La guerre que se livrent les anglophones et les francophones depuis des décennies au Québec se répercute sur les ressortissants algériens, particulièrement les étudiants qui ambitionnent de poursuivre leurs études au pays de l'érable. C'est ce qui explique que les autorités canadiennes refusent des visas aux étudiants francophones acceptés par les universités québécoises.
Selon une étude effectuée par l'Institut du Québec, reprise par RFI, environ 50 % des étudiants francophones qui ont été acceptés par des universités québécoises se voient refuser le visa de séjour à l'entrée du territoire par le Canada. « Une proportion qui grimpe à 72 % pour les étudiants africains qui ne peuvent accéder à leur établissement d'enseignement », ajoute-t-on de même source.
Étudiants algériens indésirables au Canada : L'indépendance du Québec en toile de fond
La ministre québécoise de l'Immigration Christine Fréchette et de nombreux élus de la province dénoncent ce qu'ils qualifient de « situation absurde » qui touche des étudiants originaires d'Algérie, mais aussi du Sénégal, de la Guinée et du Congo-Brazzaville. Une situation réellement absurde, puisque ces étudiants étrangers se retrouvent victimes d'une « guerre » qui n'est pas la leur. Une guerre entre le Québec qui veut « franciser » la province avec en toile de fond une future indépendance et le Canada qui rejette les visas aux francophones en guise de lutte contre une future indépendance du Québec.
Il faut dire cependant que dans ce cas de figure, c'est le Canada qui décide qui entre sur son territoire et fait donc en sorte que les francophones soient de moins en moins nombreux à venir. Et bien sûr, les Africains sont plus faciles à rejeter avec ce sempiternel argument de la peur que les étudiants du continent africain ne rentrent pas dans leurs pays respectifs après leurs études. Drôle d'argument pour un pays qui encourage l'immigration et qui dit avoir besoin de 460'000 nouveaux arrivants, rien que pour cette année1.
Les indépendantistes québécois encouragent la venue des Algériens
L'Institut du Québec estime que seulement 1 étudiant africain sur 4 obtient le droit de s'établir au Québec, en raison justement de la politique canadienne dans cette province, qui encourage la venue des anglophones au détriment des francophones. Et cette question de visas est utilisée par les autorités canadiennes comme une arme contre la francisation galopante du Québec qui risque de mener cette province vers l'indépendance.
Et c'est tout naturellement que les partisans de l'indépendance du Québec ne soient pas contents face à cette situation, à l'image du député Alexis Brunelle-Duceppe, conscient de l'importance des étudiants africains francophones. « L’avenir de la francophonie, il est en Afrique. Et l’avenir du Québec est en français. Donc, on a besoin de ces gens-là pour qu’on devienne une communauté francophone solidaire, puis on a besoin de ces étudiants-là pour qu’ils viennent ici au Québec, soit faire leur vie, soit par la suite devenir des ambassadeurs du Québec dans leur pays respectif », a-t-il affirmé, non sans exprimer l'espoir qu'Ottawa change sa politique à l'égard des étudiants africains, notamment les Algériens.
LITTÉRATURE – Le paysage littéraire national s’est enrichi cette semaine par deux nouvelles parutions qui risquent de ravir les férus de littérature algérienne. Il s’agit de la réédition de deux ouvrages du célèbre romancier de Tizi-Hibel, Mouloud Feraoun (1913-1962). Le premier est une version non censurée du Fils du Pauvre. Le second est le texte intégral d’un roman inédit intitulé La Cité Des Roses (l’Anniversaire).
C’est Ali Feraoun, le fils de l’écrivain et président de la Fondation Mouloud Feraoun, qui a fait l’annonce sur son compte Facebook le vendredi 19 mai 2023. « La Fondation Mouloud Feraoun a le plaisir d’annoncer la disponibilité nouvelle d’édition de deux ouvrages revus, complétés des textes apurés des manuscrits d’origine et commentés par expertise académique », peut-on lire dans le communiqué.
Une nouvelle version du Fils du pauvre qui contient tous les textes censurés de l’édition originale
En ce qui concerne le roman culte, Le fils du pauvre (première édition en 1950), la Fondation Mouloud Feraoun souligne que cette nouvelle édition est « la seule qui dispose du texte intégral du manuscrit original », car « y ont été réintégrés tous les textes censurés de l’édition initiale. » Il s’agit donc de « la seule édition à redonner à cette œuvre majeure la profondeur et la symbolique voulue par l’auteur », précise la fondation.
S’agissant de La cité des roses, œuvre publiée à titre posthume en 2007 et qui raconte une histoire d’amour entre un Algérien et une Française, elle représente « l’ultime roman de Mouloud Feraoun. Certainement le roman le plus abouti, mais aussi le plus dérangeant en son temps par la puissance de la symbolique qui en ressort ». Cette « nouvelle édition complète » comprend une postface où la professeure Etsuko Aoyagi, traductrice des œuvres de Feraoun au Japon, livre une étude académique du roman.
La cité des roses, une histoire d’amour extra-conjugale entre un Algérien et une Française
La Cité des roses (titre original L’Anniversaire) est l’ultime œuvre de Mouloud Feraoun. Elle est demeurée à l’état de manuscrit jusqu’en 2007. Le roman, dont les faits se déroulent entre 1957 et 1959, raconte « une histoire d’amour extraconjugale brève entre un directeur d’école et une institutrice française. Le récit fait allusion à la situation tendue en Algérie vers la fin de la colonisation française. Les trois principaux personnages symbolisent respectivement trois peuples distincts. »
L’homme est un Algérien Kabyle d’environ 45 ans. Il dirige une école qui se situe dans un bidonville d’Alger et qui porte le nom de La cité des Roses. Au sein de l’établissement, tous les enseignants sont français, sauf lui. La femme française est une enseignante nouvellement arrivée dans la capitale algérienne. L’amour impossible entre l’Algérien et la Française est tâtonnant et maladroit. L’enseignante décide finalement de repartir définitivement en France au début de l’année 1959.
Pour le journaliste et écrivain, José LENZINI, « Il ne fait pas de doute que dans ce roman, FERAOUN sortait résolument de ses romans “ethnographiques” pour se livrer à une dénonciation franche et directe des dérives de la colonisation, des ambiguïtés de la guerre, de l’inextricable jeu de dupes dans lequel le pays s’enfonçait »
Parti pris et pour cause écrit par le Général Massu...
Le poste de commandemant de la 10° D.P. en opération hors d'Alge en 1957. Le Général Jacques Massu avec derrier lui le Capitaine Graziani.
Au cours d'une existence de soldat
fertile en événements les plus divers, j'ai été plusieurs fois placé par la Providence, ou le Destin, dans l'obligation d'effectuer rapidement des choix importants, dont les conséquences débordaient le domaine militaire pour déboucher sur la politique qui ne m'a jamais inspiré aucun goût.
C'est le récit de l'un de ces choix.
Celui qui me fut proposé en 1957 et m'amena à livrer la « Bataille d'Alger », qui fait l'objet de cet ouvrage.
Que désigne-t-on exactement par Bataille d'Alger ?
C'est l'affrontement qui opposa la 10° division parachutiste et les troupes du secteur à l'organisation F.L.N. d'Alger, au cours de l'année 1957.
Cette définition me paraît pompeuse,
mais elle a été employée par notre adversaire, Yacef Saadi, dans son livre Souvenirs de la Bataille d'Alger, publié chez Julliard en 1962.
Dans mon esprit :
cette bataille évoque l'ensemble des actions de toutes sortes, autant humaines que policières, menées par les Forces de l'Ordre pour enrayer le terrorisme et rétablir la confiance sur toute l'étendue de l'agglomération algéroise.
La phase « utile » s'est déroulée en deux temps :
de janvier à mars 1957
de juin à octobre 1957.
Tout ce qui se passa en Mitidja et dans les contreforts de l'Atlas qui bordent cette plaine eut une telle résonance que le département d'Alger en entier fut concerné par cette « Bataille ».
Pourquoi ai-je écrit cet ouvrage ?
Un ensemble de circonstances m'y a entraîné.
Circonstances prévues :
les loisirs de la « retraite ».
circonstances fortuites :
la projection privée qui me fut faite en juin 1970 du film de Pontecorvo-Yacef Saadi, sur la Bataille d'Alger,
La lecture d'œuvres très variées en leurs genres sur les années que j'ai vécues en Algérie,
la rédaction d'un article qui me fut demandé sur certain combat de cette époque,
Ma citation par le commandant Faulques dans son procès contre l'Express en mars 1970.
Ces condiments ont excité l'état
de «
rumination
» dans lequel je vivais depuis dix ans, nourri de tout ce qui se rapportait à l'Algérie.
Ils ont provoqué chez moi la conscience d'un devoir, celui de mieux faire connaître,
dans son contexte ingrat, mais aussi dans ses résultats :
La tâche demandée à la 10 division parachutiste et accomplie par elle en 1957.
Je préviens donc le lecteur qu'il ne trouvera pas, dans les pages qui suivent :
une nouvelle histoire plus ou moins romancée de la Bataille d'Alger, j'ai parfaitement conscience qu'il attend autre chose de moi, il veut aujourd'hui des réponses à toutes les questions, certaines douloureuses, qui hantent encore son esprit.
Il veut connaître la vérité, savoir ce qui s'est passé et pourquoi cela s'est ainsi passé.
Parti pris et pour cause écrit par le Général Massu...
La bataille d' Alger fut-elle vraiment gagnée ?
Aucun des témoins de cette époque n'a contesté que la Bataille d'Alger ait été gagnée par les parachutistes, ainsi que les troupes de secteur et les forces de police placées sous mon commandement.
Cinq ans plus tard, a été lancée une campagne tendant à persuader l'opinion que l'indépendance de l'Algérie avait été acquise à la suite de la « victoire » du F.L.N. à Alger. La Belle duperie !
Sans doute les fellagas ont-ils pour satisfaire leur ambition :
Apparaître aux yeux du monde comme les seuls représants du peuple algérien, dû éliminer les dissidences internes.
Ils l'ont fait la plupart du temps avec une férocité et une absence totale de ce sens « fraternel » auquel ils se réfèrent si volontiers dans leurs rapports avec ceux de leur race.
Chez eux n'y eut que soif de pouvoir absolu !
Quel contraste avec les luttes qui opposent Nord et Sud-Vietnamiens, séparés par des dissensions idéologiques ou socio-économiques, et aussi avec l'affrontement dramatique qui termina, pour nous du moins, la guerre d'Indochine.
Pas de Dien-Bien-Phu en Algérie,
malgré la menace et l'espoir d'une victoire spectaculaire du même type que brandissaient si volontiers Larbi Ben M'Hidi et les autres chefs de la rébellion.
Arrestation de Ben M'Hidi et de Hamida son agent de liaison en 1957.
Cette guerre qu'ils ont perdue par les armes, aboutissant cependant à son but, l'indépendance, n'a-t-elle pas hanté les nationalistes algériens dans leur fierté ombrageuse ?
Ne devoir la réalisation de leur rêve qu'à la seule autorité du général de Gaulle, n'est-ce pas l'humiliation qui pousse aujourd'hui un Yacef Saadi, dans le film de Pontecorvo qu'il inspira, à transformer la vérité, à la modeler pour lui donner la mesure de son orgueil blessé ?
C'est aller vite en besogne
et prendre avec l'histoire des libertés qui ne peuvent résister aux documents et aux chiffres... même avec la bienveillante complicité des esprits forts de notre hexagone.
Ces alliés inespérés,
non contents d'avoir cherché à déconsidérer l'armée combattante, faite de leurs compatriotes parce qu'elle réussissait trop bien dans sa mission, n'ont pas hésité à proclamer plus tard, qu'elle « n'avait pas existé », puisque le F.L.N. l'avait vaincue !
De la même manière,
les « informateurs qualifiés » qui nous accusaient de « gonfler nos bilans » se sont surpassés à les gonfler eux-mêmes démesurément lorsqu'il s'est agi de dénoncer la férocité de nos combats et de notre action !
On pourrait rire de ces trop faciles jongleries
si la mémoire de nos soldats, partis pour l'Algérie accomplir leur devoir, la douleur de leurs familles, le culte que leur ont voué leurs camarades survivants, ne s'en trouvaient atteints profondément, à tout jamais !
la rue Marmol et la rue de la bombe situées Place d'Estrées en 1957.
Faut-il donc
poursuivre une démonstration que je me suis efforcé de faire tout au long de ces pages ?
Je n'ai pas la prétention
de décourager la mauvaise foi,
de désarmer la calomnie,
la haine
et parfois l'imbécillité,
mais j'ai voulu corriger une information tendancieuse pour apporter, à ceux qu'elle avait dupés, matière à réflexions nouvelles basées sur des faits précis, indiscutables, nourris aux meilleures sources.
Je me suis imposé de traduire en images facilement perceptibles des données techniques parfois arides et j'ai senti le poids de cet effort.
Effort, pour moi, d'imposer une évidence si claire à mes yeux et à ceux de mes camarades, acteurs et témoins de ces mois de lutte, évidence devenue doute, obscurité ou contre-vérité, pour ceux qui ont été, jour après jour et maintenant encore, quatorze ans plus tard, abusés par d'insidieuses manoeuvres.
De quoi s'agissait-il ?
Ceux-là même qui utilisent, pour gagner, les coups les plus bas, pour qui :
la bombe,
la mutilation,
l'assassinat,
l'enlèvement,
le viol,
la mort lente d'innocents otages,
le chantage,
l'intoxication,
la menace jour et nuit suspendue sur la tête des êtres les plus chers
constituent la routine quotidienne.
Ceux-là exigent de leurs adversaires la guerre « traditionnelle », conventionnelle, et hurlent ou font hurler leurs complices ou leurs partisans du monde entier dès que l'adversaire sort des règles du parfait gentleman.
L'essence même du succès de la 10° division parachutiste à Alger n'a-t-elle pas été d'avoir su
démonter le piège,
déjouer la machination ?
Sérieux et inquiétant coup de semonce infligé aux apprentis sorciers du chambardement...
Puisque nous sommes tenus à des décomptes de fossoyeurs, comparons cependant le poids du sang versé dans cette bataille d'Alger à celle de Dien-Bien-Phu.
Dien-Bien-Phu,
Quatre mois de combats, dont deux mois acharnés, en des assauts et des combats aux corps à corps, nous a coûté :
2.300 tués,
10.000 prisonniers dont 4.500 blessés, seul 3.500 reviendront vivants.
Les pertes pour le Viêt-minh ont été de :
30.000 morts et 32.000 blessés, auxquels il faut peut-être ajouter 20.000 à 30.000 coolies, morts d'épuisement sur 75.000 coolies qui ont transporté des charges de 200 kilos sur des vélos.
la colonne des 10.000 prisonniers Français.
Pour illustrer
notre victoire dans la Bataille d'Alger, il n'est que de regarder ses effets.
Images simples, perceptibles aux yeux les moins favorables, à condition qu'ils acceptent de s'ouvrir sur l'évidence !
La haine, la rancune n'auraient pas permis une certaine physionomie d'Alger après la mise hors de combat de Yacef Saadi, Ali la Pointe et de ceux qui, suivant leur sillage, l'enserraient dans leur étau de peur.
Quelle est donc cette physionomie ?
La sécurité rétablie, :
La circulation dans tous les quartiers et jusque dans la Casbah est libre.
Nul n'est plus fouillé à l'entrée des cinémas, et des stades.
Les trams et les autobus connaissent la fréquentation intense d'avant-guerre,
la vie culturelle a repris.
Le couvre-feu supprimé permet les nuits indéfiniment prolongées des pays méditerranéens.
Puis quelques mois plus tard, le 13 mai 1958,
un phénomène explosif éclairer la portée constructrice, ce phénomène, qui a bouleversé l'actualité et amené sur le forum d'Alger des journalistes du monde entier, ne nous a pas surpris.
Il était comme le bouquet d'un feu d'artifice de joie, de soulagement, de compréhension et d'espoir, jaillissant de tous les cœurs depuis des semaines, pour célébrer la paix enfin restaurée.
Dans ces foules en liesse partout rassemblées,
pas une voix discordante n'osait se faire entendre,
pas un fusil ne se risquait à lâcher une balle de la fenêtre la mieux cachée.
N'est-ce pas la preuve qu'il s'agit bien de manifestations
comme le furent en France ou dans les villes alliées celles du 11 Novembre 1918 ou du 8 Mai 1945, mais avec l'exubérance d'un pays au chaud soleil.
Parti pris et pour cause écrit par le Général Massu...
La mission de retrouver Ali la Pointe
sera confiée au 1er régiment étranger parachutiste, commandé par le chef de bataillon Guiraud, qui remplace le colonel Jeanpierre, blessé lors de l'arrestation de Yacef Saadi.
Dès fin septembre,
une piste sérieuse permet de déterminer approximativement l'emplacement, dans la Casbah, de la cache du terroriste.
Le 7 octobre
un renseignement, recoupé par trois fois, la situe avec exactitude : 5, rue des Abdérames, au premier étage.
Les « bérets verts » établissent alors un vaste filet autour du quartier de la rue Porte-Neuve.
Simultanément, tandis que des patrouilles s'avancent par les ruelles,
Des paras convergent par les célèbres terrasses de la Casbah vers la rue des Abdérames, sautant de l'une à l'autre et se recevant parfois sur des tôles pourries ou sur des verrières.
les patrouilles s'avancent par les ruelles de la casbah.
A 20 heures,
le numéro 5 est investi, les terrasses alentour occupées.
On fouille chaque pièce, C'est finalement les propriétaires de la maison, deux femmes, qui indiquent exactement la cache. Elles précisent que quatre personnes y ont cherché refuge, dont une femme.
« Le chef s'appelle Ali... », il n'y a donc aucun doute sur l'identité du petit groupe.
Les paras apprennent en outre que la tanière a été construite dans les premiers jours de septembre et occupée, le lendemain de la capture de Saadi, par Petit Omar et Mahmoud.
Le 28 septembre,
Ali la Pointe et Hassiba les y rejoignent.
Huit jours durant, Ali et ses trois compagnons vivent entassés dans un espace de quatre mètres carrés.
Leur seule communication avec l'extérieur
est assurée par deux trappes, en haut et en bas, composées d'un cadre de bois et d'un fort treillage métallique sur lequel sont cimentées des briques à huit trous.
Chaque trappe pivote sur des gonds et est verrouillée de l'intérieur par une barre horizontale.
L'ensemble est robuste, bien conçu et la cache ne peut être détectée par sondage des murs.
C'est Yacef Saadi
qui a dessiné le plan de ce refuge à l'usage de ses subordonnés. Celui d'Ali présente l'inconvénient majeur de n'offrir aucune issue de secours.
Dans la nuit du 7 au 8 Octobre 1957,
Sachant qu'Ali la Pointe,
homme d'action, possédant des armes, peut très bien tenter une sortie désespérée, le commandant Guiraud, avec l'accord du colonel Godard, décide, après de vaines et nombreuses sommations, de faire sauter un angle de la cloison au moyen d'une petite charge de plastic, susceptible de détruire un pan de mur.
Cinq légionnaires et un officier
sont désignés pour foncer dans la cache immédiatement après l'explosion. Il n'y a pas d'autres moyens d'y accéder.
Parallèlement, des mesures de sécurité sont prises :
On évacue les habitants du 5.
Le n° 3, la maison de Yacef Saadi est vide.
Mais certains civils sont revenus subrepticement pour récupérer leurs affaires, dans des maisons voisines.
Au lever du jour, la petite charge de plastic explose.
A la stupeur générale,
une violente déflagration en chaîne se produit, la maison située au fond de l'impasse Silène, celle où habite le député communiste Amar Ouzegane, s'effondre, causant la mort d'innocentes victimes.
Les légionnaires ont quatre blessés légers. Certains, postés sur une terrasse, se retrouvent à l'étage inférieur.
Ali la Pointe ne s'est donc pas fait sauter.
Nous l'avons attaqué dans son repaire hermétique.
Nous ne pouvions supposer que le tueur avait avec lui une telle charge d'explosifs, au moins vingt kilos !
Les légionnaires revêtent la tenue de corvée et procèdent au déblaiement des décombres amoncelés au milieu desquels gisent les quatre derniers animateurs du terrorisme à Alger :
ils ont péri de la même mort que tant de leurs innocentes victimes.
Qui était ce personnage ? :
« Ali la Pointe », qui a aussi comme sobriquet « Petit Boxeur ». Ces derniers temps, on le désignait dans la rébellion sous le surnom de « Si Lahbib ». Il figue sur les registres de l'état civil sous le nom de Amar Ali, né à Miliana, le 14 mai 1930. Il a donc vingt-sept ans.
En 1945, il se fait connaître à Alger comme joueur de tchic-tchic. Son quartier opérationnel était alors Bab-el-Oued.
Peu après, il commence à se faire une petite place dans « le Milieu » comme souteneur, non sans avoir commis au passage quelques vols à main armée.
Son casier judiciaire comporte quelques condamnations :
1943 : vols d'effets militaires. 1950 : viol 1952 : coups et blessures volontaires, violences et voies de fait à agent. 1953 : tentative d'homicide volontaire. 1954 : tentative d'assassinat.
On est en droit de se poser une question ? que fait la justice !!!
Le 22 avril 1955 :
Ali la Pointe réussit à s'évader du chantier de travail de Damiette (Médéa), où il purge une condamnation pour tentative d'assassinat.
Cette évasion constitue un tournant dans sa carrière de « voyou ».
Peu après, il est présenté à Yacef Saadi qui l'incorpore aussitôt à son groupe d'action armée, dirigé alors par Chaib Ahmed dit le « Corbeau », autre personnage du milieu, qui a pris le maquis.
Depuis sa capture, Yacef Saadi a précisé :
Ali la Pointe
avait eu pour mission, de regrouper, de contrôler et d'employer à l'action armée les hommes du milieu, ses anciens compagnons.
Yacef Saadi a dit de lui :
« qu'il n'avait aucune instruction, encore moins de sens politique, mais qu'il était très dévoué »...
Par contre, il lui a consacré, dans son livre sur la Bataille d'Alger, un élogieux chapitre qu'il termine ainsi :
« Ali la Pointe, un héros, un patriote, un homme ! »
Le 15 octobre
Arrestation de Benhamida Abderhamane, le dernier responsable de la Zone Autonome d'Alger.
Parti pris et pour cause écrit par le Général Massu...
Nous n'étions plus dans l'inconnu :
Nous avions décortiqué le système F.L.N.,
Consolidé nos bases de travail,
Perfectionné nos méthodes,
Nos premiers succès avaient entraîné une certaine collaboration des services de police.
Dans la « deuxième Bataille d'Alger », on a pu compter pleinement sur le soutien des policiers, de la D.S.T. en particulier.
L'organisation du commandement a revêtu un caractère qu'elle n'avait pas antérieurement :
Aux côtés du colonel Godard se trouvaient :
Le colonel de gendarmerie Crozafon,
le commissaire Perriod de la police judiciaire,
les représentants des sous-secteurs, etc.
Les missions étaient mieux réparties:
les gendarmes mobiles avaient pris en main toutes les tâches de leur ressort :
les interrogatoires,
la mise en forme des procès-verbaux,
la responsabilité des centres de tri,
à l'exception de celui qui était concédé au seul régiment para laissé par mes soins à la disposition du secteur.
La collaboration était poussée et chacun en mesure d'éviter à l'autre un faux pas.
La recherche des poseurs de bombes se focalise sur la casbah.
Dès le 12 juin, la « pêche» aux bombes continue, inlassablement.
Le 25 juin, le 1er R.C.P. et le 9° zouaves découvrent 33 bombes dans la Casbah.
Après les cérémonies du 14 Juillet, avec notamment le défilé de la 10° Division de Parachutistes sous mes ordres sur les Champs-Elysées, le 3° R.P.C. relève à Alger, le 1er R.C.P. qui assure, depuis le 18 mai, l'action en profondeur dans la cité.
Le 27 juillet,
Le F.L.N. a prévu de faire sauter huit bombes.
Les porteurs de bombes sortent d'une cache de la rue Saint Vincent de Paul pour rejoindre les quartiers européens, mais le quadrillage des forces de l’ordre les empêchent de rejoindre leurs objectifs, ils doivent éviter les patrouilles militaires pour ne pas être arrêtés et fouillés, le temps passe, l'heure fixée à la minuterie approche.
Une bombe explose avec son porteur, sans doute mal réglée, les autres poseurs s'affolent, l'un d'eux monte dans un escalier de HLM, il essaye de la désamorcer, il saute avec sa bombe.
Les six autres s'en débarrassent n'importe où.
Un caporal para, du 3e R.P.C. M. Cazes, sera blessé gravement, il a voulu désamorcer la bombe qu’il avait découvert.
Trois bombes, dont une de 10 kg, sont désamorcées par les artificiers.
Ce jour là, il n'y eu que trois blessés dont un grave du 3° R.P.C. et les deux terroristes tués par les engins qu'ils allaient déposer.
Au cours du mois d'août,
l'étreinte des forces de l'ordre composées :
du 3e R.P.C.
du 9° zouaves
des policiers
se resserre progressivement autour de l'organisation de la zone autonome d'Alger, qui est finalement démantelée par la capture de 80 % de ses responsables.
Le lundi 26 août 1957,
Commence l'affaire la plus chaude dans l'impasse Saint-Vincent-de-Paul :
Trois terroristes logés dans l'impasse Saint Vincent de Paul, sont tués lors d'une opération des parachutistes renforcée par des zouaves.
Il s'agit des derniers subordonnés de Yacef Saadi : Hadj Athman
, dit Ramel
Cherif Debid
, dit Mourad.
Les tueurs lanceront six bombes contre les forces de l’ordre, dont l‘une tuera une musulmane.
18 bombes prêtes à être programmées sont retrouvées dans une cache.
Ce meme jour
Deux familles de fermiers européens sont massacrées à Courbet ( 72 km est d'Alger ). Sept personnes dont trois femmes et un enfants, toutes égorgées. Les femmes, dont une jeune fille de 22 ans ont subies les pires outrages.
La Une de l' Echo d' Alger du mardi 27 Aout 1957.
La relève de Bigeard par Jeanpierre, dans les premiers jours de septembre, va donner au 1er R.E.P. l'occasion d'achever la Bataille d'Alger.
Dans le contexte trés lourd de cet été de 1957,
la décision s'impose d'un dernier effort contre le F.L.N. d'Alger.
Il faut à tout prix mettre fin aux attentats, qui dans ce climat de tension risquent de provoquer, à tout moment, un contre-terrorisme européen de plus en plus menaçant.
Notre objectif précis sera évidemment Yacef Saadi, le responsable des attentats.
La situation du malheureux n'est pas confortable.
Contraint de se terrer dans la Casbah qu'il connaît bien et où il a de nombreux amis, il a fait aménager plusieurs cachettes dans des immeubles et y entrepose munitions et documents.
Souvent accompagné d'Ali la Pointe, élu garde du corps, il a, en outre, constitué un système de surveillance.
Dès qu'une patrouille apparaît dans une ruelle proche de sa résidence du moment, les guetteurs donnent l'alarme et Yacef Saadi rejoint le réduit aménagé dans le logis.
Le mardi 24 septembre :
Les bérets verts, les zouaves et les gendarmes cernent depuis trois heures du matin l'un des quartiers de la Casbah où se trouve la rue Caton qui donne sur la place Rabbin Bloch.
les Paras dans la casbah 1957
Le filtrage et le contrôle d'identité des habitants commencent à quatre heures.
Une indicatrice avait eu l'idée de mettre de la peinture rouge au creux de ses mains.
Ainsi tachait-elle dans le dos et faisait-elle repérer à son insu l'agent de liaison qu'elle rencontrait dans la foule, parfois même lui passait-elle un pli dont elle était chargée.
C'est alors que la rue Caton attira l'attention de nos observateurs :
Ils avaient remarqué l'entrée d'hommes tachés de rouge qu'on ne voyait pas ressortir, sans doute parce qu'ils quittaient l'immeuble par une autre issue.
Par contre, une fillette de six ou sept ans franchissait la porte du 4, traversait les escaliers de l'étroite ruelle et entrait au 3. C'était elle qui, en fait, assurait le dernier relais.
Le colonel JeanPierre pénètre le premier dans le repaire :
une maison à petites fenêtres et couloirs très étroits, au premier étage, un patio sur lequel donnent des chambres, un couloir conduisant à une cuisine moderne et un escalier.
En haut de celui-ci, un mur sur lequel un panneau d'une quarantaine de centimètres paraît avoir été rajouté. Attaqué à la pioche par les soldats, le mur perd ses premiers moellons et laisse apparaître
Yacef Saadi, presque nu, qui lance une grenade offensive sur les légionnaires et tire une rafale de mitraillette.
Le colonel Jeanpierre et un adjudant-chef sont blessés. Des pourparlers s'engagent entre les officiers du 1er régiment étranger parachutiste et Yacef qui, se sachant identifié et dans l'incapacité de s'échapper, accepte de se rendre.
Il demande à ne pas être séparé de la jeune Drif Zohra qui, nue elle aussi, se trouve à ses côtés (condamnée à mort par contumace pour l'affaire des bombes du Milk-Bar et du Coq-Hardi).
Tous deux sortent alors de leur réduit, après qu'on leur ait fourni des vêtements Yacef, qui souffre d'une angine, sollicite des soins.
Yacef Saadi lors de sa capture le 24 Septembre 1957.
Dans les milieux musulmans,
où la nouvelle s'est répandue en quelques heures,
« il semble que se manifeste comme une gêne », écrit le correspondant particulier du Monde.
On se montre déçu de la faible résistance opposée par Yacef Saadi.
On établit même un parallèle entre sa reddition et le combat qu'ont livré, avant de mourir, ses deux adjoints Mourad et Ramel.
Yacef Saadi,
dont l'imagination d'un grand nombre faisait un être insaisissable, est mis, le lendemain de sa capture, dans la villa mauresque d'El Biar, P.C. du 1e. régiment étranger parachutiste, en présence des membres de la presse autorisés à le photographier, ainsi que Zohra Drif.
PARIS-MAGHREB. Tous les quinze jours, une histoire qui résonne d’un côté de la Méditerranée à l’autre. Aujourd’hui, entretien avec Habib Kazdaghli, historien et universitaire tunisien, après l’attentat contre la synagogue de la Ghriba, à Djerba.
Après la fusillade contre la synagogue de la Ghriba, à Djerba, le 9 mai au soir, qui a fait cinq morts – deux pèlerins juifs, dont un Franco-Tunisien, et trois membres des forces de sécurité –, les autorités tunisiennes ont dénoncé une attaque « criminelle » mais se sont gardées de la qualifier de « terroriste » ou de lui conférer une dimension antisémite. En France, en revanche, le parquet national antiterroriste, compétent du fait de la nationalité française de l’une des victimes, a ouvert « une enquête du chef d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste ».
Décryptage avec Habib Kazdaghli, historien et universitaire tunisien, spécialiste de la communauté juive religieuse du pays.
Vous étiez à la synagogue de la Ghriba, à Djerba, au moment de l’attentat, le 9 mai.
Habib Kazdaghli Oui. Je fais tous les ans le déplacement à Djerba, au moment du pèlerinage de la Ghriba avec mes étudiants. Nous organisons la veille une journée d’étude, des visites des différents lieux de culte (église, mosquée et synagogue) et ensuite nous assistons aux festivités. C’est un moment de fête très spécial, car toutes les composantes de la communauté juive tunisienne dispersée dans le monde se retrouvent à Djerba. Ce soir-là, nous venions de sortir de la synagogue avec mes étudiants et nous montions dans le bus, quand nous avons entendu les coups de feu, à 50 mètres de là. Au début, nous avons pensé qu’il s’agissait de pétards. Mais, lorsque les coups de feu se sont prolongés, j’ai demandé à tout le monde de se mettre à plat ventre, de se cacher sous les sièges du bus et d’attendre…
C’est la troisième fois que cette synagogue est visée...
En 1985, un policier, qui gardait les lieux, avait tiré à l’intérieur, tuant 5 personnes dont 4 juifs. En 2002, c’est un attentat revendiqué par Al-Qaida [exécuté avec un camion-citerne bourré d’explosifs, NDLR] qui avait fait 21 morts : les victimes étaient alors en majorité des touristes, allemands, puisque la synagogue de Djerba est un lieu touristique [14 touristes allemands, cinq Tunisiens et deux Français avaient été tués]. Mais c’est la première fois que le rassemblement de juifs au moment du pèlerinage est visé. Ce pèlerinage a une haute valeur symbolique et sentimentale aussi bien pour la communauté juive qui vit dans le pays que celle qui réside à l’étranger. C’est aussi un rendez-vous annuel qui marque le démarrage de la saison touristique.
Des membres des forces de sécurité autour de la synagogue de Ghriba, à Djerba, le 9 mai 2023, après l’attaque qui a coûté la vie à cinq personnes. (YASSINE MAHJOUB/AFP)
Le président tunisien Kaïs Saïed n’a pas voulu qualifier cette attaque d’acte terroriste et antisémite.
Contrairement aux autres attaques contre le musée du Bardo, la station balnéaire de Sousse ou la ville de Bengardane [en 2015 et 2016], vite désignées comme terroristes par les autorités, le président a fait le choix cette fois-ci de qualifier l’attaque de « criminelle ». Ni le président ni le ministre de l’Intérieur n’ont fait le déplacement à Djerba, seul le ministre du Tourisme s’est rendu sur les lieux. Comme si le gouvernement n’était tétanisé que par une seule chose : l’impact sur la saison touristique ! Dans n’importe quel autre pays, après une tragédie pareille, le président serait venu sur place. Le tueur, un garde national, a visé des juifs, en choisissant le moment du pèlerinage de la Ghriba, et les trois collègues tués l’ont été car ils étaient un obstacle : il voulait assassiner le maximum de juifs. Pourquoi se cacher derrière les mots ? Toute cette communication est incompréhensible et mérite une meilleure transparence. Dédaignant Djerba, le président a préféré se rendre dans la banlieue de l’Ariana, proche de Tunis, où se trouve sa maison familiale, en évoquant le fait que ses grands-parents avaient caché des juifs…
« Les juifs s’abritaient dans la maison de mon grand-père et aujourd’hui ils viennent me taxer d’antisémitisme. Nos frères palestiniens se font massacrer tous les jours ! Et personne ne réagit ! », a déclaré Kaïs Saïed, le 13 mai, lors de sa visite à l’Ariana, dans une vidéo qu’il a rendue publique.
Le président tunisien Kaïs Saïed lors du sommet de la Ligue arabe à Djedda, le 19 mai 2023. (SAUDI PRESS AGENCY/AFP)
En avril, le conseil scientifique de la faculté des lettres de l’université de La Manouba a en effet décidé de bloquer l’attribution du titre de « professeur émérite » en raison de votre participation à un colloque scientifique à Paris aux côtés d’universitaires israéliens.
Je regrette qu’on soit descendu aussi bas au sein de la faculté dont j’ai été le doyen de 2011 à 2017 et où j’ai passé trente-quatre ans… Je précise qu’ils ne peuvent pas me retirer ce titre car je ne l’ai pas encore obtenu ! Le titre de « professeur émérite » est accordé aux universitaires à la retraite comme moi par le conseil des universités présidé par le ministre de l’Enseignement supérieur. En fait, il s’agit d’un processus qui ne tient compte que de critères académiques et non politiques. J’ai présenté mon dossier et j’attends aujourd’hui la réponse de monsieur le Ministre. Toute cette cabale est partie d’une capture d’écran d’un internaute, qui, au vu du programme du colloque, a décidé de m’épingler comme « rabbin de la normalisation » – c’est-à-dire un militant pour la normalisation des relations avec Israël. Il a lancé la polémique sur les réseaux sociaux. Sans même me contacter, le conseil scientifique de l’université a publié un communiqué pour condamner ma présence à ce colloque : consternant. Comme je suis spécialiste de l’histoire des juifs et d’autres communautés, des fanatiques nationalistes arabes et des dogmatiques d’extrême gauche m’accusent souvent d’être un « normalisateur des relations avec l’ennemi sioniste » comme ils disent. Alors que je suis un historien ! Quoi de plus légitime et normal que de participer à un colloque international sur l’histoire des juifs de Tunisie, quand c’est votre spécialité… Ce n’est pas la première fois que je suis ciblé par ce type de campagne, mais j’avais toujours été soutenu par les instances universitaires, y compris quand j’ai été attaqué par des salafistes parce que je m’opposais au port du niqab.
Et ça recommence avec l’annulation du colloque à Monastir [prévu le 11 mai au surlendemain de l’attaque de Djerba], sans aucune raison officielle, qui devait honorer la mémoire de Clément Cacoub, le grand architecte juif tunisien du palais présidentiel, devenu aujourd’hui musée Bourguiba. Après l’attentat, cet événement aurait pourtant pu être une occasion de réaffirmer l’importance de notre héritage pluriel. De redire aux juifs tunisiens qu’ils sont nos compatriotes, nos frères, et qu’ils font partie de l’histoire de la Tunisie, alors que je constate aujourd’hui, à l’école, un vide mémoriel. Mais on nous a signifié que l’événement était annulé.
Y a-t-il une résurgence de l’antisémitisme en Tunisie ?
Je ne crois pas. Oui, l’assaillant a visé la même synagogue vingt ans après l’attentat d’Al-Qaida. Oui, les pèlerins juifs ont été pris pour cible. Cependant, en toute objectivité, je pense qu’on est loin de ce qui s’est passé en France, de la tuerie de l’école juive de Toulouse [en mars 2012] à l’attentat de l’Hyper Cacher [à Paris, en janvier 2015]. Il n’y a pas d’hostilité envers la communauté juive qui vit paisiblement à Djerba, où je me rends au moins deux fois par an. Et puis, aujourd’hui, il n’y a plus qu’un millier de juifs en Tunisie… Contre 120 000 après la Seconde Guerre mondiale et 100 000 au moment de l’indépendance en 1956. C’était une communauté très visible, très influente. C’est un peu la nostalgie de cette ère-là que le pèlerinage de la Ghriba fait revivre tous les ans, des moments de nostalgie et des pans de cette Tunisie riche et plurielle.
Pourquoi la communauté juive a-t-elle quasiment disparu de Tunisie ?
Il y a eu une première vague de départ en Israël après la Seconde Guerre mondiale (estimée à 25 000 personnes entre 1948 et 1954). Après l’indépendance, une partie des juifs tunisiens, qui avaient obtenu la nationalité française, ont décidé de partir en France. Puis vient la crise de Bizerte en 1961 [un conflit militaire entre la France et la Tunisie autour d’une base navale qui a causé des centaines de morts, surtout côté tunisien – Jean Daniel, fondateur de « l’Obs », avait alors été blessé par les tirs de l’armée française]. Elle provoque un conflit de loyauté et pousse beaucoup de juifs à quitter la Tunisie. Mais la grande cassure s’opère en 1967. A la suite de la guerre des Six-Jours, des émeutes antisémites éclatent dans tous les pays arabes. Lors du pogrom de Tunis, des magasins juifs sont pillés, la synagogue est incendiée. Après ces événements, la communauté a été réduite comme peau de chagrin et s’est concentrée notamment à Djerba, d’où l’importance symbolique de l’île et du pèlerinage de la Ghriba.
l'essentielSans filtre, la chronique de Mémona Hintermann, grand reporter, ancienne membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Quand la sonnerie a retenti en pleine nuit, Camille Blanc s’est précipité hors de son lit espérant que sa femme ne serait pas réveillée. Le téléphone était posé à proximité d’une fenêtre donnant sur la rue surplombant le lac. Le feu d’une explosion. La charge de plastic avait été placée sur le rebord de la fenêtre. A 50 ans, le maire socialiste (SFIO) d’Evian, médaillé de la Résistance, un pacifiste militant pour la paix en Algérie venait de payer le prix de son idéalisme. L’OAS l’avait ciblé parce qu’il avait proposé sa ville pour accueillir une délégation algérienne. C’était en mars 1961, exactement un an avant la signature des fameux accords.
Aujourd’hui, même dans la cité thermale de Haute-Savoie, l’assassinat du maire disparaît des mémoires. Quant aux touristes, n’en parlons pas. On préfère l’oubli parce que c’est commode d’effacer les traces des forfaits des amis de Jean-Marie Le Pen. On ne fait pas d’histoire parce que…c’est de l’histoire ancienne, parce que des morts, dans le sillage de la guerre d’Algérie, il y en a eu de tous côtés, non ?
Pourtant, entre l’attentat qui a tué Camille Blanc et l’incendie qui a fait craquer Yannick Morez, un point commun : la mouvance de l’extrême droite. Une vieille affaire, l’extrême-droite en France. Comme son homologue assassiné au bord du Lac Léman, le maire de Saint-Brévin-les-Pins a reçu suffisamment de preuves de la détermination de nervis en embuscade. Sont-ils les seuls à saboter les rouages de la vie démocratique ? Il faudrait être borgne pour ne pas distinguer les failles sous nos yeux. Les ennemis de la liberté - étiquetés d’obédience fasciste - n’ont pas le monopole des méthodes qui imposent de jeter l’éponge. L’extrême-gauche, par ses paroles et ses actes, n’a pas renoncé à son vieux fonds de commerce de la haine bien-pensante. Les groupes nommés Black blocks ou autres nihilistes qui ricanent en faisant brûler des policiers comme des torches ne sont pas des enfants de chœur. Chez nous, la palette des acteurs de la violence est largement garnie. On n’oublie pas les apôtres de l’islamisme, pas vraiment des apprentis dans l’art de l’intimidation. Sans compter la violence sans nom, sans affiliation particulière, banalisée au quotidien.
Sur les 1300 démissions de maires depuis 2020, toutes ne s’expliquent pas uniquement par des causes de brutalité physique. Il y a aussi les injures, les diffamations, la peur lancinante qui ronge parce qu’on a un élu dans la famille, il y a toutes ces sales manières qui dégoûtent de la chose publique jour après jour. Avec un sentiment diffus que l’Etat ne s’intéresse pas à ces dangers. Cette fois, est-ce vraiment la fois de trop ? Ce serait naïf de le croire, malgré la décision du gouvernement de renforcer la protection des titulaires de l’onction du suffrage universel.
L’air du temps est gonflé de violence. Le choc provoqué par le choix de Yannick Morez de renoncer à son mandat et à sa ville s’est ajouté à un acte qui aurait pu passer pour un fait divers. Le passage à tabac du petit-neveu de Brigitte Macron n’est pas un fait divers anodin, il ajoute au sentiment que tout se règle désormais par la force. Dans les yeux d’Emmanuel Macron dénonçant cette attaque contre un proche, il y avait de l’effroi comme si, soudain, le chef de l’Etat prenait conscience de la haine dont il est l’objet. Elu au plus haut degré de responsabilités, il ne peut ignorer ce que subissent les enseignants, les soignants, les pompiers…Punir comme on le fait jusqu’à présent ne suffit pas . Changer de mentalité, alors ? Pas le temps, il y a le feu à la maison.
Parti pris et pour cause écrit par le Général Massu...
Malgré les échecs subis
au début du printemps, le F.L.N. n'a pas renoncé à l'action terroriste, loin de là !.
Le 12 Mai,
j'avais assisté aux obsèques de M. Gabet, le maire de Koléa, lâchement assassiné.
Le 3 Juin,
Trois bombes à retardement, dissimulées dans des lampadaires en fonte, aux arrêts d'autobus, explosent vers 18 heures trente, l'heure de sortie des bureaux.
Elles provoquent la mort de huit personnes dont trois enfants. Il y aura quatre-vingt-huit blessés, dont trente-trois seront amputés.
Les bombes ont frappé, sans distinction de sexe, d'âge, ou de religion, mais en majorité des musulmans
Je donne alors
le commandement du secteur Alger-Sahel à mon adjoint, le colonel Godard, qui s'installe au palais Bruce, au plus près de la Casbah.
Il va y avoir deux ans que nous sommes à Alger,
ma famille et moi, sans que l'idée même d'un jour de permission ou de détente me soit venue. Ma femme ne veut se séparer ni de moi, ni de notre fille... Nous sommes donc tous trois rivés à cette vie harassante, usante, que la chaleur, dès le mois de mai, rend plus difficile à supporter.
Un changement d'air, d'ambiance me serait bénéfique.
Mais il ne peut être question de décrocher d'Alger, surtout alors que reprennent les attentats, que se durcit à nouveau le terrorisme.
Le lieutenant Mazza, mon aide de camp, conscient comme tout mon entourage, du problème, me propose la réquisition d'une villa sur la côte à quelques kilomètres d'Alger. Il s'agit d'une vaste maison, quelque peu délabrée parce que vidée et inoccupée depuis les « événements ». Le principal agrément de la villa est son accès immédiat à la mer.
Chaque jours, dès le petit matin,
je pars précédé de mes motards qui me font filer un train d'enfer. Au volant de ma 403 blonde, l'acrobate du volant, le sergent parachutiste Happey, leur colle aux roues. Je suis éternellement pressé et nous avons contracté là, Happey et moi, la dangereuse habitude d'oublier les servitudes du code de la route pour gagner les cinq minutes qui me manquent pour faire une heure !
Sur ce front de mer au pied de Notre Dame d'Afrique, je traverse la pointe Pescade, les Deux-Moulins, Saint-Eugene, je me glisse entre les barrages militaires, j'entrevois des voitures arretées et vidées.
C'est le chemin d'accès à la ville. La voie de la fuite de ceux qui apportent le trouble et surtout la mort !
Point-Pescade Eglise Saint-Christophe
Je recevais beaucoup :
réunions où j'écoutais les comptes rendus d'exécution et donnais des directives de détail,
audiences privées après filtrage par mon cabinet.
J'avais bâti un programme hebdomadaire et m'efforçais de le suivre si l'actualité le permettait.
Le lundi et le jeudi : à 11 heures, je recevais dans mon bureau mes subordonnés directs, les paras et les chefs de service de la police pour préciser les modalités de leur action en profondeur, dont les détails m'étaient communiqués chaque jour par le 2° bureau.
Les mardi et vendredi : à 14 heures, j'allais à la préfecture pour recevoir les comptes rendus de l'action en surface exposés par les commandants de secteurs d'Alger. Nous étudiions la manière de parer à certaines difficultés, d'améliorer les métho- des.
le samedi : à 10 h 30 je me rendais à la préfecture, pour m'occuper des affaires du département d'Alger, traitées par l'état-major mixte départemental (militaires et civils) et celui de la zone Nord Algéroise (Z.N.A.) C'étaient des affaires qui me concernaient personnellement et dont j'assurais la responsabilité.
Mais j'étais tenu à participer également aux réunions provoquées, à la préfecture, par le général Allard et le préfet Baret, où étaient traitées les affaires des quatre départements et zones, à la fois à l'échelle de l' « Igamie » pour les civils et de la division militaire d'Alger devenue le corps d'armée d'Alger.
Mais si ces réunions étaient essentielles et m'obligeaient à une présence aussi régulière que possible, je devais multiplier mes contacts personnels avec les colonels de mes régiments à leur P.C chaque fois qu'une découverte ou une capture importante requérait ma venue.
De gauche à droite : Le général Massu, les colonels Perrin, Brothier, Mayer, JeanPierre, Romain-Desfossés
Pour mes officiers, pour moi, il était vital de ressentir en commun l'atmosphère intraduisible du lieu même où se déroulait l'action... où elle venait de se dérouler.
Parfois, c'était l'inspection de V.I.P., d'autorités supérieures, qui m'amenait à ces déplacements. Je n'avais pas toujours, alors, le même sentiment de ne pas perdre mon temps.
Dans la seconde période de la Bataille d'Alger, qui va commencer maintenant, j'irai souvent rendre visite au colonel Godard, auquel j'ai délégué mes pouvoirs concernant le secteur Alger-Sahel. Son P.C., tout près de la Casbah, s'est installé dans un « palais »... encore un.
Le dimanche 9 juin, c'est la Pentecôte,
le colonel Brothier et son épouse sont venus nous voir. Cette fin de journée, je ne suis pas près de l'oublier ! Nous prenons l'apéritif sur la terrasse quand une explosion troue le calme du soir... il est 18 ou 19 heures :
Le téléphone m'apprend qu'une bombe a éclaté au casino de la Corniche, tout proche de chez moi. Brothier et moi nous nous précipitons.
Le spectacle qui nous est offert n'a pu s'effacer de notre mémoire ! Toute une jeunesse joyeuse, venue danser au terme de ce beau jour de fête, est massacrée.
Point-Pescade Le Casino de la corniche
Le bilan est lourd :
9 morts, 85 blessés dont 39 femmes, 10 dans un état désespéré.
Ce sont des Français de souche, en grande majorité du quartier populaire de Bab-El-Oued, beaucoup n'ont pas vingt-cinq ans !
La bombe a été déposée sous l'estrade, par un des plongeurs de l'établissement qui a pris la fuite et qui sera arrêté dans la soirée avenue Gandillot. .
Le chef d'orchestre, Lucky Starway, est déchiqueté, ses musiciens tous grièvement atteints. La piste est balayée, les danseurs couchés pêle-mêle...
Voilà comment se termine un bal innocent !
Point-Pescade Le Casino de la corniche
Ne peut-on penser à notre réaction,
à nous qui savions, en cette soirée du dimanche 9 juin 1957, jour de la Pentecôte , qu'une main criminelle, mue par une volonté froide, avait sciemment causé un tel drame ?
Ne peut-on imaginer,
notre désir de trouver les autres bombes, prêtes à causer les mêmes drames, de tout mettre en œuvre pour les désamorcer ?
Je revois cette belle jeune fille de dix-huit ans dont les deux jambes ont été arrachées et qui gît, évanouie, dans ses cheveux blonds souillés de sang.
Cette vision s'est imposée en moi, avec un réalisme étrange, insoutenable, lorsque j'ai entendu l'an passé, puis lu le récit de l'atroce drame du « 5 à 7 » de Saint-Laurent-du-Pont.
Une des nombreuses bléssées de ce dimanche 9 juin 1957
Le 11 juin 1957,
les obsèques des victimes sont l'occasion de violentes manifestations.
Une grève inopinée est respectée par la population française de souche.
Après les obsèques des victimes du casino de la corniche, la foule exaspérée se livre à des exactions :
cinq indigènes musulmans sont tués, dont deux terroristes.
un camion fonce sur la foule, une Européenne est tuée, 8 bléssés.
200 magasins de musulmans sont saccagés,
200 personnes sont arrêtées, il y a 49 blessés parmi les manifestants, dont 2 paras.
Ce jour là,
les paras arrêtent Maurice Audin, communiste, chef de réseau, professeur à l'université d'Alger, il avait obtenu sa mutation en 1953 afin de participer à l'insurrection qui s'annonçait.
C’est lui et ces complices qui était chargé de caché et de transférer vers le maquis, les tueurs F.L.N. recherchés par les parachutistes.
Les arrestations des membres du réseau communiste marquera le début de la seconde partie de la Bataille d’Alger et la fin des poseurs de bombes.
Le couvre-feu est fixé à 21 heures pour l'ensemble de la ville. .
Je m'adresse à la population et à mes troupes dans les termes que voici :
« Nous, militaires et policiers,
ressentons la même douleur, la même indignation que vous devant les attentats dont sont victimes tant d'innocents. Vos deuils et vos souffrances sont nôtres, du fond du cœur.
L'action difficile, qui nous est imposée par cette guerre secrète, exige, avec la foi dans la victoire qui nous anime, beaucoup de sang-froid, d'astuce et de temps.
Le moment n'est pas, même pour les étudiants, de se livrer sur la voie publique à des manliestations qui obligent les troupes et la police à se distraire de leur effort essentiel pour en contrôler le développement.
Car vous n'ignorez pas qu'au milieu des gens les mieux intentionnés, aspirant à se libérer publiquement de l'angoisse qui les étouffe, se trouvent des provocateurs, soucieux avant tout de détourner vers leurs fins malsaines les mouvements de foules les plus honorables.
Il est primordial pour ll'avenir de l'Algérie que nous tous ici donnions à la métropole et au monde le spectacle de l'union qui existe dans nos cœurs, notre seul but étant de réclamer et d'obtenir, dans la légalité, la justice saine et totale, indispensable à notre victoire. »
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