J’ai les yeux fermés et ne croyez surtout pas que je fais exprès… je n’ai pas envie de les ouvrir. Je me demande même si je ne rêve pas. Si c’est le cas je vous prie de ne pas me réveiller.
Je vous décris la scène qui a eu lieu ce matin dans un lycée à la Seine Saint Denis :
Tous les garçons étaient vêtus d’un qamis, toutes les filles d’une abaya… les uns d’un côté et les autres de l’autre, observant une minute de silence à la mémoire de la fin de l’histoire, à la gloire de ceux qui n’ont pas besoin de voir Dieu pour le croire. Les professeurs ne savaient plus où se mettre, se la fermer ou se démettre. La question tourmentait tout l’établissement : De quel côté se situe l’être ? De quel côté se situe le paraître ?
Non ce n’est pas une parodie mais le paradis tel qu’il a été imaginé et financé par un groupe pétrolier pour illustrer le passage de la France de Ferry à la France d’Arabie.
Pour certains ce sera fantastique, pour d’autres, c’est un film d’horreur où l’on ne voit plus une seule cheville !
LE MÉPRIS DES ALGÉRIENS
Chez eux, vous leur disiez qu’ils sont chez vous… et chez vous, vous leur dites qu’ils ne sont pas chez eux… je veux parler de ces français d’origine algérienne.
Pourquoi ? Pourquoi sont-ils si détestés ? Pourquoi sont-ils si détestables ?
Si on joue avec eux, cartes sur table, ils avoueront que c’est regrettable mais qu’ils s’en fichent éperdument d’être désavoués.
Peut-être à cause d’un passé qui ne passe pas et qu’ils ne cessent de se repasser en boucle sans jamais la boucler. Ils ont la rage pour deux raisons qui les empêchent de tourner la page : le mépris et le mépris.
Vous les méprisez parce que vous les jugez méprisables. Ils vous méprisent parce que vous êtes méprisants. Vous les méprisez hypocritement alors qu’ils vous méprisent catégoriquement. Tout bien pesé : le français reproche à l’Algérien d’être ce qu’il est, alors que l’Algérien reproche au français de faire ce qu’il fait.
Et pour clore ce dossier scabreux : cessons de mêler l’Algérie aux zizanies franco-françaises… Que la France se débrouille avec ses français, quelles que soient leurs origines. Quant aux Algériens qui se sont mis à mépriser les Algériens… On va leur dire qu’ils sont bien français.
L’abaya, longue robe ample traditionnelle, est interdite depuis lundi 4 septembre dans les établissements scolaires en France. Habit traditionnel des Bédouins, l’abaya se teinte de religieux après que la police saoudienne l’impose, de couleur noire, pour les femmes. À partir des années 2000, elle est revisitée comme accessoire de mode.
Une mannequin saoudienne portant une abaya signée par la créatrice et princesse saoudienne, Safia Hussein, à Riyad en Arabie saoudite, 23 janvier 2021.AHMED YOSRI/REUTERS
Ce lundi 4 septembre a eu lieu la première rentrée scolaire française sans abaya, cette longue robe ample dont l’interdiction a été annoncée la semaine dernière par le ministère de l’éducation nationale au nom de la laïcité.
Du sable et du soleil
L’abaya, « un manteau ample constitué d’une seule pièce » (1), est d’abord un vêtement traditionnel qui serait né en Mésopotamie il y a quatre millénaires, avec pour objectif de se protéger du soleil et du sable dans le désert. Il s’agit alors d’une large toile en coton ou en laine dont on s’enveloppe le corps, ne laissant dépasser que le visage, les mains et les pieds.
Dans son Dictionnaire détaillé des noms de vêtements chez les Arabes, publié en 1845, l’orientaliste néerlandais Reinhart Dozy y voit « l’habit caractéristique des Bédouins d’à peu près tous les temps ». Chaque tribu a alors une abaya distinctive, par sa coupe, sa matière ou ses broderies.
Un symbole islamique
L’abaya se popularise et devient un symbole de l’identité arabe et musulmane, alors que le Moyen-Orient, et notamment le Golfe, est en proie à un retour du religieux, à la suite de la défaite des armées arabes face à Israël en 1967. Si le port de l’abaya n’est pas recommandé dans le Coran, la sourate Al-Ahzab incite à la pudeur pour les femmes : « Ô Prophète ! Dis à tes épouses, à tes filles, et aux femmes des croyants, de ramener sur elles leurs grands voiles. »
Après la prise d’otages à La Mecque par des rebelles fondamentalistes en 1979 et dans un contexte de compétition avec la jeune République islamique d’Iran, le roi Khaled Ben Abdelaziz Al Saoud veut donner des gages aux tenants d’une approche rigoriste de l’islam. « Voyant des mouvements de contestation émerger, le régime étend l’emprise du religieux sur la société afin de renforcer le contrôle social », explique Stéphane Lacroix, professeur à Sciences Po. Le roi accroît les prérogatives de la police religieuse. Cette dernière fait alors respecter le port de l’abaya de couleur noire pour les femmes, qui devient de facto la norme.
Cette obligation est précisée en 2000 dans une fatwa, un avis non contraignant, du Comité permanent saoudien pour la recherche scientifique et l’orientation, l’autorité religieuse du royaume. L’abaya « licite » doit être « d’un tissu épais, non collant et entièrement couvrant », « l’ouverture de ses manches doit être étroite » et « elle ne doit comporter aucun ornement susceptible d’attirer les regards et être exempte de dessins, de décorations ou d’écritures ». Surtout, « elle ne doit pas ressembler à la tenue des infidèles, femmes ou hommes ».
« Dans un pays où le droit n’est pas codifié, c’est la police religieuse qui fait appliquer les fatwas prononcées par les grands oulémas et les transforme en contraintes », détaille Stéphane Lacroix.
La mode « mastour »
La fatwa n’empêche pas les mutations de ce vêtement et même sa transformation en accessoire de mode, loin des critères stricts du wahhabisme. En 2007 est créée la première abaya sportive, au tissu plus élastique et aux tons pastel pour supporter les fortes chaleurs.
À la même époque, l’abaya est revisitée par des designers arabes ou internationaux, qui surfent sur l’émergence de la mode mastour (« cachée ») ou modest fashion, qui fait de la modestie et de la pudeur ses maîtres mots.
Plusieurs marques de prêt-à-porter telles qu’Uniqlo, H & M ou Mango lancent des lignes d’abayas pour s’emparer du marché du vêtement féminin dans la péninsule arabique. La haute couture n’est pas en reste. Dolce & Gabbana sort en 2016 une collection de hijabs et d’abayas cintrées, colorées, à motifs. Le style l’emporte sur la piété.
La chercheuse Noor Al Qasimi expliquait, dès 2010, au Journal of Middle East Women’s Studies que « le phénomène de mode de l’abaya va à l’encontre de sa signification première sans toutefois entraver complètement l’ordre hégémonique du patriarcat islamique. Elle constitue ainsi une forme de résistance passive ».
Dans le même temps, l’Arabie saoudite s’ouvre un peu sur la condition féminine, sous l’impulsion du prince héritier Mohammed Ben Salmane. Ce dernier va jusqu’à déclarer, en 2018, que le port de l’abaya n’est pas obligatoire. « Il appartient aux femmes de décider du type de vêtements décents et respectueux à porter», estime-t-il. Celui que l’on nomme « MBS » ne modifie certes pas la loi, mais met au placard la police religieuse, relâchant la contrainte sur le port de l’abaya noire.
Deux membres de la Brav-M seront jugés en correctionnelle le 7 mars 2024 pour des faits de violences et des menaces sur un étudiant en marge d’une manifestation, en mars 2023 à Paris.
Deux policiers de la Brav-M (Brigade de répression de l’action violente motorisée) ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour des violences et menaces à l’encontre d’un étudiant tchadien lors d’une manifestation en mars à Paris.
Les deux gardiens de la paix seront jugés le 7 mars 2024 pour des faits de violences par personne dépositaire de l’autorité publique et menaces de violences réitérées « à l’exclusion de toute autre infraction ou circonstance aggravante » sur l’étudiant Souleyman Adoum Souleyman, a précisé le parquet de Bobigny (Seine-Saint-Denis), mardi 5 septembre.
Les échanges avec les policiers avaient été enregistrés
Dans la nuit du 20 au 21 mars, des membres de la Brav-M ont interpellé sept jeunes manifestants soupçonnés d’avoir pris part à des dégradations dans un cortège sauvage dans le centre de Paris. L’un des interpellés avait alors discrètement enregistré les échanges avec les policiers, où l’on entendait ces derniers proférer des menaces et des propos humiliants.
L’étudiant tchadien était particulièrement visé par les fonctionnaires dans l’enregistrement. Avec une autre manifestante, il avait alors déposé plainte le 24 mars contre les effectifs de la Brav-M. Leurs plaintes visant le préfet de police et la procureure de Paris, la procédure judiciaire avait été dépaysée en Seine-Saint-Denis. La plainte de la manifestante « a été classée sans suite, l’enquête n’ayant pas rapporté la preuve des faits allégués par la plaignante », a indiqué le parquet de Bobigny.
L’avocat des plaignants, Me Arié Alimi, a regretté que le parquet n’ait pas retenu les chefs d’agression sexuelle et injures à caractère racial envers Souleyman Adoum Souleyman. « Nous allons poursuivre tous les policiers de la Brav-M qui ont participé à l’interpellation et tous les policiers de la Brav-M qui étaient présents du chef de violences en réunion », via le mécanisme de citation directe qui permet à une victime de saisir directement le tribunal, a-t-il déclaré.
En juin, trois policiers de la Brav-M ont été renvoyés en conseil de discipline et quatre autres ont écopé d’un avertissement pour ces mêmes faits.
L’homme politique et polémiste d’extrême droite avait réaffirmé sur la chaîne CNEWS que le maréchal Pétain avait « sauvé » des juifs français pendant la seconde guerre mondiale. Il devra donc être rejugé par la cour d’appel.
La Cour de cassation a décidé, mardi 5 sep
tembre, de casser la décision de la cour d’appel de Paris qui avait relaxé Eric Zemmour du délit de contestation de crime contre l’humanité pour ses déclarations datant de 2019, lorsqu’il avait réaffirmé sur la chaîne CNEWS que le maréchal Philippe Pétain avait « sauvé » des juifs français pendant la seconde guerre mondiale. Il devra donc être rejugé par la cour d’appel.
« Contrairement à ce que la cour d’appel a retenu, les propos reprochés peuvent constituer un délit même s’ils portent sur une personnalité qui n’a pas été condamnée pour crime contre l’humanité (dans cette affaire Philippe Pétain), précise la cour. La cour d’appel aurait dû considérer qu’en affirmant “C’est encore une fois le réel”, l’homme politique a repris à son compte les propos selon lesquels Philippe Pétain avait « sauvé les juifs français » ;
La plus haute juridiction de l’ordre judiciaire a rendu sa décision après avoir été saisie des pourvois du procureur général près la cour d’appel de Paris ainsi que de cinq associations antiracistes – SOS-Racisme, l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples, J’accuse ! action internationale pour la justice et la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme – contre l’arrêt de mai 2022 relaxant Eric
En juin 2023, l’homme politique d’extrême droite était poursuivi pour des propos tenus en 2019, lors d’un débat face à Bernard-Henri Lévy dans l’émission « Face à l’info », dont il était le chroniqueur, sur CNews. « Un jour (…) vous avez osé dire que Pétain avait sauvé les juifs français. C’est une monstruosité, c’est du révisionnisme », avait lancé M. Lévy. M. Zemmour avait alors répondu qu’il fallait « préciser » qu’il parlait des juifs « français ». Bernard-Henri Lévy avait insisté : « C’est une monstruosité, c’est du révisionnisme ! » Et M. Zemmour de conclure : « C’est encore une fois le réel. »
Dans son arrêt, la cour d’appel de Paris estimait que l’infraction de contestation de crime contre l’humanité n’était pas caractérisée car « les propos (…), s’ils peuvent heurter les familles de déportés (…), n’ont pas pour objet de contester ou minorer, fût-ce de façon marginale, le nombre des victimes de la déportation ou la politique d’extermination dans les camps de concentration ». Elle ajoutait que Pétain n’avait pas été « poursuivi pour un ou plusieurs crimes contre l’humanité tels qu’ils sont définis par l’article 6 du statut du tribunal militaire international annexé à l’accord de Londres du 8 août 1945 ».
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La convocation pour la Coupe du monde de rugby d’un joueur français condamné pour violences racistes ne choque pas l’exécutif. Amélie Oudéa-Castéra s’abrite derrière la présomption d’innocence. À cinq jours du Mondial en France, personne ne veut être accusé de gâcher la fête.
epuisDepuis sa nomination au gouvernement en mai 2022, Amélie Oudéa-Castéra a fait de la promotion de l’éthique le marqueur principal de son action. En mars, elle appelait à un « printemps du sport français », pour en « renforcer l’éthique » et en défendre les « valeurs ». Des discours qui ne sont pas restés sans lendemain : elle a par exemple obtenu que les fédérations françaises de football (FFF) et de rugby (FFR) changent de président, tout comme la ligue nationale de handball (LNH), au nom de l’exemplarité et de l’intégrité des figures du sport français.
Sur la convocation de Bastien Chalureau en équipe de France de rugby, en revanche, la ministre n’a pas eu grand-chose à dire. « Je ne demande pas [son] exclusion », a-t-elle dit sur Sud Radio, malgré la condamnation du joueur par le tribunal correctionnel de Toulouse (Haute-Garonne) en novembre 2020 pour des « faits de violence avec la circonstance que ces derniers ont été commis en raison de la race ou de l’ethnie de la victime ».
Interrogée à plusieurs reprises sur le sujet, Amélie Oudéa-Castéra a invoqué la présomption d’innocence pour justifier sa position. « Dans l’attente de la décision de justice définitive, chacun doit laisser la justice faire sereinement son travail, dans le respect de la présomption d’innocence », a-t-elle fait savoir dans un communiqué. « Il a fait appel » et « il nie les propos racistes » condamnés en première instance, a-t-elle souligné sur Sud Radio.
« Je ne suis pas raciste, a effectivement juré l’intéressé, lundi face aux journalistes. Depuis le premier jour, je le nie. J’ai réfuté ces accusations. Je suis un fédérateur. » Les deux anciens rugbymen agressés, Yannick Larguet et Nassim Arif, ont raconté à l’audience avoir entendu Bastien Chalureau leur lancer « Ça va les bougnoules ? » et d’autres « insultes racistes » avant de les agresser violemment. Le joueur de Toulouse a reconnu les violences, mais pas les propos tenus. Condamné à six mois de prison avec sursis, il a fait appel.
Suffisant, selon le gouvernement, pour mériter sa place au sein du XV de France. En visite au camp de base des Bleus, le président de la République s’est même fendu d’un conseil d’expert à Fabien Galthié, le sélectionneur national. « Il ne faut pas se laisser aller aux polémiques », a enjoint Emmanuel Macron, sur le ton d’une confidence toute relative puisqu’elle était filmée par plusieurs caméras et enregistrée par la presse.
Bernard Laporte aussi avait fait appel, et pourtant...
L’inertie des pouvoirs publics a de quoi surprendre, si on la compare à la célérité avec laquelle le gouvernement s’est positionné dans d’autres affaires. Le rugby français en sait quelque chose. Lorsque le président de la fédération, Bernard Laporte, a été condamné pour corruption fin 2022, la ministre a dégainé un communiqué cinglant pour l’appeler à se retirer. Malgré l’appel interjeté par le dirigeant de l’instance, Amélie Oudéa-Castéra a considéré à l’époque que « ce nouveau contexte [faisait] obstacle à ce que M. Laporte puisse, en l’état, poursuivre sa mission ».
L’avocat de Bernard Laporte avait dénoncé à l’époque une entorse grave à la présomption d’innocence. « Il [y] a le droit, mais d’un autre côté, l’extrême gravité des manquements retenus en première instance […] est incompatible avec la bonne gouvernance d’une fédération », assumait la ministre dans Ouest-France fin 2022. En janvier de l’année suivante, sur France Bleu, elle se vantait d’avoir « préservé l’éthique et l’intérêt supérieur du rugby » en poussant Bernard Laporte au départ, tout en essayant de « respecter la présomption d’innocence ».
Quelques mois plus tard, la gravité des manquements et l’éthique du rugby ne pèsent plus grand-chose face au caractère suspensif de l’appel, bien pratique pour évacuer le sujet. Cette fois, c’est « l’intérêt supérieur du rugby » qui compte, à savoir la nécessité de préserver l’équipe de France à quelques jours de « sa » Coupe du monde, organisée en France pour la deuxième fois de son histoire.
Philippe Saint-André, ancien sélectionneur du XV de France (2011-2015) et ancien entraîneur de Bastien Chalureau à Montpellier, a par exemple livré sur RMC un coup de gueule aux accents complotistes. « Ce qui m’énerve énormément, c’est le timing, a-t-il lancé. On essaie de déstabiliser l’équipe de France à cinq jours d’une Coupe du monde. On prend un coup de couteau de nos politiques à cinq jours d’une compétition. […] Là, on a besoin de faire bloc derrière l’équipe de France. »
Au milieu de ces accusations, la ministre des sports peine à cacher son embarras lorsqu’il s’agit de commenter l’affaire. Tout juste après avoir défendu son maintien en sélection, lundi sur Sud Radio, Amélie Oudéa-Castéra a ajouté, comme pour convaincre de sa cohérence sur le sujet : « J’ai aussi envie et besoin de rappeler que quand on porte le maillot d’une équipe de France, les valeurs d’égalité et de fraternité sont essentielles et impératives.[…] Il y a un enjeu d’exemplarité. »
Violences et racisme dans le sport, ces « fléaux » à combattre
Le même enjeu d’exemplarité avait d’ailleurs été avancé par la FFR pour évincer Mohamed Haouas, un autre international tricolore, après sa condamnation pour violences conjugales en mai 2023. Le vice-président de la fédération, Serge Simon, avait signé un communiqué d’une clarté limpide, dont la relecture prêterait presque à sourire aujourd’hui. « Être membre de l’équipe de France implique un respect irréprochable des valeurs de respect et d’intégrité, disait-il. La fermeté est notre devoir dans de telles circonstances. »
Des propos qu’aurait pu applaudir Amélie Oudéa-Castéra, elle-même très engagée sur le sujet. Elle a lancé cette année un plan de lutte contre les violences dans le sport et participé à l’élaboration du plan national de lutte contre le racisme et l’antisémitisme. De la haine raciale, elle parlait ces derniers mois comme d’un « fléau à l’opposé des valeurs du sport », contre lequel il faut « lutter sans relâche ». Début juillet, elle saluait la « révolution » du sport « pour ne plus laisser aucune prise à toutes ces formes d’incivilités et d’agissements violents ».
L’affaire pourrait continuer d’occuper le débat public à la veille de l’ouverture de la compétition : deux députés insoumis, François Piquemal et Thomas Portes, ont écrit au gouvernement pour dénoncer la convocation du deuxième-ligne. « Beaucoup d’acteurs du rugby commencent à sortir du silence, salue le premier auprès de Mediapart. Beaucoup m’ont écrit pour nous dire qu’on avait raison de lancer l’alerte. Il y a eu sept faits de racisme en 2023 autour du rugby en France. Trois internationaux français ont été la cible de propos racistes. Il y a un sujet. » L’entourage d’Amélie Oudéa-Castéra n’avait pas répondu, mardi soir, aux questions de Mediapart.
L’assassinat des moines de Tibhirine en Algérie en 1996 est une tragédie complexe et controversée. Cet événement tragique a eu longtemps des répercussions sur les relations entre la France et l’Algérie, ainsi que sur la mémoire collective des deux pays.
Les circonstances entourant leur mort n’ont toujours pas été entièrement élucidées, du moins celles alléguant la complicité des services algériens et les services français. Cela a contribué à une atmosphère de méfiance et de controverses qui depuis, entrave sérieusement le devoir mémoriel entre les deux pays. Différentes théories ont été avancées concernant les responsables de l’attaque qui a coûté la vie à sept moines trappistes français après avoir été enlevés de leur monastère à Tibhirine, en Algérie.
L’Armée algérienne ou l’Armée Nationale Populaire (ANP) et ses services secrets du Département de renseignement et de sécurité (DRS) dirigé par le général Mohamed Mediène, plus connu sous le nom de Toufik avait attribué la responsabilité de l’assassinat, notamment au Groupe islamiste armés (GIA) branche armée du FIS (Front Islamique du Salut). A cette époque (décennie noire), l’Algérie était en proie à une guerre civile des plus sanglantes entre le gouvernement et des groupes islamistes armés. Mais d’aucuns soutiennent fermement que l’armée algérienne est volontairement impliquée dans la mort des moines et ce, à la suite d’une opération de sauvetage mal planifiée et qui aurait tourné à une scène de tuerie généralisée.
Mais l’idée que les services secrets français et/ou algériens sont impliqués dans l’assassinat des moines de Tibhirine en Algérie ne figure guère dans le domaine de la théorie du complot. Les enquêtes officielles menées par les gouvernements algériens et français, ainsi que par d’autres organisations, n’ont pas réellement conduit à des conclusions définitives sur les responsables de l’assassinat, mais il n’y a pas de fumée sans feu.
Cela dit, le devoir mémoriel est un processus complexe et délicat, surtout lorsqu’il s’agit d’événements aussi douloureux et controversés. Cependant, lorsqu’ils sont ainsi tragiques comme l’assassinat des moines sont entourés de mystère et de soupçons, cela peut rendre difficile la construction d’un récit commun et la reconnaissance mutuelle de la tragédie. Ces allégations de complicité des services algériens dans l’assassinat des moines ont longtemps suscité des tensions et des dissensions entre les deux pays, ce qui peut rendre difficile la mise en place d’une commémoration conjointe pour parvenir à une compréhension mutuelle et à une réconciliation durable.
Et pourtant à l’occasion de la visite qu’Emmanuel Macon a effectué en Algérie qui c’est qu’on sort du chapeau ? Ce bon vieux général-major M’henna Djebbar (75 ans). Il est devenu depuis que Macron a visité l’Algérie le principal interlocuteur des services secrets français dans le cadre de la coopération bilatérale entre les deux pays. En France dans les services secrets on n’ose désormais plus jamais évoquer les moines trappistes.
Lorsque le général algérien leur demande d’extrader les opposants algériens exilés en France personne ne s’y s’oppose et les réseaux de services algériens agissent en toute impunité dans des tentatives d’enlèvement et d’assassinat d’opposants algériens dans l’Hexagone au nom d’un laxisme volontaire et bienveillant de la France.
Faut dire aussi que le général de division M’henna Djebbar à l’époque de l’enlèvement et l’assassinat des moines trappiste, était le commandant M’henna Djebbar, alors chef du Centre opérationnel principal de la 1ère région militaire. C’est lui qui avait ordonné l’opération de Tibhirine avec la suite que l’on sait. Il est aujourd’hui général de division, directeur général de la Documentation et de la Sécurité extérieure, non sans avoir été incarcéré en 2019 pour « enrichissement illicite.
Le 18 octobre 1980, cité de la Busserine, dans le nord de Marseille, Lahouari Ben Mohamed, dit « Houari », 17 ans, est tué par un CRS à l’issue d’un simple contrôle routier. Son petit frère Hassan, devenu policier, a enquêté sur sa mort. « L’Obs » l’a rencontré.
A la mort de « Houari », Hassan Ben Mohamed n’avait que 4 ans. « J’ai grandi en ne sachant pratiquement rien de l’histoire de mon frère », raconte-t-il, mi-juillet, au premier étage du centre social des Flamants, dans le nord de Marseille. Pour préserver leur petit dernier, ses parents, qui ont sept autres enfants, l’avaient envoyé quelque temps chez une tante à Nice. A son retour, personne ne lui parle de Lahouari. Jamais. Trop douloureux. Hassan sait seulement que son frère a été tué par un CRS. « Comment et pourquoi, je l’ignorais », précise cet homme de 46 ans, devenu lui-même, vingt ans après le drame, policier.
Une histoire singulière, personnelleet nationale, qu’est venue raviver la mort de Nahel, fin juin, tué par un policier lors d’un contrôle routier après un refus d’obtempérer à Nanterre. « Je me suis dit : “Mais c’est pas vrai, ça se répète !” s’exclame, à ses côtés, Mourad Bekkis, travailleur social et ami d’Hassan. Je me suis revu, du haut de mes 10 ans, sauter du bus et courir vers les Flamants. »
Ce dimanche 19 octobre 1980, c’est la fête de l’Aïd el-Kébir. Mais dans le quartier, tout le monde pleure. « C’était la première fois que je voyais cela, raconte cet homme de 52 ans, avec une émotion intacte. Comme s’il pleuvait des larmes. Pas un habitant ne pleurait pas, même mon grand-père, que je n’avais jamais vu pleurer. Ça m’a marqué à vie. »
La veille au soir, à la Busserine, au pied d’une des tours claires construites une dizaine d’années plus tôt pour accueillir près de 900 logements sociaux, Lahouari Ben Mohamed, 17 ans, dit « Houari », a été tué par un policier, au pistolet-mitrailleur, lors d’un banal contrôle routier.
L’abyssale douleur d’un quartier toujours traumatisé
A l’époque, entre son jeune âge et le silence de sa famille, Hassan ne prend pas la mesure du retentissement de ce drame. La mort de son frère sera un élément déclencheur de la Marche pour l’Egalité et contre le Racisme qui reliera trois ans plus tard Marseille à Paris. Adolescent, dans un livre d’école, il tombe sur la photo d’une personne brandissant le portrait de son frère lors d’une manifestation. Il se tait mais garde précieusement cette unique photo du disparu. Ce n’est qu’en 2010, lorsqu’un journaliste contacte sa famille, qu’il décide d’enquêter.
« Il en savait bien plus que moi sur l’histoire de mon propre frère », dit Hassan Ben Mohamed, qui en tirera un livre, « la Gâchette facile » (en collaboration avec Majid el Jarroudi, éd. Max Milo, octobre 2015).
" Mourad Bekkis et Hassan Ben Mohamed à Marseille, devant la plaque en mémoire de Lahouari, au centre social des Flamants. (CÉLINE RASTELLO)
Il contacte policiers, témoins et habitants, fouille dans les archives… Quatre ans de recherches qui le plongent dans l’abyssale douleur de ses proches et d’un quartier toujours traumatisé. Certains sont intarissables, d’autres ne peuvent en parler sans s’effondrer.
Deux policiers de la CRS 53, présents ce soir-là aux côtés de celui qui a tué Houari, acceptent de le rencontrer. « Trente-cinq ans après, il n’y avait aucune contradiction dans les déclarations des uns et des autres », souligne le Marseillais, qui parvient à reconstituer cette soirée où tout a basculé.
Samedi 18 octobre 1980. Après le dîner, Lahouari descend faire un tour. « Tu rentres avant 22 heures », lui lance sa mère, Fatma. En bas, il croise Zahir, le frère de son copain Djamel. Zahir a 19 ans, le permis et une Renault 12 rouge quasi neuve. Il embarque Houari et Djamel à l’arrière, son ami Cherif à l’avant. La nuit tombe. L’autoradio diffuse « Upside Down », le tube de Diana Ross.
Vers 21 heures, quatre CRS en mission de sécurisation en cette veille de l’Aïd les arrêtent. Vérifications des papiers du véhicule et du conducteur. Armé d’un pistolet-mitrailleur MAT 49, un CRS de 23 ans, plus nerveux que les autres, lance : « Attention les jeunes, je ne sais pas si c’est le froid, mais ce soir j’ai la gâchette facile ! »
Agité, il va jusqu’à fouiller la boîte à gants avec le canon de son arme. Puis Lahouari, qui n’a sur lui qu’un paquet de cartes à jouer. Tout est en règle. Zahir peut repartir. Mais, alors que les autres CRS s’éloignent, celui qui tient le pistolet-mitrailleur ouvre le feu sur Lahouari, toujours assis à l’arrière, et le tue de deux balles dans la tête, à bout portant.
« La France nous a trahis ! »
Le lendemain, le maire de Marseille, Gaston Defferre, sonne chez les Ben Mohamed. « Il nous avait promis que ce crime ne resterait pas impuni », expliquera plus tard Farida Ben Mohamed à son petit frère Hassan.
Inculpé pour « homicide involontaire » et placé sous mandat de dépôt, le CRS, révoqué de la police peu après, est d’abord jugé en mai 1983 devant le tribunal correctionnel de Marseille. Il varie dans ses déclarations, dit d’abord s’être senti en danger, puis assure que « le coup est parti tout seul ».
Il ne convainc pas la présidente, qui déclare son tribunal incompétent à juger « des tirs manifestement délibérés ». Direction les assises pour un « homicide volontaire ». Une victoire pour les Ben Mohamed et leur avocat marseillais, Gilbert Collard. Quatre ans plus tard, le 23 septembre 1987, le procès de l’ancien CRS, en liberté provisoire depuis six ans et demi, s’ouvre à Aix-en-Provence. La défense plaide l’accident.
L’avocat général aussi. « Malgré son rôle d’accusateur public, malgré les faits, malgré l’expertise psychiatrique, malgré les dépositions accablantes des collègues de Taillefer [le policier, NDLR], malgré les aveux même du criminel, [André Viangalli] défend la thèse de l’accident ! » écrit la journaliste Chantal de Rudder dans les colonnes du « Nouvel Observateur ». Selon lui, le CRS n’a pas voulu tirer.
Quand il requiert deux ans de prison, la mère de Houari et une de ses sœurs quittent l’audience en larmes. Dans la soirée, le verdict tombe : dix mois de prison dont quatre avec sursis. « La France nous a trahis ! » hurle la mère de Houari à la sortie. Impossible alors de faire appel d’un verdict de cour d’assises. C’est l’indignation.
« On a peur de comprendre qu’à Aix il était socialement difficile de condamner un policier français pour la mort d’un jeune Arabe », écrit dans « Libération » Laurent Joffrin, pour lequel « cette décision de justice est une parfaite injustice ».
Pour les Ben Mohamed, c’est la double peine. « Ma mère a toujours dit que mon frère était mort deux fois : le soir du contrôle et le soir du verdict », raconte Hassan, qui apprend bien plus tard que le policier, en sus, a été amnistié.
En 1986, Malik Oussekine
Agée de 87 ans, Fatma Ben Mohamed vit toujours aux Flamants. Dès le lendemain de la mort de Houari, elle était sur la Canebière avec d’autres mères. En 1987, elle se rend à Paris avec son mari pour dénoncer le matraquage à mort du jeune Malik Oussekine un an plus tôt par deux « voltigeurs » de la préfecture de police.
La mère de Lahouari (au centre) lors d’une manifestation à Marseille en octobre 1987, pour dénoncer la « trahison » de la justice. (YVES JEANMOUGIN/DONATION MINISTÈRE DE LA CULTURE, MPP)
« On pouvait se permettre, à l’époque, de tuer un Arabe en toute impunité, lâche Hassan. Mon frère s’inscrit malheureusement dans cette partie de l’histoire de la France. » Mais il est convaincu que la société a évolué.
« La même affaire serait traitée différemment aujourd’hui, j’y crois, assure-t-il. Et, même si les faits ne sont pas exactement les mêmes dans le cas du jeune Nahel, alors que le policier était mis en examen pour “homicide volontaire”, le ministre de l’Intérieur et le président ont assez rapidement marqué leur détachement. »
« J’ai grandi en pensant que les policiers étaient tous des racistes et qu’il ne fallait surtout pas que je m’en approche », poursuit-il. Il a ensuite changé d’avis : à la fin des années 1990, Hassan Ben Mohamed, d’abord chauffeur routier, est devenu policier (il est actuellement en disponibilité).
Arrivé d’Algérie en 1965, son père, Ahmed, ouvrier, voulait qu’il fasse son service militaire. Alors à sa mort, en 1998, Hassan s’y décide. C’est là qu’on lui parle des postes d’adjoint de sécurité (aujourd’hui appelés « policiers adjoints »).
« Devenir policier, je m’y suis d’abord refusé. Puis je me suis dit : “Pourquoi pas ? Peut-être que je peux faire changer un peu les mentalités.” Si, dans une patrouille, un policier n’est pas blanc, cela se passera sans doute différemment. Au pire, je prendrai la place d’un raciste. »
Reste à obtenir l’assentiment de sa mère, qui accuse le coup. « Elle en a parlé avec mes frères puis m’a dit : “Si tu veux, mais pas CRS.” » Ce sera le commissariat de la cité Félix-Pyat, dans le 3e arrondissement de Marseille, puis la BAC (brigade anti-criminalité) à Paris, avant un retour en commissariat, toujours dans la capitale, où il vit.
Longtemps, le policier Ben Mohamed ne révèle pas qui il est. Il tente une fois, quand il croise un ancien de la CRS 53 : « Ça l’a scotché, on n’en a plus parlé. » Quand il publie son livre, en 2015, il informe sa supérieure, qui, elle non plus, n’en revient pas. « Elle m’a lancé : “Et vous finissez dans la police ?” »
La rencontre avec l’ancien policier
Hassan Ben Mohamed décrit à ses proches, surpris, l’esprit de camaraderie et la solidarité des policiers, si semblables aux valeurs du quartier. « Finalement, de quoi est mort Lahouari ? conclut-il dans son livre. Du climat raciste de l’époque ? De l’héritage de la guerre d’Algérie et de la décolonisation ? De l’incompétence et de la haine d’un CRS 53 ? De la malchance ? » Lui n’a jamais utilisé son arme.
« Ouvrir le feu est la hantise de tout policier, on n’a qu’une fraction de seconde pour décider. »
Soumis à son devoir de réserve, il ne s’étend pas davantage sur son métier. Son enquête ne l’a pas laissé indemne, mais l’a « allégé d’un poids ».
Comment toutefois tourner la page sans contacter le CRS qui a tué son frère ? « Pour moi, il était le diable », dit Hassan, qui se décide finalement à l’appeler. L’ancien policier accepte immédiatement de le rencontrer. Un moment compliqué. D’emblée, l’homme refuse d’évoquer les faits, insiste sur le « cauchemar » que fut cette affaire pour sa famille et lui, se défend de tout acte raciste.
L’ancien CRS blêmit quand Hassan lui apprend ce que sa mère vient alors de lui avouer : le lendemain de la mort de Houari, deux inconnus se sont présentés chez ses parents. « Ils ont dit à mon père qu’ils avaient des contacts aux Baumettes et que, s’il le voulait, le CRS était mort. » « La justice fera son travail », leur répond Ahmed Ben Mohamed en refusant. « Je voulais qu’il sache que s’il était toujours vivant, c’était grâce à mon père. »
Après la mort de Nahel, un supermarché Aldi tout près des Flamants a été pillé puis incendié, un car et des Abribus ont été détruits. « A l’époque, je m’attendais à des émeutes, les politiques craignaient le pire, reprend Mourad Bekkis, l’ami d’Hassan. Mais pas du tout. Plusieurs amis de Houari avaient même eu cette réaction géniale de répondre par le théâtre, avec la pièce “Ya oulidi”, “Mon fils” en arabe, qu’ils avaient créée à l’ancien centre social des Flamants et jouée en mars 1981 au Théâtre du Merlan devant une salle comble. »
Trente ans plus tard, ceux qui y avaient participé l’ont rejouée, continuant ainsi à faire vivre la mémoire de Houari et du quartier. Son frère Hassan y veille particulièrement. Avec diverses actions puis l’association Flamants Rise, qu’il a ensuite créée, il organise notamment des rencontres avec des policiers.
« Les petits adorent », assure Hassan en montrant sur son téléphone des photos d’enfants essayant des casques. Elles ont lieu à côté de l’ancien stade de foot, détruit lors du projet de réhabilitation du quartier, et qui portait le nom de Houari. La plaque a été sauvée in extremis des débris. Hassan en a vite revissé une autre :
« A la mémoire de Lahouari Ben Mohamed, décédé le 18 octobre 1980. “Plus jamais ça !” »
Hassan aimerait que la rue qui passe devant prenne le nom de son frère. Et qu’on cesse, comme après la mort de Nahel, d’« opposer systématiquement deux camps » : « Peut-être pourrait-on proposer à des acteurs sociaux de patrouiller avec des policiers, dans certaines conditions, pour qu’ils comprennent mieux leurs problématiques, et vice versa ? » avance-t-il.
Il pense souvent à ce qu’ont enduré ses parents. Quand il s’est plongé dans le dossier judiciaire de son frère, y découvrir pour la première fois sa carte d’identité l’a bouleversé. Au lendemain de sa mort, leur père l’avait portée en main propre à l’hôtel de police : « Il leur avait dit : “Vous la vouliez, je crois.” Et la leur avait donnée. »
Attention, ce soir j’ai la gâchette facile ! » : en 1980, Lahouari, 17 ans, mourait tué par un policier
ARCHIVE. Dans cet article paru dans « le Nouvel Observateur » en 1987 et intitulé « Bavure : un meurtre sans assassin », le magazine revenait sur la mort, sept ans plus tôt, du jeune Lahouari Ben Mohamed, tué par un CRS, Jean-Paul Taillefer, lors d’un contrôle routier. La famille s’est battue pendant sept ans et attendait beaucoup de ce procès. Verdict : dix mois de prison dont quatre avec sursis, et une loi d’amnistie qui permettra au meurtrier de ressortir libre.
Devant les caméras avides, après l’énoncé du verdict de la cour d’assises d’Aix-en-Provence, elle a poussé un cri immense comme un appel au secours : « La France nous a trahis ! » Le 24 septembre, sept ans après l’assassinat de son fils Houari par un CRS excité [Jean-Paul Taillefer, NDLR], la justice refusait à Fatma Ben Mohamed l’apaisement qu’elle attendait avec une irréprochable patience. Sept ans d’un deuil impossible qu’une sentence inique rend impossible à jamais. Quelle mère au monde pourrait s’y résigner ?
Au cours d’un contrôle injustifié dans une cité marseillaise, Jean-Paul Taillefer éclate la tête de Houari d’une rafale de PM [pistolet-mitrailleur, NDLR] à bout portant. Parce qu’il était contrarié. Qu’il avait peur. Qu’il était nerveux. Qu’il possédait un flingue. Le véhicule dans lequel le jeune Ben Mohamed était assis venait pourtant de recevoir la permission de repartir. « Attention ! avait ricané l’homme à l’uniforme. Ce soir, j’ai la gâchette facile. » Le juge d’instruction concluait à un homicide involontaire par maladresse, imprudence et inobservation des règlements.
Un crétin, président d’une quelconque commission de sécurité, enfonçait le clou : « De toute façon, tout ça, c’est de la graine de voyou. » Aucun service de police n’avait jamais entendu parler d’aucun membre de la famille Ben Mohamed. Mais qu’importe ! Le meurtrier sortait de détention provisoire au bout de trois mois et l’affaire était portée au tribunal correctionnel entre une histoire d’assurances et un vol de Mobylette.
Pour les Ben Mohamed commencent alors sept ans de bataille. Leurs seules armes : le respect de la loi et la dignité. Leur seul appui : la cité des Flamants (un de ces ghettos marseillais des quartiers nord qui chatouillent la parano des « braves gens ») qui les porte à bout de bras. Ils réussissent à obtenir des magistrats du tribunal correctionnel qu’ils se déclarent incompétents pour juger Taillefer. Puis la cour d’appel d’Aix et la Cour de Cassation en font autant. Qu’un flic assassin soit traduit devant la cour d’assises pour le meurtre d’un Arabe – ce qu’on appelle ordinairement une bavure – dans cette région de France, ce n’est plus une évidence. C’est devenu une victoire de la démocratie !
« La vie de mon fils vaut moins que celle d’un chien »
Mais dans le prétoire l’avocat général décide qu’il faut tempérer cet égalitarisme qui ne correspond pas à la réalité sociale locale. Et malgré son rôle d’accusateur public, malgré les faits, malgré l’expertise psychiatrique, malgré les dépositions accablantes des collègues de Taillefer, malgré les aveux mêmes du criminel, il défend la thèse de l’accident ! Le jury accorde carrément les circonstances atténuantes : dix mois de prison dont quatre avec sursis pour Jean-Paul Taillefer, qui, bénéficiant d’une loi d’amnistie, est désormais entièrement libre de ses mouvements. « Maintenant, s’indigne Me Pons de Poli, représentante de la Ligue des Droits de l’Homme, nous savons qu’il y a deux catégories de Français : ceux qui sont protégés par le pouvoir et ceux qui ont le teint basané. »
Dans son HLM des Flamants, Fatma Ben Mohamed ne crie plus. Ne pleure plus. Son beau visage est immobile. Sa voix reste feutrée. Mais ses tempes et sa gorge battent la chamade : « Ce n’était pas un voyou… Il avait 17 ans… Je leur faisais confiance… Mais ils me l’ont tué une seconde fois… » Inlassablement, elle répète l’intolérable irruption du malheur. Dans la maison impeccablement tenue, les petits-enfants que les frères et sœurs de Houari lui ont donnés écoutent silencieusement leur grand-mère. Des voisins viennent l’assurer de leur sympathie. Des journalistes entrent et sortent. Le téléphone sonne sans arrêt. Mais inlassablement, Fatma répète à qui lui demande l’intolérable déni de justice :
« La vie de mon fils vaut moins que celle d’un chien… J’ai peur pour tous les jeunes qui ont la figure d’un Maghrébin… C’est pour ça que je ne me tairai jamais… Raconter le mal, la folie… »
Samedi dernier, Fatma la discrète, qui ne sortait d’ordinaire que pour aller faire ses courses, se place en tête de la manifestation qui arpente les trottoirs de la Canebière. Sans une larme, refusant les bras qui s’offrent pour la soutenir, elle marche pour l’exemple. Et elle exhibe son désespoir terrible et silencieux comme celui des mères de la place de Mai sur le bitume argentin. Sur sa robe, elle a accroché une cible.
Le combat par les voies légales
Pendant ce temps, les jeunes des quartiers nord distribuent des tracts et font signer des pétitions pour obtenir une révision du procès. Tant pis si Gilbert Collard, l’avocat des Ben Mohamed [élu député européen en 2019 après avoir rejoint le Front national en 2017, et avant de rejoindre Eric Zemmour en 2022], leur répète depuis plusieurs jours qu’elle est légalement impossible. Vox populi, vox Dei. Ils ne veulent pas l’accepter. « Il faut continuer, s’exclame naïvement Messaoud, 21 ans et l’accent de Pagnol. Il se peut que la justice se rattrape… Ça m’angoisse, ce mort qui n’a pas droit à un assassin. Dire que personne n’a tué Houari, c’est comme dire que tout le monde était d’accord pour qu’il meure ! C’est l’intégration des beurs qu’on assassine. »
Aidés par SOS-Racisme et Me Collard, les jeunes préparent un livre noir de l’instruction. « Pour démonter mécanisme par mécanisme tous les rouages de ce simulacre de justice. » Pas une soirée sans réunion dans le centre social des Flamants : « Faut empêcher l’oubli », décrète Djamel. De nombreuses associations ont rejoint le comité de soutien à la famille Ben Mohamed. Drifa, 30 ans, la sœur de Houari, relève la tête à nouveau après le choc du verdict : « Je renvoyais tout le monde dos à dos. Et puis, j’ai lu la presse. Les journalistes n’avaient pas le droit de critiquer une décision de justice. Et pourtant, ils l’ont fait ! Même “le Quotidien de Paris”… » Drifa ne renonce pas à la démocratie : « Je suis bien placée pour savoir que la violence est la pire des solutions. » Et le combat continue par les voies légales…
Le 18 octobre, septième anniversaire de la mort de Houari, Me Gilbert Collard déposera une plainte contre l’Etat français au nom de la famille Ben Mohamed. « L’Etat, déclare le jeune avocat, doit assumer sa part de responsabilité dans la manière dont il forme ses fonctionnaires. C’est pourquoi nous engageons une action en responsabilité civile contre lui. »
Même si l’on accepte la thèse du « regrettable accident » défendue par le parquet, le ministère de l’Intérieur devra quand même répondre de ses critères de recrutement. Qui a-t-il engagé pour veiller sur notre sécurité ? A qui a-t-il confié le privilège exorbitant de porter un fusil-mitrailleur et de représenter l’autorité ? A « un grand émotif et un grand immature… incapable de maîtriser son agressivité dans une situation délicate… qui n’aurait jamais dû être CRS ». Telles sont les conclusions présentées par l’expert-psychiatre au cours du procès d’Aix. Comment s’est défendu Jean-Paul Taillefer ? En imputant la cause du drame à son inexpérience : « Je n’avais tiré que deux fois avec ce type d’arme au cours de mon stage chez les CRS. », affirmait-il pendant l’audience. Incompétent et incapable. Combien de Taillefer la police compte-t-elle encore dans ses rangs ?
En Algérie, après deux mois de sécheresse, des pluies diluviennes se sont abattues sur le nord du pays fin mai et début juin, mais trop tard pour espérer sauver la récolte de blé. Les services agricoles de l’État manquent d’imagination pour revoir la stratégie de production céréalière.
En Algérie, les incendies ne sont pas les seuls effets du réchauffement climatique. À la mi-mai, après deux mois de sécheresse, des pluies diluviennes se sont abattues sur le nord du pays. Des pluies trop tardives pour espérer sauver la récolte de blé. Les services agricoles restent incapables de revisiter le dry-farming (aridoculture)1. Aussi assiste-t-on à une fuite en avant, comme semer un million d’hectares de blé en plein désert.
Traditionnellement c’est l’ouest du pays qui est touché par le manque de pluie, mais cette année c’est l’ensemble des régions céréalières qui sont concernées. L’année avait pourtant bien commencé, et à la sortie de l’hiver les pouvoirs publics pensaient possible de dépasser largement la moyenne nationale de 17 quintaux à l’hectare. « On dispose de 3 millions d’hectares destinés à la production de céréales. Multipliés par une moyenne de production de 30 quintaux l’hectare cela donne 9 millions de tonnes », avait déclaré fin 2022 le président algérien. De quoi s’affranchir des importations. Le manque de pluie aura réduit à néant ces espoirs.
« IRRIGUEZ VOS PARCELLES ! »
Aussi, la priorité a-t-elle été accordée à la production de semences, avec un recours massif à l’irrigation. Mais le manque d’eau est tel que les villes du littoral doivent leur approvisionnement à quatorze usines de dessalement d’eau de mer. Face au tarissement de nombreux puits, des autorisations de forage profond ont été accordées. Le président algérien a déploré les chiffres de l’administration2 : « La superficie des terres cultivées à travers le pays [a été] évaluée, alors, à 3 millions d’hectares, mais les enquêtes menées dans le cadre de la numérisation ont démontré que ce chiffre ne dépassait pas 1,8 million d’hectares ».
Malgré les réserves de productivité des régions céréalières du nord, les espoirs se tournent vers les sables du Sahara où est prévue la mise en valeur d’un million d’hectares3. En 2022, à plus de 1 500 km au sud d’Alger, les régions d’Adrar et de Menéa ont produit près de 2 millions de quintaux de céréales sur les 42 millions de quintaux produits au niveau national. Des céréales produites sous d’immenses rampes pivots. Face à la sécheresse au nord, début mai l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) a envoyé une armada de camions et de moissonneuses-batteuses vers le sud avec le mot d’ordre de récolter le moindre grain. Le sud aura assuré les semences des prochains semis du nord mais au prix de subventions publiques et d’une forte consommation d’eau.
Les autorités clament qu’au Sahara l’eau ne manque pas, avec les 50 milliards de m3 estimés de la nappe albienne. Une eau fossile qui ne se régénère que très peu4. À Menéa, s’il y a vingt ans l’eau affleurait en surface, elle se trouve aujourd’hui à 30 mètres de profondeur.
Un office de développement de l’agriculture saharienne est chargé de l’attribution de concessions agricoles. Alléchés par l’accès à la terre et de généreuses subventions, les candidats se pressent pour tenter l’aventure.
DES SERVICES AGRICOLES AUX IDÉES COURTES
Au nord, suite à la sécheresse, des agriculteurs n’ont rien récolté et n’ont pas les moyens de réensemencer leurs champs ; aussi demandent-ils que l’État efface leurs dettes. Les services agricoles sont en panne d’idées. Ils tardent à reconsidérer les techniques de culture et s’accrochent à un mode d’encadrement administratif des fellahs. Les semis se font avec un mois de retard. Le semis direct représente une alternative. Il permet de mieux valoriser l’humidité du sol et concilie rapidité d’exécution, réduction des charges de mécanisation et assure un minimum de récolte même en cas d’année sèche. De quoi permettre à l’agriculteur de rentrer dans ses frais et relancer un nouveau cycle de culture la saison suivante. C’est l’OAIC qui détient le monopole de la collecte des céréales, aussi les minoteries se trouvent-elles coupées des agriculteurs. Depuis quarante ans, les experts français et australiens de passage à Alger plaident pour une agriculture de conservation, mais les services agricoles restent sourds et préfèrent miser sur la seule utilisation de variétés nouvelles et d’engrais. Il est ainsi question de transférer une partie de l’eau de la nappe saharienne vers les zones céréalières situées à 1000 km du nord.
LA PAILLE POUR LE MOUTON DE L’AÏD
Les pratiques actuelles correspondent à une agriculture minière sans restitution des pailles au sol, seul moyen d’améliorer sa fertilité et d’emmagasiner plus d’eau. Pour les agriculteurs, élever le plus grand nombre de moutons pour la fête de l’Aïd est prioritaire, et le moindre brin de paille leur est réservé. Malgré le relèvement à 6 000 dinars (DA, soit 40,54 euros) le quintal de blé acheté par l’OAIC, l’élevage du mouton reste plus rémunérateur. L’orge est massivement utilisé pour l’engraissement des agneaux, et sur le marché libre il atteint jusqu’à 7 000 DA (47,30 euros) le quintal.
Une partie du blé meunier importé est détourné. Des minoteries trouvent plus avantageux de le vendre à 3 500 DA (23,65 euros) le quintal au lieu de le céder à prix réglementé à 2 200 DA (14,87 euros) sous forme de farine aux boulangers. Le prix des issues de meuneries est en partie libre, aussi des minoteries n’hésitent pas à frauder sur le taux d’extraction de la farine en le réduisant à sa plus simple expression. Un moyen qui leur permet de disposer d’un plus grand volume d’issues de meunerie vendues aux éleveurs. Leur prix au quintal a plus que doublé et a atteint 5 000 DA (33,79 euros) le quintal.
Aujourd’hui, l’Algérie s’intéresse aux blés de la mer Noire. Un programme de renforcement des capacités de stockage des céréales vise à assurer la consommation locale au-delà de six mois, la durée estimée des « stocks stratégiques » du pays.
L’attractivité de l’élevage du mouton et le mirage de la céréaliculture saharienne ont jusqu’ici été les fossoyeurs du développement de la culture du blé au nord du pays. La sécheresse actuelle pourrait être l’occasion de revoir la stratégie céréalière.
Les éditions Tafat, à leur tête le jeune écrivain Tarik Djerroud, ne cessent d’enrichir la scène éditoriale algérienne par des livres très intéressants qui prospectent l’actualité ainsi que l’histoire contemporaine de notre pays.
Au mois de juillet dernier, un opus intitulé « Sartre et l’Algérie » de l’auteur Kamal Guerroua vient de voir le jour. C’est un travail d’orfèvre jusque-là inédit en Algérie. Le défi est immense : revenir sur l’épopée du philosophe existentialiste et de son rapport engagé avec l’Algérie d’alors en révolution contre l’une des grandes puissances coloniales du XXe siècle.
L’essayiste Salah Guemriche qui a préfacé l’ouvrage signale en incipit que l’essai de Kamal Guerroua est unique en son genre et qu’il réalise un focus particulier sur l’engagement anticolonial de l’auteur de L’Être et le Néant. L’arrivée de ce nouveau-né sur le marché du livre est, sans doute, une aubaine pour l’immersion de la nouvelle génération et du public intéressé dans les convulsions de la IVe et de la Ve République, en guerre contre les Indigènes-la qualification des Algériens à l’époque, révoltés. Par-delà cette dimension-là, c’est une sorte d’hommage amplement mérité au philosophe germanopratin.
Dans l’introduction, Kamal Guerroua met longuement l’accent sur l’apport de Sartre à l’Algérie combattante et l’oubli dont il est victime, que ce soit en France ou en Algérie. « Il n’est nullement, précise-t-il en page 17, dans mon intention de porter Sartre au pinacle ni de mythifier son combat philosophique, médiatique ou politique engagé, mais seulement de lui rendre justice ».
Rendre justice à Sartre, c’est, paraît-il, le but avoué de l’écrivain-journaliste. Jean-Paul Sartre demeure, pour lui, une personnalité très peu connue par les Algériens et cela pose problème, toujours d’après lui, à la connaissance de notre mémoire collective.
Tout au long des quatorze chapitres de cet essai de 240 pages, du reste bien denses et référencées, K. Guerroua revient sur les principales escales du parcours sartrien : le Congrès de la salle Wagram en 1956, le Manifeste des 121, Francis Jeanson et les Porteurs de valises, la question de la torture notamment avec les affaires Audin et Alleg, les manifestations du 17 octobre 1961 et le rôle éminemment important qu’avait joué Sartre dans la prise de conscience des Français du gouffre dans lequel les a mené la politique va-t-en-guerre socialiste, puis gaulliste, etc.
En ce sens, la vie du philosophe est piochée avec soin et parfois dans le moindre des détails. On sent, au fil de la lecture, comme une sorte de fusion dans la narration, dans la mesure où, dans certains chapitres où il y a comparaison entre Sartre et bien d’autres intellectuels de la IVe et de la Ve République, à l’image de Camus, Raymond Aron, André Malraux, et tant d’autres, Guerroua met en relief de façon particulière l’influence de la pensée de Sartre : existentialisme, approche sur la violence révolutionnaire, la praxis marxiste, etc.
Et puis, tout un chapitre est réservé à Frantz Fanon, sur le mode comparatif avec le philosophe existentialiste. Logique qui, en parallèle, creuse, mais d’une autre manière, toute la différence entre la pensée sartrienne et camusienne, bien discutée auparavant. Sartre qui fut, pour rappel, un indépendantiste convaincu a privilégié l’usage de la contre-violence révolutionnaire du FLN à l’encontre de la violence des Colons.
« Le déni en demi-teinte de Camus du fait colonial, sinon son refus d’engagement avait donné, dixit K. Guerroua en page 100, à la gauche, en général, et à Sartre en particulier, un avant-goût d’ersatz de la trahison des idéaux républicains de la France de la résistance sous le régime du Vichy ». Ce qui lui a coûté l’adversité du milieu intellectuel parisien et du gouvernement français. Si, au cri de « fusillez Sartre » prononcé par les Colons, de Gaulle a opposé en 1961 : « on ne tue pas Voltaire », il n’en demeure pas moins que l’aversion de l’élite hexagonale du philosophe était autrement très forte et elle est due, en grande partie, à son soutien à l’Algérie.
Toutefois, ce qui étonne l’auteur Kamal Guerroua, c’est l’oubli algérien. Un oubli incompréhensible, ambigu, ingrat! « Mais osons quelques questions, finit ce dernier dans sa conclusion en page 192, sur notre oubli, nos oublis, nos ingratitudes à l’égard de notre mémoire collective. Parlons-en entre Algériens, en toute honnêteté, avec sérénité! La première des questions que je me pose, à moi-même, et que je voudrais poser aux miens : pourquoi a-t-on oublié Sartre? »
Dans la foulée, l’auteur cite le problème palestinien dans lequel la position de Sartre était un peu ambigüe. Ce qui aurait pu susciter peut-être, à l’en croire, tout le ressentiment officiel de l’Algérie indépendante qu’on connaît à l’égard de tout ce qui est en rapport avec Jean-Paul Sartre.
En revanche, en remontant le fil des événements, Kamal Guerroua a comme éclairé, avec des références appuyées, sur la cohérence de la pensée sartrienne sur beaucoup de sujets, dont la résistance palestinienne soutenue aussi avec force par le philosophe. Ainsi incite-t-il les Algériens à redécouvrir cette icône mondiale pour qui l’anticolonialisme n’est, en fin de compte qu’un humanisme, en proposant de baptiser en son nom écoles, jardins, métros et théâtres, rues et boulevards, etc. En gros, Sartre et l’Algérie est une mine d’or à ne pas rater, décidément…
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