Récit des années 1850, juste avant le Tipaza français.
PROJET D'ETABLISSEMENT
D'UNE FERME-VILLAGE
A TIPASA
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Le gissement de Tipasa repose sur une plaine dont les abords
du côté de terre sont faciles et doux ; C'est au pied
des murailles de la ville, que viennent mourir et disparaître
les derniers soulèvements géologiques du Sahel.
Les forces volcaniques, qui ont bouleversé ces contrées,
ont eu leur foyer placé, dans la chaîne du petit Allas, au
lieu appelé : col de Téniah. Elles semblent s'être épuisées,
en s'éloignant du centre et se rapprochant de la mer-, tandis
qu'elles paraissent renaître, avec plus de vigueur, plus
d'intensité, dans le système volcanique, dont le mont Zakar
est le noyau, et dans les ramifications de ce système, qui
disparaissent dans la mer au mont Chenouan.
C'est à la montagne dite : col de Téniah qu'a lieu le
partage des eaux, qui alimentent le pays, et que se trouvent
les sources:
1° de la Chiffa, dont le cours se dirige vers l'est;
2° de L'Oued-Djer, qui coule vers l'ouest, pour ensuite, par
un retour vers l'est, venir rejoindre la Chiffa, dans la plaine
de la Mitidja, sous le nom de Mazafran, après avoir traversé
le lac Halloula;
3° du Chétif, qui déverse ses eaux,
d'abord vers le sud, pour aller joindre la plaine qui porte
son nom, ensuite vers l'ouest; et après avoir porté la vie
et l'abondance à cette grande plaine, qu'il parcourt dans
toute sa longeur-, vient se jeter à la mer aux pieds des monts
Zegnoun et Makioun.
Un grand nombre d'autres sources sourdent de ce point
élevé de plus 1,500 mètres au-dessus du niveau de la mer,
et s'irradient vers tous les points, même dans la direction
du Djurjura, l'ancien Mons Ferratus des Romains.
Tipasa est peu distante de plusieurs grandes villes. Du
côté de l'est, quinze lieues seulement la séparent d'Alger ;
et du côté de l'ouest, elle n'est qu'à trois lieues de Cherchell.
Par mer, sa distance, de ces deux ports, est encore
plus rapprochée.
Le mont- Chenoua se trouve entre Tipasa et Cherchell.
Une de ses radiations s'immerge dans la, mer en y formant
le promontoire dit : Raz-el-Amouch, sur la crête duquel
passe la méridien de Paris.
A l'ouest de la ville, entr'elle et le Chenoua, se trouve
une baie spacieuse, qui forme le port de Tipasa, appelé en
arabe : Mers-el-Amouch.
La rivière du Nador ou Gourmaat naît de l'écoulement des
eaux qui s'épanchent des flancs du Chenoua, vient déboucher
dans cette baie. Celle-ci est profonde : les navires,
même de haut-bords, y -trouvent un très bon mouillage,
sur un fond de vase, de sable et de roches, et sont parfaitement
abrités des vents d'ouest et de nord-ouest, ainsi que
des courants rapides, qui arrivent du détroit de Gibraltar.
Les vents d'est et du nord y soufflent avec violence ; il
serait facile, au moyen de quelques travaux d'art, d'en faire
un port vaste et sûr. Les navires peuvent, sans aucuns risques
raser la terre de très près, la falaise se trouvant à
pic, et plongeant verticalement dans la mer à une profondeur
qui varie de 16 à 25 mètres.
C'était un des principaux ports, d'où s'écoulaient, vers l'empire
romain, ces immenses quantités de blé, recollées jadis
dans les plaines de la Mitidja et du Chélif : Ce qui avait fait
considérer l'Afrique comme le grenier de Rome.
On y recueillait aussi beaucoup de sel marin, dans de
salines, qui existent encore bien conservées et qu'il sera facile
de rendre à leur destination, avec très peu de frais.
Une d'elles, que nous avons découverte, et qu'à cause de
sa grandeur on pourrait confondre avec une crique, pour
mettre les bateaux à l'abri, est creusée dans un seul bloc
de roche, dont les parois latérales sont taillées en muraille
d'un mètre cinquante de hauteur en dedans et en dehors ;
sa forme est celle d'un carré long-, elle est percée d'une
seule ouverture carrée d'un mètre de large environ; on y
voit deux rainures perpendiculaires pour y glisser une écluse
et empêcher la communication avec la mer, dont elle est
entourée.
Sa longueur est de 60 mètres et sa largeur
de 37 mètres, ce qui donne une superficie de 2,220 mètres;
le fond est enduit d'un stuc, qui a résisté aux sels rongeurs
du temps et de la mer ; il n'est recouvert que de 25 à 30
centimètres d'eau.
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Du côté du nord, la ville a une longueur de 1,600 mètres
et du midi, elle n'a que 1,100 mètres; sa largeur moyenne
est de 350 mètres-, sa figure est un trapézoïde, un carré long
irrégulier ; elle occupe une superficie de 47 hectares.
Les remparts existent encore, à part quelques brèches
de peu d'importance. Il serait facile de les réparer, car les
matériaux sont sur place; ils enclosent la ville sur les trois
faces, qui regardent la terre, et la défendent contre les attaques
des ennemis; la face, qui est au nord, est à l'abri
d'un coup de main, par les récifs, qui bordent le rivage, sur
une partie, et par une falaise très élevée, taillée à pic, qui
occupe l'autre partie.
Cette ceinture de fortifications romaines , règne sur une
longueur de plus de 2,000 mètres; elle est flanquée, de distance
en distance, de quatorze tours qui dominent la campagne,
et ont chacune une issue pour les communications
du dehors au dedans. On y remarque des constructions en
ruines, qui servaient de corps-de-garde, d'autres plus grandes
étaient des casernes ; il y a de grandes citernes qu'on
n'aurait qu'à déblayer des matériaux qui les encombrent,
pour les rendre à leur usage. L'une d'elles offre,
15 mètres de long sur 10 de large et environ 6 mètres
de profondeur; les décombres ont empêché d'en reconnaître
la profondeur totale.
Tous les édifices et les maisons avaient des citernes que
l'on retrouve encore, mais qui sont devenues des terriers,
où les lapins foisonnent.
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