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Les habitants de cette contrée ne sont plus les descendants
aborigènes des Icompenses ni des Nababes, peuplades inquiètes
et inhumaines. Le sang européen circule évidemment
dans la génération actuelle; la race s'est abâtardie, par ses
croisements divers, avec les nations, qui sont entrées en relation-
intime de commerce et de co-habitation.
Les caractères de leur physionomie sont bien différents
de ceux, qui distinguent les hordes numides, dont la plaine
de la Métidja est encore, de nos jours , sillonnée, et dont le
type distinctif consiste en une maigreur osseuse et pourtant
musculeuse, qui n'exclut pas la santé et qui indique la
force; un nez judaïque, des lèvres saillantes, légèrement
boursoufflées, le teint jaunâtre, l'absence de mollets -, c'est,
au contraire, un galbe régulier, selon nos idées d'Europe. Les
hommes y sont bien proportionnés, plus petits que dans les
autres parties du littoral ; ils ont le teint blanc, coloré, le
nez bien fait, la bouche moyenne, l'oeil vif, et conservent un
air de bonne santé, qui ne touche pas à l'embonpoint et qui
est bien au-dessus de la maigreur. L'intelligence brille dans
leurs gestes et dans leurs regards; on croit revoir en eux
les descendants malheureux de quelques familles épargnées
par les persécutions, ou échappées au massacre, qui , après
la destruction de leur patrie, sont restées dans les alentours
pour en cultiver les champs abandonnés et pleurer sur elle.
La fertilité du sol, l'abondance des eaux, source de richesse,
dans cette vallée, ainsi qu'une douce température
rafraîchie, par la brise de mer, qui, chaque jour, émousse les
chaleurs suffoquantes du soleil d'Afrique, les ont retenues
stationnaires. Bien différents des arabes qui méprisent la
propriété, et changent de lieux, lorsqu'ils en ont épuisé la
fertilité, pour aller chercher ailleurs des pâturages et des
terres vigoureuses ; les Tipasiens tiennent à leurs héritages ;
l'agriculture et l'élève des troupeaux sont leurs occupations
principales'. Malgré le voisinage de la mer, ils sont peu marins
et ne se livrent pas à la pêche, ils aggrandissent leurs
domaines, par le défrichement des steppes de bruyères , de
térébinthe, de chênes verts, dont les collines sont couvertes.
Malheureusement, l'abus del'eau-de-vie de figues et des
liqueurs fortes, pour lesquelles, ils ont un goût très prononcé
, et un penchant vers l'oisivité, peut-êlre aussi l'assurance
de l'impunité, dans ces lieux écartés des routes battues,
les ont rendus inhospitaliers. Malheur au
voyageur isolé, qui s'aventure dans les défilés du Nador,
il est rare qu'il rentre sain et sauf dans ses foyers.
Un grand réservoir carré d'architecture romaine, où se rendaient
les eaux du Nador, avant de s'engager dans le canal
de Tipasa, porte un nom, qui, traduit de l'arabe, veut dire :
Bois et va-t-en, avis tout charitable donné à l'imprudent
pour le prémunir contre les assassins.
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Ha ha ha
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Écrit autour de 1850, dans le cadre du :
PROJET D'ETABLISSEMENT
D'UNE FERME-VILLAGE
A TIPASA
pour la colonisation par la France
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