es cadres algériens sont partout à travers la planète et rendent d’énormes services aux pays qui les accueillent. Le cas de Karim Zaghib, un Algérien installé au Québec, est emblématique.
Outre son apport dans le domaine académique et de la recherche, cet ingénieur est derrière l’ouverture d’une grande usine qui apporte à la province canadienne 7 milliards de dollars d’investissements et 3.000 emplois.
Karim Zaghib, électro-chimiste et ingénieur des matériaux, est né en 1963 à Constantine. Avant d’atterrir au Canada, il a fait un passage par la France où il a obtenu un DEA 1987 puis un doctorat en électrochimie à l’université de Grenoble, et plus tard, en 2002, une habilitation de physique à l’université Pierre et Marie Curie de Paris.
En 1992, il a travaillé pour le gouvernement japonais puis, dès 1995, avec l’entreprise Hydro-Québec. Depuis, il a multiplié les postes dans l’enseignement et la recherche dans ce pays, jusqu’à être nommé en 2023 PDG de l’initiative de recherche « Electrifying Society » de l’Université Concordia, soutenue à hauteur de 123 millions de dollars par le gouvernement canadien.
Aujourd’hui, le chercheur d’origine algérienne est considéré comme l’un des plus éminents spécialistes au monde des batteries et du stockage de l’énergie.
Au Québec, il a apporté son savoir-faire dans le domaine. Visionnaire, il a compris dès le début que le pays pouvait se faire une place dans l’industrie mondiale des batteries.
En octobre 2020, il partageait sa vision dans un entretien au journal local La Presse. Il disait que le Québec pouvait émerger comme un acteur significatif dans cette industrie et se positionner avec les géants de ce secteur que sont la Corée du Sud, le Japon, les États-Unis et bien sûr la Chine.
Karim Zaghib à l’origine d’un important projet au Québec
« J’imaginais également qu’une usine de cellules au lithium-ion verrait le jour dans notre belle province d’ici trois ans », a-t-il écrit cette semaine sur les réseaux sociaux. S’il est revenu sur le sujet, c’est parce qu’il a vu juste et le projet a abouti.
Il raconte que pendant la même année 2020, et alors qu’il était conseiller à Investissement Québec, il a soumis le projet au PDG de la firme suédoise Northvolt, Peter Carlsson, un ancien de Tesla.
L’Algéro-canadien lui a proposé d’ouvrir au Québec une usine de cellules vertes, en lui égrenant les multiples avantages qu’offre la province francophone : soutien des institutions, un écosystème propice au développement de l’industrie des batteries, une énergie verte (hydro-électrique), et un « formidable capital humain », fait d’ingénieurs, techniciens, chercheurs et opérateurs.
« Aujourd’hui, trois ans après, cette proposition est devenue réalité », se félicite Karim Zaghib. « 7 milliards de dollars d’investissements et 3.000 emplois. C’est historique pour notre province », ajoute-t-il.
Le lancement officiel de l’usine de Northvolt a été fait par le Premier ministre du Canada, Justin Trudeau, le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne et celui de l’Économie, Pierre Fitzgibbon. Au cours de la cérémonie, le chercheur d’origine algérienne a été honoré par les responsables pour sa contribution et par l’assistante qui l’a longuement applaudi.
Rescapés palestiniens à Gaza après une frappe de l'armée terroriste israélienne. D. R.
L’occupation du territoire palestinien par Israël dure depuis 1947. Et, pendant tout ce temps-là, les Palestiniens ont souffert le martyre et n’ont connu que la tyrannie, la barbarie, l’humiliation, l’expropriation de leur terre et toutes sortes d’agressions exercées par un Etat hors-la-loi, qui a toujours affiché publiquement son mépris du droit international. Un Etat hors-la-loi aidé et protégé par les Etats-Unis et leurs vassaux européens, qui ont toujours érigé la sécurité d’Israël en priorité absolue, entraînant dans leur sillage de nombreux pays arabes dirigés par des hommes sans honneur et sans dignité, tous adeptes du suivisme et de l’aplaventrisme.
Cet Etat voyou a donc toujours fait la loi sur les territoires occupés et au Moyen-Orient, et a bravé la communauté internationale à plusieurs reprises en toute impunité. Il a toujours incarné l’horreur dans toute sa splendeur. Les crimes horribles qu’il a commis dans un passé récent à Gaza contre la population civile, femmes et enfants y compris, qualifiés par feu Fidel Castro de «macabre génocide et de nouvelle et répugnante forme de fascisme», ne sont pas près d’être oubliés. Au nom de ce soi-disant droit de se défendre, l’entité sioniste a commis les pires exactions et les crimes de guerre les plus abjects sur le territoire palestinien.
La guerre qui se déroule présentement n’est pas finie et sera dramatique, surtout pour les populations civiles, dans les deux camps.
Cet Etat voyou qui dispose de tous les moyens ultrasophistiqués et ultramodernes, et possède une machine de guerre infernale et redoutable, va faire beaucoup de mal. Muni d’un pareil dispositif perfectionné à l’extrême, d’une technologie hors pair et d’un potentiel de défense immense, il frappera sans pitié. Il l’a déclaré publiquement. Personne n’ignore l’écrasant rapport de force entre les Israéliens et les Palestiniens. Il est difficile de ne pas pouvoir imaginer le futur bain de sang.
La guerre va donc se poursuivre en Palestine, avec son cortège de victimes civiles et militaires, menée par un bourreau qui semble ne voir qu’une opération «antiterroriste» sous l’œil bienveillant des Etats-Unis , de leurs vassaux européens et des valets arabes. Cette opération sanguinaire s’inscrit dans un schéma bien huilé – à savoir la destruction totale de toute forme de résistance –, qui ne s’embarrasse guère du respect du droit humain, comme l’a déclaré son innommable dirigeant. On peut se demander ce qui pousse cet Occident arrogant et injuste, qui se proclame haut et fort humaniste, à se focaliser uniquement sur l’attaque du Hamas et à fermer les yeux sur les crimes abominables commis par l’entité sioniste.
Par ailleurs, le quatrième pouvoir va se mettre en branle. On sait, depuis l’affaire du président roumain, Ceausescu, et le prétendu charnier de Timisoara, que cette presse est très puissante et combien elle peut faire sortir les faits de leur contexte et les jeter à l’opinion publique afin de discréditer les Palestiniens. Nous vivons dans un univers de science-fiction, plein d’impostures, de tromperies, de mensonges, de supercheries. La Russie, entre autres, continue à faire les frais de cette campagne de presse orchestrée par les médias occidentaux.
Et les pays arabes, dans tout cela ? «Sagesse et modération», prônent-ils ! Des mots creux qui ne veulent rien dire. Modération pour qui et sagesse pourquoi, quand Gaza est assiégée et que toute sa population est prise en otage ? Personne ne nie que toutes les démarches en faveur d’une paix négociée est à encourager. Mais, présentement, il faut se rendre à l’évidence : l’Etat voyou est décidé à en finir avec les Palestiniens, son objectif est bien précis : la vengeance à n’importe quel prix ! Haro sur le baudet !
En tout état de cause, quelle que soit l’issue de la riposte sioniste aussi condamnable soit elle, les Palestiniens ont pu mettre à nu au moins quatre vérités flagrantes.
1) Les Palestiniens ont réussi à démystifier la soi-disant invulnérabilité de l’armée de Tsahal, du Mossad et de la CIA, mythe nourri par l’entité sioniste, l’Occident et certains pays arabes. Une légende factice qui s’est avérée dénuée de tout fondement et complètement ridicule. Entre le mythe et la réalité, il y a un fossé immense.
2) Les conventions internationales sont une fiction. Le droit et la légalité internationale sont dressés comme un épouvantail et comme une épée de Damoclès uniquement au-dessus d’une catégorie de pays, tels que la Russie, la Palestine, la Chine et les pays du tiers-monde. Les Américains, les Européens et l’entité sioniste ne sont pas concernés. On connaît tous les crimes qu’ils ont commis à travers le monde et particulièrement en Algérie, au Vietnam, au Japon, au Yémen, en Libye, pour ne citer que ceux-là. Les victimes civiles de ces pays soi-disant humanitaires se comptent par millions.
3) L’hypocrisie des pays arabes. On s’est étonné de l’ambiguïté de la position officielle de leurs dirigeants et, surtout, de leur mutisme et leur effacement. Il est vrai que ces pays sont, depuis longtemps, disqualifiés et ne jouissent d’aucune assise populaire. Vivant sous le diktat de leurs maîtres, ils sont convaincus de leur «sagesse» et de leur «modération», n’éprouvant aucune honte à se soumettre aux desiderata de leurs parrains. Ils ne cherchent qu’à se maintenir au pouvoir. Des dirigeants sans scrupule, obsédés par l’argent. Leur silence et l’absence de réaction de leur part ne font que confirmer la ligne politique suivie par ces dirigeants qui, se maintenant à coups de slogans creux et surannés, et qui consiste en un immense aveu d’impuissance.
4) Le quatrième pouvoir, celui de la presse téléguidée, excelle dans l’art de déformer l’information pour manipuler l’opinion.
Il est difficile de retenir son émotion devant les nombreuses victimes civiles innocentes, quelle que soit leur origine. Des victimes innocentes qui n’aspiraient qu’à vivre en paix.
Devant cette guerre atroce – qui aurait pu être évitée si les accords d’Oslo n’avaient pas été sabordés et qui a été imposée par ceux dont l’intérêt passe avant la paix et qui, in fine, n’a fait que déshonorer ceux qui règnent en maîtres absolus sur la planète –, il est urgent de revenir à la raison et d’œuvrer pour rétablir la paix partout dans le monde.
La parade militaire organisée par l’Égypte pour célébrer le cinquantième anniversaire de la guerre d’octobre 1973, qui a opposé l’armée égyptienne à l’occupation israélienne de la Palestine, revêt une importance particulière cette année. Alors que le monde assiste à une agression généralisée menée par les forces israéliennes contre les Palestiniens, l’Égypte rend hommage à sa victoire historique.
Un Hommage à une Victoire Historique
Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a présidé une parade militaire impressionnante pour marquer le cinquantième anniversaire de cette guerre mémorable. La parade a été le théâtre de vols de chasse spectaculaires, mettant en scène des avions de combat de 4e génération, notamment des F-16, et des avions Mirage 2000, ainsi que des avions de combat polyvalents.
Mais au-delà de la démonstration de puissance militaire, cette parade symbolique a permis au président al-Sissi de rendre hommage aux drapeaux des pays arabes qui ont participé à la guerre d’octobre, contribuant ainsi à la libération de la péninsule du Sinaï de l’occupation israélienne. Parmi ces pays, l’Algérie occupe une place particulière en tant que nation solidaire dans ce conflit.
Un Cinquantième Anniversaire à un Moment Crucial
Le cinquantième anniversaire de la guerre d’octobre 1973 coïncide malheureusement avec une nouvelle vague d’agression menée par les forces israéliennes contre les Palestiniens. Cette agression a été déclenchée par l’opération « Déluge d’Al-Aqsa » menée par la résistance palestinienne. Les images des destructions et des violences à Gaza et en Cisjordanie choquent le monde, rappelant la nécessité de trouver des solutions pour mettre fin à ces conflits longtemps enlisés.
L’Égypte, en tant que pays qui a lutté pour sa propre libération et pour celle de la Palestine, continue de jouer un rôle clé dans les efforts pour parvenir à une paix durable au Moyen-Orient. Les événements actuels soulignent la complexité de la situation, mais l’anniversaire de la guerre d’octobre rappelle que l’espoir de la paix et de la justice demeure.
La manifestation du jour, souligne son président Abdennacer Naït-Liman, «a pour objet de rappeler aux oppresseurs israéliens qu’ils sont tenus, eux aussi, de respecter les principes de la Charte des Nations unies.» L’événement intervient alors que plusieurs pays d’Europe serrent la vis aux démonstrations de soutien à la Palestine, jugés «susceptibles de générer des troubles à l’ordre public».
«N’importe quel peuple se rebellerait dans ces conditions»
L’air résigné, Rachid Houchen, Genevois originaire d’Algérie, se gratte le front. «Ça fait des décennies que ça dure, dit-il. On grignote le territoire palestinien. Les traités internationaux sont ignorés. C’est l’habituel deux poids deux mesures. On n’en peut plus. On est venus pour défendre la cause palestinienne.»
Derrière lui, un autre homme déambule avec une pancarte portant cette question: «Quand viendra le jour où les sionistes seront jugés comme des nazis?» En attendant les premiers discours, de la musique orientale s’enclenche dans les haut-parleurs. Hania, la vingtaine, n’est pas non plus Palestinienne, dit-elle, «mais Libyenne». Toutefois, elle précise partager le fardeau palestinien. «Il est temps que l’occupation israélienne prenne fin, dit-elle. Il est décevant de voir les Ukrainiens fêtés comme des héros qui résistent à l’envahisseur alors que tous les Palestiniens sont mis dans le sac des terroristes. N’importe quel peuple se rebellerait dans ces conditions.»
Qualifier le Hamas de «terroriste»?
A la question qui occupe la politique suisse de savoir si le Hamas doit désormais être labellisé «organisation terroriste», la réponse est toujours la même. «Et les Israéliens? Ce ne sont pas aussi des terroristes?»
De l’autre côté de la rue, une dizaine de policiers surveille la situation, alors qu’Hani Ramadan, frère de Tariq, prend le micro: «Comment en est-on venu au sein des gouvernements occidentaux à soutenir une armée qui massacre des civils par milliers? demande le prédicateur. Et cela, depuis des décennies. Comment criminaliser une résistance légitime? Comment passer sous silence la colonisation sioniste au mépris du droit international? Les maisons de Jérusalem-Est qui sont détruites? Et personne ne dit rien. Gaza, qui est une prison à ciel ouvert, soumise à un blocus inhumain. Et personne ne réagit. Nous déplorons que le sang soit versé de part et d’autre, mais les premiers responsables sont les colonisateurs. Et pas les colonisés.»
Un message de Gaza
Envoyé depuis Gaza, le message vocal d’un résident enregistré avant que son téléphone ne s’éteigne faute d’électricité disponible fait état d’une situation «génocidaire». Dans la foule, les participants hochent la tête. «Au moins, dit Abdennacer Naït-Liman, ici nous pouvons nous exprimer. Je remercie la police et la ville de Genève. Dieu merci, nous sommes en Suisse!»
Des interdictions de Zurich à Berlin, en passant par la France
En fin de journée, Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur français, ordonnait en effet l’interdiction des manifestations pro-palestiniennes «parce qu’elles sont susceptibles de générer des troubles à l’ordre public», ajoutant que «leur organisation devait donner lieu à des interpellations».
La ville de Berlin interdisait également une manifestation pro-palestinienne ce jeudi, tandis que l’Université de Zurich et l’EPFZ annonçaient aussi «ne pas tolérer» un rassemblement prévu sur le site intitulé «Solidarité avec la Palestine – Intifada jusqu’à la victoire».
Le gouvernement israélien - et le massacre qu’il perpétue depuis 1948 - est bien l’ennemi réel, le criminel. Mais l’assimilation d'une population tout entière à son gouvernement, à son identité ethnique, est une pensée meurtrière. La déshumanisation au nom d'une ethnicité appartient à l’extrême droite. Le Hamas montre un visage de terreur et de haine. Il désolidarise, quand la solidarité envers le peuple palestinien est plus que jamais nécessaire ; le Hamas fait fi des vies en jeu, même de celles de son propre peuple.
Le gouvernement israélien est une entité mortifère, une puissance coloniale et impérialiste sans vergogne qui commet au quotidien, et ce, depuis 75 ans des crimes de guerre atroces. Qui tue, humilie et emprisonne arbitrairement enfants et civils dont le seul crime est d’oser être Palestinien. La nausée à chaque exaction du gouvernement, de son armée et de ses fanatiques. La rage et le deuil à chaque mort palestinienne.
Le gouvernement israélien et le massacre qu’il perpétue depuis 1948 est bien l’ennemi réel, le criminel - c’est donc lui qu’il faut détruire. LE GOUVERNEMENT ISRAÉLIEN.
Maintenant, la nausée me prend à nouveau. L’assimilation d’une population entière, au sein de laquelle, lutte de classes, discriminations raciales, divergences politiques existent bel et bien comme dans chaque pays du monde, l’assimilation de cette population toute entière à son gouvernement, à son identité ethnique, est une pensée fasciste, délétère et meurtrière. C’est un discours d’extrême droite dégoulinant de haine et de bêtise.
Célébrer le meurtre et le viol de jeunes à peine pubères, les qualifier de colons, comme si ce statut justifiait toutes les horreurs et transformait leurs bourreaux en héros, est d’une violence inouïe. L’incohérence est absolue. Ne peut se prétendre de gauche celui qui essentialise, celui qui défend le meurtre de sang-froid. La déshumanisation d’une population au nom de sa nationalité ou de son ethnicité appartient à l’extrême droite.
La tactique du Hamas est incompréhensible, ils se savent démunis face à la puissance militaire de l’État hébreu. La seule interprétation plausible à ce jour est que, à la veille de la normalisation des relations entre Israël et l’Arabie-Saoudite, le Hamas, en désespoir de cause, lance une mission suicide, sachant pertinemment que la réponse sera d’une violence démesurée (le gouvernement actuel est le plus radical et violent que le pays ai connu depuis 30 ans, affichant de manière assumée une volonté de rayer la Palestine de la carte pour de bon.). C’est cette violence qui permettra au Hamas de regagner des soutiens au sein du monde arabe et pourrait empêcher les accords entre Israël et L’Arabie-Saoudite d’advenir. C’est donc une attaque suicide, mais dont les suicidés sont les civils Gazaouis. Gazaouis qui depuis 16 ans subissent un blocus invivable et dont la misère déjà incommensurable ne va qu’en s’élargissant (le désert ne peut plus croître ?). Le Hamas fait fi des vies en jeu, même de celles de son propre peuple.
La révolution ainsi que la libération palestinienne sont nécessaires, et non pas de manière abstraite. Oui, la guerre, c’est sale, oui il y a du sang, des injustices, des “dommages collatéraux” AKA la mort d’innocents. Mais le Hamas joue mal. Il dessert la cause palestinienne, montrant un visage de terreur et de haine à la communauté internationale. Il désolidarise quand la solidarité envers le peuple palestinien est plus que jamais nécessaire. C’est l’enfer tout bonnement qui attend les Gazaouis cette semaine.
La lutte décoloniale est aussi une lutte médiatique. Les images que j’ai vues et qui désormais hantent ma mémoire comme un cauchemar ineffable sont injustifiables. Ni au nom de la libération palestinienne, ni au nom de la révolution, je ne peux adouber ce que j’ai vu et continuer à porter le nom d’Homme. La vision de la barrière de sécurité passée au bulldozer est une réjouissance, une véritable évasion de prison. Les postes de police brûlés, les bases militaires saisies. Bien, il y a cohérence, les oppressés de toujours s’en prennent à l’oppresseur, ses institutions, son armée et sa police.
Le reste est insupportable, tout bonnement. Entrer dans les foyers, tirer à bout portant sur des familles entières, violer des femmes sur les cadavres de leurs amis pour ensuite les exécuter ou parader, le corps nu et humilié, comme un trophée de guerre tandis qu’une foule en délire crache dessus. J’ai envie de vomir. Voilà que les “freedom fighters” s’abaissent au niveau de l’oppresseur, et peut-être même, s’enfoncent dans des ténèbres plus épaisses encore. Que ceux qui scandent que : ce sont de toute façon des colons, qu’ils n’avaient qu’à pas aller à une fête à la frontière de la prison à ciel ouvert qu’est Gaza se posent la question ; tous ceux qui vont se coucher dans leur lit le soir alors qu’il y a sans-abris et réfugiés qui dorment au pied de leurs immeubles, méritent-ils la mort ? Ceux qui passent en sifflant devant les murs de nos prisons, songeant à leur crush, méritent-ils la mort ? Où commence la culpabilité ? Et ne sommes-nous pas tous coupables ?
Il y a une vidéo que j’aurais aimé ne jamais voir et qui me hante. Je vous l’épargne, mais je vais la décrire, car elle soulève pour moi une réflexion au-delà des événements actuels.
Dans cette vidéo, prise par un Palestinien dans Gaza puis glorieusement diffusée sur les réseaux sociaux, il n’y a qu’un seul corps féminin au milieu d’une foule d’hommes debout. Ce corps-là n’a pas de visage, il est nu, humilié, face contre terre à l’arrière d’un camion en marche. Cinq hommes autour d’elle la retiennent par le pan de sa robe retroussée agitant leurs armes dans les airs et poussant des cris de joie. La foule en délire - uniquement des hommes - les suit en courant, euphorique. Certains s’accrochent au bord du camion et crachent sur le corps inanimé. Le corps de cette femme est un trophée. C’est une prise de guerre, un symbole de victoire. Il est nu et le visage au sol. Le corps des femmes est toujours une arme de guerre, un objet qu’on parade. Des mythes antiques à nos jours, les femmes sont des tributs. Je ne peux croire qu’une seule femme au monde devant cette scène, puisse se réjouir. Je ne peux croire que les femmes de Gaza ne ressentent pas leur chair de femme se déchirer devant ce supplice. C’est sans doute pour cela qu’elles sont totalement absentes de la scène. La Femme n’a pas de visage, la Femme n’est pas un Homme.
La source de toute cette violence est le gouvernement israélien, n’oublions pas que le Hamas en est l’enfant monstrueux, leurs existences sont liées par le sang - et la destruction du père mettrait fin à l’existence du fils. Ces deux entités sont les ennemies du peuple palestiniens et de tous ceux qui souhaitent vivre.
Mais j’en viens à penser que, peut-être, la racine du problème, et de toutes les violences qui ébranlent le monde, c’est la masculinité.
Quand je pense qu’il y a quelques jours à peine des centaines de femmes Palestiniennes et Israéliennes ont participé à la marche de “women wage for peace” à Jérusalem, je frémis de l’horreur qui suivit. Je frémis de ces hommes brandissant leurs armes dans les airs comme un sexe dressé. Je frémis des chefs d’Etat, humiliés, heurtés dans leur masculinité, qui prendront leurs décisions avec qu’une seule pensée en tête : prouver qui a la plus grosse.
Je sais que je vais me faire défoncer de tous bords. Par les pro-Palestine, par les pro-Israël, par les anti-féministes, par les hommes fragiles, par les femmes alliées. Et pour la première fois de ma vie, je m’en contrefous.
Vice-président de l’ONG internationale Médecins du monde, Jean-François Corty alerte sur la situation catastrophique dans la bande de Gaza. L’enclave est assiégée et bombardée par l’armée israélienne dans le cadre de l’opération « Glaive de fer » lancée samedi 7 octobre.
LeLe bilan de la guerre entre Israël et le Hamas continue de s’alourdir avec, au matin du 12 octobre, plus de 1 200 morts côté israélien et plus de 1 200 morts côté palestinien ainsi que des milliers de blessés de part et d’autre. Six jours après l’attaque surprise perpétrée par le mouvement islamiste palestinien, la bande de Gaza est soumise à un siège complet par l’État hébreu, accompagné de bombardements intensifs.
« Pas d’électricité, pas de nourriture, pas de gaz [...]. Nous combattons des animaux et nous agissons en conséquence », avait annoncé le ministre de la défense israélien, Yoav Gallant, lundi 9 octobre. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), plus de 338 000 Gazaoui·es ont été contraint·es de fuir leur domicile.
« Il n’y a plus aucun lieu sûr à Gaza. Aller secourir des blessés, c’est risquer sa vie », alerte dans un entretien à Mediapart Jean-François Corty, le vice-président de Médecins du monde. L’ONG internationale, qui opère depuis de longues années dans la bande de Gaza, où la seule centrale électrique a dû s’arrêter, mercredi 11 octobre, à court de carburant, reçoit désormais des nouvelles« parcellaires » de son équipe sur place, constituée d’une vingtaine de personnes.
Mediapart : Quelles sont les dernières nouvelles de votre équipe sur le terrain à Gaza ?
Jean-François Corty : Notre équipe joue comme le reste de la population sa survie sous les bombes. Certains membres ont perdu leur maison, d’autres tentent de faire des stocks de nourriture et d’eau.
Ils craignent le moment où il n’y aura plus d’électricité, ils nous ont prévenus qu’ils ne pourraient bientôt plus recharger leurs téléphones et leurs ordinateurs. Ils travaillent pour Médecins du monde depuis longtemps, ils sont formés aux situations d’urgence, ils ont connu plusieurs séquences de bombardements par le passé, mais cette fois, le niveau d’intensité est sans précédent.
C’est-à-dire ?
On a basculé dans une autre dimension, y compris les humanitaires qui se retrouvent soumis au même risque de mort que les civils sous les raids israéliens. On a appris la mort de plusieurs membres du Croissant-Rouge. Il n’y a plus aucun lieu sûr à Gaza. Aller secourir des blessés, c’est risquer sa vie.
Dans les hôpitaux qui fonctionnent encore, la situation est catastrophique. Les bombardements, l’insécurité, le manque de médicaments et de ressources rendent encore plus difficile la mission des équipes humanitaires.
On fait de la médecine de guerre. On trie au maximum et on ne prend que des urgences vitales parmi les milliers de blessés qui affluent, ceux qu’un geste salvateur simple peut sauver. L’accès aux soins va devenir compliqué pour les personnes qui souffrent de pathologies, de maladies chroniques, pour les femmes qui doivent accoucher.
C’est exceptionnel dans les conflits modernes d’être ainsi livré à de l’ultraviolence sans échappatoire.
Le siège complet de la bande de Gaza, décrété par Israël, qui vise l’ensemble de la population y vivant, est inédit et fait craindre l’aggravation d’une situation humanitaire déjà désastreuse. Avez-vous connu pareil siège par le passé en tant qu’humanitaire ?
On a rarement connu un tel siège. L’an passé, il y a eu celui de Marioupol en Ukraine mais le CICR [Comité international de la Croix-Rouge – ndlr] avait réussi à évacuer des civils, la contrebande était encore possible, il y avait peu d’humanitaires. Lors du siège d’Alep en Syrie, nous avions une équipe bloquée mais il y avait eu des évacuations de civils, il ne restait plus que les combattants et leurs familles.
Ici, à Gaza, tous les corps sociaux sont retenus, toute une partie de la société est assiégée y compris des acteurs internationaux de coopération ou de l’humanitaire. C’est exceptionnel dans les conflits modernes d’être ainsi livré à de l’ultraviolence sans échappatoire. En général, vous avez le temps de fuir, il y a des plans d’évacuation, etc. Ici, vous êtes dans une prison à ciel ouvert, l’expression consacrée, avec la mer d’un côté, et les quelques portes de sortie possibles sont bouchées. Même les convois humanitaires sont bloqués.
Tous les indicateurs sont dans le rouge. D’ici peu, il n’y aura plus d’électricité. Les stocks ne sont pas éternels. Les Gazaouis n’ont pas les capacités de se préparer à un siège de plusieurs jours ou plusieurs semaines. La bande de Gaza est à 80 % dépendante de l’aide humanitaire, d’une assistance extérieure.
Le blocus total est en train d’affamer et d’assoiffer une population qui était déjà rendue vulnérable par plus d’une décennie de blocus partiel par terre, par mer et par air. L’accès à l’eau, à des moyens pour la filtrer ou des bouteilles, était déjà difficile. Il va devenir impossible si le siège n’est pas levé et si les bombardements continuent.
Je pèse mes mots, je ne le dis pas pour faire du buzz, c’est une réalité, 2,3 millions de personnes ont un pronostic vital engagé à court et moyen terme. L’État hébreu est en train de priver des civils d’accéder à des denrées essentielles pour vivre, à l’eau, à la nourriture. C’est d’une violence inégalée.
L’Organisation des Nations unies a rappelé vainement mardi 10 octobre que le siège total de Gaza était interdit par le droit international humanitaire (DIH). La représentation israélienne auprès de l’ONU à Genève a répondu aux journalistes que le siège fait suite au « massacre sans précédent d’innocents israéliens, et Israël a parfaitement le droit de se défendre contre une telle brutalité »…
Le droit international humanitaire est censé humaniser la guerre, défendre l’intérêt des civils, des aidants, des soignants. Il est de bonne volonté, assez complet dans son corps de texte mais dans la vraie vie, il ne sert à rien. Parce qu’il est rarement respecté. Il est totalement bafoué à Gaza, comme il l’a été en Syrie, au Yémen, en Afghanistan, etc. Des civils sont empêchés d’accéder à des ressources, des soignants se font tuer.
Tout le monde se contrefiche du DIH mais il faut continuer de l’agiter et renvoyer la communauté internationale à ses inconsistances. En connaissance de cause, elle sait que 2,3 millions de personnes ont un pronostic vital à court et moyen terme engagé. L’histoire retiendra qu’elle est au courant et qu’elle a laissé faire.
L’Organisation mondiale de la santé ainsi que plusieurs ONG dont la vôtre font pression pour la mise en place d’un corridor humanitaire. Sans succès à ce jour.
Oui, il faut que les parties prenantes soient d’accord, que des acteurs neutres sécurisent un dispositif pour évacuer des civils, des blessés, des malades, et acheminer des produits de première nécessité comme à Marioupol ou Alep. Cela prend du temps, c’est de la négociation.
Les Gazaouis, compte tenu des restrictions, vont-ils tenir le temps des négociations qui, pour l’heure, ne sont pas à l’ordre du jour ? On est sur une phase active du conflit. S’il y a corridor, ce sera pour faire entrer du matériel, des groupes électrogènes, du carburant pour faire tourner les hôpitaux, de l’eau, de la nourriture.
La crise du Fln de l'été 1962. Indépendance nationale et enjeux de pouvoir(s). Essai de Amar Mohand-Amer, Editions Frantz Fanon, Alger 2023, 382 pages, 2.000 dinars
Un ouvrage qui reprend et reconfigure une thèse soutenue il y a dix ans et dont le contenu n'est nullement dépassé de nos jours. Un ouvrage qui démontre, faits à l'appui, qu'en matière de détention et d'exercice du pouvoir politique, rien n'est jamais «joué d'avance» et rien n'est durable.
Un ouvrage qui analyse un moment de l'Histoire du pays ; un moment en apparence assez court, mais qui se trouve parsemé de très nombreux et difficiles événements où les revirements, les combats fratricides et les protagonistes sont légion. Enfin, un ouvrage qui nous permet de découvrir un «historien qui connaît son métier». Ni un théoricien de l'histoire, ni un philosophe, ou un romancier de l'histoire mais un chercheur méticuleux et précis... De l'histoire comme on l'aime car elle restitue les événements, petits et grands, dans leur contexte... et pris dans la tourmente des passions humaines, non pas inventées mais ancrées dans le réel, avec ses retournements, sessions, ses trahisons, ses assassinats, ses purges, ses conflits entre «frères», ses morts inutiles n'ayant rien à voir avec la guerre de libération... mais plutôt avec une guerre (ou des «guerres») de succession.
On a donc:
Un (court) chapitre préliminaire qui traite de la situation politique du Fln entre le 1er novembre 1954 et le 18 mars 1962 ; chapitre qui permet d'appréhender la dynamique générale et la portée des crises antérieures sur celle de l'été 1962. Une première partie qui analyse l'évolution des rapports politiques au sein du Fln ; du cessez-le-feu du 19 mars 1962 au Cnra de Tripoli de mai/juin 1962. Une place particulière est donnée à Ahmed Ben Bella et aux Wilayas.
Une deuxième partie aborde l'implosion du Fln historique... Un Fln divisé face à l'Aln avec des risques réels d'une guerre civile et d'une «congolisation» du pays.
La troisième partie traite du dénouement politique et militaire de la crise... la violence armée mettant un terme à la crise... et voyant le Groupe de Tlemcen et son leader Ben Bella vainqueurs du conflit... Et, Mohamed Boudiaf créant, le 20 septembre 1962, le premier parti d'opposition, le Prs... alors que l'Ugta est «ostracisée».
L'Auteur : Docteur en Histoire (Paris 7), chercheur en socio-anthropologie de l'Histoire et de la Mémoire, directeur-adjoint du comité de rédaction de la revue Insaniyat (Crasc d'Oran). Travaille sur les processus de transition, les trajectoires individuelles et de groupes, la violence en temps de guerre, les questions mémorielles et les récits historiques alternatifs.
Table des matières : Préface (Omar Carlier) / Introduction/Première partie : Les enjeux conflictuels de pouvoir (s) au Fln (3 chapitres) / Deuxième partie : L'implosion du Fln historique (3 chapitres)/ Troisième partie : Le dénouement politique et militaire de la crise (3 chapitres)/ Conclusion/ Postface (Mohammed Harbi) / Liste des documents annexes/Bibliographie générale/ Chronologie indicative de la crise/ Correspondance des noms des villes/Correspondance des rues d'Alger/Glossaire/ Index
Extraits : «La constitution de l'Emg marque un tournant dans l'histoire du Fln et de l'Aln. Pour la première fois depuis le 1er novembre 1954, l'Aln est dotée d'un commandement militaire national avec des prérogatives biens définies» (pp 35-36), «En nommant le colonel Boumediene à ce poste stratégique (direction de l'Etat-major (unifié) de l'Aln), les «triumvirs» choisissent le moins «maquisard» des chefs de l'Aln, mais le plus efficace et le plus organisé (p37), «Entre janvier et juillet 1961, la Fédération de France du Fln achemine trois cent trois cadres dont un ingénieur, six médecins et cent sept étudiants» (pp 111-112), «En un an (1962), le bilan de la politique de la «terre brûlée» mis en application par l'Oas s'élève, selon Harbi, à 2 000 morts et 5 000 blessés (p 146), «Ironie ou ruse de l'histoire, cette situation («la situation politique jugée précaire du Gpra», fin juin 1962) favorise l'intrusion dans le jeu politique de l'émir Saïd El Djazaïri, petit-fils de l'émir Abdelkader. Après avoir officiellement revendiqué le trône de l'Algérie, il reconnaît finalement l'autorité du Gpra» (Le Monde, 7 juillet 1962, cité p 176), «Vingt deux jours après l'Indépendance, la guerre fratricide au sein du Fln a fait voler en éclats les dernières digues «morales» entre les frères, devenus ennemis» (p 207), «Pour la rédaction du journal (El Moudjahid -historique, éditorial du 13 juillet 1962 ), la crise nest pas idéologique, mais l'expression violente de la guerre des chefs» (p 268).
Avis : Pour bien comprendre l'évolution politique du pays de l'Indépendance... à nos jours... ou presque. Un ouvrage qui détricote une «crise» avec force détails ; une crise certes passagère mais aux retombées profondes sur le poids, l'exercice et les dérives du «pouvoir».
Citations : «Agitateur» en 1956, il (Ahmed Ben Bella) est, à sa sortie de prison, devenu un «homme d'Etat» (Jean Daniel, L'Express, 15 mars 1962, cité p 69), «Le Fln est plus un agglomérat de dirigeants que l'expression d'un parti doté de mécanismes démocratiques de prise de pouvoir «(p83), «D'outre-tombe, Abane Ramdane devient un protagoniste de la crise du Fln de l'été 1962 » (pp 85-86), «Rabah Bitat révèle déjà un tempérament d'homme-tampon» (180), «C'est l'ébauche d'un système dans lequel la revanche sociale sert d'aiguillon et de masque à la formation d'une nouvelle classe sociale» (Mohamed Harbi, in «L'Algérie et son destin», cité p 297), «Les historiens doivent savoir qu'ils sont aussi des citoyens. Ils doivent aider à l'élaboration d'un récit national qui exprime la diversité politique, sociale et religieuse de toutes les composantes de l'ensemble algérien» (Mohamed Harbi, postface, p 299).
Algérie 1962. Une histoire populaire. Essai de Malika Rahal, Editions Barzakh, Alger 2022, 493 pages, 1500 dinars (Fiche de lecture déjà publiée. Pour rappel. Extraits. Fiche complète in www.almanach-dz.com.histoire/bibliotheque d'almanach)
Yves Courrière avait, le premier, récolté les «confidences». Ce qui donne, au final, des œuvres historiques assez riches en informations (et donc, en analyses, même si, souvent, nous ne sommes pas d'accord avec elles). Il en est ainsi du dernier ouvrage de Malika Rahal qui s'est concentré sur la seule année 1962, aux journées liées au «cessez-le-feu», aux mois annonçant l'Indépendance du pays, au 5 juillet... et ce qui a immédiatement suivi... tout particulièrement au niveau des populations, celle des villes, celle des campagnes, les réfugiés et leurs retours, le départ précipité des «pieds-noirs»...
1962 a été, donc, à la fois la fin d'une guerre et la difficile transition vers la paix et la reconstruction d'un pays moralement et physiquement détruit. Une guerre -seulement celle étalée sur les 7 années et demie qui a fait, selon les chiffres avancés par les uns et les autres, entre un million et demi et 600 000 victimes algériennes (pour 26 614 soldats de l'armée française tués et un millier de prisonniers ou de disparus... et 2788 civils européens victimes de l'Oas). Une guerre qui a fait plus de 320 000 réfugiés dans les pays voisins (Maroc et Tunisie surtout, les zones frontalières ayant été minées et transformées en «zones interdites»). Une guerre qui a «déplacé «(dans des camps de concentration dits de «regroupement» plus de 3 520 000 personnes auxquelles il fallait ajouter les 1 175 000 «recasés» ou «resserrés» (sic !) ayant peuplé les bidonvilles de villes ou villages ou des habitations de fortune autour d'un «camp». Une guerre, avec sa victoire finale laquelle mal acceptée par une large majorité de la population pied-noir a vu la «migration» vers la France (ou ailleurs) de plus de 650 000 personnes (dont 110 000 juifs sur les 120 000 qui vivaient, en 1962, en Algérie) . Une guerre qui... (...)
L'Auteure : Née en 1974, agrégée d'histoire, spécialiste de l'histoire contemporaine de l'Algérie, chargée de recherche au Cnrs (France).
Extraits : (...) «Le cessez-le-feu et l'indépendance ont un effet de révélation par la sortie de la clandestinité et de la guerre, de passage de l'invisible au visible et de découverte de soi, notamment lorsque les proches se retrouvent» (p137) (...) «La brèche entre les uns et les autres, les accapareurs (note : 1962, des biens «abandonnés» par les pieds-noirs) et les pondérés, ne cessera de croître au fil des années, au point d'être régulièrement convoquée pour expliquer les injustices du présent» (p283)(...)
Avis : Un livre qui se lit d'un seul trait (bien que surchargé de détails... tous aussi intéressants les uns que les autres)... Un roman de (re-)découvertes -pour les sexa et plus- de moments extraordinaires de notre Histoire.(...)
Citations : (...) «Avant d'être un temps de la violence, 1962 est en effet le temps de l'effervescence» (55), «Dans le temps fluide de la fin de la guerre, il est encore possible de se faire passer pour ce que l'on n'a pas été ou de faire disparaître son passé en se réinventant» (p138), «(Indépendance/Juillet 62). Les festivités sont l'aboutissement victorieux de l'effervescence festive et émeutière qui s'est développée dans la dernière séquence de la guerre, depuis les manifestations de décembre 1960 (...). La fièvre libère les corps, le plus souvent dans des transgressions festives» (236),(...). Que 1962 soit un temps des possibles narratifs fait aussi de ce moment le berceau de mythologies durables, en même temps que le point focal d'une obsession du vrai et du faux, de la falsification, de l'oubli et de la commémoration» (p 410).
PS : Lire aussi «Algérie 1962». Insaniyat. Revue algérienne d'anthropologie et de sciences sociales (ouvrage collectif du Crasc), n° 65-66, juillet-décembre 2014 (Vol. XVIII, 3 -4), Oran 2015, 500 dinars. 433 pages (351 en français et 82 en arabe)
La revue ne fait que reprendre des communications présentées par des chercheurs en sciences sociales et humaines, notamment des historiens, dans le cadre du cycle «Les Conférences du Crasc» (manifestations scientifiques nationales et internationales, mises en place à l'occasion du Cinquantenaire de l'indépendance nationale, en 2012)(...)
Sadek Benkada établit le lien entre des événements vécus pendant la Guerre de libération nationale et plus particulièrement les six derniers mois, et des faits que connut l'Algérie durant la décennie noire (se référer, entre autres au roman «Oran», de Assia Djebar présenté récemment in Médiatic)
Amar Mohand-Amer revient sur un des épisodes les plus sensibles de l'année 1962... et sur la maladie infantile de la Révolution : le wilayisme (...)
En accordant une dense considération pour la bravoure des Palestiniens et leur impressionnant engagement militaire à peine croyable, une forte interrogation ne peut être écartée devant le drame amplifié vécu aujourd'hui en Palestine. Comment en effet, le Mossad, l'un des plus puissants services secrets du monde a-t-il pu faire preuve d'une manifeste indolence et ne pas avoir décelé les prémices d'un rare soulèvement époustouflant jamais provoqué jusqu'ici ? L'interrogation est d'autant plus de circonstance que le renseignement américain n'a pas pour habitude de se laisser aller dans un aveuglement, et les liens comme l'efficace collaboration dans ce domaine entre Washington et Tel-Aviv sont notoirement connus.
Israël n'a jamais fait état de ses pertes matérielles et humaines comme il s'y applique aujourd'hui. Il n'a pas pour habitude de se dénuder, et de plus, il s'applique à mettre en exergue le décompte des tués occidentaux ouvrant le champ libre à leurs médias pour engager d'un crucifix qui a l'air d'une programmation élaborée.
Pour la première fois, le gouvernement israélien intime l'ordre à ses colons de se replier provisoirement et de laisser place vide. L'exigence est parlante. Son poids et son contenu ne sont pas légers quand la politique de colonisation israélienne figure au sommet de sa stratégie hégémoniste. En parallèle, le nombre de centaines de milliers de déplacés palestiniens, femmes, enfants et familles livrés à l'errance, ne cesse d'augmenter. L'un dans l'autre, ces deux déplacements sont significatifs d'un plan bien établi.
Dès lors, il serait une erreur de se laisser bercer par un aura démesuré devant la hardiesse remarquable des combattants palestiniens. Il serait aussi illusoire de croire que le tocsin a sonné pour les «accords d'Abraham», car il se confirme de plus en plus que la reconnaissance offerte par certains pays arabes à Israël n'est pas un don fortuit.
De fait, la diabolisation renforcée que subit le mouvement Hamas n'est qu'une manœuvre pour voiler l'entame d'une décision finale. C'est le peuple palestinien qui est la visée optimale.
La guerre de Gaza a relégué au second plan les accords de normalisation noués en 2020 entre Israël, les Émirats arabes unis, le Bahreïn et le Maroc. Au-delà de sa dimension géopolitique, un des aspects de cette alliance a été passé sous silence : malgré leurs divergences théologiques, les fondamentalistes des trois grands monothéismes en ont tiré profit pour faire front commun contre le libéralisme moral et les valeurs laïques — même si la répression israélienne à Jérusalem-Est et les violations des lieux saints menacent aussi cet aspect du pacte. (Ce texte a été écrit avant les récents événements dans la région).
Le rabbin Levi Duchman allume une menorah géante à Dubaï (Émirats arabes unis), le 21 novembre 2021
Chabad.org/Wikimedia Commons
Au moment de la signature des accords d’Abraham en 2020, leurs détracteurs les ont dénoncés comme un exercice cynique d’opportunisme géopolitique. Les États-Unis, sous la présidence de Donald Trump, voulaient relancer une hégémonie déclinante en négociant de nouveaux traités de paix israélo-arabes, consolidant ainsi le front anti-iranien et renforçant leurs liens avec leurs alliés arabes. Et ces alliés (les Émirats arabes unis, le Bahreïn et le Maroc) faisaient miroiter les perspectives d’une normalisation avec Israël pour obtenir de nouveaux accords commerciaux, une assistance militaire et d’autres avantages. Le Maroc mettait en avant la spécificité de son héritage historique (la présence d’une importante minorité juive dans le pays) pour justifier le rapprochement avec Israël, et espérait qu’une main tendue vers Tel-Aviv allègerait les pressions exercées sur lui au sujet du Sahara occidental, avec à la clé une reconnaissance de la souveraineté de Rabat sur ce territoire.
Enfin, pour sa part, Israël améliorait son positionnement international grâce aux accords conclus avec des pays arabes qui partagent également, et ce n’est pas un hasard, son objectif de contenir un Iran doté d’une capacité nucléaire militaire.
MARGINALISATION DE LA CAUSE PALESTINIENNE
Tous ces acteurs profitaient de la marginalisation de la cause palestinienne, qui s’est trouvée déconnectée du reste des crises du Proche-Orient durant les soulèvements des « printemps arabes ». Ainsi, les accords d’Abraham constituaient l’exemple même d’une realpolitik cynique. Pourtant, d’autres États arabes se positionnaient différemment sur l’échiquier géopolitique. L’Algérie pariait sur le fait que les accords échoueraient, tandis que le Qatar préférait rester au-dessus de la mêlée régionale en cherchant à jouer le rôle de médiateur, comme il l’avait fait en Afghanistan.
Pourtant, alors que la nouvelle série d’accords de normalisation israélo-arabes a commencé comme un exercice d’opportunisme géopolitique, elle s’est transformée en quelque chose de fort différent. La logique stratégique qui a donné naissance à ces traités n’est plus entièrement valable. Alors que les États-Unis se retirent du Proche-Orient, les États de la région n’ont plus besoin de la validation américaine pour discuter de paix et innover dans leur politique étrangère.
La peur commune d’une agression iranienne ne suffit pas plus à expliquer la normalisation israélo-arabe : le récent rapprochement entre Riyad et Téhéran n’a en effet pas diminué la dynamique de normalisation. Même si l’Arabie saoudite est plus prudente du fait de sa position symbolique de gardienne des deux villes saintes de La Mecque et Médine, elle négocie par l’intermédiaire de l’administration du président américain Joe Biden afin d’obtenir le plus d’avantages possible d’une paix séparée avec Israël. La realpolitik pousse aussi certains États arabes à nouer des alliances stratégiques avec Israël pour améliorer leur position économique ou politique.
Un autre facteur, hormis le géopolitique, permet de comprendre les accords d’Abraham : la radicalisation religieuse. Les accords rassemblent en effet une coalition inattendue de pays qui prétendent parler au nom de leur foi à travers une formulation spécifique d’idéaux fondamentalistes. Si l’utilisation du nom du prophète Abraham pour désigner ces traités de paix mettait l’accent, au début, sur la tolérance œcuménique entre les religions juive, chrétienne et musulmane, elle indique aujourd’hui une alliance extrémiste contre la démocratie libérale.
LES THÉORIES DE SAMUEL HUNTINGTON
Les acteurs fondamentalistes sont devenus prédominant dans le contexte politique d’Israël et des États-Unis, et restent fortement présents pour les États arabes. En Israël, les fondamentalistes juifs de droite dominent le gouvernement et dictent sa position sur la question palestinienne. Aux États-Unis, l’aile évangélique du Parti républicain exerce une forte emprise sur le mouvement conservateur et se confond également avec la tendance populiste du mouvement Make American Great Again (MAGA) de Trump. Pour les pays arabes signataires des accords d’Abraham, la situation est plus complexe. Les dirigeants autoritaires imposent le contrôle de l’État sur l’islam, alors que jusqu’ici des acteurs religieux ancrés dans la société, allant des oulémas traditionnels aux groupes fondamentalistes comme les islamistes et les salafistes, pouvaient coexister avec un islam officiel. Ils prétendent soutenir une version modérée de l’islam, mais appliquent en réalité un fondamentalisme étatique. Ils rejettent la sécularisation au sens philosophique du terme, car ils monopolisent et réglementent la pratique de la foi musulmane dans la vie sociale.
Ces trois forces — musulmanes, chrétiennes et juives — dominent dans leurs sociétés respectives. Les points de vue qu’elles pouvaient avoir les unes sur les autres se sont également rapidement transformés. Jusqu’à très récemment, elles se considéraient comme rivales. L’antisémitisme chrétien et musulman ciblait la diaspora juive, tandis que les sionistes considéraient la plupart des chrétiens et des musulmans comme une menace pour leur rêve d’une patrie juive. Des termes comme « croisade » et « djihad » illustraient la manière dont chaque mouvement fondamentaliste percevait le « choc des civilisations ». Dans cette vision du monde développée par le politologue américain Samuel Huntington, la religion était considérée comme le fondement de la culture, et même les personnes laïcisées étaient identifiées à leurs coreligionnaires de fait. La ligne de démarcation divisait le monde entre des sociétés tenues pour homogènes (chrétiennes juives ou musulmanes). Un évêque français était ainsi vu comme plus proche d’un franc-maçon français que d’un imam immigré venu du Maghreb.
Cette vision d’une compétition interreligieuse a cependant été remplacée chez les fondamentalistes par une alliance nouée pour promouvoir des valeurs communes. Les guerres culturelles ont remplacé le vieux paradigme huntingtonien du conflit civilisationnel. Désormais, chaque faction religieuse ne répugne plus à se joindre à ses cousins abrahamiques éloignés contre ses frères et sœurs les plus proches mais laïques — juifs, chrétiens ou musulmans qui sont en désaccord avec leur théologie et critiquent leur politique. Aux États-Unis, les chrétiens évangéliques voient le libéralisme laïc comme une menace égale, voire supérieure, à toute autre religion concurrente. Les fondamentalistes chrétiens tentent de bâtir une coalition mondiale de conservateurs religieux issus de toutes confessions pour combattre l’ennemi athée. Ils s’allient aux populistes européens, s’appuient sur le nationalisme blanc, se méfient de toute politique de gauche et considèrent Vladimir Poutine comme un croisé chrétien.
DES ACTEURS POLITICO-RELIGIEUX RADICALISÉS
Dans le même temps, les groupes juifs ultra-orthodoxes ont ébranlé la politique israélienne. Les tensions entre ces mouvements et les juifs sécularisés sont telles que les premiers ne considèrent même plus les seconds comme juifs. Ils ne se mobilisent plus pour défendre la diaspora contre l’antisémitisme, parce qu’une grande partie de cette diaspora s’est sécularisée ou rejette leurs opinions politiques et théologiques. Ainsi, cette aile fondamentaliste juive ne voit aucun problème à s’allier aux populistes occidentaux antisémites qui soutiennent également les nationalistes chrétiens blancs. Par exemple, Benyamin Nétanyahou a qualifié le premier ministre hongrois Viktor Orban de « véritable ami d’Israël », malgré ses attaques antisémites contre le milliardaire américain George Soros. Plus récemment, en mai 2023, une délégation du parti d’extrême droite Les Démocrates suédois, dont le programme appelle à l’interdiction de la circoncision, a effectué une tournée en Israël.
Dans le Golfe, les États arabes qui prétendaient autrefois représenter l’islam mondial ont fait marche arrière. En Arabie saoudite, le prince héritier Mohamed Ben Salman a abandonné la posture traditionnelle saoudienne de promotion des idéaux wahhabites comme instrument de soft power. Alors que le roi Salman conserve son titre de gardien des lieux saints de La Mecque et de Médine, ni les dirigeants du pays ni la plupart des autres gouvernements arabes ne défendent les positions religieuses du passé, qui étaient autrefois au centre de leurs revendications politiques sur la scène internationale. Ils ne font plus cause commune avec le sort des Palestiniens. Ils ne se pressent pas non plus pour défendre les musulmans victimes d’islamophobie en Occident ou les minorités musulmanes attaquées ailleurs, comme les Ouïghours en Chine.
Ces trois acteurs « politico-religieux » radicalisés nourrissent aussi une profonde hostilité à l’égard des voix démocratiques dans leurs propres sociétés. Pour les fondamentalistes juifs de Tel-Aviv, l’ennemi est le courant dominant juif laïque qui cherche à freiner les pires excès de l’expansionnisme sioniste en Palestine ainsi que l’emprise ultra-orthodoxe sur l’État israélien. Les évangéliques américains détestent les libéraux partisans du cosmopolitisme et de l’inclusion politique, lesquels menaceraient de mondialiser une nation qui, selon eux, devrait rester radicalement dominée par les Blancs. Enfin, les États arabes craignent une mobilisation populaire en faveur de la dignité incarnée par les « printemps arabes » et toujours portée par un grand nombre de jeunes pour qui l’engagement politique doit se faire au nom de la tolérance et des droits humains.
Pour les trois groupes, les accords d’Abraham représentent une confortable union d’intérêts. Du côté israélien on peut procéder à l’annexion de la Palestine, tandis que les évangéliques américains peuvent consolider leur prétendue défense de la civilisation occidentale, et les régimes arabes peuvent renforcer leurs capacités militaires et leurs technologies de contrôle de la population. C’est cette coalition de radicaux religieux qui soutient les accords de normalisation.
ISRAËL, LE MAILLON FAIBLE
Pourtant, ces accords font face à une menace inattendue. Il a toujours été naïf de penser que ces forces religieuses et politiques resteraient dans un équilibre harmonieux. Or cet équilibre est en train de se rompre en Israël — le seul pays du Proche-Orient doté d’institutions libérales, mais exclusivement pour les juifs. Ainsi, c’est la « démocratie » israélienne même qui est devenue le maillon faible de cet édifice. Les mobilisations de masse récurrentes contre la politique autoritaire de Nétanyahou ont déclenché une crise politique, annonçant un nouveau cycle d’instabilité gouvernementale, avec la possibilité d’élections anticipées et de changement de leadership.
Ces manifestations contre la nature de plus en plus exclusive et abusive de l’État israélien laisse entrevoir des contradictions plus profondes au sein de la nouvelle alliance religieuse. Les sionistes radicaux n’hésitent pas à s’en prendre aux chrétiens, comme à Jérusalem, avec la complicité des institutions judiciaires et policières du pays. Mais ils doivent également affronter une autre réalité : à l’extérieur, les chrétiens évangéliques considèrent Israël comme une simple étape sur la voie du retour du Messie et ne sont pas concernés par la pérennité d’un État juif. De même, les attaques répétées des sionistes radicaux contre la mosquée Al-Aqsa symbolisent non seulement la dépossession de la Palestine, mais une agression spirituelle contre la foi de tout le monde musulman et donc contre toute idée de coalition des religions. En ce sens, c’est tout le cadre régional créé par les accords d’Abraham qui risque de s’effondrer sous le poids de ses propres paradoxes.
HICHAM ALAOUI Enseignant à l’université de Californie, Berkeley. Auteur du livre Pacted Democracy in the Middle East
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