Published date: Dimanche 16 octobre 2022 - 11:26 | Last update:5 hours 29 secs ago
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Le drame a choqué toute l’Algérie. Le 26 septembre, en Kabylie, Ryma Anane, 28 ans, enseignante de français, a été attaquée par son voisin alors qu’elle s’apprêtait à prendre le bus pour aller à son travail. Il l’a aspergée d’essence et brûlée vive à l’aide d’un briquet.
La nouvelle s’est répandue très vite sur les réseaux sociaux. Selon des sources locales, l’agresseur a fini par se rendre à la police quelques heures après l’attaque. D’après ses aveux, il aurait agi ainsi parce que la jeune femme avait refusé de se marier avec lui et choisi un autre futur époux.
« Son dos et son cou en flammes, Ryma s’empresse d’aller chercher de l’aide. Arrivée chez elle, elle s’effondre, et bredouille quelques mots : ‘’Il a brûlé mon avenir !’’ », rapporte le site d’information TSA.
Après son transfert à l’hôpital de Tizi Ouzou (Kabylie), les médecins ont jugé que son état nécessitait une prise en charge rapide à l’étranger au regard de la gravité des brûlures (60 % de son corps).
Rapidement, la solidarité s’est organisée à travers les réseaux sociaux et une cagnotte a été lancée pour payer les frais d’un transfert en Europe.
« La famille s’est d’abord tournée vers l’hôpital Saint-Louis à Paris, connu pour son expertise des grands brûlés. D’après le devis consulté par France 24, l’hôpital demandait plus de 316 000 euros pour 70 jours d’hospitalisation en réanimation », relate France 24.
Mais l’établissement n’a pas accepté l’échelonnement de la facture. « Qui peut faire ça ? Cela a retardé la prise en charge de Ryma à l’étranger. Et pendant ces quelques jours, elle aurait pu y passer », témoigne toujours sur France 24 un ami de la victime.
Faute d’avoir pu obtenir un visa pour la France, l’entourage de Ryma s’est tourné vers l’Espagne, qui a accepté de lui en délivrer un. Et grâce à une société d’assistance médicale, ADM international, la famille a pu trouver un hôpital à Madrid qui proposait un devis moins onéreux, avec par ailleurs la possibilité de payer par tranches.
Ryma a donc été transférée en Espagne par avion médicalisé grâce aux efforts de ses proches et des nombreux donateurs en Algérie et à l’étranger. Selon les dernières informations, son état se serait stabilisé.
La cellule de veille indépendante Féminicides Algérie relève qu’une jeune femme, mère de quatre enfants, a été assassinée, brûlée vive, par son époux le 16 avril 2022. Depuis le début de l’année, 32 cas de féminicides ont été recensés par les militantes.
Par
MEE
Published date: Dimanche 16 octobre 2022 - 11:26 | Last update:5 hours 29 secs ago
L’histoire de ces soldats africains envoyés au front pour combattre l’ennemi n’est pas méconnue mais peu racontée.
"Je n’ai pas d’explications, je ne sais pas pourquoi ni pour quelles raisons on ignore encore cette partie de l’Histoire, je sais juste qu’on n’en entend pas souvent parler. Mais je me dis qu’on perd du temps à se demander pourquoi, et qu’il est primordial aujourd’hui de la raconter, c’est tout. On a fait ce film pour cela", a souligné dans un entretien Omar Sy, acteur et coproducteur du film.
Si "Tirailleurs" est une fiction qui se déroule en 1917, l’histoire de ces hommes est bien réelle.
Les tirailleurs sénégalais ont également été mobilisés dans des conflits qui ont opposé la France à ses colonies en Indochine, en Algérie, à Madagascar.
Dans l’un de ses poèmes dédiés aux tirailleurs sénégalais, Léopold Sédar Senghor évoque les tombes fleuries de soldats inconnus de "Tirailleurs à la peau noire".
"Cette histoire de tirailleurs m’importe dans la mesure où je n’aurais pas voulu que mon père soit une personne anonyme dans un cimetière", précise le professeur d’histoire qui réside en France.
"De cette guerre, il [mon père] n’en a jamais parlé. Tous les éléments que j’ai pu tirer proviennent de son carnet militaire", confie-t-il.
Gaspard Mbaye estime que "Tirailleurs est un outil pédagogique pour comprendre une histoire complexe".
Le film interroge le rapport de la France à ses anciennes colonies.
"L’enjeu du film était de "rendre hommage aux tirailleurs sénégalais et plus largement, à tous les hommes issus des ex-colonies françaises qui ont combattu, sans avoir eu la reconnaissance de leur sacrifice", a déclaré le réalisateur dans un entretien en amont de la sortie du film.
"A tous les hommes issus des ex-colonies françaises qui ont combattu, sans avoir eu la reconnaissance de leur sacrifice".
Le film nous ramène à une période sombre de l’Histoire.
Il nous replonge dans une époque pendant laquelle l’Afrique est colonisée, une époque où des hommes sont enrôlés de force dans l’enfer des tranchées et une époque qui impose un si grand sacrifice à ces soldats noirs venus des anciennes colonies. C’est une histoire collective et universelle.
Le fil narratif du film repose sur l’épopée à la fois historique et intimiste d’un Sénégalais nommé Bakary Diallo. Ce personnage qui s’exprime en langue peule s’enrôle dans l’armée française pour rejoindre son fils de 17 ans, recruté de force.
Nous sommes en France, en 1917, alors que la 1ère guerre mondiale fait rage.
En trame de fond, les tranchées, la mort à bout de bras.
Mais alors comment ces hommes, des Africains, ont-ils été projetés dans la Grande Guerre, une guerre entre puissances européennes ? Comment ont-ils été recrutés ?
Recrutement
Le premier bataillon de tirailleurs a été créé en 1857.
Le corps des tirailleurs sénégalais a joué un rôle majeur dans la constitution de l’Empire colonial français.
Le film Tirailleurs revient sur le destin de ces hommes venus d’Afrique combattre pour la France notamment lors de la première guerre mondiale.
Ces fameux tirailleurs dits ‘sénégalais’ sont des soldats africains reconnaissables à leur chéchia rouge ‘recrutés’ plus ou moins de force pour soutenir l’effort de guerre et renforcer les régiments de France métropolitaine qui subissent de lourdes pertes.
On estime que près de 200 000 tirailleurs sont montés au front, 30 000 seraient morts sur les champs de bataille de la Grande Guerre, et nombreux sont revenus blessés ou invalides.
Ils étaient Sénégalais, Guinéens, Maliens, Burkinabés, Ivoiriens, Mauritaniens et bien d’autres encore.
À la fin de la guerre, beaucoup espéraient qu’ils seraient compensés et récompensés pour leur service.
L’histoire en a voulu autrement.
Le principe d'égalité
L'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose que "la loi doit être la même pour tous".
Le principe d'égalité n’a pourtant pas été appliqué aux tirailleurs sénégalais, ces anciens combattants, titulaires de pensions militaires et ressortissants de pays autrefois sous souveraineté française – c’est-à-dire Français au moment des combats.
Malgré leur engagement dans l’armée française, malgré les combats menés et les traumatismes causés, les tirailleurs n’ont pas été traités comme leurs frères d’armes. Ils ont dû faire face à des inégalités de traitement et souffrent encore aujourd’hui d’un manque de reconnaissance.
Ces inégalités dénoncées depuis tant d’années par les familles et les associations d’anciens militaires sont vécues comme une discrimination et accroissent le sentiment d’injustice.
Il faudra attendre 2010 pour qu’une décision du Conseil Constitutionnel censure partiellement des dispositions relatives aux pensions des anciens soldats des ex-colonies afin que celles-ci soient identiques pour les bénéficiaires français et étrangers résidant dans le même pays.
Cette décision coïncidait avec la sortie du film "Indigènes" de Rachid Bouchareb.
La sortie du film Tirailleurs il y a quelques semaines a également été marquée par un geste symbolique. Le Ministère français des Solidarités a annoncé que les derniers tirailleurs sénégalais pourront désormais rentrer dans leur pays d’origine tout en continuant de toucher le minimum vieillesse.
Cette mesure ‘trop politique’ pour certains, ‘trop tardive’ pour d’autres, ne concerne qu’une poignée de dossiers, des hommes de plus de 90 ans qui devaient obligatoirement passer à minima six mois en France pour percevoir leur allocation de 950 euros.
Gaspard Mbaye considère pour sa part que "c’est une bonne chose" pour les personnes et les familles concernées, "même s’il y a beaucoup de retard à cette reconnaissance financière".
Les régiments de tirailleurs sénégalais ont été définitivement supprimés entre 1960 et 1962 mais le travail de reconnaissance est généralement un travail de longue haleine.
Une démarche historique
L'Association Mémoire du Tirailleur Sénégalais (A.M.T.S) a été créé en 2008 "pour rendre honneur et sortir de l’anonymat plusieurs centaines de tirailleurs inhumés dans les fosses communes du cimetière du Trabuquet à Menton", explique Mr Mbaye.
Menton est une ville située à l'extrême sud-est de la France, a une trentaine de kilomètres de Nice.
Au cours de la Première Guerre mondiale, plusieurs milliers de tirailleurs sénégalais, entre autres, sont passés par les hôtels de la ville de Menton transformés en hôpitaux militaires.
De nombreux tirailleurs s’y trouvaient en convalescence et beaucoup ont succombé aux blessures et maladies contractées au front.
"Menton concentre le plus grand nombre de tirailleurs inhumés sur la côte d’azur", constate Mr Mbaye.
"S'il est vrai que le premier tirailleur, NKY Dembélé, mort à menton, le 11 décembre 1914, y fut inhumé avec les honneurs de la ville, il est par ailleurs triste de constater que c'est par centaines que les Tirailleurs, furent par la suite enfouis dans des fosses communes, sans aucune identification", indique-t-il sur le site de l’association.
"On ne reportait que le nom du dernier soldat inhumé alors que dans une même fosse, il y avait plusieurs corps, six ou sept parfois. Notre travail a été ‘d’exhumer’ tous ces noms à travers les archives pour sortir de l’anonymat ces personnes enterrées et de mettre sur des plaques nominatives tous les noms des tirailleurs sénégalais inhumés à Menton", continue-t-il.
"On est arrivé à un tirage définitif qui établit 1137 tirailleurs inhumés sur le site du Trabuquet".
"Aujourd’hui, on continue à maintenir la mémoire des tirailleurs
200 000 Sénégalais ont participé à la Grande Guerre. À l’occasion de la sortie du film Tirailleurs le 4 janvier, Historia revient sur l’histoire de cette « force noire » selon les mots du général Mangin, de ces unités militaires dont l’engagement et le sacrifice ont trop longtemps été oubliés tout en faisant découvrir une histoire méconnue et une réalité complexe, loin des clichés. Avec une interview exclusive d’Omar Sy, premier rôle dans le long métrage de Mathieu Vadepied.
Sorti mercredi dernier, « Tirailleurs », le film de Mathieu Vadepied avec Omar Sy, met en lumière le sacrifice imposé à ces combattants noirs issus des colonies françaises durant la Première Guerre mondiale. « L’Obs » revient en cinq points sur leur histoire méconnue.
Omar Sy dans « Tirailleurs » (MARIE-CLÉMENCE DAVI
À l’occasion de la sortie de « Tirailleurs », cinq éclairages pour mieux comprendre le douloureux destin des soldats noirs de la Grande Guerre.
1. La France est la seule puissance coloniale à avoir envoyé des combattants « indigènes » dans les tranchées
Créé sous le Second Empire, le corps des tirailleurs sénégalais a d’abord joué un rôle majeur dans la constitution de l’Empire colonial français. À partir des années 1860, ces supplétifs de l’armée française participent à la conquête puis la « pacification » des territoires qui vont constituer l’Afrique-Occidentale française (AOF) et l’Afrique-Équatoriale française (AEF), puis de Madagascar et du Maroc. Ils combattent alors d’autres Africains. Mais à la veille de la Première Guerre mondiale, l’idée que des Noirs puissent affronter des Européens reste taboue : « races inférieures » et « supérieures » ne sauraient se mêler sur un champ de bataille.
Dans un livre très remarqué, « la Force noire », publié en 1910, le colonel Mangin est le premier à braver l’interdit. Plombée par le recul de sa natalité, la France tremble alors face à l’insolente dynamique démographique de l’ennemi allemand. Mangin a la parade : en cas de guerre, la France n’aura qu’à faire venir des tirailleurs sénégalais pour gonfler ses effectifs. Cet officier de l’armée coloniale, qui a pu éprouver la valeur des combattants africains, n’est lui-même pas exempt de préjugés : « le Noir naît soldat », assure le colonel, et l’armée française ne pourra que se féliciter d’employer « ces primitifs pour lesquels la vie compte si peu, et dont le jeune sang bouillonne avec tant d’ardeur, et comme avide de se répandre ».
L’état-major reste hésitant. Mais la boucherie des premières semaines de la guerre, à l’été 1914, a raison de ses scrupules : la France recourra à la « force noire », choquant ainsi ses adversaires, autant que ses alliés. Pour les Allemands, c’est une attaque contre la civilisation, une trahison vis-à-vis de l’ensemble de la « race européenne ». L’allié britannique, qui cantonne l’emploi de ses soldats coloniaux aux théâtres d’opération périphériques, principalement au Moyen-Orient, craint que la promotion des Africains au rang de combattants (presque) comme les autres, admis à servir en Europe, ne leur donne, à leur retour chez eux, l’idée de réclamer des droits équivalents à ceux des colons. En France aussi, l’arrivée de ces « sauvages », précédés par une réputation de cannibales et de violeurs, commence par effrayer. Au cours du conflit, à mesure qu’on apprend à les connaître, cette peur raciste disparaît au profit de l’imagerie tout aussi dégradante du « grand enfant ». Un énième cliché dont s’empare une nouvelle marque de boisson chocolatée : en 1915, Banania se fait connaître avec ses affiches publicitaires mettant en scène un tirailleur qui sourit de toutes ses dents. « Y’a bon », s’écrie l’Africain en dégustant son Banania. Un slogan auquel la marque n’a définitivement renoncé qu’en… 2006.
2. Tous ne venaient pas du Sénégal
Dans le film « Tirailleurs », Omar Sy incarne Bakary Diallo, un Sénégalais qui ne parle que le peul - la langue que l’acteur parlait chez lui, à Trappes, avec ses parents d’origine sénégalaise. Or, si Bakary ne comprend pas les ordres de son lieutenant français, il a tout autant de mal à communiquer avec la plupart des tirailleurs de son unité. Durant la Grande Guerre, le corps des tirailleurs « sénégalais », qui tire son nom du fait qu’il a été créé à Dakar, en 1857, recrute en effet dans la plupart des territoires de l’Afrique noire sous domination française. Certes majoritaires, les soldats originaires du Sénégal, un territoire créé par le colonisateur en réunissant plusieurs ethnies, parlent eux-mêmes des langues différentes, le peul, le wolof, le mandingue, le sérère, le diola…
La communication étant vitale sur le champ de bataille, les officiers imposent à leurs soldats une langue commune, le « français tirailleur », nom militaire officiel du « petit nègre », ce français simplifié dont les Africains comprennent très vite, en le comparant à la langue des Blancs, qu’il est humiliant. En 1916, l’armée française distribue ainsi aux officiers des bataillons noirs un manuel intitulé « le Français tel que le parlent nos tirailleurs sénégalais », qui prescrit notamment au lecteur, pour s’adresser à ses soldats, de « donner toujours à la phrase française la forme très simple qu’a la phrase dans tous les dialectes primitifs de notre Afrique occidentale ».
3. Beaucoup d’entre eux ont été enrôlés de force
Au début de la Grande Guerre, le recrutement des tirailleurs sénégalais est officiellement qualifié de « volontaire ». Suivant un principe adopté dès la création du corps, sous le Second Empire, il est délégué par les autorités coloniales aux chefs de village, sommés de réunir chaque année un contingent de candidats au service – or ces derniers sont souvent désignés contre leur gré.
Mais lorsque en 1915 l’état-major décide d’intensifier massivement le recrutement de soldats noirs, ce système s’enraie. Pour échapper à l’enrôlement, de nombreux jeunes Africains quittent leur village et se réfugient dans la brousse ou les forêts alentour. Certains rejoignent même les colonies britanniques ou portugaises voisines. La réponse des autorités coloniales est sans nuance : les fuyards sont poursuivis et saisis par la force, l’arme à la main, lors de véritables chasses à l’homme, comme celle qui ouvre de manière saisissante le film « Tirailleurs ». Mais en novembre 1915, à Bona, dans l’actuel Burkina Faso, la résistance tourne à la révolte. C’est le début de la guerre du Bani-Volta, qui embrasera toute la région pendant dix mois, jusqu’à ce qu’une violente répression militaire, détruisant une centaine de villages, rétablisse l’ordre colonial.
4. Leur loyauté a été mal récompensée
Enrôlés par la contrainte, sinon la force, les soldats africains, une fois parvenus dans les tranchées, vont pourtant faire preuve, pour la plupart, de discipline et de loyauté. D’abord victimes de véritables hécatombes, car ils ont reçu une formation sommaire, les BTS (bataillons de tirailleurs sénégalais), une fois aguerris, se distinguent notamment en octobre 1916 lors de la reprise du fort de Douaumont, au cours de l’emblématique bataille de Verdun, ou lors de la défense de Reims, à l’été 1918. Sur les 134 000 soldats d’Afrique noire qui ont combattu en Europe, un quart ne sont pas revenus, tués, portés disparus ou morts de maladie (ils ont beaucoup souffert du froid, notamment victimes d’infections pulmonaires). Un taux de perte équivalent à celui des unités de fantassins métropolitains.
Les raisons de ce consentement global au combat sont multiples. Certains tirailleurs sont séduits par le prestige de l’uniforme, et l’héroïsme des affrontements. Beaucoup espèrent être récompensés pour leur service à la fin de la guerre. De fait, au début de l’année 1918, alors que l’armée française commence à manquer cruellement d’hommes, le gouvernement multiplie les promesses à leur égard. Le président du Conseil Clemenceau envoie ainsi en mission le député noir Blaise Diagne, représentant du Sénégal. Au cours d’une tournée en Afrique de l’Ouest, celui-ci parvient à recruter 60 000 hommes en quelques semaines : à ces Africains soumis au code de l’« indigénat », avec son lot d’interdictions et de travaux forcés, il a promis l’obtention de la pleine citoyenneté française.
Mais les combattants africains de la Grande Guerre ne deviendront pas d’authentiques citoyens. Ils devront se contenter de quelques compensations juridiques (un dispositif leur permet par exemple d’accéder à des emplois de fonctionnaires) et de pensions inférieures à celles versées aux anciens combattants français. À cette déception s’ajoute le fait que ces minces avantages leur valent souvent d’être mal accueillis à leur retour dans leur village. À cause de leurs (maigres) pensions, on reproche aux anciens tirailleurs d’être des fainéants, ou encore de vouloir remettre en cause l’ordre traditionnel au nom de leurs médailles rapportées de France.
5. Dans « Mein Kampf », Hitler fustige l’emploi de Noirs par l’armée française
Dès le début de la Première Guerre mondiale, la présence sur le front des tirailleurs sénégalais suscite outre-Rhin un choc et une indignation appelés à une grande postérité. « Ceux qui ne craignent pas d’exciter des nègres contre la race blanche offrent au monde civilisé le spectacle le plus honteux qu’on puisse imaginer », écrivent dès octobre 1914 une centaine d’intellectuels allemands dans un « Appel au monde civilisé ». L’armée allemande ayant elle-même été accusée d’atrocités contre les civils lors de son invasion de la Belgique et du nord de la France, au début du conflit, Berlin réplique en dénonçant la cruauté supposée des soldats noirs. Ceux-ci, assure la propagande allemande, ne font pas de prisonniers et mutilent les cadavres de leurs adversaires, dont ils coupent la tête, le nez ou encore les oreilles, pour s’en faire des colliers. Des dizaines de milliers de brochures, diffusées dans les pays neutres, évoquent aussi la frénésie sexuelle supposée des tirailleurs sénégalais, qui violeraient toutes les Blanches croisant leur chemin. S’il a bien existé des cas d’exactions commises au coupe-coupe sur des soldats allemands, l’écrasante majorité des témoignages cités en appui de ces accusations sont de pures inventions.
Mais l’opinion allemande est encore imprégnée de cette propagande lorsque, à la fin de 1918, après la victoire de l’Entente, l’armée française occupe la rive gauche du Rhin, suivant les clauses du traité de Versailles. Au sein des troupes d’occupation figurent plusieurs milliers de tirailleurs sénégalais. Le contact direct de la population rhénane avec ces « bêtes féroces » va permettre de combattre les préjugés – les Noirs sont généralement jugés plus polis que les soldats blancs. Mais dans le reste de l’Allemagne, une campagne nationaliste se déchaîne contre la « honte noire », l’occupation par des soldats africains étant considérée comme la pire des humiliations de la part des vainqueurs. Des rumeurs font état du viol de milliers de femmes rhénanes, agitant le spectre d’un métissage forcé qui menacerait la pureté de la race allemande.
Au bout de quelques années, ces accusations se dissipent à la faveur d’une détente dans les relations franco-allemandes, mais les nazis vont reprendre ce thème de l’humiliation de l’Allemagne par une France « négrifiée ». C’est ainsi qu’en 1925, dans « Mein Kampf », Adolf Hitler écrit : « La contamination provoquée par l’afflux de sang nègre sur le Rhin, au cœur de l’Europe, répond à la soif de vengeance sadique et perverse de la France, cet ennemi héréditaire de notre peuple. »
Du fait de cette psychose tenace, en mai-juin 1940, lors de l’invasion de la France par la Wehrmacht, près de 3 000 tirailleurs sénégalais, venus à nouveau défendre la métropole, seront exécutés sommairement après avoir été faits prisonniers.
BIBLIO EXPRESS :« les Tirailleurs sénégalais. De l’indigène au soldat, de 1857 à nos jours », d’Anthony Guyon (Perrin, 2022)« la Honte noire. L’Allemagne et les troupes coloniales françaises, 1914-1945 », de Jean-Yves Le Naour, (Hachette, 2004)Mise à jour le 8 janvier, à 15h : ajout d’une précision sur l’emploi de soldats coloniaux par les Britanniques.
Thomas Legrand, petit journaleux au service de l'Internationale sioniste. D. R.
Un journaliste français du quotidien de gauche Libération s’est permis d’attaquer injustement Algeriepatriotique dans une sortie qui n’est pas si hasardeuse que ça car elle répond évidemment à un agenda bien particulier, confirmant les manœuvres perfides d’un certain lobby qui agit depuis l’Hexagone pour déstabiliser l’Algérie. En effet, le timing choisi par le journaleux Thomas Legrand n’est pas du tout fortuit. Son article intitulé «Diatribe antisémite contre Benjamin Stora au vu et au su du pouvoir» (rien que ça !) n’étant en fait qu’un prétexte que cet hypocrite à la solde de «qui l’on sait» utilise pour faire passer un message au pouvoir en place au pays des droits de l’Homme qui conserve les crânes de certains de nos martyrs… au Musée de l’Homme de Paris. Donc, vos histoires de droit de l’Homme et tutti quanti pas à nous, et surtout pas venant de vous !
Son écrit diffamatoire est, en fait, une réponse évidente à tous ceux qui s’évertuent à s’ingérer dans les affaires algéro-algériennes en prétextant la promotion des libertés dont la liberté de la presse. Et sûrement que ce plumitif agit à la demande de ceux qui cherchent, sans succès, à vouloir imposer à l’Algérie une vision du monde bien particulière. Il suffit de voir ce qu’il est advenu de la Libye qui a été détruite par ces mêmes Occidentaux pour comprendre où ces démons-crates veulent nous mener. Et ça ose encore, sans vergogne, nous parler démocratie et libertés. M. Legrand, c’est bien la France de Sarkozy qui est derrière l’assassinat de Mouammar Kadhafi face à la caméra. Et quel rôle joue régulièrement votre BHL national qui sème le chaos partout où il passe, n’est-ce pas ? Bon, bref ne parlons pas trop de BHL sinon je risque d’être accusé d’antisémitisme. Car cette accusation d’antisémitisme, c’est juste un moyen perfide que vous avez trouvé pour attaquer ce journal, non ? Bien-sûr, c’est évident.
Je ne parlerai pas non plus des propos de votre ancien ministre des Affaires étrangères M. Laurent Fabius qui a osé dire que le groupe terroriste Al-Nosra, c’est-à-dire Al-Qaïda, faisait du bon boulot en Syrie. Non, je ne le dirai pas pour ne pas être qualifié d’antisémite. L’accusation d’antisémitisme à l’encontre d’Algeriepatriotique n’étant, sous la plume téléguidée de ce journaliste, qu’un prétexte qu’il utilise pour arriver à ses fins. Comme on dit, «la fin justifie les moyens». Donc, M. Legrand utilise la question de l’antisémitisme pour arriver à ses fins. CQFD. Il ne fait qu’instrumentaliser le sempiternel chantage à l’antisémitisme qui fait recette quand on y met les formes. Mais dans le fond, ce qui semble déranger ceux qui sont à la manœuvre derrière cette attaque sournoise contre le journal algérien n’est pas ce prétendu antisémitisme contre l’historien Benjamin Stora mais l’actualité en Algérie. M. Legrand veut donner à l’Algérie des leçons des libertés à l’endroit de notre pays. Toujours cette arrogance française qui l’empêche de tirer elle-même les leçons de son histoire. Il attaque ce journal en utilisant la judéité de l’historien Stora de manière hypocrite car on a bien compris que le problème pour lui et ceux qui se cachent derrière cette manœuvre précommandée se situe ailleurs.
Le voilà donc à nous dresser un tableau noir de la situation de la presse en Algérie qui «ne cesse de se refermer», selon ses dires. Il nous parle d’une «dégradation du débat général que l’on constate avec cette mécanique infernale, maintenant bien connue». Quelle sortie, on y croirait presque à ces propos qui reflètent, en fait, la réalité faussée de ceux qui ont fait des mensonges et des détournements de la réalité des faits leur spécialité au quotidien.
Legrand continue sa petite leçon de démocratie à travers son regard de citoyen et de journaliste français soi-disant irréprochable ouvert au monde. Il nous explique ainsi : «Dans les sociétés ouvertes et pluralistes comme les nôtres, la presse, le monde universitaire et le personnel politique continuent, tant bien que mal, à s’échanger des arguments et à proposer une diversité d’angles de vue. Mais dans les sociétés fermées, comme l’est de plus en plus l’Algérie, l’effet polarisant d’une vision du monde paranoïaque joue à plein.»
Tout cela pour en venir à l’actualité algérienne et, plus particulièrement, à la situation de la liberté de la presse en Algérie. Il prend le prétexte de la fermeture du journal Liberté pour en venir au cas du journaliste au rabais Ihsane El Kadi qui a été arrêté il y a quelques jours et dont les deux médias, Radio M et Maghreb-Emergent, ont été ciblés par des mesures administratives.
Mais notre journaliste français prend des libertés avec la réalité des faits. Tout d’abord, il faudrait qu’il s’informe avant de prétendre vouloir informer. Thomas Legrand devrait travailler son sujet avant de faire des sorties hasardeuses qui ne mèneront à rien sinon à se décrédibiliser. Avant d’écrire n’importe quoi sur le journal Algeriepatriotique qu’il accuse de manière éhontée et mensongère d’être un site proche des militaires au pouvoir à Alger, notre arrogant donneur de leçons devrait revoir sa façon de travailler. Je dis cela humblement en tant que lecteur fidèle de ce journal algérien. Mais quand on a affaire à tant de mauvaise foi, comme c’est le cas avec ce journaliste français, il ne faut pas hésiter à dire les choses. Il a beau être journaliste, français, champion du monde exportateur des valeurs universelles toutes catégories confondues, on ne va pas se laisser endormir et enfumer comme ça sans rien dire. M. Legrand, le journal Algeriepatriotique, au cas où cela vous aurait échappé, n’est pas proche du pouvoir d’Alger comme vous le nommez du haut de votre arrogance occidentale puisqu’il y est frappé par la censure depuis des années.
Ensuite, au lieu de vous lancer dans des accusations comme vous le faites, les autorités algériennes sont compétentes et savent très bien ce qu’elles font. Et concernant le cas de votre protégé Ihsane El-Kadi des preuves accablantes contre lui ayant conduit aux mesures frappant ses deux médias existent. Et ce n’est pas pour rien que je l’ai qualifié de journaliste au rabais puisque c’est ce qu’il est. Et son travail de journaliste aussi était un travail au rabais. C’est la définition de plumitif. Un mercenaire qui se cachait derrière sa fonction par opportunisme. Ce n’est pas une insulte puisqu’il relève de faits connus depuis un bon moment déjà. Vous voulez défendre la liberté de la presse en Algérie qui est à la botte de la France car, et c’est un secret de Polichinelle, elle est elle-même financée par le Quai d’Orsay, c’est-à-dire votre ministère des Affaires étrangères. Et ça, vous le savez très bien, n’est-ce pas ? Pas étonnant donc que dans votre billet d’humeur vous y avez glissé perfidement «au vu et au su du pouvoir». C’est plus qu’un message subliminal, sans aucun doute.
Vous accusez sans fondement un journal algérien car deux médias en Algérie, qui sont financés avec des fonds étrangers, agissaient en toute illégalité depuis des années, utilisant des méthodes subversives dans le but de déstabiliser le pouvoir. Mieux vaut laisser la justice algérienne faire son travail dans ce dossier de Ihsane El-Kadi. Les autorités en place savent ce qu’elles font.
Quant aux accusations contre Algeriepatriotique concernant un prétendu discours à caractère antisémite et d’être à la solde du pouvoir d’Alger, ce ne sont que des allégations vite fait démontables. Car on a vite fait de comprendre que vous vous servez de la judéité de M. Stora pour arriver à vos fins. Quelle perfidie vraiment !!! Une petite question, M. Legrand : ne seriez-vous pas vous-même un peu antisémite sur les bords à l’encontre des Algériens ? Tant de clichés ne peuvent être le fruit du hasard. Normal, dans un pays qui n’a pas soldé son passif au regard de son histoire et qui continue d’avoir une attitude pleine d’arrogance qui démontre bien que l’idéologie colonialiste est toujours vivante dans la classe politique française, toutes tendances confondues, mais aussi dans certains milieux qui vivent toujours dans une nostalgérie. Pas étonnant que l’Assemblée nationale française vient d’élire un nostalgique de l’Algérie française, membre du Rassemblement national, José Gonzalez, sympathisant de l’ancienne organisation terroriste OAS, à la vice-présidence du Groupe d’amitié France-Algérie. Incroyable mais vrai !
Le journaliste Thomas Legrand devrait nous donner la définition d’officines de propagandes diverses quand ils visent certains journaux algériens qui ne sont financés ni par la France (comme c’était le cas des deux médias Radio M et Maghreb-Emergent), ni par l’Algérie. Car, je me répète, Algeriepatriotique est un journal indépendant qui est censuré en Algérie et qui ne reçoit de fond d’aucune officine.
C’est vraiment incroyable cette inversion accusatoire. Que Legrand donneur de leçons sache que s’il y a bien un domaine dans lequel excellait Ihsane El Kadi et ses comparses, c’est bien celui de la propagande. Car les deux médias de M. El Kadi qui ont été frappés par des mesures administratives étaient bel et bien des outils de propagande qui officiaient au vu et au su de tous, depuis des années, dans le but de renverser le pouvoir en utilisant la subversion comme méthode de travail.
Algeriepatriotique n’est pas un outil de propagande officiant avec des méthodes particulières et ne cherche en aucun cas d’influer sur la politique interne de pays tiers comme la France, par exemple. Ce journal électronique algérien n’est pas lié, ni de près ni de loin, à des groupes classés comme organisations terroristes. M. Legrand, renseignez-vous donc, si vous ne l’êtes pas déjà, sur l’organisation terroriste Rachad, qui est en fait l’émanation de l’ex-FIS dissous (Front islamiste du salut).
L’Algérie a combattu vaillamment le terrorisme islamiste durant la décennie noire, et son Armée nationale et populaire n’a jamais cessé de lutter contre la vermine intégriste. Elle continue ainsi de veiller, sans relâche, à la sécurité de ses habitants et à l’intégrité du territoire national. Car la souveraineté en Algérie est sacrée. Mais certains ont préféré brader notre souveraineté au profit d’officines étrangères, en utilisant de façon détournée ces fameuses libertés : liberté de la presse, liberté d’informer, liberté d’expression… A ce niveau-là, on peut dire que la liberté à bon dos, surtout quand on sait que les libertés dont certains se font aujourd’hui les défenseurs sont celles qui conduisent inévitablement au chaos comme en Irak, en Syrie, en Lybie… L’Algérie est vaccinée car elle a connu les affres du terrorisme islamiste. Et M. Ihsane El-Kadi fait partie de ceux qui ont flirté avec ceux qui ont du sang sur les mains et qui revendiquaient les assassinats de journalistes et de gauchistes comme Mourad Dhina, du mouvement terroriste Rachad, ex-FIS. M. Ihsane El-Kadi a milité, on sait aujourd’hui pourquoi, pour que l’organisation terroriste Rachad rejoigne le mouvement populaire hirak, qui avait été dévoyé et détourné de ses aspirations légitimes une fois qu’il fût infiltré par des groupuscules extrémistes, qu’il s’agisse de l’extrémisme islamiste avec Rachad ou l’extrémisme identitaire avec le MAK.
Je conseille donc à M. Thomas Legrand un célèbre youtubeur algérien en la personne de M. Rafaa. Un vrai nationaliste algérien qui défend avec ferveur et dignité notre nation en mettant à nu toutes les méthodes et les stratagèmes utilisés par tous ceux qui se révèlent être de véritables dangers pour la sécurité nationale en Algérie, mais également un véritable danger pour l’humanité entière. Je lui conseille également les travaux de notre cher Professeur M. Ahmed Bensaada, un autre nationaliste algérien compétent et qualifié. Ils vous donneront des leçons de ce qu’est un travail d’investigation de qualité. Et quand M. Thomas Legrand met en avant l’échange d’arguments et la diversité d’angles de vue, qu’il sache qu’Ihsane El-Kadi et sa clique ont toujours refusé le débat contradictoire, préférant rester figés dans cette posture de faux opposants. M. El Kadi allant même jusqu’à insulter le Professeur Bensaada de barbouze lors de la sortie de son livre Mais qui sont ces ténors autoproclamés du hirak ? qui mettait à mal ceux qui ont, en fin de compte, dévoyé et détourné ce mouvement populaire à des fins plus qu’obscures.
Je rappelle à M. Legrand qu’être nationaliste n’est pas un gros mot pour les Algériens car notre nationalisme est issu du mouvement révolutionnaire national qui a conduit à la libération du pays après 132 années de colonisation. Notre nationalisme n’est pas expansionniste lui, il ne menace pas d’autres pays comme celui des Occidentaux. Au contraire, puisqu’il a même servi d’exemple dans les pays du tiers-monde à des mouvements révolutionnaires et/ou de libération qui avaient à cœur l’indépendance de leurs territoires et l’émancipation de leurs peuples de l’oppression de vos sociétés dites modernes. L’Algérie a su jouer ce rôle dans le Mouvement des pays non alignés de manière non arrogante. Elle aspire, comme de plus en plus de nations, à une vision multipolaire du monde. Elle ne veut pas tomber dans le piège de la paranoïa que veulent nous tendre ceux qui n’ont jamais pu accepter notre indépendance et qui se sont cru obligés de nous donner des leçons de façon arrogante. C’est fini le temps des colonies, M. Legrand ! L’Algérie a accédé à sa libération et ne compte pas se soumettre à l’ancien colonisateur qui semble ne pas vouloir se détacher de cette idéologie colonialiste.
L’Algérie a toujours su conserver cette position de non-alignement dans sa relation au monde. Elle n’a pas, contrairement aux pays occidentaux et notamment à la France, une empathie à géométrie variable concernant la guerre en Ukraine. C’est pour cela que l’on n’a pas à recevoir de leçons de quiconque en matière de libertés, en matière de lutte contre le terrorisme islamiste… L’Algérie est fidèle à ses principes et ne bradera jamais sa souveraineté sous couvert de la promotion des «valeurs universelles des droits de l’Homme» d’un pays qui refuse d’assumer son passé criminel et qui vient d’élire à la vice-présidence du Groupe France-Algérie un député du Rassemblement national, nostalgique et sympathisant de l’OAS.
Que Thomas Legrand nous parle plutôt du rôle pro-pédophilie du journal Libération dans lequel il officie en tant que journaliste. Car le journal Libération est mal placé pour faire la leçon à Algeriepatriotique, surtout quand on a avoué avoir protégé un journaliste pédophile. Ainsi, de ses 10 à ses 18 ans, le jeune Franck Demules a été abusé par le journaliste Christian Hennion, alors qu’à la rédaction du journal tout le monde était plus ou moins au courant. Libération qui a employé et défendu un journaliste emblématique pédophile. Ce n’est pas nouveau puisque certains ont dénoncé à plusieurs reprises le rôle pro-pédophilie du journal Libération. Sa position face au cas Matzneff symbolise également l’attitude d’une certaine presse de gauche. Comme le journal Le Monde par ailleurs (et que dire du silence complice autour des affaires sordides de Pierre Bergé et Yves Saint-Laurent autour de la fameuse villa Marjorelle à Marrakech…).
L'historien Benjamin Stora victime d'un “antisémitisme insupportable”
Certains y lisent une nouvelle preuve de ce que l’Aglérie se replie sur elle-même, mais d’aucuns constatent surtout l’agressivité et la violence du propos. L’universitaire Benjamin Stora, qui enseigne l’histoire du Maghreb contemporain, est pris à partie dans un média algérien. Et ce, alors que les journaux indépendants endurent de virulentes attaques.
Le Pen Club français a réagi, en condamnant la diatribe médiatique. Leur tribune est ici reproduite dans son intégralité.
Pour Benjamin Stora lâchement attaqué avec l’aval du pouvoir algérien !
C’est sur le site Algérie Patriotique proche du pouvoir militaire algérien que Benjamin Stora, auteur d’un remarquable travail de mémoire concernant l’histoire partagée de la France et de l’Algérie se voit attaqué. Et ce en des termes qu’il faut bien qualifier de marqués par un antisémitisme insupportable.
« La pauvre France est en droit de se faire conduire comme bon lui semble dans l’écriture de son histoire, mais le peuple algérien refuse d’emprunter ce même chemin tracé par Benjamin Stora, ses semblables et ses aïeux. Ceux-là mêmes qui furent à l’origine de la prise d’Alger, les Bacri et les Busnach — commerçants véreux convoitant l’immense trésor de la Régence pour leurs maîtres les Rothschild, les Seillière et les Schneider »
Aucune critique de ce boulet à l’initiative des institutions algériennes ou dans la presse comme si c’était là un point de vue recevable et partagé !
À l’heure où l’Algérie bâillonne ses citoyens, arrête le directeur de radio M et de « Maghreb émergent » qui comptaient parmi les seules voix libres et démocratiques restantes et les condamnent à des fermetures inacceptables, Le Pen Club français veut affirmer sa solidarité avec le peuple algérien menacé dans ses droits les plus élémentaires.
Il apporte tout son soutien à Benjamin Stora, historien de haute tenue qui incarne l’honneur de notre pays par les recherches scientifiques et équilibrées qu’il mène, un travail rigoureux pour faire éclore la vérité à charge et à décharge des deux peuples qui aspirent aujourd’hui, nous n’en doutons pas, à une vraie collaboration.
En 2022, sur presque tous les continents, les informations se sont empilées au sujet d’activistes, de journalistes, de personnalités politiques et d’autres individus ayant été des cibles présumées d’attaques de logiciels espions commanditées par des États.
La plupart des attaques commanditées par des États se rapportent à Pegasus et à la fuite d’une liste contenant plus de 50 000 numéros de téléphone (AFP/Nicolas Asfouri)
Nous arrivons au point de rendez-vous que Ghanem al-Masarir nous a donné. Mais il n’y a aucun signe de sa présence. Un chemin bordé d’arbres à l’orée d’un bois sombre ? Oui. Un pré tapissé d’herbe verte ? Oui. Ghanem ? Non.
Lorsque nous avons convenu de nous rencontrer au bord de ce parc dans la campagne du nord-ouest de Londres, il s’agissait d’un plan inhabituel – mais pour Ghanem al-Masarir, cela s’entendait parfaitement.
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En 2018, cet homme de 42 ans qui vit au Royaume-Uni depuis dix-neuf ans était au sommet de sa carrière autodidacte. The Ghanem Show, sa chaîne YouTube qui critiquait de manière acerbe – et parfois loufoque – la famille royale saoudienne, avait atteint 300 millions de spectateurs.
L’un des surnoms qu’il employait pour désigner le prince héritier Mohammed ben Salmane, le dirigeant de facto du royaume – était « Al-dub Al-dasher » (gros ours errant). Il était relayé sur les réseaux sociaux aux quatre coins du monde arabe et même The Economist parlait de lui.
« Aujourd’hui, à l’ère de Salmanco et de son ours errant, également appelé “double slip”, on peut passer des années et des années en prison pour un tweet », plaisantait-il dans un épisode consacré au roi d’Arabie saoudite et à son fils.
Mais un vendredi soir au cours de ce mois d’août, alors qu’il déambulait dans le quartier chic de Knightsbridge à Londres, Ghanem al-Masarir a été agressé par deux hommes devant Harrods. Un troisième homme a filmé l’agression : les images sont rapidement apparues sur les réseaux sociaux, sur des comptes liés au gouvernement saoudien.
Ghanem al-Masarir a la certitude que cette agression a été ordonnée par le prince héritier.
Piraté avec Pegasus
Trois mois plus tard, quelques semaines après l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi au consulat saoudien à Istanbul, la Metropolitan Police s’est rendue au domicile londonien de l’humoriste. Une menace crédible pesait sur son existence, lui a-t-on affirmé. Un mécanisme d’alerte a rapidement été installé.
De plus, il a remarqué quelque chose d’étrange sur ses iPhone. Leur batterie se vidait à vue d’œil. Ils refusaient d’installer les dernières mises à jour.
Perplexe, Ghanem al-Masarir a contacté le Citizen Lab, un groupe de l’université de Toronto spécialisé dans les technologies de communication, les droits de l’homme et la sécurité mondiale.
Le groupe d’universitaires a mené une enquête et découvert que les téléphones avaient été piratés avec Pegasus, le logiciel espion de la société israélienne NSO Group qui transforme les téléphones en dispositifs de surveillance de niveau militaire.
Les enquêteurs ont découvert que l’ensemble des déplacements, conversations, photos et messages de Ghanem al-Masarir avaient été transmis à un serveur saoudien.
Cela fait maintenant quatre ans. Accompagnée d’un caméraman, je m’apprête à rencontrer Ghanem al-Masarir à un point qu’il a marqué sur une carte dans ce parc en pleine campagne.
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Ces jours-ci, me dit-il par le biais d’une application cryptée, il est préférable de ne pas filmer chez lui. J’ai regardé des extraits de son émission et une interview qu’il a accordée à Channel 4 en janvier 2020, dans laquelle il est si bavard que le présentateur est obligé de le couper. Je m’attends presque à le voir jaillir d’un buisson. Ou sortir de la camionnette blanche arrêtée non loin.
Mais où est-il ?
Une silhouette s’avance droit vers moi. L’individu se présente : ce n’est qu’alors que je comprends que cet homme, enveloppé dans une épaisse écharpe et une lourde veste en daim en cette chaude journée de juin, est le présentateur du Ghanem Show – ou, du moins, l’était.
Après avoir trouvé un rondin noueux sur lequel nous asseoir, il m’explique qu’il a arrêté de tourner après les événements de 2018. « Je ne pouvais pas faire mon émission, je ne pouvais rien faire », raconte-t-il, scrutant tour à tour du regard un promeneur avec son chien, une famille et deux hommes qui passent par là.
Menaces de mort
Ce n’était pas la première fois qu’on tentait de le réduire au silence. YouTube a fermé sa chaîne à deux reprises à la demande de la Saudi Broadcasting Authority, affirme-t-il. Il avait reçu des menaces de mort et des appels téléphoniques menaçants.
Vivant sous protection policière et craignant de se rendre à un quelconque endroit du centre de Londres, il a vu sa vie se refermer sur lui. « Ce piratage m’affecte dans ma vie professionnelle, ma vie personnelle, partout », confie-t-il. « Il a détruit mon envie de faire quoi que ce soit, pour être honnête. »
« La surveillance est une forme de violence. Elle porte atteinte à votre vie privée, à votre dignité, à votre capacité d’action. Vous êtes dans un état perpétuel de peur et d’anxiété, non seulement par rapport à vous-même mais aussi par rapport aux autres »
- Marwa Fatafta, Access Now
En 2022, sur presque tous les continents, les informations se sont empilées au sujet d’activistes, de journalistes, de personnalités politiques et d’autres individus ayant été des cibles présumées d’attaques de logiciels espions commanditées par des États.
La plupart se rapportent à Pegasus et à la fuite d’une liste contenant plus de 50 000 numéros de téléphone. Des collaborateurs de Middle East Eye ont notamment été visés.
Cependant, la simple ampleur des Pegasus Papers – qui n’étaient qu’une fuite concernant un seul logiciel espion – ne traduit nullement l’impact du piratage sur la vie de ses cibles.
Parmi elles figurent des dissidents arabes qui se sont installés il y a plusieurs décennies au Royaume-Uni pour fuir un gouvernement répressif, convaincus qu’ils pourraient alors vivre et s’exprimer librement. Aujourd’hui, ils se demandent si leur pays d’adoption est aussi sûr qu’ils le croyaient – ou peut-être, qu’ils voulaient le croire.
Leur crainte, affirment-ils, est exacerbée par le mutisme du gouvernement britannique après les attaques et par l’absence de suivi de la part des autorités britanniques.
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Ainsi, se demandent les dissidents, qu’est-ce qui les empêcherait d’être à nouveau pris pour cibles, étant donné que le Citizen Lab affirme maintenant que même Downing Street et le Foreign Office ont été infectés avec Pegasus, probablement par les Émirats arabes unis ?
À l’instar de Ghanem al-Masarir, tous les dissidents interrogés par MEE dans le cadre de cet article avaient le pressentiment, avant d’être piratés, que le Royaume-Uni n’était peut-être pas à l’abri du danger. Un matin, l’un d’entre eux a survécu à une tentative d’incendie criminel visant son domicile familial. Un autre a découvert un grand couteau devant la fenêtre de sa cuisine le jour même où il a reçu des messages indiquant « Bientôt » avec des émojis en forme de couteau.
Deux autres ont vu leurs comptes bancaires britanniques – et ceux de membres de leur famille – fermés après que les Émirats arabes unis ont désigné les organisations établies au Royaume-Uni qu’ils dirigent comme organisations terroristes.
Mais le piratage les a perturbés d’une autre manière, soulignent les dissidents. Le fait que leur vie privée ait été infiltrée dans l’espace virtuel, à leur insu et sans autre témoin, en temps réel, comporte pour eux quelque chose d’incroyablement pénible.
Il s’agit d’un traumatisme invisible, mais bel et bien réel et puissant, que Marwa Fatafta, spécialiste des droits numériques et responsable des politiques pour la région MENA au sein d’Access Now, reconnaît immédiatement lorsque je lui raconte les témoignages recueillis.
« La surveillance est une forme de violence », embraye-t-elle. « Elle porte atteinte à votre vie privée, à votre dignité, à votre capacité d’action. Vous êtes dans un état perpétuel de peur et d’anxiété, non seulement par rapport à vous-même mais aussi par rapport aux autres. »
Un précédent
Les six hommes avec lesquels j’ai échangé ont engagé des actions en justice au Royaume-Uni contre Bahreïn, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, accusés de les avoir ciblés à des occasions différentes. Ils espèrent que les tribunaux britanniques agiront là où ils estiment que le gouvernement britannique et les autorités ont failli.
Un jugement est imminent dans l’affaire que Ghanem al-Masarir a intentée contre l’Arabie saoudite pour les allégations d’usage d’un logiciel espion ainsi que l’agression subie en pleine rue en août 2018.
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Mais il ne s’agira pas d’un verdict définitif : le tribunal se prononcera en revanche quant à la poursuite de l’action engagée par l’humoriste contre le royaume pour des dommages corporels et matériels. Généralement, les États sont à l’abri de la plupart des litiges au Royaume-Uni en raison du State Immunity Act, promulgué en 1978, avant l’apparition des logiciels espions.
Néanmoins, les avocats de Ghanem al-Masarir, du cabinet britannique Leigh Day, soutiennent que ce qui lui est arrivé constitue une exception à cette loi. L’affaire qui le concerne donnera lieu à la première décision d’un tribunal britannique se rapportant à un logiciel espion et à un pays étranger, et pourrait constituer un précédent pour d’autres dissidents au Royaume-Uni qui ont été ciblés. Par ailleurs, selon des avocats et des experts en surveillance, elle pourrait inspirer de futurs litiges dans le monde entier.
Les gouvernements saoudien, émirati et bahreïni n’ont pas répondu aux demandes de commentaires formulées par MEE au sujet de l’action en justice intentée au Royaume-Uni.
Anas al-Tikriti, 53 ans, est anglo-irakien. Son père était une figure éminente de l’opposition au régime baasiste. Sa famille a quitté l’Irak pour le Royaume-Uni alors qu’il était bébé.
Après avoir passé une grande partie de son adolescence et le début de sa vie d’adulte aux Émirats arabes unis, où il a étudié, Anas al-Tikriti est retourné au Royaume-Uni, où il milite contre la guerre et pour la démocratie au Moyen-Orient, dirige une fondation prônant le dialogue entre l’islam et l’Occident et officie en tant que négociateur d’otages.
Posé et clair dans son propos, comme à son habitude, il s’exprime avec aisance alors même que la pluie s’abat sur nous. Mais ce qui me frappe, c’est que pour la première fois au bout de plusieurs interviews données au fil des ans, je l’entends se confier sur ses sentiments, lorsqu’il explique dans quelle mesure la surveillance numérique l’a affecté.
« C’est quelque chose d’invisible, d’insidieux, qui s’infiltre dans votre espace le plus sûr et le plus sacré. »
Anas al-Tikriti a fondé la Fondation Cordoba en 2005. Celle-ci prône le dialogue entre l’Occident et l’islam et conseille les responsables politiques dans les domaines de la stratégie et de la sécurité au Moyen-Orient. En 2014, elle a été désignée comme une organisation terroriste par les Émirats arabes unis – mais le gouvernement britannique n’a rien dit, à la surprise d’Anas al-Tikriti.
« Au moins, qu’ils se dédouanent, sans même penser à moi ou à Cordoba », lance-t-il à propos du gouvernement britannique. « Cela a marqué ma perception de la valeur de la citoyenneté britannique. Mais c’est probablement le dernier clou dans le cercueil. »
« Il faut faire attention, Anas a son téléphone sur lui »
Anas al-Tikriti a appris l’été dernier que des enquêteurs soupçonnaient les Émirats arabes unis d’avoir piraté son iPhone avec Pegasus. Depuis lors, il demande à ses interlocuteurs de ne pas lui confier leurs secrets, ce qui est un peu délicat lorsque l’on gagne sa vie en proposant des conseils politiques à des dirigeants et en menant des négociations d’otages.
Son goût pour la manipulation d’informations un tant soit peu confidentielles s’est aujourd’hui envolé. « Je leur dis : “Écoutez, je préférerais que [vous ne me disiez rien de privé], sauf si vous le devez, parce que je ne sais pas si je suis le seul à écouter.” »
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Avant les événements de l’été dernier, son téléphone était pratiquement collé à son corps, prêt à être dégainé à tout moment. Aujourd’hui, il ne sait plus quand le garder près de lui, ni s’il en a envie. Les proches éprouvent le même sentiment. J’étais avec un groupe d’amis et ils se sont mis à rire : « Il faut faire attention, Anas a son téléphone sur lui. » Il hausse les épaules. « C’est extrêmement inconfortable. »
Mohammed Kozbar, 56 ans, est le président de la mosquée de Finsbury Park, dans le nord de Londres. Deux jours après la fin du Ramadan, nous nous asseyons dans la salle de prière déserte de la mosquée, calme et au sol moelleux, traversée par une brise soufflant depuis une fenêtre ouverte.
Le grand gabarit de Mohammed Kozbar, confortablement juché sur une chaise pliante, dégage aussi un air calme. Pourtant, il est de toute évidence gêné à l’idée de parler de lui-même.
Il est arrivé en Grande-Bretagne en 1990 après avoir quitté le Liban, dévasté par une longue guerre civile. Depuis, il veille au développement de la communauté musulmane en Grande-Bretagne : il est l’un de ceux à qui l’on doit la réhabilitation de la mosquée de Finsbury Park, dominée auparavant par l’Égyptien Abou Hamza.
En tant qu’iman de la mosquée, Abou Hamza encourageait ses fidèles à aller combattre à l’étranger. Il a ensuite été condamné par un tribunal britannique pour incitation à la violence avant d’être extradé aux États-Unis, où il a été reconnu coupable de terrorisme et emprisonné à vie.
Mohammed Kozbar invite régulièrement des délégations internationales de représentants des forces de l’ordre à visiter la mosquée afin d’observer le travail entrepris pour éradiquer l’influence d’Abou Hamza.
En juillet 2021, il a lui aussi découvert que son numéro figurait sur la liste divulguée et qu’il avait probablement été ciblé par les Émirats arabes unis. Le Citizen Lab a analysé son téléphone et confirmé qu’il avait été infiltré par Pegasus. Il n’en connaît pas la raison exacte, même s’il a déjà dénoncé le bilan des Émirats arabes unis en matière de droits de l’homme.
Négociation d’otages
Comme pour Anas al-Tikriti, ses comptes bancaires britanniques ont été fermés lorsque les Émirats arabes unis ont désigné la Muslim Association of Britain, au sein de laquelle les deux hommes occupent un poste de direction, comme une entité terroriste.
Il se souvient du moment où, alors qu’il était assis dans la mosquée, un journaliste lui a raconté ce qui était arrivé à son téléphone. « Je lui ai demandé : “Vous êtes sûr à 100 % ?” Il a confirmé : “Oui, à 100 %.” »
« Même si vous vous êtes installé dans ce qui est considéré comme une démocratie occidentale stable et à l’abri du danger, vous pouvez toujours être pourchassé et persécuté »
– Monika Sobiecki, associée au cabinet d’avocats Bindmans
Quelques heures plus tard, il a expliqué à son épouse et à ses enfants que les photos et les conversations qu’ils avaient partagées n’étaient pas privées. Et c’est cette idée que l’on avait porté atteinte à la vie privée de sa famille qui l’a particulièrement perturbé.
« Qu’est-ce que tu as fait, Baba ? », lui a demandé son fils de 13 ans. « Je n’avais pas de réponse », confie Mohammed Kozbar, la voix enrouée. « J’ai répondu : “Je n’ai rien fait.” » Il se demande s’il existe un fichier contenant les messages et les photos de sa famille, et où celui-ci pourrait se trouver.
Anas al-Tikriti est pour sa part convaincu que les informations recueillies lorsque son téléphone a été infecté sont déjà utilisées. Au moment où les enquêteurs affirment qu’il a été piraté, il participait à quatre négociations d’otages, dont aucune n’impliquait les Émirats arabes unis.
Un effort en particulier, visant à obtenir la libération d’une jeune femme, était arrivé à sa phase finale. Pourtant, explique-t-il, toute communication a été interrompue avant que l’accord ne soit conclu et l’otage libérée. Il s’arrête. « J’ai négocié dans 31 ou 32 affaires et jamais, jamais, ce que je viens de vous décrire ne m’est arrivé. »
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C’était il y a deux ans. Aujourd’hui, Anas al-Tikriti n’a aucune idée de l’endroit où se trouve cette femme, ni de ce qui est arrivé aux personnes dans la région qui ont tenté de la libérer. « Dans quel genre de danger cela les a-t-il mis ? Dieu seul le sait. »
Anas al-Tikriti n’a cessé de se demander s’il devait annoncer à la famille de cette femme que son téléphone avait été piraté. Même si le fait de savoir comment l’affaire a capoté représente pour lui un fardeau, il a conclu que leur communiquer les détails ne leur serait d’aucune utilité. Il tousse et semble perdre ses mots, chose inhabituelle.
« La personne sur laquelle ils fondaient beaucoup d’espoir n’était pas aussi sûre qu’ils l’espéraient. Je n’aurais rien pu faire. Je ne m’en étais pas rendu compte à ce moment-là. Je ne m’en étais pas rendu compte, même lorsque les choses étaient retombées. »
C’est cette ignorance qui, selon les avocats impliqués dans l’action en justice en cours, a été l’un des coups les plus durs portés à leurs clients, et qui alimente encore aujourd’hui leur anxiété.
« S’il peut être déployé contre vous une fois, qu’est-ce qui vous garantit qu’il ne l’est pas aujourd’hui ? », souligne Monika Sobiecki, associée au sein du cabinet d’avocats britannique Bindmans, qui représente Mohammed Kozbar et Anas al-Tikriti.
« Dans les faits, cela crée un panoptique – une perception du monde comme une prison – et il n’y a aucun endroit où vous pouvez être à l’abri de ceux qui vous persécutent, parce que même si vous vous êtes installé dans ce qui est considéré comme une démocratie occidentale stable et à l’abri du danger, vous pouvez toujours être pourchassé et persécuté. »
Yahya Assiri n’est certainement pas détendu. « Honnêtement, je ne me sens pas en sécurité dans ce pays », me dit-il depuis le bureau londonien d’ALQST, l’organisation de défense des droits de l’homme qu’il a créée en 2014 après avoir cessé sa double vie en Arabie saoudite.
Au premier abord, Yahya Assiri était un officier de l’armée de l’air saoudienne chargé d’acheter des armes. Mais il utilisait également le pseudonyme d’Abou Fares pour exprimer en ligne ses préoccupations sur des questions telles que la pauvreté, le chômage et la répression. Il a finalement été démasqué.
En 2014, alors qu’il étudiait les droits de l’homme à l’université Kingston, dans le sud-ouest de Londres, des amis en Arabie saoudite lui ont appris que les forces de sécurité le recherchaient. Il a alors compris qu’il ne pourrait pas rentrer chez lui.
Depuis huit ans, Yahya Assiri s’affaire à critiquer les politiques et les dirigeants du royaume depuis le Royaume-Uni. En plus d’ALQST, il a lancé Diwan London, une plateforme en ligne qui défend la liberté et la justice dans le monde arabe.
Il est également secrétaire général du Parti de l’Assemblée nationale (NAAS), le seul parti d’opposition en Arabie saoudite, en grande partie dirigé par des exilés.
Cependant, son travail et en particulier les réseaux qu’il a construits font de Yahya Assiri et de sa famille une cible. Ils ont été menacés en public. Leur voiture a été forcée. C’est devant la fenêtre de leur cuisine qu’un couteau a été trouvé.
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Yahya Assiri a lui-même la particularité peu enviable d’avoir été ciblé par Pegasus non pas une fois, mais deux, d’après les enquêteurs du Citizen Lab.
Ils attribuent ces deux attaques à l’Arabie saoudite. « Le plus douloureux, c’est qu’un grand nombre de défenseurs des droits de l’homme et de dissidents ont été pris pour cible tout au long de cette période, des gens que je considère comme des patriotes, des gens qui travaillent pour le bien de ces pays. »
Dans un courrier préalable à une action en justice adressé en février à Khaled ben Bandar ben Sultan al-Saoud, ambassadeur d’Arabie saoudite au Royaume-Uni, les avocats de Yahya Assiri affirment que la quantité de données qui pourraient avoir été exfiltrées du téléphone de leur client lorsqu’il a été infecté « n’est rien moins que catastrophique » pour leur client et ses contacts dans le royaume.
Parmi ces contacts figure Loujain al-Hathloul, l’éminente activiste saoudienne des droits de l’homme qui a été arrêtée avec au moins une dizaine d’autres Saoudiennes en mai 2018, quelques semaines avant la levée de l’interdiction de conduire contre laquelle elles avaient mené une longue bataille. Loujain al-Hathloul a été détenue pendant dix mois et victime de torture physique avant d’être officiellement inculpée. Son acte d’accusation était truffé de références à ses échanges avec « le renégat Yahya Assiri ».
Selon Yahya Assiri, il est difficile de savoir si les informations provenant de son téléphone ou d’autres appareils ont été essentielles dans l’affaire Loujain al-Hathloul ou toute autre affaire. Les téléphones de Loujain al-Hathloul ont également été piratés à deux reprises depuis 2017.
Yahya Assiri estime néanmoins que tenter de déterminer quelle infiltration de quel appareil a donné lieu à quelle arrestation revient à passer à côté de l’essentiel. « C’est douloureux de savoir que notre travail faisait l’objet d’un espionnage. Mais le plus important n’est pas nécessairement que ces autorités essaient de découvrir nos secrets. C’est qu’elles essaient d’empêcher quiconque de s’exprimer contre eux ou de les défier. »
Des dissidents bahreïnis traqués
Saeed Shehabi pensait avoir trouvé le moyen de ne pas se faire pirater. Activiste pro-démocratique et journaliste chevronné, mais aussi figure de proue du mouvement d’opposition bahreïni, il est membre du conseil d’administration de l’Abrar Islamic Foundation, une organisation caritative enregistrée qui se consacre à l’éducation musulmane au Royaume-Uni.
Mais lorsque j’appelle la fondation, l’homme au bout du fil s’excuse. Saeed Shehabi n’est pas là, explique-t-il.
Je demande s’il peut lui transmettre un message. « Non, désolé. Il n’a pas de portable », répond-il.
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Lorsque nous finissons par nous rencontrer, Saeed Shehabi, 67 ans, explique qu’il n’a jamais eu de téléphone. « J’ai pris mes précautions. Je savais que j’étais visé par notre gouvernement parce que j’ai toujours été un opposant. » La stratégie consistant à ne pas avoir de téléphone s’inscrit dans ses méthodes de la vieille école, ancrées dans le monde réel.
Tous les mercredis après-midi, on le retrouve devant l’ambassade d’Arabie saoudite à Londres, où il a commencé à manifester avec des camarades en mars 2011 après que le royaume a envahi Bahreïn au cours de manifestations pro-démocratiques. Le samedi, il est à Downing Street pour exhorter le gouvernement britannique à cesser de soutenir Bahreïn et de former ses forces de sécurité.
En ce qui concerne la surveillance dont il fait l’objet, il affirme également être un vieux de la vieille. Dans les années 1980, il a reçu chez lui, à Londres, au moins trois appels téléphoniques suspects en provenance de Bahreïn, destinés selon lui à le démasquer.
Une autre fois, lors d’une campagne de répression gouvernementale, un camarade dissident a l’appelé pour organiser un entraînement militaire, ce qui a interloqué Saeed Shehabi, qui a soutenu que ce n’était pas ainsi que l’opposition bahreïnie devait opérer. Il s’est avéré par la suite que l’ami en question l’appelait depuis une prison bahreïnie. « Ils voulaient m’attraper comme ça », explique-t-il à propos de cet appel et des autres qui ont suivi. « La surveillance a toujours été là. »
En 2014, une fuite a révélé que Bahreïn aurait piraté l’ordinateur de Saeed Shehabi à l’aide du logiciel espion FinSpy et aurait eu accès à ses e-mails. Les autorités pouvaient même contrôler la caméra et les micros de son ordinateur portable pour le voir et l’écouter.
Il s’en est pourtant voulu.
« Je me fais vieux et ces années se sont envolées pour rien, tout cela à cause des Saoudiens »
– Ghanem al-Masarir
« “Comment peux-tu être aussi naïf, Saeed ?”, s’est-il demandé à l’époque. “Comment peux-tu laisser tes ennemis s’infiltrer chez toi aussi facilement ?” » Il se retourne vers moi. « Ce n’est pas si facile. Ils ont payé. C’est une procédure qui coûte cher. Mais ils ont réussi. »
Saeed Shehabi explique avoir été particulièrement affecté par la découverte de ce piratage, car en 2009, sa famille avait déjà échappé à un incendie allumé un matin à son domicile. Cet incendie est survenu deux jours après l’agression de deux dissidents bahreïnis dans une ruelle près de la gare d’Euston à Londres.
D’après le témoignage de Saeed Shehabi et des autres dissidents bahreïnis devant la commission britannique des affaires étrangères en novembre 2012, ils avaient été avertis d’une « attaque imminente » avant ces deux événements. Après avoir été attaqués dans la rue, les deux dissidents ont affirmé avoir été informés par téléphone que la prochaine fois qu’ils s’approcheraient de l’ambassade de Bahreïn, « [ils seraient] plus sévèrement punis ».
Saeed Shehabi est certain que ces attaques étaient destinées à les faire taire. « Alors quand cela [un piratage] se produit, à la lumière de ces expériences, on se dit : “Que va-t-il nous arriver ensuite ?” »
Dans le bois à la périphérie de Londres, Ghanem al-Masarir semble plus détendu. En quatre ans, il a raconté les détails de sa vie à des dizaines de journalistes. Une fois que nous avons fini de filmer, il reconnaît que c’est fatigant.
« Je me fais vieux et ces années se sont envolées pour rien, tout cela à cause des Saoudiens », soupire-t-il. « Je ne pourrai pas rattraper ces années, mais j’espère qu’un jour, je me relèverai. »
Il nous propose de prendre un café. Nous avons fait beaucoup de route pour le rencontrer et il souhaite nous montrer son quartier. Alors que nous passons devant la camionnette blanche, je lui explique que je croyais qu’il allait en sortir lorsque nous le cherchions tout à l’heure.
Il s’arrête. Je crains alors d’avoir dit quelque chose de mal. Il finit par sourire et je retrouve un visage familier. « Vous pensiez que j’étais en train de me faire découper en morceaux là-dedans ? », rétorque-t-il en riant.
Nous nous dirigeons vers un coin de banlieue animé. Alors que Ghanem marche entre moi et le caméraman, le soleil illumine furtivement son visage.
A l’heure où, au-dessus de nos têtes, un ballet aéronautique dessine des lignes bien droites vers les lieux de rêve où nos contemporains vont fêter le passage vers une nouvelle année, plus bas, bien plus bas, d’autres, pour venir jusqu’à nous, s’engagent dans une périlleuse recherche de passages, de frontière en frontière, entre la mer, les sables, les murs et les barbelés.
Souvenirs… Après une interminable traversée du Sahara sur le pont d’un camion, entre l’Algérie et le Niger, on découvrait la ville d’Agadez comme un centre logistique pour tous ceux qui tentaient la redoutable traversée du désert en direction de Nord. Une bande de passeurs ordinaires, commerçants, convoyeurs, migrants rescapés d’un naufrage abreuvant de leurs conseils les nouveaux candidats à l’exil, s’y affairait, au vu et au su de tout le monde. Depuis 2015, une nouvelle loi, sur le modèle de celles adoptées par la plupart des gouvernements européens, criminalise toute forme d’entraide, favorisant, paradoxalement, le développement d’un trafic de passeurs clandestins, mieux organisés, impitoyables, jouant avec la vie et la mort des demandeurs d’asile. Si Agadez me revient en mémoire, c’est parce qu’aujourd’hui, c’est là que des bus en provenance d’Algérie ou de Libye déversent les déportés de l’asile, celles et ceux devant qui le passage de la Méditerranée est resté fermé parce qu’ils n’avaient pas de quoi payer le passeur.
Obnubilés par l’idée que ce sont ces organisations criminelles et elles seules qui sont responsables de l’afflux de requérants, comme si, sans elles, aucun être humain ne pouvait ressentir l’impérieuse nécessité de sauver sa peau en fuyant la guerre ou la misère, les gouvernements leur ont déclaré la guerre. Mais il ne faut pas confondre le symptôme et la cause. Surtout parce que la figure du passeur est loin d’être univoque: c’est une zone grise qui comporte autant de bienfaiteurs et de sauveteurs que d’opportunistes ou de crapules. Toutes et tous sont criminalisés et condamnés, sauf probablement les plus redoutables! Parfois, ce sont les victimes des crapules, les migrants eux-mêmes, qui se trouvent inculpés comme passeurs. Il suffit pour cela que les garde-côtes et les agents de Frontex aient repéré, un peu au hasard, celui qui, sur une embarcation, tient le gouvernail, ou la boussole, ou même le téléphone pour les secours, pour l’envoyer en prison sans ménagements et pour longtemps.
Et si ça ne marche pas, il y a plus vicieux: pourquoi ne pas délocaliser ces indésirables? Pour la ministre des Affaires étrangères de Grande-Bretagne (mais elle n’est pas la seule), les expédier au Rwanda serait la solution idéale! Et conforme au droit, puisque les demandes d’asile seraient examinées sur place et, le cas échéant, le droit de séjour octroyé. Mais attention: pour le Rwanda, pas pour l’Angleterre! Ironie: c’est la construction d’un passage facilité vers ce pays, le tunnel sous la Manche, qui a eu pour effet de multiplier les périlleuses traversées sur des embarcations de fortune et les noyades tragiques quand les secours font la sourde oreille.
En réalité, les passeurs se comptent aussi du côté des gouvernements qui déplacent des migrants d’un coin à l’autre du monde: par car de Tripoli à Agadez, par vol spécial, de Lausanne en Georgie, ou de Londres à Kigali, par train de Genève en Grèce et de Berne en Croatie. Le système Dublin est une agence de passeurs. Tout cela me fait penser au nocher Charon, le passeur des enfers de la mythologie grecque, qui, moyennant obole placée par les vivants dans la bouche des morts, faisait passer le fleuve Styx aux trépassés. Comme lui, nos autorités acheminent des cercueils vers les pays d’origine des noyés, ou vers l’Afghanistan quand le demandeur d’asile menacé de renvoi a choisi la mort plutôt que l’expulsion…
Au tournant de l’année, il conviendrait sans doute de finir sur une note positive. A cet égard, on peut souligner que les migrants qui parviennent jusqu’à nous ont accompli une véritable prouesse! Pendant parfois des années, ils ont cherché les passages et les passeurs, résisté aux violences et aux chantages, subi l’enfermement et la torture, côtoyé la mort. A leur arrivée, ils sont donc riches de capacités d’endurance, de résilience, de savoir-faire et d’entraide. Ils deviennent des passeurs d’espoir, ce qui devrait leur valoir l’octroi immédiat d’un permis de séjour! Ils ne sont pas les seuls. Je pense aussi à toutes celles et ceux qui se mobilisent, inlassablement, pour leur venir en aide et à toutes celles et ceux qui nous font vibrer d’émotion, de bonheur et de reconnaissance pour leurs actions ou leur créativité. «Ce n’est pas par la tête que les civilisations pourrissent. C’est d’abord par le cœur», écrivait Aimé Césaire. En écho j’entends chanter Gilles Vigneault: «Jamais les fleurs du temps d’aimer/ n’ont poussé dans un cœur fermé/ La nuit, le jour/l’été, l’hiver/Il faut dormir le coeur ouvert.»
VENDREDI 30 DÉCEMBRE 2022ANNE-CATHERINE MENÉTREY-SAVARY
Il serait intéressant de savoir à quel stade en est la coopération entre la région Île-de-France, dirigée par Valérie Pécresse, qui avait, en 2018, proposé le célèbre architecte Jean Nouvel à l’Algérie « afin de restaurer la Casbah d’Alger »… semble-t-il !
Houria Bouhired (présidente de l’association « Sauvons la Casbah d’Alger ») avait offert un tableau à Jean Nouvel et une tenue algérienne à Valérie Pécresse (présidente de la région Île-de-France) et avait déclaré : « Nous avons une convention de coopération avec le conseil d’Île-de-France qui se charge de payer l’architecte et son équipe. La wilaya d’Alger ne donnera pas un sou à Jean Nouvel. Il se chargera des études et de la réflexion. Les Algériens ne doivent pas se tromper. C’est une chance pour nous d’être accompagnés par un architecte mondialement connu. Il va nous conseiller pendant deux ans, installer une équipe pour réfléchir et proposer une conception (Cette coopération ne devait pas coûter pas un centime aux Algériens, certes, mais nous coûter certainement une fortune à nous, Français, puisque c’est nous qui devions régler la note, et elle devait être très salée !).
Il est difficile d’imaginer ce que pourrait faire Jean Nouvel de cette Casbah qui est, dit-on à Alger, le symbole puissant des luttes anti-coloniales !
Totalement absurdes ces affirmations de notables et politiciens algériens qui « rappellent que les Français ont détruit trois fois la Casbah d’Alger, à partir de 1830 ».
Quand ils tentent d’expliquer que « la partie basse de la ville (donc de la Casbah) a été effacée pour être remplacée par une place (La place du Gouvernement, devenue place des Martyrs de la résistance) et qu’à cause de cette place, « la Casbah » n’a plus eu accès à la mer depuis ».
Que, plus tard, les affreux colonialistes que nous sommes ont construit des « immeubles haussmanniens » (immeubles qui font la renommée de notre capitale, Paris) et, qu’à la fin des années 30, les autorités coloniales « ont fait la guerre aux taudis », en détruisant le quartier de la Marine.
Qu’au cours de « la bataille d’Alger », la destruction de la Casbah avait atteint son paroxysme quand, dans la nuit du 10 août 1956, des terroristes français avaient placé une bombe dans une maison, rue de Thèbes, qui avait détruit plusieurs maisons et tué 80 habitants dans cette fameuse maison de la rue de Thèbes. (C’est le communiste Timsit, salarié du quotidien « Alger-Républicain », qui a fait exploser par accident cette maison où il entreposait les explosifs et fabriquait les bombes qui massacraient les innocents algérois).
Enfin, que le 8 octobre 1957, ce sont les parachutistes français qui avaient dynamité la maison où s’étaient réfugiés « les derniers survivants du FLN à Alger » : Yacef Saadi, Ali la Pointe, Petit Omar, Zohra Drif et Hassiba Ben Bouali (notons au passage cette citation « les derniers survivants du FLN » ! N’est-ce pas la preuve, si elle était nécessaire, que la bataille était gagnée par notre armée et que ce sont les « politicards français » qui ont trahi la France et son armée ?).
Il se trouve que j’ai été justement élevé dans ce quartier de la Marine.
J’y ai fait mes premières courses en pantalon court dans les rues, le long des quais de l’Amirauté. Je me suis reposé sur les marches de la plus vieille mosquée d’Alger, « Djamaâ El Kebir » (construite en 1097 et terminée en 1324), qui se situait rue de la Marine, rue qui descendait de la place du Gouvernement jusqu’à l’entrée du port. Preuves que la basse Casbah n’a jamais été détruite et qu’elle n’a jamais eu « les pieds dans la mer » car, entre elle et le port, se trouvait un vaste terrain vague où se réunissait la foule et où se vendaient les esclaves blancs et noirs (les gravures de l’époque en font foi).
Quant aux « immeubles haussmanniens », comme ils disent, les notables et les élites algériens se sont empressés de les occuper et d’y loger avec leur famille dès notre départ, en 1962.
L’Algérie souhaiterait que la Casbah devienne un véritable endroit touristique, à l’instar du Jardin d’essai, au quartier du Hamma, qui a enregistré cette année 1,8 million de visiteurs (en très grande majorité algériens).
Jardin d’essai qui, rappelons-le, fut construit, après assèchement des marais, à dater de 1832 et a trouvé sa forme actuelle vers 1867, sous le nom de « Jardin d’acclimatation », considéré comme le plus beau parc zoologique d’Afrique du Nord.
Partiellement détruit par les bombardements aériens allemands durant la dernière guerre et, surtout, par l’occupation des troupes alliées après le débarquement de 1942, il fut restauré et ouvert de nouveau au public en 1947.
Mais également, ce qui peut paraître surprenant, également Notre-Dame d’Afrique et, à grand renfort de publicité internationale, la béatification, à Oran, des moines de Tibhirine, martyrs de l’Algérie, afin de donner un autre visage plus accueillant de ce pays alors que la justice algérienne pourchasse et condamne tous ceux qui osent pratiquer une autre religion que celle imposée : la religion musulmane. (De nombreuses condamnations sont prononcées chaque année contre des Algériens qui pratiquent une autre religion).
Offrir l’Algérie, et plus particulièrement la capitale, Alger, au tourisme international, alors que les autorités se trouvent devant l’obligation de constater que « leur Alger la belle, la blanche » se couche à 18 heures.
Force est de constater que les habitants sont chez eux le soir, dès la nuit tombée. Et qu’il est difficile, dans certains quartiers, de trouver des commerçants, des restaurants, etc. ouverts après 18 h. « Alger ne vit pas la nuit et notre rôle est d’améliorer l’éclairage public, la sécurité, la prise en charge des SDF et d’organiser davantage de patrouilles de police ».
Les gens ne sont pas en sécurité dès que la nuit tombe. Les rues sont sombres, mal éclairées, c’est vrai, mais même la lumière n’empêcherait pas les agressions, les vols. La police est impuissante et les commerçants subissent bien malgré eux l’obligation de baisser le rideau.
C’est le triste constat actuel. Elles sont bien loin les années bénies de la colonisation, n’est-ce pas ?
De grâce, que l’on ne déforme pas l’Histoire de l’Algérie, ni celle d’avant 1830, ni celle d’après !
Nous espérons très sincèrement qu’Alger et l’Algérie réussissent totalement leur métamorphose afin qu’elles puissent conserver chez elles toutes ses centaines de milliers de « chances » qui s’enfuient et voguent vers nous, les ex-colonisateurs !
En revanche je félicite leur justice expéditive qui n’hésite pas à condamner à mort l’assassin qui avait décapité le Français Hervé Gourdel. Il sera exécuté.
Venu en Kabylie pour explorer un nouveau site d'escalade, le guide de montagne français avait été kidnappé par des djihadistes le 21 septembre 2014, avant d'être exécuté.
Le guide de montagne français Hervé Gourdel, en novembre 2013. Photo Sipa/ Barbara LECOMTE
La justice algérienne a confirmé en appel la condamnation à mort du principal accusé dans l'assassinat du guide de montagne français Hervé Gourdel, enlevé et décapité par des djihadistes en 2014 en Algérie, ont indiqué ce jeudi des médias locaux.
Abdelmalek Hamzaoui a été « condamné à la peine de mort tard dans la soirée » de mercredi, a précisé le site d'information Interlignes. Le pays applique un moratoire sur la peine capitale depuis 1993.
M. Hamzaoui, âgé de 37 ans, avait déjà été condamné à la peine capitale en première instance en février 2021.
Abdelmalek Hamzaoui, membre présumé de Jund al-Khilafa (« Les soldats du califat ») -- groupe affilié à l'organisation Etat islamique (EI) ayant revendiqué l'assassinat -- avait été capturé après le drame.
6 personnes acquittées
La Cour d'Alger a également confirmé l'acquittement, prononcé en février 2021, de cinq accompagnateurs du guide français et d'un sixième prévenu, poursuivis pour ne pas avoir informé à temps les autorités de l'enlèvement de M. Gourdel, selon la même source.
Originaire de Nice (Alpes-Maritimes), Hervé Gourdel, 55 ans, passionné d'aventures, était formateur de guides de montagne. Venu en Kabylie à l'invitation de ses hôtes et accompagnateurs pour explorer un nouveau site d'escalade dans le massif touristique du Djurdjura, il avait été kidnappé le 21 septembre 2014.
Avant de mettre sa menace à exécution, le 24 septembre, et de diffuser une vidéo, Jund al-Khilafa avait menacé de tuer le guide niçois si la France ne renonçait pas à ses frappes contre l'EI en Irak.
L'armée algérienne, qui avait mobilisé environ 3 000 soldats dans des recherches, n'avait retrouvé sa dépouille que le 15 janvier 2015, à une vingtaine de kilomètres du lieu de l'enlèvement.
En 2016, les autorités algériennes avaient assuré avoir éliminé pratiquement tous les combattants de Jund al-Khilafa, et notamment son chef présumé, Abdelmalek Gouri, en décembre 2014, puis son successeur, Bachir Kharza, en mai 2015.
Récit | Rapt et assassinat d’Hervé Gourdel : condamnation à mort pour l’un des auteurs
Reconnu coupable de l’enlèvement et l’assassinat du ressortissant français Hervé Gourdel le 21 septembre 2014, Abdelmalek Hamzaoui, a été condamné très tard dans la soirée du 14 au 15 décembre, à la peine de mort. Il avait été confronté par les cinq accompagnateurs de la victime ainsi qu’un entrepreneur tous enlevés par le même groupe, au même endroit et au même moment. Poursuivis eux aussi pour non dénonciation de crime, ils ont tous été acquittés.
Revenu devant la chambre d’appel criminelle près la cour d’Alger, après appel du principal accusé, le procès de l’un des auteurs du rapt et de l’assassinat du guide de montagnes français, Hervé Gourdel, le 21 septembre 2014, entre Tizi Ouzou et Bouira, s’est terminé très tard dans la soirée de mardi, avec la confirmation de la peine de mort, retenue contre Abdelmalek Hamzaoui, membre d’un groupuscule de terroristes, Djound El Khilafa, liée à Daesh, qui activait dans certaines régions de la Kabylie, avant qu’il ne soit démantelé et la plupart de éléments neutralisés.
Poursuivis dans plusieurs affaires de terrorisme, Hamzaoui a comparu, sur une chaise roulante, avec six autres accusés, dont cinq accompagnateurs de Gourdel, et un entrepreneur, qui avaient été enlevés par les mêmes terroristes au même endroit et au même moment.
Les six ont été blanchit du délit de non dénonciation de crime et de ce fait, ont été acquittés. Dès l’ouverture de l’audience, suivie en directe par visioconférence, en France, par la famille du défunt, Abdelmalek Hamzaoui refuse d’être jugé en raison de l’absence de son avocate.
La présidente refuse de renvoyer l’affaire et désigne un avocat d’office pour assister l’accusé. Résigné, ce dernier est appelé à la barre. « Vous êtes accusé de rapt, torture, d’assassinat avec préméditation et d’appartenance à une organisation terroriste. Qu’avez-vous à dire ? », lui lance la présidente. L’accusé : « je n’ai pas rejoint les terroristes de manière volontaire. J’ai été enlevé par ces derniers en 2009. Je suis resté captif chez eux durant une année, jusqu’au moment où ils ont commencé à me faire confiance. Je n’activais en raison de mes blessures au bras et à la jambe, causées par un tir d’un des terroristes. Je ne pouvais pas utiliser d’armes ». La juge : « qu’avez-vous à dire sur l’assassinat de Gourdel ? ».
L’accusé : « je n’étais pas avec eux et je ne les ai pas vu. Ce que j’ai dit aux services de sécurité m’a été raconté par des terroristes. Je l’ai déclaré au juge et je lui ai dit que j’étais sous pression et je me suis rendu ». La juge : « vous vous êtes rendu âpres vos blessures ». L’accusé : « non avant. J’étais en contact avec un certain Billel, qui devait m’aider avec les services de sécurité pour me rendre. Lorsque j’ai été blessé, j’ai pris attache avec lui pour qu’il me ramène des médicaments. C’est mon oncle qui m’a mis en lien avec les services de Ben Aknoun ( sièges des services de renseignements militaires Ndlr), qui me demandaient les noms des terroristes et des émirs. La dernière fois, j’été sur le point de me rendre avec une autre personne, mais nous sommes tombés dans un accrochage. J’ai été blessé et transféré au CHU de Tizi Ouzou. Ma famille m’a rendu visite avec les services de sécurité. J’ai informé ces derniers du lieu d’enterrement de Gourdel, dans le « camp Sendouk », des terroristes. Ils sont partis sur les lieux mais ils n’ont rien trouvé. Je les ai accompagnés et nous avons cherché deux ou trois jours avant de trouver la tombe ».
« Je n’ai pas rejoint les terroristes, ils m’ont enlevé »
La juge : « vous étiez en contact avec Ben Aknoun ou avec les éléments qui vous ont accrochés ? ». L’accusé : « avec Ben Aknoun. Ceux qui m’ont blessé ne savaient pas que j’étais en contact avec l’armée. J’avais peur d’être tué ». La juge : « vous aviez fait des déclarations très précises et détaillées durant l’enquête préliminaire et lors des premières auditions chez le juge, puis vous êtes revenu sur vos propos. Vous vous êtes contredit ». L’accusé : « ils m’ont demandé de faire ces déclarations. Je suis resté chez eux durant 5 mois. Oui j’ai dit que nous avions enlevé et séquestré Hervé Gourdel ». La juge : « qui vous a parlé du rapt, de l’assassinat et de l’enterrement de Gourdel ? ». L’accusé : « j’ai entendu des membres de l’organisation dont je faisais partie ». La juge : « comment s’appelle-t-elle ? ». L’accusé : « je ne sais pas. Je suis handicapé. Je ne bougeais pas ». La présidente : « qui était votre émir ». L’accusé : « je ne sais pas. C’est Al Bara’a Lemsili qui m’a raconté les détails ». La juge : « qui était votre émir ? ». L’accusé : « je ne sais pas ». La juge : « vous êtes restés six ans dans les rangs de cette organisation et vos ne connaissez pas votre émir ? ». L’accusé : « nous ne restions pas avec les émirs ». La juge l’interroge sur la distance qui sépare le lieu du rapt de Gourdel et de celui où il a été blessé et Hamzaoui répond : « à peu près 5 ou 6 jours de marche. Le lieu dépend de Iferhounene (Daira et commune dans la wilaya de Tizi Ouzou, mais la dépouille a été déterrée dans la commune de Abi Youcef, commune voisine à Iferhounene Ndlr). Moi j’étais à Boumerdes et ils m’ont transféré à Jijel pour me soigner ». La juge : « vous n’avez participé ni au rapt ni à l’assassinat ? ».
« Le responsable me donnait le téléphone pour communiquer avec Bilel »
L’accusé acquiesce, et c’est le procureur général qui entame son interrogatoire. « Qui vous a amené vers le groupe terroriste ? », lui demande-t-il et Hamzaoui répond : « j’ai été pris lors d’un faux barrage. Ils voulaient prendre la voiture parce qu’ils avaient un malade. Ils m’ont pris avec eux ». Hamzaoui nie connaitre l’émir Gouri, mais le magistrat lui rappelle qu’il est de Boumerdes, sa région. Le magistrat : « Ou aviez-vous été blessé par balles au bras et au pied ? ». L’accusé : « les Ouacifs, dans la forêt Laaziz, Daira de Azazga, à Tizi Ouzou. Celui qui m’a blessé est Abou Merouane de Lakhdaria ». Le magistrat l’interroge sur Billel Debari, de Boumerdes, et ses premiers contacts avec lui. « C’était en 2009. Je l’ai contacté par téléphone ». Le magistrat : « vous aviez un téléphone ? ». L’accusé : « il appartient au responsable ». Le magistrat : « comment votre responsable peut-il vous donner un téléphone pour appeler les services de sécurité ? ». L’accusé : « je lui ai dit que c’était pour qu’il nous aide à nous procurer des médicaments ». Le magistrat : « vous aviez des idées djihadiste et vous aviez refusé de vous rendre… ». L’accusé : « le premier qui est venu me voir était mon père puis Billel qui m’a trahi. Je lui ai demandé de venir sinon je sors crier dans la rue pour avoir de l’aide. Il n’est pas venu seul ».
Interrogé sur les terroristes qu’il connait, Hamzaoui cite Abou Younes, Oussama, Oubaida. Le magistrat lui rappelle : « et Al Bara ? ». L’accusé : « celui-là je l’ai connu à Boumerdes ». La juge reprend le micro : « vous aviez déclaré avoir été enlevé et que vous n’aviez pas la confiance des terroristes, comment peuvent –ils alors vous donner un téléphone pour parler à Billel de votre projet de reddition et contacter les services de Ben Aknoun pour les informer. Est-ce normal ? ».
L’accusé : « j’ai dit au responsable que c’était pour ramener des médicaments. Je lui ai parlé d’un ami de confiance à Tizi Ouzou et il m’a cru ». Le procureur général : « étiez vous dans les rangs de Djound El Khilafa ou Daesh ». L’accusé se contente de dire qu’il ne connait aucune de ces organisations et qu’il a entendu leurs noms chez les services de sécurité.
Le magistrat : « vos déclarations concordent exactement avec celles des autres accusés. Vous aviez parlé du 2ème groupe dirigé par l’émir Gouri, venu accompagné de trois terroristes et affirmé que ce sont ces derniers qui ont enlevé Gourdel, sur ordre de Gouri et que c’est celui-ci avec Lemsili, qui l’ont égorgé et enterré ».
L’imperturbable accusé nie et se contredit
Imperturbable, l’accusé continue à nier les faits. Le magistrat : « où avez-vous activé durant les six années de maquis ». L’accusé : « j’étais à Boumerdes et après ma blessure, j’ai été transféré à Tizi Ouzou, puis à Bordj Bou Arreredj ». Le magistrat : « quelle preuve avez –vous sur votre enlèvement ? Vos parents ont-ils déposé plainte pour rapt ? ».
L’accusé : « je ne sais pas. La voiture que j’avais est toujours chez les services de sécurité. Il n’y a aucune preuve sur un quelconque mensonge de ma part. On m’appelle Abderrahmane Abou Hafs, parce que n’importe quel terroriste qui arrive chez eux, il doit changer de nom ».
La présidente fait remarquer : « rappelez-vous, vous venez de dire n’importe quel terroriste ». Le procureur général reprend son interrogatoire : « puisque vous êtes handicapé et que de ce fait vous ne pouvez pas être actif, pourquoi vous ont-ils gardé dans cette organisation ? ». L’accusé : « pour éviter la fitna. En plus, ils avaient peur que je délivre aux services de sécurité leurs secrets et qu’ils soient obligés de changer tous leurs plans ».
Hamzaoui persiste à nier avoir déclaré qu’il faisait partie du 2ème groupe, de quatre terroristes, dont l’émir Gouri, qui a enlevé Gourdel. « Ce sont les services de sécurité qui m’ont fait réciter ce scénario. Si c’était mes aveux je ne les aurais pas oubliés. Comment pourrais-je me rappeler du nom de Gouri et pas des autres ? ».
La défense de l’accusé : « pourquoi avez –vous été enlevé ? ». Hamzaoui : « ils avaient besoin d’une voiture parce qu’ils avaient un blessé. J’étais au volant et j’ai fait exprès de renverser le véhicule dans un ravin. Ils m’ont rattrapé et pris avec eux pour ne pas les dénoncer. Je suis resté 4 mois dans le camp et ils m’ont chargé de la surveillance des lieux. Après ma blessure, ils ne m’ont donné aucune mission ». La juge : « comment pouvez-vous surveillez alors que vous avez été enlevé ? Je veux être convaincue ».« Je restais juste sur les arbres et en cas où je vois un convoi de l’armée sur les montagnes, je les informe », répond Hamzaoui avant de reprendre sa place.
La présidente appelle les quatre accompagnateurs de Gourdel, (en liberté) poursuivis pour « non dénonciation de crime et non déclaration d’hébergement d’un étranger ».
Des accompagnateurs victimes qui basculent vers le statut d’accusés
Le premier à être auditionné est Karim Oukara, qui affirme avoir connu le défunt Gourdel, sur les réseaux sociaux du fait qu’il partageait avec lui la passion de l’escalade. « Gourdel voulait visiter le Djurdjura. Je l’ai invité. Comme j’habite en France, j’ai profité des vacances pour venir au pays, au mois d’aout et Gourdel est arrivé le 20 septembre 2015. Je l’avais reçu à l’aéroport avec Oussama Dahendi. Nous nous sommes entendus sur un programme de 5 jours. Une journée pour le Djurdjura, une journée au Cap Carbon, à Bejaia, et une journée à la Casbah d’Alger. Nous sommes allés dans un chalet loué à Bouira, où je lui ai présenté le reste du groupe. Le lendemain nous sommes sortis très tôt, pour l’escalade, mais le temps n’était pas propice. Il était mauvais. Nous avons donc décidé de faire une promenade dans le mont Lala Khedidja. Nous avions beaucoup marché. Vers 14 heures, nous avions fait une pause. Nous n’avions plus d’eau et nous commencions à chercher des sources. Nous avons rencontré un berger qui nous a orientés vers un bassin situé à plus de 20 minutes de marche dans la forêt, où nous avions bu et rempli nos gourdes. Après une heure de randonnée, et sur notre chemin de retour, trois terroristes armés, qu’on pensait être des militaires déguisés, ont surgit de nulle part. Ils nous ont mis à terre et commencé à nus poser plein de questions sur les raisons de notre présence sur les lieux. Ils nous parlaient de Daesh, du djihad. L’un d’eux était derrière moi. Je l’ai entendu dire à Gourdel pourquoi il ne parlait pas. Gourdel a expliqué qu’il ne comprenait pas l’arabe. Oussama m’a dit qu’il avait vu deux autres terroristes qui nous surveillaient de loin. Une demi-heure après, ils nous ont dit de partir. Après quelques minutes de marches, un autre groupe est arrivé en courant. Les terroristes nous ont mis à terre et nous parlaient de manière agressive. Ils nous ont demandé ce que faisait Gourdel avec nous. Ils nous ont séparé et chacun de nous était interrogé par un des terroristes ».
« Hamzaoui était très proche de l’émir, il portait une tenue afghane et une kalachnikov »
La juge : « Malek Hamzaoui était parmi le 1er ou le 2ème groupe ? ». Oukara : « il était avec le 2ème groupe et il était armé. Vers le coucher du soleil, un 3ème groupe composé de 40 ou 60 terroristes est venu. Ils nous ont sommés de nous ont mis en file indienne puis nous ont sommés de nous assoir par terre. À ce moment, l’émir est arrivé avec un autre terroriste. Nous l’avions entendu dire « nedou al gaouri » (nous prenons l’étranger). Je me suis opposé et l’un d’eux m’a dit en exhibant son arme : nous le prendrons que tu le veuille ou non ».
« Il m’a pris les clés de ma voiture et ils ont pris Gourdel. Un groupe est parti avec l’émir et un autre est resté avec nous. Vers une heure du matin, un groupe de terroristes est revenu. Il a ramené Amara Ferdjellah, et rendu les clés de ma voiture. IIs nous ont demandé de monter dans la voiture et de rester jusqu’à ce qu’au matin. Nous sommes restés les quatre sans bouger dans la voiture et Ferdjellah dehors. Vers 4 heures du matin, Karim a dit il n’y a personne dehors. Nous avons démarré et nous nous sommes dirigé vers le 1er barrage militaire de Tikejda pour alerter les services de sécurité ».
Le procureur général lui demande pourquoi aucun parmi les quatre accompagnateurs n’a utilisé le téléphone. « Nous étions tétanisés par la peur. Ils étaient une soixantaine, armés de kalachnikovs. Comment pouvons-nus utiliser les téléphones ? », répond Oukara. La présidente : « est-ce que Hamzaoui était parmi eux ? ». Oukara : « bien sûr qu’il y était. Il avait une kalachnikov, le bras entouré par un bandana noire et il courrait ».
La juge appelle Hamzaoui : « qu’avez-vous à répondre ? ». L’accusé : « je n’étais pas présent. J’étais blessé au pied et au bras. Cette personne a été ramené la journée et visage découvert et a dit ne pas se souvenir de moi. Pourquoi je vais couvrir main ? Personne parmi les accompagnateurs n’a dit que j’avais le bras couvert ».
Oukara : « lorsque les services m’ont montré sa photo je l’ai reconnu tout de suite. Je peux ne pas reconnaitre les 60 autres, mais lui je ne pouvais pas l’oublier. Il était le premier qu’on a vu. Il parlait en kabyle avec l’un d’entre nous et allait discuter avec Gouri l’émir ». Hamzaoui : « pourquoi les autres ne m’ont pas reconnu ? ».
Clairement identifié par ses victimes, l’accusé persiste à nier
Le procureur général : « pourquoi n’avoir pas informé de l’hébergement de Gourdel aux services de sécurité ». Oukara: « nous avons fait une attestation d’hébergement déposée au niveau de la mairie d’El Asnam, à Bouira, où on devait camper, afin de lui faciliter les procédures de visa. A cette époque, il n’y avait pas de terroristes dans la région. Nous ne savions pas qu’il fallait informer les services de sécurité.
Les déclarations de Boukamoum Hamza, Oussama Dahendi, Kamel Saadi et Amine Ayache (en liberté), poursuis pour les mêmes griefs que Oukara, rejoignent toutes celles de leur prédécesseur à la barre. Aucune contradiction ou détail manquant dans la déposition.
Tout comme Oukara, Hamza Boukamoum, est formel : « Hamzaoui était avec l’émir Gouri. Il me parlait en kabyle et après il allait discuter avec l’émir. Lorsqu’il est venu avec le 2ème groupe il m’a donné la main gauche et me parlait en kabyle. Dès que j’ai vu sa photo, je l’ai reconnu. J’ai remarqué qu’il était proche de Gouri. Il faisait des va-et-vient entre lui et les autres. Je l’ai revu sur la vidéo. Je pense qu’il était le quatrième à droite et portait la kalachnikov avec la main gauche vu que son bras droit était blessé ».
Hamzaoui, très serein répond : « je l’ai vu chez le juge. Il a dit que j’avais le bras entouré par un chèche. Or quelqu’un d’autre le portait sur la gauche et personne n’en a parlé aux gendarmes ».
Oussama Dahendi confirme lui aussi la version de ses co-accusés, en précisant : « même si je ferme les yeux, je peux vous dire ce que Hamzaoui portait ce jour-là, comment il était, et à qui il a parlé. Tout ce qu’il a dit est mensonge. Je ne peux pas l’oublier. Il apparaissait comme le bras droit de Gouri. Lorsque j’ai parlé à Gouri, il était à son coté. C’est comme son guide. Il portait sur son bras droit, un bandana noir avec un cordon blanc. Je ne peux effacer de ces détails de ma mémoire même si lui, dit le contraire. Il parlait kabyle et on l’appelait le kabyle ».
Hamzaoui réplique : « je l’ai vu pour la première fois chez le juge. Il n’a rien dit à l’instruction. Je ne suis pas le seul kabyle. Il n’a jamais dit avant que j’étais un élément actif. Si je l’été, il m’aurait vu partout pas uniquement avec le 2ème groupe ».
« Je peux fermer les yeux et vous dire ce que portait Hamzaoui et comment il était »
Lui succédant à la barre Kamel Saadi, ajoute au témoignage de Dahendi cette déclaration : « Hamzaoui avait une petite barbe et portait une tenue afghane. Il avait le bras droit soutenu par un atèle et couvert par un bandana noir. Je l’ai touché en lui donnant la main. En prenant Gourdel, ils m’ont dit on va faire entendre son affaire dans le monde entier. Lorsqu’ils avaient isolé Gourdel, ils nous ont ramené à manger et ils nous ont dit que ce sont les émirs qui décideront, peut-être une rançon, ou un échange d’otages. C’est un apostat ».
Hamzaoui : « lorsque les terroristes circulent la journée, ils ne mettent pas la tenue afghane et ne portent pas de barbe. Pourquoi personne n’a parlé de ce bandana noir avant ? ». Amine Ayach avait 18 ans lors des faits, et préparait son bac. Il raconte la terreur qu’il a vécue.
« Ils me posaient des questions bizarres sur la prière, le coran, sur ma manière de m’habiller et de me coiffer, sur le djihad … etc. Lorsqu’ils sont venus prendre Gourdel, nous avons tenté de les dissuader mais ils nous ont dit qu’ils allaient régler des choses avec lui et revenir. Je ne connaissais pas Gourdel. Je voulais juste sortir avec le groupe. J’étais champion d’Algérie de l’escalade et Gourdel voulait nous aider à ouvrir de nouvelles voies. J’ai été traumatisé. J’ai reprise l’escalade en 2019 et j’ai gagné le championnat ».
La partie civile : « L’accusé s’est montré en tant que terroriste. Il est resté terroriste »
Fardjellah Amara, poursuivi pour non dénonciation de crime. Par un concours de circonstance, il s’est retrouvé dans un faux barrage. « Vers 21 heures, je roulais avec ma voiture et subitement un homme en tenue militaire et portant une kalachnikov s’est dressé sur ma route et m’a arrêté. En fraction de secondes, plusieurs autres m’ont encerclé. L’homme m’a tiré de la voiture et m’a mis par terre. Puis leur chef, m’a rassuré en me disant qu’il voulait la voiture. Ils avaient un blessé avec eux. Je les ai vu enlever les tenus militaires et Gouri grande taille et bien rasé milieu. On m’a mis un bandage sur les yeux et on m’a fait marcher. J’ai entendu des bruits de pas et de chaines et une fois arrivé, on m’a enlevé le bandage des yeux. J’ai vu que ces gens se chamaillent entre eux. Je leur ai demandé s’ils avaient des kalachnikovs et de lance-roquettes. Je me suis isolé du groupe. Je voulais récupérer ma voiture. Ils me l’ont ramenée mais sans essence. J’ai mis plus de 4 heures pour arriver au premier poste militaire ».
Les auditions se terminent et la présidente demande aux greffiers de faire défiler les photos des terroristes, Gouri Abdelmalek, Amine Abdesadok Belhout, Moumene Abderrahmane, dit Abou Al Moutawakil Al Mordad, Hamzaoui Mohamed, dit Abou Youcef, Mohamed Serraj, dit Abou Oumama Yaakoub, Omar Billel, dit Abou Houraira Thabet, sur l’écran.
La majorité sont reconnue par les accusés. La présidente donne le signal pour diffuser la vidéo de l’exécution de Gourdel et la revendication de l’assassinat. Les images sont aussi violentes que terrifiantes. Elles font fondre en larme, un des avocats de la partie civile.
Le frère de Gourdel, intervient de France par visioconférence. « Nous retenons en tant que partie civile, que l’accusé n’a à aucun moment exprimé un sentiment de repentance ou de regret (…) Nous étions prêts à entendre une parole de regret mais en vain. Nous voulons une peine exemplaire. Il s’est montré en tant que terroriste. Il faut donc protéger la société civile algérienne de cet homme. Il se comporte toujours en tant que terroriste ».
« Les déclarations de Hamzaoui, constituent une insulte à l’intelligence humaine »
Agissant au nom de la compagne de Gourdel et de son fils, Maitre Rachid Ouali, est revenu sur le danger et la menace terroriste en Algérie et à travers de nombreux pays, avant de revenir sur les faits en se demandant ce qu’a pu faire Gourdel à ses bourreaux pour lui faire subir toute cette horreur.
Pour lui, « les déclarations de Hamzaoui, constituent une insulte à l’intelligence humaine. Hamzaoui était heureux d’offrir la vire de Gourdel à qui ? A El Khalifa El Baghdadi, en signe d’allégeance à son organisation terroriste. L’Algérie est un pays de paix et non pas de terreur. Gourdel a laissé comme héritage un enfant devenu, depuis la mort de son père, policier qui sauve des vies humaines dans les montagnes. Qu’avez-vous laissé, vous Hamzaoui, à l’Algérie ? ».
Dans un long réquisitoire, le procureur général est revenu sur les faits puis précisé dans quelle circonstance Hamzaoui a été arrêté, le 14 janvier 2015, après un accrochage qui a couté la vie à son acolyte. « Il a tout reconnu et les cinq accusés l’ont reconnu et identifié parmi les auteurs du rapt. Sans lui, jamais la tombe de Gourdel n’aurait été retrouvée. Ils l’ont tué de manière sauvage et l’ont enterré sans respect du au mort. Ils l’ont mis à quelques centimètres sous terre, pour être dévorés par les loups et les chacals et les hyènes ».
Il requière la peine capitale contre Hamzaoui, une peine de 2 ans contre les cinq accompagnateurs de Gourdel et une année de prison contre Amara Fardjellah.
Très tard dans la soirée, la chambre criminelle a prononcé la peine capitale contre Malek Hamzaoui, après l’avoir reconnu coupable du rapt et l’assassinat d’Hervé Gourdel et l’acquittement pour ses cinq accompagnateurs et l’entrepreneur.
Le quotidien libanais « l’Orient le Jour » livre le témoignage de Yosra Frawes, Responsable du bureau Maghreb et Moyen-Orient de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), qui a été refoulée à son entrée en Algérie.
Il est 10h30, ce jeudi 1er décembre lorsque j’atterris à Alger. Un soleil d’automne enveloppe l’Aéroport Houari Boumédienne, où je fais escale afin de me rendre à Oran pour assister à une rencontre sur les droits des femmes.
« Bonjour madame, vous êtes tunisienne ? demande le policier au contrôle des passeports.
– Oui.
– Marhaba. Oh, c’était énorme hier ! Vous avez battu la France ! »
Je souris.
Il reprend d’un ton plus sérieux : « Pouvez-vous me rappeler la date de votre dernière visite en Algérie, Madame ?
– Oui, c’était en 2019, je crois…
– Ah oui, mais je ne trouve pas trace de votre passage, écrivez-moi votre métier sur la fiche. »
Je l’avais déjà mentionné, mais je m’exécute et écris : Yosra Frawes, responsable FIDH, avant de lui demander s’il avait retrouvé la date de ma dernière visite. Penché sur son ordinateur, il ne répond pas. Pour lui faciliter la tâche, je lui précise être venue avant la pandémie.
« Bizarre ! » murmure-t-il avant d’appeler sa collègue, la quarantaine environ, qui s’avance l’air sévère – dans ce métier, majoritairement masculin, une femme ne peut s’imposer autrement. En l’observant s’approcher, l’idée me vient que je suis probablement fichée en raison de mes activités de défense des droits humains.
Rancune tenace
Je prends alors la précaution d’effacer de mon téléphone les messages et photos de mes amies militantes algériennes au cas où je serais fouillée. J’écris aussi un court message : « Je suis bloquée à l’aéroport d’Alger » pour un envoi rapide au cas où mes craintes se confirmeraient. Et j’attends.
Le policier est toujours plongé sur son ordinateur qu’il n’abandonne que pour prendre des notes sur une fiche. Il est si affairé qu’il a l’air d’avoir oublié ma présence. Entre-temps, la policière arrive et prend mon passeport d’un geste rapide. Je n’ai plus de doutes maintenant, mais plutôt que de broyer du noir, je pense à la rencontre sur les droits des femmes à laquelle j’allais assister et dont je me faisais une joie. La policière interrompt ma rêverie en m’ordonnant de ranger mon téléphone. J’obtempère en prenant bien soin de cliquer sur envoyer le message que j’avais rédigé et destiné à l’organisatrice de la rencontre. Mais le message, je m’en apercevrai plus tard, ne lui parviendra pas, faute de réseau.
Mon passeport à la main, la policière me demande de la suivre. Je m’apprête à le faire quand son collègue se penche vers moi et me dit à voix basse : « Prévenez ceux qui vous ont invitée : vous êtes interdite d’entrée en Algérie. »
Je l’avais deviné et pourtant, à l’apprendre, j’ai les larmes aux yeux : un autre pays de la région s’ajoute à ceux où je ne peux me rendre. Guerre, occupation… et maintenant, l’Algérie pour d’autres raisons. Politiques, évidemment.
Je pleure parce que c’est l’Algérie, notre grande sœur comme l’aiment à l’appeler les Tunisiens. J’avais visité l’Algérie en 2000, je l’avais sillonnée en train et on m’avait alors traitée de folle. J’y étais retournée, en mars 2019, soutenir le Hirak, avec Khadija Cherif, Messoud Romdhani, Soukaina Abdessmad et Jamel Msallem… Émerveillée par la pugnacité des jeunes Algériens révoltés, leur humour et leur créativité. J’avais continué à les soutenir et à m’associer à leur critique d’un régime de plus en plus répressif et féroce à leur égard.
Naïve, j’avais cru que le régime qui m’avait certainement repérée alors m’aurait, avec le temps, oubliée. Mais non, sa rancune est tenace. Et je suis, le cœur lourd, la policière. Je m’adresse à elle avec un mélange d’amertume et de révolte : « je suis interdite d’entrer en Algérie, c’est bien ça ? Vous n’en avez donc pas assez des murs ? » Elle ne daigne pas me répondre. Elle m’indique une chaise et disparaît dans un bureau.
Interrogatoires en série
Au bout d’environ une vingtaine de minutes qui m’apparaissent une éternité, cinq policiers dont deux en civil s’approchent de moi. Je lève la tête quand l’un d’eux qui semble le plus âgé me demande : « Madame, qu’est-ce qui se passe ? » Les autres ne disent rien, un sourire goguenard aux lèvres. Je me fends du même sourire et répond : « c’est à vous de me dire ce qui se passe. »
Je subis par la suite un véritable interrogatoire, ils se relayent pour poser les questions :
– « Non sincèrement, Madame, c’est quoi le problème ?
– Demandez à votre collègue, celui qui m’a dit que je suis interdite d’entrer en Algérie…
– Il doit y avoir une raison. Laquelle selon vous ? »
Je commence à m’énerver, je hausse le ton : « je ne le sais pas, posez donc la question à celui qui a pris cette décision !
– Calmez-vous, Madame, je vous le dis sincèrement et j’essaie de comprendre parce qu’on m’a dit que vous venez souvent en Algérie. Alors, dites-moi, qu’avez-vous fait, au juste, la dernière fois que vous êtes venue et qui avez-vous rencontré ? »
Je suis à cran : « C’est un interrogatoire que vous me faites là ? »
Les uns se fendent d’un large sourire, un autre répond : « Non, non pas du tout … »
Le plus âgé, celui qui m’avait apostrophée le premier, dit : « allez, pas la peine, vous êtes énervée, Madame. On vous laisse tranquille… »
Ils s’éloignent pour s’arrêter quelques mètres plus loin. Ils parlent entre eux, ils délibèrent certainement sur mon cas.
Quelques heures plus tard, une policière passe. Je lui demande l’autorisation d’aller aux toilettes. Je veux surtout essayer de capter un réseau et me dégourdir les jambes. Elle m’y autorise, me fait accompagner par l’une de ses collègues, certainement moins gradée.
Mais je ne parviens pas à me connecter et quand je reviens prendre ma place, j’y trouve le policier qui m’avait interrogée en premier : « Vous savez Madame, vous pouvez aller manger si vous le désirez. » Je n’ai pas faim, mais je demande si je peux fumer. Il m’indique un endroit discret où je pourrais le faire « autant de fois que je le voudrais ». Je pressens que l’attente sera longue…
« Quelle chance, Madame ! »
La cigarette me détend un peu et quand je retourne à ma place, un jeune homme, âgé d’environ 25 ans, m’accoste. Il est beau et porte un badge, il travaille donc ici.
– « Bonjour, Madame, dit-il, je peux vous tenir compagnie ?
– Oui, bien sûr. Je m’appelle Yosra Frawes, et vous ? »
Il se présente. Il est policier, chargé, dit-il, de faciliter le passage des passagers.
– « On m’a dit que vous êtes stressée, alors je viens vous tenir compagnie. Il ne s’agit pas d’un interrogatoire. Si c’était le cas, on vous mettrait dans un bureau pour vous questionner de manière formelle. Je vous parle à titre personnel. J’aimerais vraiment comprendre votre problème. »
Je ne me fais pas d’illusions. Ce sera encore un interrogatoire, mais autant tuer le temps avec ce beau garçon, kabyle de surcroît, car j’ai, je l’avoue, un faible pour ce type d’hommes…
Il pose beaucoup de questions, il veut des détails, précis, sur la rencontre prévue, les personnes qui m’ont invitée… Je réponds : « Une rencontre sur les droits des femmes en Algérie. Je ne connais pas les participantes, je suis invitée par une fondation allemande avec qui j’ai l’habitude de travailler en Tunisie. » L’une des rares organisations internationales qui continue, contre vents et marées, à mener quelques actions en Algérie… « J’ai le programme sur ma boîte mail et j’ai besoin d’une connexion. Si vous m’en donnez une, je peux vous le montrer. » Il n’est pas dupe et fait comme s’il n’avait pas entendu.
Il s’enquiert de mes activités en Tunisie. Il est aimable, prévenant, m’écoute avec attention et montre même de l’admiration quand je lui fais part de mon engagement pour les droits des femmes et contre les violences.
Puis, il revient à l’Algérie, à mes dernières visites dans son pays. Je n’hésite pas à lui dire mon soutien au Hirak. À quoi bon cacher ce qu’ils doivent déjà savoir. Toute à mes souvenirs, je lui parle avec enthousiasme de ma rencontre avec la grande Djamila Bouhired. En mars 2019, j’étais à ses côtés à la grande poste d’Alger. Je lui raconte comment les gens se bousculaient juste pour la toucher…
« Quelle chance, Madame ! Vous savez, c’est une légende pour nous, Djamila Bouhired ! »
Un instant, je ne doute pas de sa sincérité. Une complicité s’installe entre nous, son émotion à l’évocation d’almoudjahida m’atteint comme du miel sur mon cœur. On parle de tout et de rien, comme de vieux amis. De la beauté de Hammamet et d’Oran, des droits humains, de la révolution des femmes iraniennes, des jeunes et du danger qu’ils courent sur les réseaux sociaux, de Yasmina Khadra, de ce que le jour doit à la nuit…
Djamila Bouhired fut mon passeport d’entrée au cœur de ce jeune policier. Je lisais de l’admiration dans ses yeux quand il m’écoutait. Confiant, il me parle de lui, de sa mère, et du hasard qui l’a conduit à son métier : policier. Un bon policier. Car jamais il n’oublie son enquête, sur laquelle il revient encore et encore, de manière subtile. « J’aurais aimé participer à cette réunion avec vous, et vous entendre parler, vous qui êtes si vive et intelligente. » Mais comme lui, je sais manier l’art de l’esquive, je glisse sur les questions qui pourraient causer du tort à mes amies algériennes. Comme il le fit pour la connexion à internet, je fais celle qui n’a pas entendu.
Je reste lucide, malgré le trop-plein d’émotions, les interrogatoires, ma détention à l’aéroport, le charme kabyle.
– « Si c’est ma profession que vous me reprochez, elle n’est un secret pour personne, elle est inscrite sur mon passeport. La défense des droits humains, c’est mon job, mon engagement, ma vie. C’est ce que je suis qui m’a fait côtoyer Djamila Bouhired au Hirak et je sais que c’est pour cette raison que vous me refusez d’entrer dans votre pays. » Il dit, à voix basse : « Non, ce n’est pas la raison, sinon nous serions une dictature, n’est-ce pas ?
– C’est à vous de trouver la réponse à votre question. »
Notre conversation s’arrêtera là. Il note sur son portable les dates de la rencontre prévue à Oran et l’hôtel de résidence. Puis il prend congé en m’assurant qu’il ne s’agit certainement que d’une erreur informatique.
« Le Maghreb des grands murs »
Je retrouve mon banc quand un autre policier vient me demander mon billet. Je vais donc être rapatriée. Un autre arrive, quelques heures plus tard, il me dit que j’ai le droit d’aller me restaurer si je le souhaite. Je n’ai pas vraiment faim, mais je prends le chemin qu’il m’indique, en quête de réseau. À l’entrée du restaurant, un policier en garde ne me lâche pas un instant du regard. Pas de connexion dans mon téléphone alors qu’un homme, assis à quelques mètres de moi, l’ordinateur ouvert, converse à voix haute. Lui est bien connecté. Je le fixe du regard, espérant qu’il sente ma présence et comprenne, tant j’y mets d’énergie, ma supplication muette : utiliser sa machine, un instant, rien qu’un petit instant. Mais non, il est tout à sa conversation et mes ondes s’évaporent sans l’atteindre.
Le repas fini, je reprends mon bagage à main, ramasse mes affaires et emboîte le pas au policier : « Où est-ce qu’on va maintenant ?
– Dans un quart d’heure vous allez prendre votre vol, Madame.
– Pour Oran ?
– Pour Tunis.
– Vous allez donc vous débarrasser de moi, vous allez me refouler ?
– Wallah, Madame nous aurions aimé vous avoir parmi nous. »
Un autre agent m’accoste : « Marhaba bik netwannssou bik, l’Algérie, c’est votre pays Madame, c’est le Maghreb arabe. »
– « Quel Maghreb arabe, Monsieur ? C’est le Maghreb des grands murs. Vous avez peur de moi parce que je revendique la liberté et les droits humains. N’ayez pas peur de la liberté, c’est la meilleure chose qui puisse vous arriver. »
Un collègue nous rejoint, mon passeport à la main : « Alors, tout s’est bien passé Madame, vous n’avez manqué de rien j’espère ?
– À part ma liberté de circulation, non, je n’ai manqué de rien. »
Il part d’un grand éclat de rire tandis que je m’engouffre dans mon avion. J’aurais passé 7 heures en Algérie sans sortir de l’aéroport.
Les ressortissants des anciennes colonies françaises influent significativement sur la vie politique de la France. C’est le cas notamment d’Éric Zemmour, qui a souvent évoqué ses origines algériennes. Restez scotchés pour en savoir davantage.
Éric Zemmour a confié ne pas être un « Français de souche ». Il a toujours affirmé qu’il est issu d’une famille juive originaire d’Algérie. « Mes parents viennent d’Algérie, comme je dis toujours, je ne suis pas un Français de souche, […] je ne prétends pas être Français depuis 1000 ans », a révélé l’homme. En effet, selon sa biographie, Zemmour est né dans le grand Paris, à Montreuil (actuellement Seine-Saint-Denis), le 31 août 1958. Éric Justin Léon Zemmour, de son nom complet, est issu d’une famille juive originaire d’Algérie et de nationalité française, arrivée en France métropolitaine durant la Guerre d’Algérie. Il se définit lui-même comme un Français d’origine berbère ; son nom de famille signifie d’ailleurs « olivier » dans la langue berbère.
Par ailleurs, il s’est distingué par certaines déclarations sur l’existence de l’Algérie afin de se débarrasser de ses « origines encombrantes ». « Moi je ne suis pas exactement un immigré. C’est la France qui est venue chez moi et qui m’a conquis. L’Algérie n’existe pas, c’est une invention de la France», a déclaré Eric Zemmour sur un plateau télévisé.
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