Une main de fer dans un gant de velours.
Toute communauté humaine réunie dans une construction politique a besoin de symboles et les femmes françaises d’origine maghrébine ont trouvé le leur. Symbole de la diversité accédant à de hautes fonctions politiques, Rachida Dati a célébré le 13 juillet 2007 la Fête Nationale au Ministère de la Justice aux côtés du Président Sarkosy et d’autres ministres européens. Alliant grâce et détermination, elle a mentionné son désir d’implication dans la création d’un espace judiciaire européen. Relevant tous les défis afin d’éviter tout déterminisme social selon lequel les personnes issues de milieu modeste ne pourraient réussir, elle brave les mauvaises langues et s’impose aujourd’hui comme figure incontournable du gouvernement français. Entretien avec une femme d’exception En tant qu’héritière de deux cultures, vous incarnez l’image de la réussite. Quel a été votre parcours ? -Comme tout le monde le sait, je suis issue d’une famille modeste et nombreuse. Depuis toute petite, j’étais consciente de l’importance des études et j’en ai fait une priorité. Mes études universitaires se sont soldées par une maîtrise en Sciences économiques et une maîtrise en Droit Public. J’ai effectué également un passage par l’Ecole Nationale de la Magistrature sur les conseils de Simone Veil. Pourquoi avez-vous choisi M. Sarkosy et l’UMP ? On aurait pu croire que de par vos origines, vous auriez choisi d’être de gauche ? -Pendant les années 1990, je deviens conseillère technique à la Direction juridique à l’Education Nationale puis substitut du procureur au tribunal de grande instance d’Evry. J’approuvais à l’époque les idées bien arrêtées de M. Sarkosy notamment sur l’emploi et la sécurité dans les banlieues. En 2001, je lui écris trois lettres mais il ne répondra finalement qu’à la troisième, probablement fatigué d’être harcelé…( Rires) Quelques temps après, je deviens attachée au projet de loi sur la prévention de la délinquance. C’est ainsi que l’idée reçue que toute personne étant issue de l’immigration serait de gauche trouve en moi et en beaucoup d’autres l’exception. La gauche, sa complaisance dans le misérabilisme et son regard constant en arrière, n’est pas faite pour les battants qui aspirent à l’élévation et à la réussite. Comment pensez-vous aider aujourd’hui les jeunes qui ont un désir certain de réussir ? -Il ne faut pas se leurrer. Si j’occupe aujourd’hui la fonction de Ministre de la Justice, c’est à force de travail et de détermination. Pendant mes études, j’ai travaillé comme aide-soignante pour les financer. A 20 ans, je me suis fait inviter à une réception à laquelle j’ai interpellé le Ministre de la Justice de l’époque qui m’a donné ma chance. Par la suite, j’ai tout fait pour convaincre M. Sarkosy de ma motivation et de mon désir d’implication corps et âme dans des tâches qui en valent la peine et c’est ainsi que je suis devenue son porte-parole lors de sa campagne électorale. Il faut que les jeunes d’aujourd’hui prennent conscience que le travail et la motivation sont les clés de la réussite. L’audace et non l’arrogance peut être le signe distinctif qui fera de la nouvelle génération les piliers de tout pays mais il faut le vouloir et non pas attendre que tout soit servi sur un plateau d’argent. Depuis que vous êtes Garde des Sceaux et Ministre de la Justice, vous avez mis en place la peine-plancher et un juge délégué aux victimes. Quelles seront vos prochaines réalisations ? -Comme je l’ai annoncé lors de mon discours le soir de la célébration du 14 Juillet, je désire contribuer à la création d’un espace judiciaire européen en arrivant à faire articuler les fonctions du système judiciaire et harmoniser les législations de 27 pays. Pour le moment, les difficultés rencontrées depuis la prise officielle de mes fonctions sont de plus en plus nombreuses sur le plan national mais elles constituent aussi un défi stimulant. Comment votre entourage perçoit-il votre réussite ? -Depuis toujours, mes proches m’ont encouragée et m’ont soutenue dans mes choix. Je dois tout à mes parents et surtout à ma mère : Dieu garde son âme. Mes frères et soeurs sont présents à mes côtés et nous essayons de nous voir très souvent malgré mon emploi du temps surchargé. Ma famille reste ma priorité. Concernant la parution de vos photos étant jeune, vous avez mis votre veto à leur publication. Etes-vous prête à laisser quand même une partie de votre vie privée être dévoilée comme toute personne publique ? -Je pense que des photos concernant ma vie professionnelle peuvent être publiées car elles renseignent sur les activités politiques du Ministre de la Justice des Français. Cela peut être un plus d’être au courant de ce qui passe dans nos murs. Par contre, des photos de moi pendant l’adolescence ou en maillot sur la plage ne constituent certainement pas une valeur ajoutée pour le pays. Ce n’est pas facile d’être à la fois femme et d’origine maghrébine. Avez-vous parfois la sensation d’être soumise à une discrimination dans votre vie professionnelle ? -Il est vrai que pour être là où j’en suis aujourd’hui, j’ai dû faire face à des personnes occupant de hautes fonctions mais dont la façon de penser est restée à un stade primaire. Heureusement, face aux discriminations, mon CV et ma motivation ont fait office de garantie. Mon parcours, à la fois difficile mais aussi convaincant, a dissuadé les plus téméraires. Vous avez dit : « Associer identité et immigration, c’est pallier l’échec de toutes les politiques d’intégration ». Comment ? -Chez la population immigrée et en particulier les jeunes issus de deux cultures, nés en France, il y a un désir manifeste d’identité. Les réactions sont parfois négatives et peuvent être violentes face à l’absence d’appartenance à un groupe social. Il faut absolument faire ressortir les richesses des deux cultures et les exploiter pour s’intégrer. Etre mixte, c’est un plus et non un handicap dans un pays comme la France. On doit penser français afin d’enrichir et de développer notre pays. A propos de la démission de certains membres de votre cabinet, on dit de vous que vous êtes autoritaire et dure au travail. Comment est la vraie Rachida Dati dans la vie de tous les jours ? -J’aime le travail bien fait. On doit s’impliquer totalement quand on commence un projet difficile. Ceux qui prennent le travail à la légère et qui ne s’investissent pas n’ont pas de place dans mon cabinet. Je peux paraître autoritaire, parfois voire sèche dans mes propos mais ceux qui me côtoient au quotidien savent que pour faire avancer les choses, il faut savoir faire preuve parfois d’intransigeance. Mais je crois quand même être une personne facile à vivre et ouverte à toutes les suggestions. Vous voyez-vous dans quelques années la première femme Présidente de France ? -Il est vrai que je suis ambitieuse et que mes ambitions peuvent paraître sans limites, mais laissons d’abord à M. Sarkosy le temps d’exécuter son mandat et je tiens à remplir ma mission comme il se doit à ses côtés. Pour le reste, l’avenir nous le dira. Quels conseils donneriez-vous à toutes les femmes qui débutent dans la vie et qui ambitionnent d’obtenir des postes importants ? -D’abord, déterminez vos objectifs, essayez d’être toujours motivées et ne laissez personne vous décourager. Travaillez d’arrache- pied car vous récolterez le fruit de votre labeur. On croit souvent qu’être femme aujourd’hui est beaucoup plus facile qu’il y a cinquante ans mais il n’en est rien car concilier vie de famille et ambitions personnelles est dur. Soyez fière d’être une femme et ne laissez personne vous dire le contraire . .
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