Au cœur de la tradition orale
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Ayant traversé les siècles grâce à la tradition orale et à des manuscrits dont une partie a été perdue, les Mille et Une Nuits ont une origine ancienne qui reste relativement mystérieuse. Elles trouvent sans doute leur source originelle dans des récits de la tradition orale indienne — la structure narrative «enchâssée» du recueil est présente dans d’autres contes anciens originaires d’Inde —, dont certains pourraient dater du IIIe siècle. Les premiers textes ayant formé la base du recueil ont ensuite probablement été établis en Perse, comme en témoigneraient les noms, persans, des protagonistes principaux, Shahrazâd (Schéhérazade) et le sultan Chahriyâr (Schahriar) — un recueil persan narrant l’histoire de Shahrazâd est d’ailleurs évoqué par des écrivains arabes, tel Ibn Nadim au Xe siècle, sous le nom des Mille contes (Hazar Afsana). Se répandant à travers le monde arabe à partir du VIIIe siècle, adapté à sa culture, l’ensemble initial est, au fil du temps, complété par un grand nombre de contes arabes, pour former les Mille et Une Nuits (Alf layla wa layla).
La plupart des textes arabes rassemblés sont tirés de récits populaires, de légendes ou de fables transmis par la tradition orale. Ils s’organisent autour de deux sources principales. La première comprend des textes ajoutés vers le Xe siècle sous le règne de la dynastie des Abbassides. Ils prennent place à Bagdad, siège de la dynastie, décrivent les splendeurs de la capitale et font référence à des personnages historiques tels le calife Haroun al-Rachid. Le second groupe de textes, d’origine un peu plus tardive (XIe ou XIIe siècle), prend quant à lui naissance au Caire durant le règne des Fatimides ; merveilleux, magie, génies et tapis volants y sont très présents. Enfin, les Mille et Une Nuits se complètent de contes et manuscrits d’origine inconnue, et la compilation semble tendre à une forme fixe vers le XIVe siècle. Parmi les nombreux récits qui les composent figurent des épopées guerrières, près de 1 250 poèmes et plusieurs histoires sentimentales.
Le récit fait par Schéhérazade (Shahrazâd), nuit après nuit, au sultan Schahriar (Chahriyâr) constitue la trame principale de l’œuvre. Le sultan, après avoir découvert l’infidélité de sa première épouse et l’avoir fait décapiter, est décidé à épouser chaque nuit une nouvelle femme, pour la faire périr au lever du jour. Alors Schéhérazade, la nuit de ses noces, entreprend de conter à sa sœur, à portée d’oreille du sultan, le premier de ses récits. Elle s'interrompt à l'aube, avant la fin de l'histoire, si bien que le sultan, désireux d'en connaître le dénouement — «Par dieu ! Je ne la tuerai que lorsque j’aurai entendu la suite.» —, accorde à son épouse un jour de sursis. Sollicitée par sa sœur et par le sultan lui-même — «conte-nous vite la suite de ton récit d’hier» —, celle-ci poursuit nuit après nuit, s’interrompant toujours à l’aube avant la fin de l’épisode. Elle conte ainsi peu à peu l’histoire du pêcheur et du djinn, du dormeur éveillé, du sage persan ou encore du calife et du fou… «Mon histoire comporte […] nombre d’épisodes plus beaux et plus merveilleux encore que ceux dont je vous ai régalés».
Chacune de ses histoires, par un effet d’enchâssement des récits, contient à son tour plusieurs autres légendes contées, comme c’est le cas du conte du marchand et du djinn, dans laquelle trois vieillards racontent chacun une histoire dans le but de sauver un marchand qu’un djinn veut tuer de son sabre. «Et elle continua à dérouler ainsi le fil de ses histoires, l’interrompant à la fin de chaque nuit et le reprenant au cours de la nuit suivante, toujours avec la permission du roi Chahriyâr… Et mille et une nuits s’écoulèrent». À la fin du dernier récit, Schéhérazade demande sa grâce à Chahriyâr, qui annule la sentence de mort.
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Diffusion et popularité de l’oeuvre
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L’œuvre doit sa découverte en Occident à l’orientaliste français Antoine Galland qui, à partir d’un recueil en arabe d’auteur inconnu rapporté de Syrie, publie le premier volume de ses Mille et Une Nuits en 1704. Devant le succès que rencontrent ces Contes arabes traduits en français, il écrit ensuite, jusqu’à 1717, onze autres volumes. Édulcorant dans sa traduction le texte original, il omet certains poèmes qu’il juge trop osés, et incorpore par ailleurs divers contes n’appartenant pas au recueil de départ. C’est le cas en particulier des récits qui ont pourtant, sans doute, connu la popularité la plus grande : Aladin et la lampe merveilleuse, Sindbad le Marin et Ali Baba et les quarante voleurs, un récit de provenance indéterminée — peut-être issu de la tradition orale, il pourrait également avoir été tiré d’un recueil d’origine turque. Par la suite, de nombreuses traductions de l’ouvrage sont produites à travers l’Europe entière, puis dans le monde oriental — la première version imprimée en arabe, établie à partir de textes anciens, paraît à Calcutta en 1814. Interprétations libres, adaptations pour les enfants, contes supprimés ou ajoutés, il existe aujourd’hui des dizaines de versions différentes du recueil des Mille et Une Nuits.
L’immense succès des Mille et Une Nuits a une double origine : fourmillant notamment de références sur la vie quotidienne, l’organisation religieuse, politique et sociale du monde arabe, les Mille et Une nuits offrent en outre une vision empreinte de merveilleux et de raffinement qui, après avoir inspiré notamment Goethe et Proust, continue aujourd’hui encore d’évoquer dans l’imaginaire collectif toute la magie d’un Orient rêvé.
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02-10-2007
R . C.
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