messali Hadj, qui était à l’étranger et devait donner son accord pour le déclenchement de la Révolution, début 1954. Sidi Mammar Hocine a pris la décision, en présence de Krim Belkacem et des autres membres du groupe, de déclencher la Révolution quelle que soit la réponse de Messali.
Après le déclenchement de la Révolution Sidi Mammar Hocine a exécuté plusieurs missions délicates ; certaines, que je connais, ne peuvent pas être dévoilées. D’ailleurs, c’est à partir de là qu’on l’a soupçonné d’avoir commis quelques attentats. Un jour, entre décembre 1954 et janvier 1955, un groupe de gendarmes et de policiers en civil, avec des chiens, ont envahi notre maison à Bou Hinoun. Ils ont interrogé ma mère. C’est à partir de ce jour-là que mon père a abandonné son travail, sa famille et est monté au maquis.
Il est revenu deux ou trois fois à la maison avant de tomber au champ d’honneur, le 23 mars 1957, à Izemmouren, commune d’Aït Khelili, au grade d’aspirant ou de sous-lieutenant, aux côtés du capitaine Si Kaci et d’un autre aspirant. C’était une grande bataille qui a duré du 21 au soir jusqu’au 23 mars. Bilan : 149 chouhada entre officiers et djounoud, et plusieurs civils femmes et hommes. Ce jour-là étaient présents Krim Belkacem, Mohamedi Saïd, Benyoucef Benkhedda et Abderahmane Mira, qui n’était pas colonel à l’époque. Les morts ont été enterrés dans des tranchées par dizaines, d’après les rescapés de cette grande bataille.
Après la mort de mon père, on a quitté notre maison (qui a été d’ailleurs détruite quelques mois après) pour occuper celle de mon oncle, au centre du village ; lui habitait à Tizi Ouzou. Nous avons alors changé de nom pour nous appeler Ouabdeli, jusqu'à l’indépendance.
En décembre 2009, un article dans El Watan évoquait Ben Chennouf Mohamed, qui avait commis un attentat à Alger en 1956 ; il avait été envoyé par Krim Belkacem et le colonel Ouamrane ; un certain Si El Hocine était chargé de le couvrir. Il me semble que ce dernier était mon père, qui avait pour nom de guerre «l’hélicoptère.» J’aurais Voulu avoir davantage de renseignements sur cette opération et ses membres…
Je vous informe que le village de Bou Hinoun compte 84 chouhada (martyrs, NDLR). Le premier chahid (martyr, NDLR) tombé au champ d’honneur en 1954 est Touahri Amar, dit Amar Asmane.
Sidi Mammar Si Larbi est né le 21 février 1913 à Bou Hinoun. Il était cheikh du village et chef de front. Il a subi les pires tortures (plis dans sa chair, sel dans ses blessures…) puis on lui a crevé les yeux vivant avant de l’emporter à Beni Douala. Quelques jours après, on nous a informés qu’il était mort sous la torture.
Sidi Mammar Moh Saïd : commerçant, membre de l’OCFLN, il a été arrêté en 1955 et emprisonné jusqu’en 1956. A sa sortie, il a repris ses activités comme chef de front. Il a été exécuté à la mitraillette en 1957, devant sa famille et les citoyens du village. Sidi Mammar Rabah était membre de l’OCFLN de 1955 à1957, il est tombé au champ d’honneur à Maatkas.
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