L'insurection de la toussaint 1954 frappe surtout par la simultanéité des 70 actions lancées contre des bâtiments civils et militaires ( attaques, lancement de bombes, attentats individuels).
Dans la nuit de dimanche 31 au lundi 1er novembre 1954, les opérations des commandos du F.L.N. (front de Libération National) marquent les esprits par leur coordinations (entre minuit et 3 heures du matin) et leur dispersion sur tout le territoire. Oranie, Algérois, Kabylie, Constantinois et Aurès Némenchas. Des engins explosifs sautent et incendient un peu partout, provoquant plus ou moins de dégâts. Des postes de police sont également attaqués ainsi que des casernes.
Le 1er novembre 1954 une nouvelle guerre commence que les autorités françaises considèrent tout d’abord comme un soulèvement tribal. Les séditieux de novembre 1954 sont, en fait, des dissidents du mouvement nationaliste algérien en rupture avec le P.P.A-M.T.L.D. et avec Messali Hadj, son fondateur. Un comité de six activistes auxquels se joignent trois représentants en poste au Caire créent une organisation révolutionnaire nouvelle : le Front de Libération National, le F.L.N.
Ce premier novembre 1954, deux jeunes instituteurs français ont rendez-vous avec la guerre dans ce paysage brûlé des Aurès. Au col de Tighanimin ; au Km 79 sur la route de Biskra à Arris, un car de voyageurs sera attaqué par un commando du F.L.N. Le Caïd Hadj Sadik de M’chounèche et Guy Monnerot, sont tués, l’épouse de Guy Monnerot est grièvement blessée
Le FLN a placé les Aurès (wilaya 1) sous la direction de Mostafa Ben Boulaïd et la grande Kabylie (wilaya 3) sous l’autorité de Belkacem krim. L’un et l’autre sont des fondateurs du FLN et appartiennent au comité des six de l’intérieur.
C’est dans le Constantinois et les Aurès qu’ont lieu les événements les plus graves. L’heure H sur Batna et khenchela est fixé à 3 heures. A Batna, Lakhnar avec une trentaine d’hommes, s’est placé dès 2 heures près de la caserne de la sous-préfecture et du commissariat. A 2h 20, le sous-préfet Jean Deleplanque est prévenu par le commissaire de Biskra : son poste ainsi que les bâtiments de la commune mixte et la centrale électrique ont été attaqués. Il y a quatre blessés, mais le commando s’est replié. A 2h 45, Deleplanque alerte la gendarmerie de Batna et le colonel Blanche, commandant la place. Lakhnar tire la fusée rouge de repli. Deux casernes du 9e régiment de chasseurs d’Afrique et du II/4e régiment d’artillerie le chasseur René Audat, 20 ans et le brigadier Eugène cochet 21 ans sont abattus. A khenchela, vers 3 heures, les hommes de Laghrour Abbas profitent de la surprise. L’administrateur Vive de Régie est sauvé par les spahis. Au commissariat, où trois agents sont neutralisés, les armes sont emportées. Le lieutenant Gérad Darneau commandant la place, est abattu alors qu’il poursuivait ceux qui viennent d’attaquer le poste de garde, où la sentinelle Makey est grièvement blessée. A Tkout, les hommes de Chihani Bachir neutralisent la gendarmerie où dix hommes quatre femmes et cinq enfants sont retranchés. Non loin, Arris isolé ne répond plus : les lignes et la route sont coupées. A Biskra le commando d’Hocine Berrahail attaque des gardiens de la paix : il y a quatre blessés pendant ce temps des bombes éclatent à la gare et transformateur électrique.
Le jour de l’insurrection, les chefs historiques réclamaient l’indépendance nationale par la restauration de l’Etat algérien souverain, démocratique et social, la reconnaissance de la nationalité algérienne.
Les réactions françaises sont d'ailleurs en rapport avec l'importance apparente du mouvement. Sur place, l'armée et la gendarmerie démantèlent la plupart des réseaux du F.L.N., réduisant le mouvement à une activité sporadique dans les zones montagneuses des Auèrs et de la Kabylie.
Dans les dix jours, à Alger même, la DST et la police arrêtent l’essentiel des forces du Front qui ont opéré dans l’agglomération algéroise. Yacef Saadi et Rabah Bitat sont sauvés par l’application stricte des règles de clandestinité. A Oran, Ben M’Hidi échappe lui aussi de justesse à l’arrestation.
A Paris le président du Conseil, Mendès France, et son ministre de l'intérieur, François Mitterrand, multiplient les énergiques déclarations sur leur volonté de rétablir l'ordre et sur l'appartenance de l'Algérie à la France.
Cependant, analysant l'insurrection comme la preuve d'un malaise, le gouvernement conclue à la nécessité de réformes profondes et, à cette fin, nomme Jacques Soustelle gouverneur général de l'Algérie.
Jacques Soustelle, qui arrive en Algérie et mal accueilli par les colons à un moment où la rébellion s’étend, il décide la pacification des zones rebelles et l'intégration de l'Algérie à la France par l'application loyale du statut de 1947.
A peine arrivé, Jacques Soustelle se heurte aux « féodaux », ces pieds-noirs dont le poids économique,appuyé sur une grosse fortune personnelle, se double d’une incontestable influence politique. : Henri Borgeaud - à tout seigneur de la trappe, tout honneur - sénateur radical socialiste et suprême meneur de jeu. Son adjoint Munk, seigneur du tabac ; Raymond Laquière – le président Laquière, qui tient farouchement à ce titre ; le maire de Saint Eugène, qui grâce à Borgeaud dirige les travaux de l’Assemblée algérienne. Le président de la région économique d’Alger, armateur, banquier, industriel et phosphatier, fier de son magot, plus gros encore que celui de Borgeaud et de Blanchette ; Amédée Froger, Isella ; Dromiguy, Alain de Sévigniy ; les frères Morel ; René Mayer ; Eugène Vallée ; Gratien Faure, seigneur du blé, conseiller général et délégué à l’Assemblée algérienne. Tous ceux-là soupçonnent Soustelle de vouloir brader l’Algérie française.
Jacques Soustelle ordonne la modernisation économique et sociale du pays et un large programme de scolarasation. Les autorités militaires réclament du ministre de l’intérieur, François Mittrerrand, des moyens supplémentaires. Le général Charrière a ainsi obtenu le déploiement de la D.I.A.P.et de dix bataillons de gendarmerie mobile. Objectif : Le ratissage des Aurès puis de la kabylie.
Le nouveau gouverneur général est porteur d’idées bien arrêtées sur l’avenir de l’Algérie. il ne croit pas à l’assimilation mais il veut réussi l’intégration. Cette politique d’intégration tentée par Jacques Soustelle à partir de février 1955 présentait des aspects positifs. Mais, elle arrivait trop tard. Le statut de l’Algérie simple province française, avait de moins en moins de partisans parmi les indigènes et fort peu parmi les français s’il ne garantissait pas leurs privilèges. A côté de ces vues théoriques à long terme, il y a la réalité prégnante de la rébellion. L’entourage de Soustelle le pousse à chercher des contacts qui malheureusement ne déboucheront sur rien. Pourtant pour mieux séduire ses interlocuteurs, Soustelle met en chantier un vaste plan économique destiné aux régions les plus déshéritées de l’Algérie.
Le cabinet Mendès France est renversé le 5 février 1955 après plus de deux semaines de crise Le radical Edgar Faure succède, Bourgès-Maunoury devient ministre de l’intérieur. Le 1er avril à 4h 30 du matin, devant un hémicycle presque vide où somnolant 25 députés votent l’état d’urgence, qui après le vote du Sénat s’appliquera tout d’abord à la grande Kabylie et à la région des Aurès.
Au printemps 1955, c'est toujours le Constantinois qui inquiète l'état-major. Des renforts sont envoyés.
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Dans l'Aurès, les opérations se succèdent. On l'appelle maintenant le massif pourri.
Collo fait partie des secteurs où les attentats, les embuscades, les accrochages se multiplient
l'hélicoptère finira par devenir l'indispensable véhicule tout au long de cette guerre
Le renfort des moyens de transport va permettre au commandement de multiplier ses activités.
Le colonel Ducournau commandant le 18è régiment d'infanterie parachutiste de choc
en conversation avec Jacques Soustelle dans un camp des Aurès.
La population européenne ne comprend pas la double démarche du gouverneur : rétablir l’ordre par la pacification et simultanément, bouleverser assez profondément, au profit des musulmans, le contexte économique, social et politique de l’Algérie.
Jacques Soustelle réussira, non sans mal, à faire triompher ses vues à Paris et le gouvernement lui accorde 86% des crédits qu’il réclame. Trop tard. Deux mois de guerre depuis l’entrée en fonction du gouverneur auront à cette date approfondi le fossé entre communauté européenne et communauté musulmane. Les passions déchaînées des deux côtés de la barricade feront apparaître le plan Soustelle dépassé par les événements. Et lorsque soixante et un musulmans élus démissionneront, leur geste portera le dernier coup au rêve intégrationniste de Soustelle.
Au fil des moins, les efforts de pacification étaient impuissants à empêcher l’extension de la rébellion dans le Constantinois et l’Oranie.
Ce n'est véritablement que durant l'été 1955 qu'est pris le tournant décisif vers la guerre. Décidé à empêcher une politique d'intégration qui apparaît inacceptable qu'aux yeux du nationalisme algérien, le F.L.N. prend une initiative destinée à affirmer son audience sur les masses musulmanes, à creuser le fossé entre les communautés et à intimider les Algériens partisans d'un dialogue avec les Français.
Les 20 et 21 août, il provoque et encadre un soulèvement de musulmans du Constantinois qui s'attaquent aux quartiers européens des villes et aux fermes européennes isolées. Une centaine de morts sont dénombrés autour de Constantine. Il en résulte une répression d'abord spontanée qui prend la forme de "ratonnades", la chasse à l'Arabe et qui est le fait de civils européens. Lorsque les autorités reprennent les choses en mains, on compte un millier de morts parmi les musulmans. Un fossé du sang sépare désormais les deux communautés.
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