Les chibanis, ces "papis portefeuilles", arrivés en France après l'indépendance algérienne, de façon temporaire, pensaient-ils. Ils y ont finalement passé leur vie, le regard tourné de l'autre côté de la Méditerranée. Ils livrent des témoignages rares dans Enquête de région, mercredi 28 septembre à 23h15.
Plongée dans nos mémoires collectives. 60 ans après l'indépendance de l'Algérie, l'émission Enquête de région propose trois reportages mercredi 28 septembre 2022, à 23h15, autour de la thématique commune : "60 ans d'indépendance de l'Algérie… d'une rive à l'autre".
"De l’Algérie vers Marseille", d'Estelle Mathieu et Franck Ventura, 3 minutes 30.
"Mémoires trouées", de Marie-Agnès Peleran, Sylvie Garat et Philippe Hervé, 14 minutes
"Chibanis, l’éternel tiraillement" de Sonia Boujamaa, Karen Cassuto et Alice Panouillot, 24 minutes
Un fossé mémoriel s'est construit entre la France et l'Algérie. Marseille, terre d'accueil pour des milliers d'ouvriers algériens, de pieds-noirs et de harkis, s'est construite sur ces histoires franco-algériennes multiples et souvent douloureuses.
Précieux témoignages
Difficiles à rencontrer parce que discrets et pudiques, ces hommes sont pourtant ancrés dans les paysages du sud-est de la France. "Chibanis, l’éternel tiraillement" illustre les vies intimes de vieux hommes algériens.
Arrivés en France après l'indépendance pour travailler, ils pensaient y vivre de manière temporaire. Ils n'ont finalement jamais quitté leurs foyers.
Nous les avons rencontrés dans les rues de Marseille, à Belsunce, à Noailles, à la Belle de Mai, au Vieux Port, face à la mer… mais aussi dans le Var, à Sainte-Maxime, près de Saint-Tropez, à l'aube.
Lakhdhar Mkherbeche se baigne tous les matins avant 6 heures pour observer le soleil se lever sur la plage de Sainte-Maxime. Puis, c'est l'heure du marché où il se rend presque quotidiennement.
Pour les commerçants, il est une figure incontournable de la commune. Il s'arrête à chaque stand, propose des cafés. Et quand il ne passe pas pendant plusieurs jours, tout le monde s'inquiète. Il veille sur eux et eux veillent sur lui. C'est le papi de tous les habitants qui le connaissent. Une famille en France, à défaut d'avoir vécu avec la sienne, restée en Algérie.
Seuls, sur leurs chaises, devant les portes de leurs chambres du foyer, les chibanis de la Côte d'Azur se retrouvent chaque jour dans les cuisines communes.
Ces "papis portefeuilles" ont cotisé une maigre retraite en France mais continuent d'aider leur famille restée en Algérie. Ils ont vécu toute leur vie seuls.
Leurs histoires se perdent à mesure que ces hommes approchent la fin de leur vie. Tiraillés entre deux pays, entre deux cultures, ils ont accepté de se livrer.
Voici un extrait de "Chibanis, l'éternel tiraillement", de Sonia Boujamaa, Karen Cassuto et Alice Panouillot :
Ils ont quitté l'Algérie alors qu'ils rentraient dans l'âge adulte. Depuis, ils vivent dans des résidences d'insertion autrefois connues sous le nom de foyers Sonacotra.
Vies sacrifiées
Une vie de pas grand chose. Une centaine d'euros de retraite et l'allocation de solidarité aux personnes âgées pour survivre. Pour ne pas perdre leurs droits, ils doivent rester plus de six mois et un jour en France, par an.
Ahcène Allouche est arrivé en France à 19 ans, juste après l'indépendance. Il vit à Belsunce, à Marseille, dans un foyer, avec d'autres chibanis comme voisins de pallier. Toute sa vie, il a fait des allers-retours pour rendre visite à sa famille, en Algérie. Son épouse, et neuf enfants qu'il n'a pas vu grandir.
Ahcène Allouche, 79 ans, Ahmed Mekhlouf, 84 ans, Lakhdhar Mkherbeche, 85 ans, Menouar Kaced, 74 ans, ces chibanis ont sacrifié leur vie pour nourrir leurs familles. Leurs histoires racontent l'Histoire. Celle d'une génération d'hommes seuls, tiraillés entre deux rives.
Les chibanis, qui signifie vieux, vieillards ou encore « cheveux blancs » en arabe maghrébin, représentent environ 235 000 personnes, majoritairement des hommes âgés de plus de 65 ans. Ils ont quitté l’Algérie, le Maroc et la Tunisie, durant les durant les Trente Glorieuses, alors qu’ils étaient de jeunes adultes, voire adolescents pour certains, dans l’espoir de construire un avenir meilleur en France.
Arrivés en France après l’indépendance de l’Algérie pour travailler, ils pensaient y vivre de manière temporaire. Ils n’ont finalement jamais quitté leurs foyers. Depuis des décennies, ces migrants vivent dans des résidences d’insertion autrefois connues sous le nom de foyers Sonacotra.
Aujourd’hui, selon un décompte officiel, on compte plus de 900 000 personnes considérées comme chibanis, dont 70 % d’origine Maghrébine et le reste se composent de ressortissants d’Afrique subsaharienne, majoritairement du Sénégal et Mali.
Des témoignages rares et poignants
Des témoignages rares et poignants recueillis par France info, dont celui de l’Algérien Ahcène Allouche, arrivé en France à 19 ans, juste après l’indépendance. Il vit à Belsunce dans un foyer, avec d’autres chibanis comme voisins de palier. Toute sa vie, il a fait des allers-retours pour rendre visite à sa famille, en Algérie. Son épouse, et neuf enfants qu’il n’a pas vu grandir.
Longue est la liste de ces chibanis qui ont sacrifié leur vie pour nourrir leurs familles. Ahcène Allouche, 79 ans, Ahmed Mekhlouf, 84 ans, Lakhdhar Mkherbeche, 85 ans, Menouar Kaced, 74 ans et tant d’autres. Leurs histoires racontent celle d’une génération d’hommes seuls, tiraillés entre deux rives.
Un reportage palpitant sera au programme sur France 3 Provence-Alpes Côte d’Azur, qui mettra en lumière la vie de ces seniors souvent oubliés, dans l’émission Enquête de région diffusée mercredi 28 septembre 2022 à 23h15.
Nous les avons rencontrés dans les rues de Marseille, à Belsunce, à Noailles, à la Belle de Mai, au Vieux Port, face à la mer… mais aussi dans le Var, à Sainte-Maxime, près de Saint-Tropez, à l'aube.
Lakhdhar Mkherbeche se baigne tous les matins avant 6 heures pour observer le soleil se lever sur la plage de Sainte-Maxime. Puis, c'est l'heure du marché où il se rend presque quotidiennement.
Pour les commerçants, il est une figure incontournable de la commune. Il s'arrête à chaque stand, propose des cafés. Et quand il ne passe pas pendant plusieurs jours, tout le monde s'inquiète. Il veille sur eux et eux veillent sur lui. C'est le papi de tous les habitants qui le connaissent. Une fami
Seuls, sur leurs chaises, devant les portes de leurs chambres du foyer, les chibanis de la Côte d'Azur se retrouvent chaque jour dans les cuisines communes.
Ces "papis portefeuilles" ont cotisé une maigre retraite en France mais continuent d'aider leur famille restée en Algérie. Ils ont vécu toute leur vie seuls.
Leurs histoires se perdent à mesure que ces hommes approchent la fin de leur vie. Tiraillés entre deux pays, entre deux cultures, ils ont accepté de se livrer.
Ils ont quitté l'Algérie alors qu'ils rentraient dans l'âge adulte. Depuis, ils vivent dans des résidences d'insertion autrefois connues sous le nom de foyers Sonacotra.
Vies sacrifiées
Une vie de pas grand chose. Une centaine d'euros de retraite et l'allocation de solidarité aux personnes âgées pour survivre. Pour ne pas perdre leurs droits, ils doivent rester plus de six mois et un jour en France, par an.
Ahcène Allouche est arrivé en France à 19 ans, juste après l'indépendance. Il vit à Belsunce, à Marseille, dans un foyer, avec d'autres chibanis comme voisins de pallier. Toute sa vie, il a fait des allers-retours pour rendre visite à sa famille, en Algérie. Son épouse, et neuf enfants qu'il n'a pas vu grandir.
Ahcène Allouche, 79 ans, Ahmed Mekhlouf, 84 ans, Lakhdhar Mkherbeche, 85 ans, Menouar Kaced, 74 ans, ces chibanis ont sacrifié leur vie pour nourrir leurs familles. Leurs histoires racontent l'Histoire. Celle d'une génération d'hommes seuls, tiraillés entre deux rives.
À voir sur France 3 Provence-Alpes Côte d'Azur, dans l'émission Enquête de région diffusée mercredi 28 septembre 2022 à 23h15.
La jeune écrivaine algérienne Kaouther Adimi s'est montrée très critique quant à la politique de l'immigration que mène le Président français Emmanuel Marcon. Selon elle, c'est une « politique islamophobe portée par un ministère de l'Intérieur d'extrême droite, raciste, qui, chaque jour, contribue à faire de la France un pays de plus en plus dangereux pour les musulmans ».
L'écrivaine, interviewée par Jeune Afrique[1], n'a pas hésité à faire un parallèle avec le passé colonial de la France. « Il est naïf de croire qu'il n'y a pas là un héritage colonial. Certains discours de Marlène Schiappa ne sont pas sans rappeler les discours des femmes de généraux à l'époque de la guerre. La façon de vouloir réglementer la vie des musulmans est directement inspirée de la colonisation », a déclaré l'auteur d'Au vent mauvais. Assurant ne pas croire à « une possibilité d'une relation apaisée entre l'Algérie et la France si le sujet n'est pas traité avec lucidité et courage », Kaouther Adimi accuse l'État algérien de ne pas se préoccuper de la manière dont les ressortissants algériens sont traités. « Ce n'est pas un enjeu pour lui », dit-elle.
À lire aussi :Abdelmadjid Tebboune réagit aux nouvelles déclarations de Pedro Sánchez sur le Sahara occidental
Guerre d'Algérie : une épine dans le pied de la France
À la question de savoir quelle est la place de la Guerre d'Algérie dans les relations franco-algériennes, Kaouther Adimi répond : « C'est une épine dans le pied de la France et dans beaucoup de familles françaises, souvent avides d'histoires et de réponses, une épine qui s'est infectée ». Là aussi, elle charge Marcon qu'elle accuse de ne pas aller au fond des choses. « Emmanuel Macron ne veut pas retirer les épines, il veut seulement calmer les douleurs de manière superficielle, alors qu'il faudrait regarder le pied, examiner la plaie et arracher l'épine », dit-elle. Et d'ajouter : « L'Algérie comme la France font mine de ne pas voir que la question de la Guerre d'Algérie concerne aussi la manière dont l'État français a construit sa relation avec les Algériens sur son sol et avec les Français d'origine algérienne ».
Jeune plume de la littérature algérienne francophone, Kaouther Adimi questionne dans ses livres l'histoire contemporaine de l'Algérie et fait se confronter différentes générations. Elle a à son actif cinq romans : L'Envers des autres, Des pierres dans ma poche, Nos richesses, Les petites de décembre et, enfin Au vent mauvais.
Abdelhamid Hakkar, victime des crimes commis par la France coloniale. D. R.
Une contribution d’Abdelhamid Hakkar – Pourquoi je n’attendrai pas la commission d’historiens sur les crimes de l’occupation et de la Guerre d’Algérie ? Enfant âgé d’à peine deux ans et demi, j’ai été, un matin de 1958, bombardé au napalm par un bombardier MD Dassault assassin, enflammant et détruisant ma demeure qui avait été prise froidement pour cible. Ses ruines et vestiges sont encore visibles ici : 35.40036197558687, 7.089849443554202. Des témoins sont encore vivants.
Enseveli sous les décombres de pierres enflammées, à flanc de montagne du Douar Bouderhem, situé dans l’agglomération de la ville de Khenchela, je devais être mort calciné n’étaient, à la vue du bombardier en piqué et au sifflement de sa bombe, le reflexe salvateur de ma défunte grand-mère de me protéger en me blottissant sous son ventre avant qu’elle ne succombe elle-même des suites de ses blessures. Je serai, rescapé et brûlé, secouru par ma mère et des proches accourus du ruisseau plus bas où ils allaient au matin chercher de l’eau.
Ce crime d’Etat impuni, je le porte toujours en moi. Plus que dans ma chair, il continue de me brûler l’âme – un crime de surcroît commis contre des populations civiles.
Plus tard, adulte, la France des «droits de l’Homme» m’afflige de nouveau et me condamne à une peine de réclusion criminelle à perpétuité par contumace, sans avocat, sans mandat de dépôt et sur le fondement d’un dossier falsifié. Elle m’enfermera 28 années durant dans ses basses-fosses indignes, dont douze années à l’isolement total qualifiées de torture. Comble de l’inversion accusatoire ! Ce serait de nos jours non en France mais en Algérie qu’on torture !
De fait, l’Etat français n’a pas attendu une «commission d’historiens» pour me juger et me condamner, en décembre 1989, de manière aussi inique qu’expéditive.
Mieux ! Condamné à son tour en 1995 par la Cour européenne des droits de l’Homme, à l’unanimité des juges, pour m’avoir illégalement emprisonné, l’Etat français refusera de s’exécuter et de me remettre en liberté. De nouveau qualifié à l’unanimité par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe de parodie de procès, il persistera dans son mépris.
Pis, tandis que le président du Tribunal de grande instance (TGI) de Paris s’apprêtait, en mai 2000, à prononcer ma mise en liberté immédiate assortie d’une indemnisation de trois millions d’euros pour mes seize années de détention abusive et le refus d’exécuter la décision européenne, l’Etat français, via son ministre de la Justice a – fait inédit ! – dépêché le préfet de police de Paris venu en personne au tribunal dessaisir le juge du dossier, au prétexte de soumettre la question au Tribunal des conflits pour qu’il tranche un prétendu «conflit d’attribution», quand aussi bien en matière de liberté individuelle il est constant que la compétence d’attribution relève constitutionnellement exclusivement du seul juge judiciaire.
Résultat cousu de fil blanc : le Tribunal des conflits n’a jamais statué, la procédure dont s’était emparé le préfet s’étant commodément «égarée» entretemps entre le bureau du procureur général de Paris et la chancellerie.
Ressaisi quelques mois plus tard pour qu’il purge sa saisine et prononce ma libération, le président du TGI de Paris a été soudainement muté et promu à la tête du TGI de Nice.
Jusqu’à aujourd’hui, cette affaire n’a pas été purgée ; je resterai encore enfermé douze années.
Saisi en mars 2021 de demandes de réparations pour mon bombardement au napalm, tant le président de la République française, Emmanuel Macron, que sa ministre des Armées, Florence Parly, n’ont pas daigné me consentir la moindre réponse.
Pourtant, le président Macron a dernièrement affirmé lors de son séjour en Algérie, je le cite : «J’entends souvent que, sur la question mémorielle et la question franco-algérienne, nous sommes sommés en permanence de choisir entre la fierté [!] et la repentance. Moi, je veux la vérité, la reconnaissance, sinon on n’avancera jamais». Alors, oui, on n’avancera jamais si on ne m’accorde pas «vérité» et «reconnaissance».
Même si je n’en attends pas grand-chose, j’entends introduire une action judiciaire pour ces faits pour ne serait-ce qu’elle puisse me donner la possibilité de les soumettre ensuite à des organes et institutions supranationaux.
Qui a parlé de «détermination à promouvoir l’amitié entre la France et l’Algérie et approfondir la coopération bilatérale dans les domaines d’intérêt commun» ? Qui a parlé de «partenariat renouvelé, concret et ambitieux» ? Qui a parlé d’«intensifier la coopération à tous les niveaux» ? Et qui nous parle encore de «partenariat renouvelé entre la France et l’Algérie» ? L’Etat français, «fier» de bombarder des populations civiles sans défense, qui plus est avec des armes de destruction massives interdites par le doit international.
Selon Matignon, «les membres des gouvernements français et algérien se réuniront pour réaffirmer leur détermination à promouvoir l’amitié entre la France et l’Algérie et approfondir la coopération bilatérale dans les domaines d’intérêt commun». Cet «intérêt commun» ne se limiterait-il qu’au seul gaz dans le déni assourdissant de devoir rendre justice ?
Le président Emmanuel Macron et son homologue algérien, le président Abdelmadjid Tebboune, ont acté, ce 27 août 2022, dans une déclaration commune, «la relance des liens bilatéraux». Vœu pieux si celle-ci ne s’accompagne pas dès aujourd’hui de gestes concrets.
Bon gré mal gré, je mènerai campagne seul s’il le faut. Je crierai sur le toit du monde dussé-je jusqu’à mon ultime souffle pour que la France me rende justice. Et je jure qu’on m’entendra !
Dixit Fiodor Dostoïevski : «L’histoire ne révèle sa propre essence qu’à ceux qu’elle a au préalable exclus d’elle-même».
A.H.
(Besançon, France)
septembre 26, 2022 -https://www.algeriepatriotique.com/2022/09/26/lettre-ouverte-a-letat-francais-votre-crime-impuni-je-le-porte-en-moi/
Le président algérien a décidé d’accélérer la cadence de l’enseignement de l’anglais dès la rentrée scolaire au primaire, suscitant des craintes chez les enseignants et spécialistes de l’éducation.
Le ministre de l’Éducation nationale a affirmé que son département était « prêt » pour l’introduction de l’anglais dans l’école algérienne dès septembre (AFP)
« Chez nous, la langue française est un butin de guerre mais l’anglais est une langue internationale » qui va être enseignée dès la rentrée scolaire « pour que l’Algérie accède à l’universalité ».
VIDÉO : L’Algérie va enseigner l’anglais en primaire
C’est par cette courte phrase que le président algérienAbdelmadjid Tebboune a annoncé le1er août lors d’une intervention télévisée, l’introduction de l’anglais dès l’enseignement primaire – il est actuellement enseigné à partir du collège – pour les écoliers algériens qui apprennent jusque-là le français comme première langue étrangère.
Il a aussi précisé que cette décision allait être appliquée « après une étude approfondie menée par des experts et des spécialistes ». Le ministère de l’Éducation nationale n’a pas perdu de temps : dès le lendemain, le ministre, Abdelhakim Belabed, a réuni par visioconférence les directeurs départementaux de son secteur pour leur annoncer l’application de cette « instruction » dès la rentrée scolaire, fixée au 21 septembre.
Dans la foulée, des appels ont été lancés en direction des diplômés en langue et littérature anglaises « désirant être recrutés » pour qu’ils déposent leurs dossiers de candidature à des postes « d’enseignants contractuels », dans l’immédiat. Plus de 60 000 prétendants ont déposé leurs dossiers selon les médias.
Mi-août, le ministre de l’Éducation a confirmé que l’anglais serait désormais enseigné à partir de la troisième année primaire, à raison de trois heures hebdomadaires avec le français.
« Une arrière-pensée politique et idéologique »
Pour les syndicalistes du secteur, interrogés par MEE, cette décision s’est faite « dans la précipitation ». Et alors que les experts se disent « intrigués » par la faisabilité d’un tel projet, sur les réseaux sociaux et dans les médias, les débats sont vifs.
L’option prise par le gouvernement « n’est pas suffisamment étudiée » et « est précipitée », objecte lui aussi Boualem Amoura, secrétaire général du Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (SATEF), contacté par MEE.
« Une telle décision doit être soumise à une réforme profonde du secteur éducatif dans le primaire et à une refonte du système de l’éducation des langues »
- Messaoud Boudiba, porte-parole du syndicat CNAPESTE
Tout en relevant l’absence de manuels scolaires et de programmes, ce professeur de l’enseignement secondaire estime que même sur le plan logistique, « l’école n’est pas prête ». Selon lui, pour couvrir les besoins des 20 400 écoles primaires que compte le pays, il faudrait recruter près de « 30 000 enseignants ».
« Or il n’existe probablement pas autant d’enseignants dans le pays », précise-t-il. « Une telle décision doit être soumise à des études, conditionnée à des préparatifs et surtout à une réforme profonde du secteur éducatif dans le primaire et à une refonte du système de l’éducation des langues de sorte à ce que cela ne constitue pas une charge supplémentaire pour l’enfant », explique à MEE Messaoud Boudiba, porte-parole du Conseil national autonome du personnel enseignant du secteur ternaire de l’éducation (CNAPESTE, l’un des plus importants du pays).
Les deux enseignants ne s’opposent pourtant pas à l’introduction de l’anglais. Mais pour Boualem Amoura, cette décision cache « une arrière-pensée politique et idéologique » puisqu’elle constitue une revendication du courant islamiste et conservateur qui s’oppose au maintien du français dans l’école algérienne et plaide pour la généralisation de la langue de Shakespeare.
Ces craintes ne sont pas uniquement exprimées par des syndicalistes. Ahmed Tessa est un pédagogue au long cours. Cet enseignant et formateur a fini sa carrière comme conseiller de l’ancienne ministre de l’Éducation Nouria Benghabrit (2012-2017), et compte d’innombrables publications à son actif.
Il considère que « pour qu’une innovation pédagogique de cette envergure réussisse », elle doit « répondre à des normes tant méthodologiques que technico-pédagogiques ». Et pour cela, insiste-t-il auprès de MEE, « il faudrait une bonne année scolaire pour réfléchir et élaborer une stratégie ».
Une formation intensive pour les enseignants
Il pose également la condition, pour les responsables, de « se mettre d’accord sur les objectifs à viser » et « fixer les conditions de cohabitation avec les trois autres langues enseignées au primaire pour éviter l’embouteillage graphique, grammatical et phonétique ».
La France coloniale a-t-elle mené une politique hostile à la langue arabe en Algérie ?
En plus de l’arabe, langue de l’enseignement, les enfants algériens apprennent le français et, dans certaines régions, le berbère.
Anticipant ces critiques, le ministre de l’Éducation nationale a affirmé que son département était « prêt » pour l’introduction de l’anglais dans l’école algérienne dès septembre.
« Toutes les composantes du système éducatif seront mobilisées autour de cette démarche stratégique pour en assurer l’aboutissement », a assuré Abdelhakim Belabed, indiquant que « l’enseignement de cette matière sera confié à des spécialistes qui bénéficieront d’une formation intensifiée ».
L’annonce de l’introduction de l’anglais dans le système éducatif algérien a suscité des réactions contradictoires sur les réseaux sociaux. Certains estiment que faire de l’enseignement de l’anglais une priorité est une « bonne chose », d’autres considèrent que cela s’est fait de manière « hâtive » et « non réfléchie ».
Beaucoup de ceux qui se sont réjouis de cette annonce font le lien avec une éventuelle disparition du français des manuels scolaires algériens à long terme.
Ils y ont été encouragés par le remplacement des écriteaux en français des frontons des institutions publiques par d’autres en anglais, en réaction, en octobre 2021, à des déclarations du président français Emmanuel Macron qui avaient suscité la colère en Algérie. Ce dernier s’était interrogé sur la réalité de l’existence de la nation algérienne avant la colonisation française.
VIDÉOParticipant à une marche pacifiste de militants du Hirak algérien en France, une manifestante a été rudement violentée par les forces de l’ordre, à Paris hier, dimanche 25 septembre 2022, place de la République.
Les autorités françaises seraient-elles en train de faire le sale boulot du régime algérien? Au vu de la réaction musclée des forces de l’ordre, hier dimanche 25 septembre 2022, place de la République, à Paris, cette crainte semble justifiée.
Participant à une marche pacifiste de militants du Hirak algérien en France, une manifestante a été rudement violentée par les CRS, un corps spécialisé de la Police nationale du pays. C’était au cours d'un rassemblement de la diaspora algérienne établie en France, en signe de protestation contre le régime en place à Alger, et en solidarité avec les détenus politiques en Algérie.
A l’occasion des 60 ans de l’indépendance de l’Algérie, et dans le cadre de la saison « Regards sur l’Algérie », l’Institut du monde arabe propose ce jeudi 28 septembre et ensuite tout le log du mois d’octobre, un cycle de tables rondes dédié au plus grand pays africain. Confié à Victor Salama, auteur, traducteur et chercheur, ce cycle de cinq rendez-vous propose de redécouvrir l’histoire algérienne avant l’invasion de la France en 1830 mais aussi de se familiariser avec une société postcoloniale dans toute sa diversité et son dynamisme. Artistes, journalistes et universitaires éclaireront, à travers leur savoir et leur engagement, les grands enjeux contemporains, la diversité culturelle comme politique et les dynamiques parfois méconnues de la société algérienne.
Ce programme est conçu par Victor Salama, auteur, traducteur et chercheur.
Résistants officiellement reconnus ou simplement présumés, des dizaines de ceux que l’on appelaient alors les Nord-Africains ont été passés par les armes par les Nazis. Parfois après avoir été livrés par la police française. Voici le troisième volet de notre série sur « ces héros maghrébins de la guerre de 1939-1945 ».
Le 70 eme anniversaire au Mont Valérien du maquis de l’Oisa
Environ 4 500 personnes sont tombées, les mains attachées dans le dos, devant le poteau d’exécution, en France métropolitaine pendant l’Occupation. Parmi deux, à partir de la fin 1941, figuraient des dizaines de travailleurs immigrés originaires du Maghreb.
Selon les archives officielles, les premiers à tomber sous les balles nazies n’étaient pas forcément membres de l’Armée secrète. Ainsi Mohamed Moali, né à Constantine et vivant dans le XIXème arrondissement de Paris, est arrêté, porteur d’un revolver, par les hommes de la préfecture de police de Paris. Etait-il résistant ou simple malfrat, l’histoire n’a pas permis de l’établir. Et les autorités allemandes n’ont que faire de ce détail : il est condamné à mort et passé par les armes le 27 septembre 1941.
Rien ne prouve que Mohamed Bounaceur soit impliqué dans quelque acte de résistance que ce soit, mais il est pourtant jugé comme tel
Deux mois plus tard, c’est au tour de Mohamed Bounaceur de tomber sous les balles allemandes. Ce terrassier de 41 ans également, natif de Mekla, près de Tizi-Ouzou, se fait arrêter, lui aussi par la police française, en décembre 1941 en essayant de négocier de faux tickets de pain. La police française perquisitionne chez lui et tombe sur une arme de poing. L’Algérien est immédiatement livré aux Allemands. Rien ne prouve que Bounaceur soit impliqué dans quelque acte de résistance que ce soit mais il est pourtant jugé comme tel par les Allemands et tombe au Mont Valérien, le lieu habituel des exécutions de Résistants. Au lendemain de la guerre, la municipalité d’Ivry-sur-Seine donnera d’ailleurs son nom à un sentier sur les berges du fleuve.
Est-ce quil s’agit de délinquants ou de sympathisants anti-nazis? Il est difficile de trancher sur le véritable statut des Nord-Africains fusillés à une époque où la Résistance française n’est pas encore réellement organisée. Un temps également où les Algériens coincés en région parisienne, la plupart ouvriers, baignent dans un univers prolétaire, proche du Parti Communiste, entré en clandestinité. Dans le doute, les nazis ne sont pas très enclins à séparer le bon grain de l’ivraie.
C’est ce qui sera fatal, un mois plus tard, en janvier 1942 à Essaïd Ben Mohand Haddad. Lui aussi ouvrier, né dans la région de Tamassit en Kabylie et domicilié dans le XIXème arrondissement de Paris. Il est arrêté porteur d’un revolver, toujours par la police française. Chez lui, on retrouve de la littérature crypto-communiste sous forme de tracts syndicaux. Il sera pourtant condamné par un tribunal allemand pour la seule infraction de « détention d’armes » et passé par les armes. Dans les semaines qui suivent, Amar Zerboudi et Mohammed Aït Abderrahmane, deux autres ouvriers algériens de 39 et 38 ans, subiront le même sort, pour les mêmes raisons.
Mohamed Ben Slimane, figure de la Résistance
A partir du printemps 1942 par contre, des agents assermentés de la résistance commencent à trouver la mort devant le poteau d’exécution. La figure la plus emblématique de cette résistance maghrébine, tombé au champ d’honneur est sans doute Mohamed Ben Slimane.
Mohamed Ben Slimane
Lui était né dans le Grand Sud algérien, dans le département de Laghouat, 43 ans plus tôt. Après quatre ans de service militaire dans le 27ème régiment du train, il s’était installé en France métropolitaine et s’était fait embaucher comme infirmier à l’hôpital du Kremlin-Bicêtre en 1931. Deux ans plus tard, il se mariait avec la bretonne Marie-Louise Corbel. Cinq enfants avaient suivis.
Mohamed Ben Slimane était un père comblé, encarté au Parti Communiste, ultra-dominant dans cette ceinture rouge de Paris. L’infirmier algérien militait ouvertement dans la section communiste de Villejuif, jusqu’en septembre 1939 date à laquelle le Parti Communiste fut interdit. Mais il continua à oeuvrer secrètement dans l’appareil clandestin. Début 1942, il adhère même à l’Organisation spéciale, la branche militaire du PCF. Mais suite à un attentat raté, un militant imprudent de son groupe se fait arrêter. Dans ses papiers figurent une liste de noms.
Ben Slimane est arrêté le 23 juin 1942 par la Brigade spéciale des RG de la Préfecture de Police, de redoutables collabos, chasseurs de juifs et de résistants. Dans ses affaires, la police française retrouve un pistolet, un coup de poing américain et une matraque. Cela suffit pour le faire transférer illico à la Gestapo. Les Nazis le soupçonnent d’avoir participé à un attentat à la bombe dans un café proche du palais de justice où deux collabos avaient été tués. Mais même sous la torture, Ben Slimane ne desserre pas les mâchoires. Les Allemands s’interrogent mais en plein mois d’août un nouvel attentat sanglant à lieu contre des soldats de la Luftwaffe près du stade Jean-Bouin à Paris. Huit soldats allemands perdent la vie. Les Nazis décident, en représailles, la condamnation à mort de 88 détenus. Ben Slimane en fait partie. Il tombe sous les balles allemandes au Mont Valérien, le 11 août. La mention « mort pour la France », lui sera décernée à la Libération.
Des Marseillaises fusent, des « Vive la France, l’Angleterre et la Russie » sont scandés.
Quelques semaines plus tard, c’est au tour d’Omar Ammar d’être passé par les armes. Né en 1895 à Mirabaud, près de Tizi-Ouzou en Algérie, Omar Ammar travaille alors comme un manœuvre sur le terrain d’aviation de Saint-André (Eure). Il est marié, père de cinq enfants, ne fait parti d’aucun mouvement de Résistance mais, baignant dans une ambiance ouvrière proche du parti communiste, cultive des sentiments anti-allemands prononcés. Aussi, le 5 octobre 1941, quand des miliciens arrivent sur le chantier pour tenter de recruter des candidats pour le compte de la Légion des volontaires français contre le Bolchevisme (LVF), une organisation ultra-collaborationniste qui entend combattre aux côtés de l’armée nazie sur le front de l’Est, Omar Ammar voit rouge. Des coups sont échangés entre l’ouvrier immigré, ses collègues de travail et deux hommes de la LVF. Des Marseillaises fusent, des « Vive la France, l’Angleterre et la Russie » sont scandés. Le patriote Omar Ammar est arrêté, condamné à mort par le tribunal militaire d’Evreux et fusillé, en fin d’après-midi, le 5 juin 1942.
Mais c’est durant l’année 1944, celle où la confrontation armée entre les Nazis et la Résistance atteint son apogée que le rythme des exécutions s’accélère. Elles concernent d’abord les Nord-Africains évadés des camps de prisonniers allemands comme Ahmed Yahia par exemple. Né dans la région de Constantine, engagé dans l’armée française et fait prisonnier dès le début de la guerre, Ahmed Yahia se trouve affecté dans une colonne de travail agricole à Moulins-en-Tonnerrois dans l’Yonne.
A l’été 1943, le camp est attaqué par les hommes du maquis Horteur, un groupe de résistants FTP (d’obédience communiste). Yahia parvient à prendre la fuite en compagnie de quatre de ces co-détenus indigènes, le marocain Ali Ben Hamed et trois algériens, Djelloul Ouaheb, Saïd Barich et Arsène Zamouchi.
Fait rare, le secrétaire d’Etat du régime de Vichy,Fernand de Brinon, pourtant connu pour ses sentiments ultra-collaborationniste, intervient en faveur des cinnq travailleurs immigrés condamnés à mort
Ensemble, ces hommes acceptent de s’engager dans le maquis très actif dans l’Yonne. Mais dès septembre, le groupe de résistants est démantelé par les Nazis. Arrêtés et incarcérés à Auxerre, les cinq hommes sont condamnés à mort par un tribunal militaire allemand. Fait suffisamment rare pour être signalé, les autorités de Vichy vont néanmoins tenter d’intervenir pour faire commuer leurs peines. Le secrétaire d’Etat Fernand de Brinon, pourtant connu pour ses sentiments ultra-collaborationniste, intervient : « Ces prisonniers Nord-Africains semblent avoir obéi aux suggestions d’un meneur et facilement influençables, en raison de leurs origines, désorientés par ailleurs, ils ont eu surtout en vue le désir d’une évasion et non pas celui d’une activité anti-allemande, écrit-il aux autorités nazies. Ils n’ont en effet pris aucune part active à l’exécution des attentats perpétrés par les dissidents et n’ont été trouvés porteur d’aucune arme, quoiqu’en ayant à leur disposition ». Et le responsable de Vichy de plaider l’indulgence…en pure perte. Les cinq hommes seront fusillés à Dijon, le 22 avril 1944.
Dans cette période, les autorités d’occupation semblent particulièrement s’acharner sur les Nord-Africains, notamment en les exécutant comme « otage ». Hammouche Slimi, originaire de la commune mixte de Maillot (aujourd’hui M’Chedallah) près de Bouira en Algérie, et marié avec Alexandrine Bas, la veuve d’un soldat mort pour la France en 14-18, se fait rafler à Chatillon-la-Palud dans l’Ain où il réside, trois jours après le débarquement en Normandie. Les Allemands sont furieux, et l’Algérien fait office de victime expiatoire, en compagnie de deux autres hommes du village. Tous les trois sont fusillés, sans procès, ni raison.
Les fusillés du Mont Vélérien
Morts pour la France
Youssef Ben Larbi, 24 ans, originaire de Ouled Saïd dans la région de Timimoun en Algérie et ancien soldat de l’Armée française lui aussi trouve la mort sous les balles de ses exécuteurs allemands à Moulin (Allier) en septembre 1944. Il avait été raflé par hasard dans les rues et assassiné en tant que simple otage. La Gestapo ne savait pas que Ben Larbi était en réalité un authentique résistant enrôlé dans la 3éme Compagnie du 1er Bataillon FFI de l’Allier plus connue sous le nom de Compagnie Forgette…
Après le Débarquement, de toutes, façons, l’armée d’Hitler ne fait plus beaucoup de prisonniers. Les Résistants qui tombent entre leurs griffes ont peu de chance d’échapper à la peine capitale ou pire, comme Saïd Yahi, à l’exécution sommaire. Ce manœuvre, originaire de Dal El Mizan avait rejoint l’Armée Secrète dans le maquis de l’Oisan en Isère en compagnie d’un camarade algérien Azouz Mehedine Ben Mohamed, quand ils sont tous les deux arrêtés, et après un bref interrogatoire par la Gestapo locale, exécutés d’une balle dans la nuque.
Parmi les 12 à 15000 morts sous les balles allemandes en France pendant l’Occupation, les immigrés originaires du Maghreb, pas tous des combattants, ont eux aussi payé un lourd tribut à la répression aveugle des nazis à la fin de la guerre.
Le barrage de Génissat dans l’Ain, un haut lieu de la Résistance
Le 8 mars 1944, Tahar Ben Belkacem et Mohamed Ben Ahmed deux ouvriers algériens, accompagnés de Djellil Taïeb, un tunisien natif de Sousse, tous trois affectés au barrage de Génissat dans l’Ain, se rendent consciencieusement à leur travail. La région est alors en pleine ébullition. Un groupe de résistants emmenés par un de leur ancien collègue de travail au barrage, le FFI François Bovagne, est engagé dans un combat avec les forces allemandes, assistées de gendarmes français.
Bovagne alias « Michel », ancien délégué CGT, est une figure de la Résistance dans la région. Il a recruté un groupe de partisans dans les rangs de son syndicat; mais les trois ouvriers n’en font pas partie. Ils se préparent simplement à embaucher. Un destin funeste les attend pourtant. Les trois hommes sont arrêtés sur le bord de la route et torturés à mort. Ils rendent l’âme sans avoir jamais parlé. Et pour cause : ils n’avaient rien à voir ni de près, ni de loin, avec la Résistance.
Larbi Ben Lahyien, un marocain de 56 ans, lui non plus ne faisait pas partie de l’Armée secrète. Il était juste curieux. Le 29 juin 1944 à Saint-Manvieu, dans le Calvados, les SS le surprennent examinant les papiers d’un soldat britannique tué après le débarquement. Soupçonné de faire partie d’un réseau de soutien logistique aux partisans, Ben Lahyen est battu et torturé pendant plusieurs jours avant d’être achevé d’une balle dans la tête.
Massacres de masse
Ces civils nord-africains font parties d’une longue cohorte de victimes d’exécutions sommaires et massacres de masse qui vont endeuiller la France vers la fin de la guerre. Une politique de la terreur mise au point au début de l’année 1944 par les autorités allemandes pour faire face à la stratégie de harcèlement qu’avaient adopté les hommes de la Résistance plus nombreux et mieux armés.
Le Haut Commandant des Forces Allemandes à L’Ouest, Hogo Sperrie
Le plus haut responsable militaire allemand en France, Hugo Sperrie, avait en effet promulgué un ordre général en février 1944. Cette instruction dite « Sperrle-Erlass » prescrivait à la troupe de répondre immédiatement par le feu quand elle serait attaquée par la résistance française. Cette note prescrivait: « Dans la situation actuelle, il n’y a pas de raison de sanctionner le chef d’une unité quiimposerait des mesures trop sévères. Au contraire, il faudra punir un chef trop souple, car il met la sécurité de ses hommes en danger. » Difficile de ne pas y voir un permis de tuer sans condition n’importe qui, même les civils. Une carte blanche qui explique en partie les grands massacres de la fin de la guerre en France comme Oradour-sur-Glane (643 morts) ou Asq (86 morts) par exemple.
La communauté nord-africaine immigrée en France, en paiera elle aussi un lourd tribut, rarement mis en évidence par les historiens depuis. Les exemples d’exécutions sommaires purement gratuites ou par représailles ne manquent pourtant pas. Comme celui par exemple de Mohamed Ben Ahmed, né à Fès au Maroc et installé à Cheylas (Isère) depuis 1920. A 44 ans, il travaille comme manœuvre à l’usine des Hauts Fourneaux et Forges d’Allevard (Isère). Cet ancien soldat de 1ère classe du 5ème régiment de tirailleurs marocains fait prisonnier en 1940 et libéré trois ans plus tard, avait, depuis, repris le cours de sa vie de labeur, tranquillement, sans faire d’histoires. Célibataire, il occupe un petit logement aménagé dans la cité de son usine, en compagnie notamment d’Abdelkader Ben Haouri Ben Ali, un manœuvre âgé de 35 ans, lui aussi marocain.
Le 11 août 1944, le hameau du Villard est le lieu d’une attaque d’une colonne allemande par un groupe de maquisards.
« Morts pour la France »
Le 11 août 1944, un groupe de la résistance s’accroche avec une colonne allemande de six à sept cents hommes dans le hameau du Villard. Mais les résistants se sont montrés trop présomptueux. Ils doivent se replier.
Les Allemands investissent l’usine et fouillent les bâtiments. Ils tombent sur Ben Ahmed et Ben Haouri Ben Ali. Le premier est conduit au bord d’une route, jeté dans le fossé et exécuté d’une rafale de mitraillette dans le dos. Son compagnon abattu de trois balles dans la tête, sans autre forme de procès.
Le maire de Cheylas, dans un rapport daté de juillet 1945 écrira : « leur attitude a tous les deux a été magnifique de simplicité, de grandeur et de résignation ». Les deux hommes ont obtenu, depuis la mention, « morts pour la France ». Comme également, les Algériens Tahar Bendemagh, son cousin Saad et trois autres ouvriers cuvistes de l’usine Péchiney de Saint-Michel de Maurienne en Savoie. Eux ont été fusillés sans raison le 23 août 1944. Ils avaient eu la malchance de se trouver dans les parages d’une embuscade organisée par la Résistance contre une autre colonne allemande battant en retraite après la campagne d’Italie.
Quelques jours plus tôt, le 16 août, Nourredine Rhachide, un cafetier algérien de Lyon, avait déjà succombé. Il avait été raflé par hasard, avec deux autres hommes, par la Gestapo et un groupe de collabos, après l’attaque d’une caserne de la Milice par la Résistance.
En cet été 44, la défaite allemande qui se profilait après le débarquement avait fait sauter les derniers verrous moraux de l’armée nazie. En Côte d’Armor par exemple sur 700 victimes recensées dans le département après le 6 juin 1944, la moitié étaient de simples quidams abattus par colère et frustration, sans le moindre motif, comme Abdelkader Bensaïd par exemple. Natif de Constantine, il buvait un café au Brezellec sur le port de Paimpol, le 5 août 1944 quand des Allemands font irruption dans l’établissement, font sortir tous les consommateurs et tirent dans le tas. Bilan : trois morts dont Bensaïd, 38 ans
Le monument à mort du village de Saint Yan
Quelques jours plus tard, c’est au tour d’Ali Lakrout de tomber. Né au douar Ennalou à Fort-National, marchand forain, sans domicile fixe, Lakrou est arrêté en représailles après le largage de parachutistes britanniques dans la région, qui avait rendu folles les autorités allemandes. Cet immigré est d’abord détenu dans une école catholique de Callacavec trente autres malheureux, dont ses associés Amokrane Lassaoui et Hocine Ouareski ainsi que quatre autres compatriotes. Le lendemain tout le monde est conduit dans une forêt de Plestan et sauvagement assassiné. Les meurtriers sont parfaitement identifiés. Ils sont dirigés par le chef de la Gestapo et de Rennes, assistés d’autonomistes bretons. A la Libération pourtant, les coupables réussiront à passer entre les mailles du filet de la justice.
La communauté des forains qui comptaient à l’époque nombre d’Algériens déplorera deux mois plus tard une autre victime des représailles aveugles allemandes, en la personne de Mohamed Yanes. De passage à Saint-Yan, en Saône-et-Loire, le 31 août, Yanes se retrouve pris en otage avec tous les habitants de ce petit bourg occupés par les Allemands mais assiégés par les FFI.
Les nazis, plus lourdement armés, parviennent à faire fuir les résistants. Mais ils tiennent à faire un exemple. Cinq hommes, dont Yanes, choisis au hasard sont torturés et abattus. Pour essayer de masquer leurs forfaits, les nazis brûleront vêtements et papiers d’identités des otages. Mais à leur départ, les habitants exhumeront les corps, avant de leur donner une sépulture décente.
Leurs noms figurent toujours sur le monument aux morts du village.
(2) Le Moment est venu de dire ce que j'ai vu Philippe de Villiers. « J’ai été un homme politique. Je ne le suis plus. Ma parole est libre. Je suis entré en politique par effraction. Et j’en suis sorti avec le dégoût.
Le désastre ne peut plus être maquillé. Partout monte, chez les Français, le sentiment de dépossession. Nous sommes entrés dans le temps où l’imposture n’a plus ni ressource ni réserve. La classe politique va connaître le chaos. Il n’y a plus ni précaution à prendre ni personne à ménager. Il faut que les Français sachent. En conscience, j’ai jugé que le moment était venu de dire ce que j’ai vu. »
Philippe de Villiers
(3) Georges Hollande, un père politiquement encombrant
Le père de François Hollande, Georges Hollande, a été médecin ORL avant de prendre sa retraite. L'homme s'est laissé séduire par la politique locale, tentant de se faire élire aux municipales de Rouen en 1959, sur une liste d'extrême droite. Proche de l'OAS dans les années 1961-1962, de conviction nationaliste, Georges Hollande ne souhaitait pas que son fils entre en politique, encore moins au sein du Parti socialiste.
(4) Douars et prisons
Jacqueline Guerroudj
Livre-témoignage qui rend compte du parcours de l'engagement d'une femme européenne pour l'indépendance de l'Algérie, de la prise de conscience à l'action concrète. "Je n'ai pas essayé de faire une analyse de la situation, je raconte seulement ce dont j'ai été témoin", dit-elle ; c'est ainsi que Jacqueline Guerroudj explique son livre. Mais ce qu'elle raconte, ce qu'elle et ses camarades ont vu et fait, est raconté avec une telle vérité que ce qui est dit donne toute leur profondeur et leur signification aux événements. Le récit est divisé en deux parties. Dans la première, l'auteure relate la prise de conscience de la colonisation algérienne d'une jeune institutrice française, qui la conduit à l'engagement politique pour l'indépendance de l'Algérie jusqu'à la lutte armée. La seconde partie est consacrée à son parcours dans les prisons françaises et algériennes. Interrogatoires, condamnation à mort, exécutions, brimades, débats politiques entre détenues, solidarité aussi, sont narrées avec la même lucidité. Ce livre est une immense leçon de courage, de tolérance et d'humanisme. Résistante durant la seconde guerre mondiale, Jacqueline Guerroudj part en 1948 enseigner en Algérie. Frappée par les ravages de la colonisation, elle s'engage auprès des combattants algériens pour l'indépendance de l'Algérie. Ses activités militantes au sein du PCA, puis du FLN, conduisent à son arrestation et à sa condamnation à mort. Graciée le 8 mars 1962, elle restera dans l'Algérie devenue indépendante jusqu'à sa mort en 2015, et sera élue député à l'Assemblée nationale algérienne.
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