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Bône, l’administration pacifique du général Monck-d’Uzer produisit dans les rapports des conquérants avec les tribus des résultats satisfaisants : les Arabes campaient autour de la place; leurs cavaliers éclairaient la marche des détachements français; mais dans la ville saccagée par les Turcs les ruines et la solitude entouraient les soldats. En butte aux injures de l’air ou entassés dans des baraques qui ne les garantissaient pas de la pluie, ils ne pouvaient échapper aux émanations des marais fétides que forment la Seybouse et la Boujimah avant de se jeter dans la mer; une maladie épidémique (la fièvre jaune) vint encore augmenter ces causes de destruction, et sous leurs influences réunies la garnison perdit un quart de son effectif. Malgré ces pertes, malgré le système de douceur qu’il avait adopté, le général Monck-d’Uzer fut obligé de châtier sévèrement plusieurs tribus qui, à l’instigation d’Ahmed, bey de Constantine, se montraient hostiles: de ce nombre furent les Oulad-Attia qui habitent les rives d’un lac situé à quatre lieues de Bône, dans la direction de Stora; il alla les attaquer sur leur territoire, leur tua beaucoup de monde et leur prit quelques troupeaux qui servirent à indemniser les alliés de leurs pertes et surtout l’administration, dont une partie du parc avait été enlevée. Quelques mois après, il fut obligé de sévir avec la même vigueur contre les Merdès, tribu très nombreuse qui habite sur la rive droite de la Mafrag. Ceux-ci avaient pillé des marchands qui se rendaient à Bône; le général les somma par trois fois de faire réparation de cette offense; mais par trois fois ils restèrent sourds à ses remontrances. Les voies pacifiques étant restées sans effet, il lança sa cavalerie sur les rives de la Mafrag, enfonça en un clin d’œil les rebelles et leur enleva leurs troupeaux. Les Merdès vinrent alors demander grâce à genoux; elle leur fut généreusement accordée, et depuis cette époque ils se sont montrés nos alliés fidèles.
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Après l'évacuation de Médéa, le bey de Constantine était parvenu à faire reconnaître hakem de cette ville un Maure nommé Mohamed-el-Khajy, qui lui était intimement dévoué; les habitants restés fidèles à la cause des occupants, les tribus qui comptaient sur son appui, voyant ainsi s’évanouir leur prépondérance, sollicitaient vivement le général Voirol de réinstaller le bey nommé par le général Clausel, ou du moins de leur donner un chef qui fût dévoué à ses intérêts. Le général Voirol n’osa rien prendre sur lui; il en écrivit à Paris, mais on ne lui fit aucune réponse sérieuse, et lorsqu’il fut obligé d’abandonner son commandement, aucune détermination n’avait été prise.
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A Bougie, les attaques incessantes des Kabyles furent heureusement repoussées par le jeune commandant à qui la garde de cette place avait été confiée. La garnison eut à supporter des privations et des fatigues sans nombre; mais, dans toutes les circonstances. Les jours de combat étaient devenus pour elle des jours de fête. Cependant deux blockhaus, construits l’un dans la partie supérieure de la ville, l’autre dans le bas, à l’entrée de la plaine, finirent par contenir les Kabyles et rendre plus facile la tâche des soldats.
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Telle était la situation politique et militaire en Algérie vers le milieu de l’année 1834. Malgré d’assez nombreuses fautes, l’administration du général Voirol avait avancé les affaires. Comparée à celle du duc de Rovigo, elle a prouvé que d’une rigueur ou d’une faiblesse extrêmes, celle-ci avait eu des suites moins funestes. S’il se fût moins laissé intimider par sa situation intérimaire, s’il se fût appliqué à acquérir les connaissances administratives qui lui manquaient, s’il eût de bonne heure secoué le joug que l’intendant civil sut habilement lui imposer, ce général aurait sans contredit obtenu de meilleurs résultats, et inspiré au gouvernement assez de confiance pour faire convertir son mandat provisoire en un titre définitif. Deux malencontreuses affaires, où sa religion fut surprise, achevèrent de le perdre dans l’esprit du ministère. Le moment était fâcheux, car à cette époque on s’occupait, à Paris, d’une réorganisation complète de l’administration et de l’armée en Algérie.
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Au premier moment d’enthousiasme causé par la prise d’Alger, il n’y avait eu qu’un cri en France pour la conservation et la colonisation des belles contrées qui en dépendent. Le gouvernement de juillet sembla d’abord se rendre à ce vœu en envoyant sur les lieux le général Clausel, qui dès le principe s’était montré partisan convaincu de la colonisation; mais les tracasseries qui lui furent suscitées, disons-le aussi, ses erreurs, et enfin son rappel, firent suspecter les intentions du gouvernement. On parla d’engagements secrets pris avec les puissances étrangères, relativement à l’Afrique; l’opinion publique s’en indigna, et la conservation d’Alger devint une affaire d’honneur national. Se plaçant à un autre point de vue, des hommes positifs demandèrent quels avantages on pouvait tirer de c ette conquête, en compensation des sacrifices qu’elle imposait; et plusieurs publicistes, entrant dans cette voie, n’hésitèrent pas à déclarer qu’il y avait plus de perte que de profit à la garder. Les partisans de la colonisation ne purent refuser de suivre leurs adversaires sur le terrain des intérêts matériels, et la question devint en quelque sorte arithmétique. Le ministère, dont presque tous les membres ne considéraient guère l’Algérie que comme une source continuelle d’embarras, vit avec une secrète satisfaction la question se réduire à ces termes étroits, et annonça qu’une commission nommée par le roi irait puiser sur les lieux les éléments nécessaires à sa complète solution. Il déclinait ainsi toute responsabilité, et ajournait pour quelque temps encore une décision définitive. Il faut le dire, cette commission, présidée par le lieutenant général Bonnet, pair de France, inspirait à tous les partis la plus grande confiance; elle était composée de MM. d’Haubersaert, pair de France, de la Pinsonnière, Laurence, Piscatory et Reynard, membres de la chambre des députés, Duval-Dailly, capitaine de vaisseau, le général Montfort, inspecteur général du génie. Les récriminations cessèrent, et on attendit avec une vive impatience le verdict de ce grand jury.
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La commission visita toutes les villes occupées par les troupes, à l’exception de Mostaganem, se fit donner des mémoires par tous les chefs de service, interrogea plusieurs personnes, et à l’aide de ces éléments chaque membre traita la partie qui avait le plus de rapport avec ses connaissances spéciales. Après un peu plus d’un mois de séjour en Algérie, elle revint à Paris, et soumit son travail à une seconde commission, composée de dix-neuf membres, sous la présidence de M. le duc Decazes. On y procéda à de nouvelles enquêtes; les mémoires partiels furent revus; et en définitive, dans un rapport très circonstancié, cette assemblée conclut pour la conservation de l’Algérie. La majorité fut de dix-sept voix contre deux.
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Elle décida en principe que l’honneur et l’intérêt de la France lui commandaient de conserver ses possessions sur la côte septentrionale de l’Afrique; qu’en conservant les droits de la France à la souveraineté de toute la régence d’Alger, il convenait de borner en ce moment l’occupation militaire aux villes d’Alger, Bône, Oran, Bougie, et au territoire déterminé en avant des deux premières de ces places; c’est-à-dire, pour Alger, qu’une ligne de postes serait placée au pied de l’Atlas, à Blida, et s’étendrait, d’un côté vers le cap Matifou, et de l’autre vers Koleah; pour Bône, que le territoire serait également protégé par une ligne de postes qui, partant de l’extrémité du lac Falzara et passant par Sidi-Damden, viendrait s’appuyer à la mer, vers l’embouchure de la Mafrag. Elle écarta pour le moment tout projet d’expédition contre Constantine, et exprima le désir que l’effectif de l’armée pût être réduit à vingt-un mille hommes. Il fut décidé en outre que le gouverneur général, dépositaire de l’autorité royale, réunirait tous les pouvoirs civils et militaires; que ces hautes fonctions ne devaient pas être la conséquence du commandement militaire, mais le dominer; aussi la commission proposa-t-elle de mettre sous les ordres du gouverneur un lieutenant général pour commander les troupes, et des chefs spéciaux pour chaque nature de service.
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