Cette citation de Saint-Exupéry nous met en garde contre l’assistanat et nous invite à nous mobiliser autour d’un projet. Justement, nous avons plus que jamais besoin de nous mobiliser autour d’une utopie qui nous permettra de sévir contre des adversaires qui seront de plus en plus nombreux. Beaucoup d’études montrent que l’Algérie est visée par un nouveau reshapage du monde. De ce fait, il ne faut surtout pas sous-estimer nos adversaires et leurs capacités de nuisance et surtout nous ne devons pas vivre dans l’illusion que nous sommes invulnérables. Cruelle erreur. Des pays dépositaires de civilisations qui ont vu l’enfance de l’humanité sont en train de pâtir des possibilités de partition. Que devient l’Irak, la Syrie, le Yémen, la Libye, le Soudan, amputé de 1 million de kilomètres carrés, sans parler de la Palestine qui a disparu des radars?
Il est bien connu que le Makhzen marocain a toujours eu en suspicion ses relations avec l’Algérie. L’Algérie a beau relativiser les incartades du royaume misant sur la nécessité de construire l’ensemble maghrébin que tout unit, en vain ! Les dernières «sorties» marocaines ont été la goutte qui a fait déborder le vase. Il fallait un coup d’arrêt à l’aventure. Ainsi, le 24 août 2021, l’Algérie décide la rupture des relations diplomatiques avec le Maroc. L’histoire a montré que le royaume du Maroc n’a jamais cessé de mener des actions hostiles à l’encontre de l’Algérie. La propagande et les services de sécurité marocains mènent une guerre ignoble contre l’Algérie, son peuple et ses dirigeants, en lançant des rumeurs et en diffusant des informations malveillantes et incendiaires. Voilà pour le résumé d’un feuilleton de raisons qui ont amené cette mise au point du gouvernement.
Les provocations permanentes du Makhzen marocain
La décision de rupture est l’aboutissement de plusieurs faits inamicaux inacceptables. Sans remonter dans le temps, à la traîtrise du roi du Maroc envers l’Émir Abdelkader, traîtrise qui lui a permis de faire rectifier la frontière algéro-marocaine suite au traité de Lalla Maghnia permettant ainsi à la Moulaya de dépendre du royaume alors que dans l’histoire, et ce, depuis les Romains, il y a deux mille ans, «la Moulaya séparait les deux Maurétanies».
«Tous les documents antiques s’accordent à donner un grand cours d’eau pour limiter les deux Maurétanies. Le fleuve Mulucha, au temps de Salluste, séparait le royaume de Bocchus de celui de Jugurtha (…) Et c’est ainsi à la Malva que l’itinéraire d’Antonin place la frontière des deux provinces selon ce qui a été convenu : Malva flumen dirimit Maurétanias duas».(1)
Voilà pour l’histoire. Bien plus tard, l’Algérie traversait une période pénible. Il est vrai que le roi Hassan II a qualifié l’Algérie pendant la décennie noire de laboratoire de l’expression du terrorisme. De fait, depuis 1994, l’Algérie a décidé de fermer la frontière suite aux attentats de Marrakech, lorsque le Maroc avait accusé l’Algérie de terrorisme. Malgré tous ces manquements au bon voisinage, l’Algérie n’a pas accablé le Maroc du fait qu’il soit un pourvoyeur mondial de kif dans l’impunité la plus totale, notamment de la part de l’Europe qui en est ravitaillée via l’Espagne. Pour l’histoire, l’Émir Abdelkrim El Khattabi a proclamé, en 1922, la République confédérée des tribus du Rif. Il considère le cannabis comme haram, il est le seul à avoir presque réussi à interdire [sa] «production traditionnelle dans le Rif depuis le VIIe siècle».
Cette escalade du Maroc dénote une certaine fuite en avant concernant l’invasion du Sahara Occidental en 1975, dernière colonie en Afrique, inscrit depuis 1966 sur la liste des territoires non autonomes, et donc éligible à l'application de la résolution 1514 (XV) de 1960 de l'Assemblée Générale de l'ONU portant déclaration de l'octroi de l'indépendance aux pays et peuples coloniaux. La résolution 34/37 de 1979 appelle explicitement à la fin de l’occupation du territoire par le Maroc. Plus avant pourtant, le Maroc avait accepté de s’en remettre aux Nations-Unies en 1991 s’agissant de la cause sahraouie, ce qui a permis la fameuse rencontre sans lendemain de Zéralda en 1988 de l’Union maghrébine…
Le Maroc espionne tout le monde et l’Algérie grâce à un logiciel israélien ! C’est une guerre sans mort, guerre économique, voire géopolitique. On sait que le Maroc a toujours profité des largesses de l’Europe et des Occidentaux qui ferment les yeux sur les Tazmamart nombreux qu’avait mis en évidence dans son ouvrage l'écrivain français Gilles Perrault, Notre ami le Roi. Malgré tout cela, les Riadhs et autres petits cadeaux ont anesthésié aussi bien la droite réactionnaire, mais surtout la gauche bobo qui ont une conception à géométrie variable des droits de l’Homme.
Les réactions de la classe politique
Pour le politologue Yahia Zoubir, «cette rupture était inévitable et nécessaire ; d’aucuns jugeront qu’elle a tardé. Le problème entre les 2 pays ne date pas d’aujourd’hui. Le Maroc a profité de la paralysie qui avait caractérisé les dernières années de la présidence de Bouteflika pour affaiblir les intérêts de l’Algérie en Afrique, dans le dossier du Sahara Occidental, en Europe et ailleurs. Une hostilité qui allait à l’encontre de toute pratique diplomatique. Mais de tous les actes hostiles, le soutien ouvert au MAK a dépassé le seuil de tolérance. On était en droit de penser que le roi Mohammed VI allait désavouer son ambassadeur à l’ONU, ce qui ne s’est pas produit. Le Maroc s’est senti revigoré par l’accord de Donald Trump concernant la normalisation entre le Maroc et Israël. D’où l’accélération des attaques contre l’Algérie. La relance de la diplomatie de l’Algérie dans la région nord-africaine et au-delà conduira certainement à des réalignements géopolitiques. À mon avis, l’Algérie préservera sa politique de non-alignement, mais si des puissances étrangères à la région telles que les Émirats arabes unis et Israël décident de s’immiscer avec la complicité du Makhzen dans les affaires internes des pays de la région et de menacer la sécurité nationale de l’Algérie, celle-ci se rapprochera sans aucun doute de la Russie et de la Chine».(2)
Pour Mohamed Laichoubi, ancien ministre et ambassadeur, «cette décision envers le royaume chérifien était prévisible à plus d’un titre». «Il est admis, ajoute l’ancien diplomate, qu’entre pays voisins, il y a obligation de trouver toujours des compromis pour l’avenir des sociétés, leurs économies respectives et leur destin commun. Mais quand les relations sont rompues, cela augure d’une situation grave.» «Le Maroc n’est pas à sa première forfaiture, il avait toujours eu cet objectif de réduire la présence efficiente de l’Algérie à l’Union africaine», rappellera M. Laichoubi. Le processus d’agressivité a atteint son paroxysme en continuité du cynisme jusqu’à ramener Israël et l’aider dans sa volonté de repositionnement dans la région. «Israël, pour ne pas la nommer, table sur la déchirure des sociétés, l’affaiblissement de leurs économies», avise-t-il. «On assiste à l’illusion, hélas, de libanisation de l’Algérie», présage-t-il.(3)
Parmi les autres réactions des partis et des hommes politiques qui, globalement, vont dans le sens de la décision du gouvernement, il me semble que la réponse du Parti des travailleurs est la plus articulée en ce sens qu’il n’y a pas de suivisme béat. Au contraire, ce parti met en garde contre les rodomontades et rejoint notre inquiétude, à juste titre, sur les réponses à apporter par la suite. Nous lisons : «Les raisons ayant poussé l’Algérie à prendre une telle décision son légitimes. Nous exprimons notre regret devant une telle évolution des relations entre les deux pays et affirmons que les liens historiques de fraternité et d’entraide entre les deux peuples ne sauraient être affectés par les crises, quelle que soit leur ampleur.» Le Parti des travailleurs préconise «de régler tous les différends par les moyens politiques qui ferment le porte aux ingérences étrangères qui on détruit de nombreux pays, en particulier dans notre continent et dans le région du Machrek». «Il n’est pas question ‘’de minimiser le danger de la présence sioniste’’, les dangers qui nous viennent de le propagation du terrorisme dans la région du Sahel nous suffisent». «Notre pays dispose-t-il d’une immunité suffisante politiquement, économiquement et socialement pour faire face à tout danger interne ou externe ?»(4)
Enfin, une autre analyse qui a attiré mon attention est celle de Monsieur Abdallah Labidi, ancien ambassadeur tunisien. Il résume avec justesse les données de la crise et met en garde contre ce que l’on pourrait appeler un ordo ab chao, cher à l’Administration américaine sous l’ère Condoleezza Rice, ancienne secrétaire d’État. Il met en garde contre l'importation des conflits du Moyen-Orient au Maghreb arabe, soulignant que l'Algérie a toujours été une cible difficile à atteindre pour l'entité israélienne qui s'est introduite dans la région grâce au Maroc. La région est en proie à un grand conflit (...) et la question dépasse le Maroc et l'Algérie car il y a une volonté de transformer notre région en Proche-Orient-bis et le Maroc est en train de mettre le feu aux poudres, regrettant que le Maroc ait fait de son territoire une plate-forme pour le ministre des Affaires étrangères de l’entité sioniste, Yaïr Lapid, lui permettant de proférer des propos hostiles contre l'Algérie. Par ses agissements, le Maroc a voulu «faire le parallèle avec la demande algérienne de garantir au peuple sahraouie son droit à l'autodétermination», alors qu'il n'y a pas lieu de comparer ici vu que la question du Sahara Occidental est inscrite à l'ONU et qu’il existe une mission onusienne chargée de l'organisation d'un référendum d'autodétermination au Sahara Occidental. Qui plus est, les Nations-Unies et la Cour internationale de justice de La Haye ont reconnu que le Sahara Occidental n'est pas un territoire marocain et appelé à un référendum d'autodétermination pour le peuple sahraoui. «La reconnaissance par Donald Trump de la prétendue souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental visait à perturber la région. Cette reconnaissance n'a aucune valeur au niveau international.»(5)
La contribution des citoyennes et des citoyens à l’apaisement permettra d’être résilient
Le moins que l’on puisse dire est que l’Algérie a échappé à une tentative de guerre civile dont on ne connaît pas encore les tenants et les aboutissements. Comme un seul homme, l’Algérien s’est dressé contre des diviseurs qui pensaient arriver à déchirer le tissu social au nom d’une ethnie absconse. Dans ce cadre plus que jamais, il faut saluer le geste noble du père de Djamel Bensmaïl, geste qui a mis un coup d’arrêt à l’aventure. Il a déclaré qu’il était algérien et que les Algériens, quelle que soit leur latitude, sont frères. Une délégation de notables de Larbaâ-Nath-Irathen (Tizi-Ouzou) s’est déplacée il y a quelques jours à Miliana (Aïn- Defla), au domicile du défunt Djamel Bensmaïl, à laquelle ils ont remis un chèque de trois milliards de centimes (30 millions DA). Les membres de cette délégation ont présenté en leur nom et au nom des habitants de la wilaya de Tizi-Ouzou leurs condoléances à la famille du défunt Djamel Bensmaïl. Dans le même temps, l’Assemblée populaire de wilaya (APW) de Tizi-Ouzou a annoncé avoir créé un prix pour la paix, la fraternité et l’unité, décerné, dans sa première édition, au père du défunt Djamel Bensmaïl. (…) «Malgré son drame et son chagrin, le père de Djamel Bensmaïl a fait preuve d’un sens élevé de patriotisme, de sagesse et de tolérance. Il a intervenu et mis fin à la fitna, que certains cercles voulaient promouvoir entre les enfants du peuple d’un même pays», a souligné le président d’APW.(6)
Nous ne devons ne jamais oublier cela et trouver les voies et moyens de perpétuer ce type de messages. Dans plusieurs de mes écrits, j'ai affirmé que le service national est un formidable melting pot , c'est sans conteste un des creusets du vivre ensemble à côté du système éducatif universitaire. J’ai proposé que dans toutes les écoles, les collèges, les lycées et les universités, le premier cours porterait sur la tolérance, le vivre-ensemble et le faire ensemble.
Lettre plaidoyer à un «indépendantiste»
Une contribution ancienne de Maâmar Farah, mais qui n’a pas pris un pli tant il est vrai que le problème du vivre-ensemble est plus que jamais d’actualité , est une réponse patriote à un «independantiste» qui, le moins que l’on puisse dire, n’a pas mesuré les conséquences de ses actes qui freinent le pays dans sa quête d’unité. Avec lucidité, Maâmar Farah parle de la nécessité de la déconstruction du jacobinisme pour permettre des respirations démocratiques à l’échelle des régions, ce qui n’enlève rien à l’unité du pays. Il écrit : «Autant le besoin de décentralisation est impérieux dans un pays de plus de deux millions de kilomètres carrés, autant l'idée d'indépendance d'une quelconque région est injustifiée, incohérente et irréalisable. Il vaut mieux parler de régionalisation dont les bienfaits sont évidents.
L'Algérie a lamentablement suivi la formule jacobine française alors que le monde pullule d'exemple d'États forts et respectables s'appuyant sur une large décentralisation qui donne aux régions les moyens démocratiques de mettre en valeur leurs potentialités et d'assurer sécurité et prospérité à leurs habitants. La nation où ils vivent — où tous les Algériens vivent — est un legs précieux de leurs ancêtres. Ses contours ont été tracés par le sang, depuis les époques lointaines des résistants contre les envahisseurs romain, vandale, byzantin, arabe, espagnol, turc, jusqu'à la lutte contre l'occupant français.»(7)
Voulant montrer qu’il n’y a pas de spécificité dans la défense du pays contre l’envahisseur quel qu’il soit, il a rappelé l’interdiction du colonel Amirouche qui promettait de punir les djounoud qui parlaient de régionalisme. L’auteur «avoue» : «C'est dernièrement que j'ai appris que Tacfarinas était de chez moi (je n'aime pas ce ‘’chez moi’’, car ‘’chez moi’’, c'est toute l'Algérie, mais je l'utilise sciemment) ; donc j'apprenais que ce héros du combat contre le colonisateur romain était de Khemissa, sœur de Madaure, dans l'actuelle wilaya de Souk-Ahras. Par un autre hasard, j'appris qu'il est mort à Pomaria, c'est-à-dire l'actuelle Tlemcen, en combattant les mêmes envahisseurs. Sur sa route, il avait livré beaucoup de batailles dont l'une à Sour-el-Ghozlane, où il fut blessé (et non mort comme l'affirment plusieurs sources). Ce grand homme, dont on dit qu'il inventa les techniques de la guérilla, avait mené ses hommes de la frontière tunisienne aux confins algéro-marocains, cette nation existait déjà par le sang versé par ces martyrs tout au long d'un parcours qui deviendra, plusieurs siècles plus tard, celui de l'Algérie moderne. Ce sang n'était pas le sang des hommes de l'Est, ni celui versé par les hommes du Centre ou de l'Ouest... C'est à ce moment-là, au moment où il s'est mélangé, dans le même combat et pour les mêmes aspirations, qu'il a donné naissance à cette grande nation que d'aucuns, parmi nos ennemis, renient.»(7)
Terminant son plaidoyer avec l’espoir, vain de notre point de vue, de convaincre «l’indépendantiste» : «C'est cela l'idée de l'Algérie : une idée née autour des valeurs de luttes pour l'indépendance et de combats pour la dignité. (….) Que dire à mes amis kabyles de Annaba et d'El-Bayadh, de Tam et de Djelfa, de Tébessa et de Tlemcen, qui n'ont jamais ressenti la moindre inquiétude dans leur vie et dont les parents et, parfois, les arrière- grands-parents, ont quitté leur Kabylie natale, pour vivre ailleurs, dans leur pays, parmi les leurs ? Faudra-t-il leur délivrer un passeport pour qu'ils aillent, en pèlerinage, dans le bled d'origine de leurs ancêtres ? Les Kabyles, les Soufis, les Mozabites, les Ferdjiouas, les Djijeliens, les Ouled Darradj, les Ouled Naïls, les berbérophones et les arabophones ont vécu en parfaite harmonie, ici, sur les terres numides. Que dire demain à nos pères ? Que dire à l'histoire lointaine et proche ? Et que répondre aux questions cruciales de l'avenir ?»(7)
Que faire pour tisser la trame du récit national? La réponse ne peut être que dans le temps long
Dans le même ordre que le cri du cœur de Maâmar Farah, j’ajoute que nous devons être convaincus par le sacerdoce du vivre-ensemble et la nécessité de la construction du projet de société par la justice, le brassage permanent, le parler vrai à cette jeunesse qu’il faut convaincre que nous n’avons pas de patrie de rechange… Le mouvement sécessionniste marchande rien moins que la partition du pays ! Se proclamant leader pour négocier le sort de la Kabylie, il oublie que la Kabylie appartient aux Algériens, quelle que soit leur région. Comme l’a écrit un écrivain connu : «Chacun d’entre nous a droit à une part en Kabylie.» (Nsal fiha chbar). Cette revendication de chacun plonge ses racines dans le combat anonyme de millions d’Algériens bercés par cette conviction d’appartenance à un grand pays à défendre d’est en ouest et du nord au sud.
En fait, le premier des chantiers est celui du récit national. Nous devons, à l’instar de toutes les nations, avoir des icones fondatrices du récit national. Il en est ainsi de la destinée manifeste des Américains, de Jeanne d’Arc en France, voire d’un mandat de Dieu pour le peuple élu. La difficulté d’ouvrir le fichier sur l’identité des Algériens dans ce XXIe siècle de tout les dangers. Cette quasi-errance ouvre un boulevard à tout ceux tentés par l’aventure de tenter de fracturer un pays que 132 ans de colonisation abjecte n’ont pas pu réaliser. De mon point de vue, le fait de différer constamment la question qui est de définir le projet de société et s’interroger sur ce que c’est qu’être algérien au XXIe siècle est porteuse de danger.
Quels sont nos fondamentaux culturels et cultuels ? La quête d’un récit national consensuel, qui fait siens aussi bien Massinissa que Jugurtha que l’Émir Abdelkader et qui se réfère à un Islam de 1 400 ans fait de tolérance, est un chantier qui attend toujours d’être ouvert tant il est vrai que l’aboutissement à un vivre-ensemble au nom d’une algérianité assumée qui coupera la route à l’aventure de ceux qui cherchent leur légitimité soit auprès de l’ancien colonisateur ou d’une sphère moyen-orientale installée dans les temps morts. Nous irons alors à la conquête du savoir ayant des racines assumées et des ailes pour prendre notre envol et apporter notre part à la civilisation humaine. Plus que jamais, nous appelons de nos vœux un aggiornamento qui nous permettra de rentrer enfin dans ce XXIe siècle de tous les dangers .
La réalité du monde que nous devons métaboliser dans nos actions
Nous n’avons pas fait le tour de toutes les surprises que l’on peut avoir d’un comportement imprévisible d’un adversaire épaulé par une puissance déterminée à nous amener à ses vues. Nous sommes dans un siècle où les armes classiques sont de moins en moins efficaces. Un adversaire invisible du fin fond d’une salle climatisée peut démolir le fonctionnement d’un pays en s’emparant des codes informatiques des centrales thermiques, des logiciels de planification et de régulation, des différents organes de fonctionnement d’un pays (armée aviation…). Dans cette guerre sans mort, cette guerre de quatrième génération fait appel à la maîtrise des nouvelles techniques reposant sur la technologie. C’est de fait le défi principal du XXIe siècle, engageant la sécurité mondiale et toute inadaptation à ces mutations isolerait encore plus le pays. Il faut croire l’ANP quand elle déclare qu’elle déjoue des milliers de piratages.
Nous n’avons pas compris qu’il faut changer totalement de logiciel. Avec son logiciel Pegasus, Israël peut espionner tout le monde. Il le fait en faisant endosser cela aux services marocains. Le monde est à la nanotechnologie, aux robots, à l’homme augmenté. La guerre classique fait partie de l’histoire. En traversant le siècle, nous avons laissé derrière nous la guerre classique. Les vrais combats sont ceux de l’intelligence. Les centres de recherche des armées recrutent des milliers d’ingénieurs et de docteurs.
Doit-on continuer à regarder dans le rétroviseur alors que le monde avance et n’a que faire de nos états d’âme et de ses combats d’arrière-garde ? Doit-on continuer à nous lamenter en comptant les points des coups reçus ou sommes-nous déterminés à nous battre avec les armes du XXIe siècle ? Il est temps de ré-étalonner notre rapport au monde. Un maître-mot : le savoir. Si nous décidons de donner une visibilité à l’Algérie pour qu’elle ne devienne pas une zone grise, ce ne sont plus des rodomontades sans lendemain. C’est la mise en place sans tarder en laissant l’idéologie en dehors de l’école et de l’université.
Dans ce cadre, le mieux est de prendre acte et de prendre rendez-vous avec l’Histoire et se mettre au travail autour d’un projet, celui d’une Algérie du futur qui donne sa chance et où ceux qui ont une valeur ajoutée la mettraient au service du pays, barrant la route à tous ceux tentés par l’aventure et qui croient trouver dans l’adoubement à l’ancienne puissance une façon de rendre service au pays. Cruelle erreur ! On sait ce que c’est que la démocratie aéroportée pour des pays vulnérables. Un exemple récent, l’Afghanistan. Comme sont tentés par l’aventure de combats d’arrière-garde ceux qui s’arriment à la sphère moyen-orientale, autrement plus féroce contre l’Algérie qui refuse de rentrer dans leur rang.
Le campus de l’intelligence de Sidi Abdallah avec une ambition et des moyens
Devant les nuages qui s’accumulent du fait de nouvelles de guerre dites de quatrième génération, où nous ne voyons pas l’adversaire qui généralement est difficile à déceler. La seule parade est de mettre des stratégies préventives très résilientes et pouvant répondre rapidement . De ce fait, il est urgent que La formation de l’élite capable soit capable de rendre coup pour coup par nécessité vitale. Il serait présomptueux d’en attendre des résultats dans un futur immédiat. Nous ne pouvons entrer dans le développement d’une parade efficace par effraction, c’est une lente maturation, ce sont des nuits blanches, c’est une autre Révolution qu’il faut mener en rassemblant toutes les opportunités pour déceler l’élite à tout les niveaux.
Un pays comme le Maroc , l’a compris : Quand les élèves des grandes écoles préparent les classes préparatoires en France, Hassan II reçoit les élèves la veille de leur départ en France et leur dit qu’il compte sur eux. Résultat des courses, il y a des dizaines de polytechniciens marocains : «Depuis 1985, le nombre d’élèves marocains passant de 68 à 128 élèves entre 1955-1985 et 1986-2000 a doublé. Cette augmentation confère au Maroc le premier rang de la fréquentation étrangère de l’École polytechnique. On compte 17 élèves algériens des promotions 1963 à 1985 à l’École Polytechnique de Paris, proportion inchangée de1986 à 2000. Deux caractéristiques majeures différencient la situation marocaine de la tunisienne. D’une part, le nombre de polytechniciens marocains qui continuent à rentrer au pays reste relativement élevé en comparaison : ils sont 21 sur 38 (55%) dans les promotions 1948-1980, 12 sur 29 dans les promotions 1981-1985 (41%) et 25 sur 48 dans les promotions 1986-1992 (52%). Où sont les polytechniciens algériens?»(8)
Ce campus de Sidi Abdallah devrait pouvoir avoir toutes les sollicitudes en termes de moyens. L’élite formée dans de bonnes conditions devrait pouvoir permettre de donner la pleine mesure de son talent en étant sécurisée du point de vue de l’emploi. Pour être en phase avec la réalité du monde, notamment pour investir les nouvelles disciplines qui interviennent dans la cyber-sécurité, il nous faut former chaque année des dizaines de milliers d’informaticiens, d’ingénieurs en intelligence artificielle/an.
Les écoles d’intelligence artificielle et de mathématiques devraient être complétées par les autres concernant les autres domaines. C’est le cas de l’informatique, de la robotique, de l’électronique, de la transition énergétique (ITEER)… Quelle que soit la santé financière du pays, il faut mettre en place un campus de l’intelligence à Sidi Abdallah où nous devons former les futures troupes scientifiques capables de répondre d’une façon appropriée aux différentes agressions d’un nouveau type, où vous ne voyez plus votre adversaire «à l’ancienne».
L’Algérie doit savoir qu’elle va au-devant de difficultés de plus en plus complexes. Notre adversaire n’est pas celui désigné mais c’est toute la capacité de nuisance de l’allié israélien du Makhzen dont nous aurons aussi à nous prémunir. Nous avons déjà un échantillon de cette collusion avec le programme Pegasus. Un autre danger dans les prochaines années et la concurrence concernant la vente de gaz des gisements en Méditerranée orientale. L’Italie, la Grèce, et Chypre ont paraphé un plan avec Israël prévoyant la construction d’un gazoduc allant des champs gaziers maritimes israéliens vers les côtes sud-européennes.
Plus que jamais nous avons besoin de consolider dans toutes nos actions la nécessité d un récit national décliné de façon différente mais complémentaire aussi bien dans le système éducatif en permettant le brassage que dans toutes les actions qui nécessitent, qui font intervenir les différentes régions du pays. Au risque de me répéter , l'économie de la connaissance devra être la colonne vertébrale de toute vision du futur
Le célèbre écrivain Antoine de Saint-Exupéry qui écrivit notamment: " le petit prince", parlant de l’engouement à développer au sein des jeunes en terme de mobilisation propose de ne pas se situer au détail mais viser plus haut. L’Utopie. Il écrit : «Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas tes hommes et femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose. Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer.»
Mutatis mutandis, nous devons faire naître au sein de la jeunesse ce désir d’être utile et d’être acteurs de leur destin, ce désir de construire, de se sentir responsable de l’avenir du pays et ceci par des chantiers permanents qui développent en eux à la fois la conviction d'être utiles et de compter dans l'échelle des valeurs sociales, mais aussi cet esprit pionnier qui est le moteur de la marche des civilisations.
Un exemple ? Le développement du Sud dans ses multiples dimensions : utilisant les énergies renouvelables, développant l’agriculture, créant des villes nouvelles autant de chantiers qui créeront une nouvelle utopie.,celle de faire du Sahara une nouvelle Californie. Amen.
Cette citation de Saint-Exupéry nous met en garde contre l’assistanat et nous invite à nous mobiliser autour d’un projet. Justement, nous avons plus que jamais besoin de nous mobiliser autour d’une utopie qui nous permettra de sévir contre des adversaires qui seront de plus en plus nombreux. Beaucoup d’études montrent que l’Algérie est visée par un nouveau reshapage du monde. De ce fait, il ne faut surtout pas sous-estimer nos adversaires et leurs capacités de nuisance et surtout nous ne devons pas vivre dans l’illusion que nous sommes invulnérables. Cruelle erreur. Des pays dépositaires de civilisations qui ont vu l’enfance de l’humanité sont en train de pâtir des possibilités de partition. Que devient l’Irak, la Syrie, le Yémen, la Libye, le Soudan, amputé de 1 million de kilomètres carrés, sans parler de la Palestine qui a disparu des radars?
Il est bien connu que le Makhzen marocain a toujours eu en suspicion ses relations avec l’Algérie. L’Algérie a beau relativiser les incartades du royaume misant sur la nécessité de construire l’ensemble maghrébin que tout unit, en vain ! Les dernières «sorties» marocaines ont été la goutte qui a fait déborder le vase. Il fallait un coup d’arrêt à l’aventure. Ainsi, le 24 août 2021, l’Algérie décide la rupture des relations diplomatiques avec le Maroc. L’histoire a montré que le royaume du Maroc n’a jamais cessé de mener des actions hostiles à l’encontre de l’Algérie. La propagande et les services de sécurité marocains mènent une guerre ignoble contre l’Algérie, son peuple et ses dirigeants, en lançant des rumeurs et en diffusant des informations malveillantes et incendiaires. Voilà pour le résumé d’un feuilleton de raisons qui ont amené cette mise au point du gouvernement.
Les provocations permanentes du Makhzen marocain
La décision de rupture est l’aboutissement de plusieurs faits inamicaux inacceptables. Sans remonter dans le temps, à la traîtrise du roi du Maroc envers l’Émir Abdelkader, traîtrise qui lui a permis de faire rectifier la frontière algéro-marocaine suite au traité de Lalla Maghnia permettant ainsi à la Moulaya de dépendre du royaume alors que dans l’histoire, et ce, depuis les Romains, il y a deux mille ans, «la Moulaya séparait les deux Maurétanies».
«Tous les documents antiques s’accordent à donner un grand cours d’eau pour limiter les deux Maurétanies. Le fleuve Mulucha, au temps de Salluste, séparait le royaume de Bocchus de celui de Jugurtha (…) Et c’est ainsi à la Malva que l’itinéraire d’Antonin place la frontière des deux provinces selon ce qui a été convenu : Malva flumen dirimit Maurétanias duas».(1)
Voilà pour l’histoire. Bien plus tard, l’Algérie traversait une période pénible. Il est vrai que le roi Hassan II a qualifié l’Algérie pendant la décennie noire de laboratoire de l’expression du terrorisme. De fait, depuis 1994, l’Algérie a décidé de fermer la frontière suite aux attentats de Marrakech, lorsque le Maroc avait accusé l’Algérie de terrorisme. Malgré tous ces manquements au bon voisinage, l’Algérie n’a pas accablé le Maroc du fait qu’il soit un pourvoyeur mondial de kif dans l’impunité la plus totale, notamment de la part de l’Europe qui en est ravitaillée via l’Espagne. Pour l’histoire, l’Émir Abdelkrim El Khattabi a proclamé, en 1922, la République confédérée des tribus du Rif. Il considère le cannabis comme haram, il est le seul à avoir presque réussi à interdire [sa] «production traditionnelle dans le Rif depuis le VIIe siècle».
Cette escalade du Maroc dénote une certaine fuite en avant concernant l’invasion du Sahara Occidental en 1975, dernière colonie en Afrique, inscrit depuis 1966 sur la liste des territoires non autonomes, et donc éligible à l'application de la résolution 1514 (XV) de 1960 de l'Assemblée Générale de l'ONU portant déclaration de l'octroi de l'indépendance aux pays et peuples coloniaux. La résolution 34/37 de 1979 appelle explicitement à la fin de l’occupation du territoire par le Maroc. Plus avant pourtant, le Maroc avait accepté de s’en remettre aux Nations-Unies en 1991 s’agissant de la cause sahraouie, ce qui a permis la fameuse rencontre sans lendemain de Zéralda en 1988 de l’Union maghrébine…
Le Maroc espionne tout le monde et l’Algérie grâce à un logiciel israélien ! C’est une guerre sans mort, guerre économique, voire géopolitique. On sait que le Maroc a toujours profité des largesses de l’Europe et des Occidentaux qui ferment les yeux sur les Tazmamart nombreux qu’avait mis en évidence dans son ouvrage l'écrivain français Gilles Perrault, Notre ami le Roi. Malgré tout cela, les Riadhs et autres petits cadeaux ont anesthésié aussi bien la droite réactionnaire, mais surtout la gauche bobo qui ont une conception à géométrie variable des droits de l’Homme.
Les réactions de la classe politique
Pour le politologue Yahia Zoubir, «cette rupture était inévitable et nécessaire ; d’aucuns jugeront qu’elle a tardé. Le problème entre les 2 pays ne date pas d’aujourd’hui. Le Maroc a profité de la paralysie qui avait caractérisé les dernières années de la présidence de Bouteflika pour affaiblir les intérêts de l’Algérie en Afrique, dans le dossier du Sahara Occidental, en Europe et ailleurs. Une hostilité qui allait à l’encontre de toute pratique diplomatique. Mais de tous les actes hostiles, le soutien ouvert au MAK a dépassé le seuil de tolérance. On était en droit de penser que le roi Mohammed VI allait désavouer son ambassadeur à l’ONU, ce qui ne s’est pas produit. Le Maroc s’est senti revigoré par l’accord de Donald Trump concernant la normalisation entre le Maroc et Israël. D’où l’accélération des attaques contre l’Algérie. La relance de la diplomatie de l’Algérie dans la région nord-africaine et au-delà conduira certainement à des réalignements géopolitiques. À mon avis, l’Algérie préservera sa politique de non-alignement, mais si des puissances étrangères à la région telles que les Émirats arabes unis et Israël décident de s’immiscer avec la complicité du Makhzen dans les affaires internes des pays de la région et de menacer la sécurité nationale de l’Algérie, celle-ci se rapprochera sans aucun doute de la Russie et de la Chine».(2)
Pour Mohamed Laichoubi, ancien ministre et ambassadeur, «cette décision envers le royaume chérifien était prévisible à plus d’un titre». «Il est admis, ajoute l’ancien diplomate, qu’entre pays voisins, il y a obligation de trouver toujours des compromis pour l’avenir des sociétés, leurs économies respectives et leur destin commun. Mais quand les relations sont rompues, cela augure d’une situation grave.» «Le Maroc n’est pas à sa première forfaiture, il avait toujours eu cet objectif de réduire la présence efficiente de l’Algérie à l’Union africaine», rappellera M. Laichoubi. Le processus d’agressivité a atteint son paroxysme en continuité du cynisme jusqu’à ramener Israël et l’aider dans sa volonté de repositionnement dans la région. «Israël, pour ne pas la nommer, table sur la déchirure des sociétés, l’affaiblissement de leurs économies», avise-t-il. «On assiste à l’illusion, hélas, de libanisation de l’Algérie», présage-t-il.(3)
Parmi les autres réactions des partis et des hommes politiques qui, globalement, vont dans le sens de la décision du gouvernement, il me semble que la réponse du Parti des travailleurs est la plus articulée en ce sens qu’il n’y a pas de suivisme béat. Au contraire, ce parti met en garde contre les rodomontades et rejoint notre inquiétude, à juste titre, sur les réponses à apporter par la suite. Nous lisons : «Les raisons ayant poussé l’Algérie à prendre une telle décision son légitimes. Nous exprimons notre regret devant une telle évolution des relations entre les deux pays et affirmons que les liens historiques de fraternité et d’entraide entre les deux peuples ne sauraient être affectés par les crises, quelle que soit leur ampleur.» Le Parti des travailleurs préconise «de régler tous les différends par les moyens politiques qui ferment le porte aux ingérences étrangères qui on détruit de nombreux pays, en particulier dans notre continent et dans le région du Machrek». «Il n’est pas question ‘’de minimiser le danger de la présence sioniste’’, les dangers qui nous viennent de le propagation du terrorisme dans la région du Sahel nous suffisent». «Notre pays dispose-t-il d’une immunité suffisante politiquement, économiquement et socialement pour faire face à tout danger interne ou externe ?»(4)
Enfin, une autre analyse qui a attiré mon attention est celle de Monsieur Abdallah Labidi, ancien ambassadeur tunisien. Il résume avec justesse les données de la crise et met en garde contre ce que l’on pourrait appeler un ordo ab chao, cher à l’Administration américaine sous l’ère Condoleezza Rice, ancienne secrétaire d’État. Il met en garde contre l'importation des conflits du Moyen-Orient au Maghreb arabe, soulignant que l'Algérie a toujours été une cible difficile à atteindre pour l'entité israélienne qui s'est introduite dans la région grâce au Maroc. La région est en proie à un grand conflit (...) et la question dépasse le Maroc et l'Algérie car il y a une volonté de transformer notre région en Proche-Orient-bis et le Maroc est en train de mettre le feu aux poudres, regrettant que le Maroc ait fait de son territoire une plate-forme pour le ministre des Affaires étrangères de l’entité sioniste, Yaïr Lapid, lui permettant de proférer des propos hostiles contre l'Algérie. Par ses agissements, le Maroc a voulu «faire le parallèle avec la demande algérienne de garantir au peuple sahraouie son droit à l'autodétermination», alors qu'il n'y a pas lieu de comparer ici vu que la question du Sahara Occidental est inscrite à l'ONU et qu’il existe une mission onusienne chargée de l'organisation d'un référendum d'autodétermination au Sahara Occidental. Qui plus est, les Nations-Unies et la Cour internationale de justice de La Haye ont reconnu que le Sahara Occidental n'est pas un territoire marocain et appelé à un référendum d'autodétermination pour le peuple sahraoui. «La reconnaissance par Donald Trump de la prétendue souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental visait à perturber la région. Cette reconnaissance n'a aucune valeur au niveau international.»(5)
La contribution des citoyennes et des citoyens à l’apaisement permettra d’être résilient
Le moins que l’on puisse dire est que l’Algérie a échappé à une tentative de guerre civile dont on ne connaît pas encore les tenants et les aboutissements. Comme un seul homme, l’Algérien s’est dressé contre des diviseurs qui pensaient arriver à déchirer le tissu social au nom d’une ethnie absconse. Dans ce cadre plus que jamais, il faut saluer le geste noble du père de Djamel Bensmaïl, geste qui a mis un coup d’arrêt à l’aventure. Il a déclaré qu’il était algérien et que les Algériens, quelle que soit leur latitude, sont frères. Une délégation de notables de Larbaâ-Nath-Irathen (Tizi-Ouzou) s’est déplacée il y a quelques jours à Miliana (Aïn- Defla), au domicile du défunt Djamel Bensmaïl, à laquelle ils ont remis un chèque de trois milliards de centimes (30 millions DA). Les membres de cette délégation ont présenté en leur nom et au nom des habitants de la wilaya de Tizi-Ouzou leurs condoléances à la famille du défunt Djamel Bensmaïl. Dans le même temps, l’Assemblée populaire de wilaya (APW) de Tizi-Ouzou a annoncé avoir créé un prix pour la paix, la fraternité et l’unité, décerné, dans sa première édition, au père du défunt Djamel Bensmaïl. (…) «Malgré son drame et son chagrin, le père de Djamel Bensmaïl a fait preuve d’un sens élevé de patriotisme, de sagesse et de tolérance. Il a intervenu et mis fin à la fitna, que certains cercles voulaient promouvoir entre les enfants du peuple d’un même pays», a souligné le président d’APW.(6)
Nous ne devons ne jamais oublier cela et trouver les voies et moyens de perpétuer ce type de messages. Dans plusieurs de mes écrits, j'ai affirmé que le service national est un formidable melting pot , c'est sans conteste un des creusets du vivre ensemble à côté du système éducatif universitaire. J’ai proposé que dans toutes les écoles, les collèges, les lycées et les universités, le premier cours porterait sur la tolérance, le vivre-ensemble et le faire ensemble.
Lettre plaidoyer à un «indépendantiste»
Une contribution ancienne de Maâmar Farah, mais qui n’a pas pris un pli tant il est vrai que le problème du vivre-ensemble est plus que jamais d’actualité , est une réponse patriote à un «independantiste» qui, le moins que l’on puisse dire, n’a pas mesuré les conséquences de ses actes qui freinent le pays dans sa quête d’unité. Avec lucidité, Maâmar Farah parle de la nécessité de la déconstruction du jacobinisme pour permettre des respirations démocratiques à l’échelle des régions, ce qui n’enlève rien à l’unité du pays. Il écrit : «Autant le besoin de décentralisation est impérieux dans un pays de plus de deux millions de kilomètres carrés, autant l'idée d'indépendance d'une quelconque région est injustifiée, incohérente et irréalisable. Il vaut mieux parler de régionalisation dont les bienfaits sont évidents.
L'Algérie a lamentablement suivi la formule jacobine française alors que le monde pullule d'exemple d'États forts et respectables s'appuyant sur une large décentralisation qui donne aux régions les moyens démocratiques de mettre en valeur leurs potentialités et d'assurer sécurité et prospérité à leurs habitants. La nation où ils vivent — où tous les Algériens vivent — est un legs précieux de leurs ancêtres. Ses contours ont été tracés par le sang, depuis les époques lointaines des résistants contre les envahisseurs romain, vandale, byzantin, arabe, espagnol, turc, jusqu'à la lutte contre l'occupant français.»(7)
Voulant montrer qu’il n’y a pas de spécificité dans la défense du pays contre l’envahisseur quel qu’il soit, il a rappelé l’interdiction du colonel Amirouche qui promettait de punir les djounoud qui parlaient de régionalisme. L’auteur «avoue» : «C'est dernièrement que j'ai appris que Tacfarinas était de chez moi (je n'aime pas ce ‘’chez moi’’, car ‘’chez moi’’, c'est toute l'Algérie, mais je l'utilise sciemment) ; donc j'apprenais que ce héros du combat contre le colonisateur romain était de Khemissa, sœur de Madaure, dans l'actuelle wilaya de Souk-Ahras. Par un autre hasard, j'appris qu'il est mort à Pomaria, c'est-à-dire l'actuelle Tlemcen, en combattant les mêmes envahisseurs. Sur sa route, il avait livré beaucoup de batailles dont l'une à Sour-el-Ghozlane, où il fut blessé (et non mort comme l'affirment plusieurs sources). Ce grand homme, dont on dit qu'il inventa les techniques de la guérilla, avait mené ses hommes de la frontière tunisienne aux confins algéro-marocains, cette nation existait déjà par le sang versé par ces martyrs tout au long d'un parcours qui deviendra, plusieurs siècles plus tard, celui de l'Algérie moderne. Ce sang n'était pas le sang des hommes de l'Est, ni celui versé par les hommes du Centre ou de l'Ouest... C'est à ce moment-là, au moment où il s'est mélangé, dans le même combat et pour les mêmes aspirations, qu'il a donné naissance à cette grande nation que d'aucuns, parmi nos ennemis, renient.»(7)
Terminant son plaidoyer avec l’espoir, vain de notre point de vue, de convaincre «l’indépendantiste» : «C'est cela l'idée de l'Algérie : une idée née autour des valeurs de luttes pour l'indépendance et de combats pour la dignité. (….) Que dire à mes amis kabyles de Annaba et d'El-Bayadh, de Tam et de Djelfa, de Tébessa et de Tlemcen, qui n'ont jamais ressenti la moindre inquiétude dans leur vie et dont les parents et, parfois, les arrière- grands-parents, ont quitté leur Kabylie natale, pour vivre ailleurs, dans leur pays, parmi les leurs ? Faudra-t-il leur délivrer un passeport pour qu'ils aillent, en pèlerinage, dans le bled d'origine de leurs ancêtres ? Les Kabyles, les Soufis, les Mozabites, les Ferdjiouas, les Djijeliens, les Ouled Darradj, les Ouled Naïls, les berbérophones et les arabophones ont vécu en parfaite harmonie, ici, sur les terres numides. Que dire demain à nos pères ? Que dire à l'histoire lointaine et proche ? Et que répondre aux questions cruciales de l'avenir ?»(7)
Que faire pour tisser la trame du récit national? La réponse ne peut être que dans le temps long
Dans le même ordre que le cri du cœur de Maâmar Farah, j’ajoute que nous devons être convaincus par le sacerdoce du vivre-ensemble et la nécessité de la construction du projet de société par la justice, le brassage permanent, le parler vrai à cette jeunesse qu’il faut convaincre que nous n’avons pas de patrie de rechange… Le mouvement sécessionniste marchande rien moins que la partition du pays ! Se proclamant leader pour négocier le sort de la Kabylie, il oublie que la Kabylie appartient aux Algériens, quelle que soit leur région. Comme l’a écrit un écrivain connu : «Chacun d’entre nous a droit à une part en Kabylie.» (Nsal fiha chbar). Cette revendication de chacun plonge ses racines dans le combat anonyme de millions d’Algériens bercés par cette conviction d’appartenance à un grand pays à défendre d’est en ouest et du nord au sud.
En fait, le premier des chantiers est celui du récit national. Nous devons, à l’instar de toutes les nations, avoir des icones fondatrices du récit national. Il en est ainsi de la destinée manifeste des Américains, de Jeanne d’Arc en France, voire d’un mandat de Dieu pour le peuple élu. La difficulté d’ouvrir le fichier sur l’identité des Algériens dans ce XXIe siècle de tout les dangers. Cette quasi-errance ouvre un boulevard à tout ceux tentés par l’aventure de tenter de fracturer un pays que 132 ans de colonisation abjecte n’ont pas pu réaliser. De mon point de vue, le fait de différer constamment la question qui est de définir le projet de société et s’interroger sur ce que c’est qu’être algérien au XXIe siècle est porteuse de danger.
Quels sont nos fondamentaux culturels et cultuels ? La quête d’un récit national consensuel, qui fait siens aussi bien Massinissa que Jugurtha que l’Émir Abdelkader et qui se réfère à un Islam de 1 400 ans fait de tolérance, est un chantier qui attend toujours d’être ouvert tant il est vrai que l’aboutissement à un vivre-ensemble au nom d’une algérianité assumée qui coupera la route à l’aventure de ceux qui cherchent leur légitimité soit auprès de l’ancien colonisateur ou d’une sphère moyen-orientale installée dans les temps morts. Nous irons alors à la conquête du savoir ayant des racines assumées et des ailes pour prendre notre envol et apporter notre part à la civilisation humaine. Plus que jamais, nous appelons de nos vœux un aggiornamento qui nous permettra de rentrer enfin dans ce XXIe siècle de tous les dangers .
La réalité du monde que nous devons métaboliser dans nos actions
Nous n’avons pas fait le tour de toutes les surprises que l’on peut avoir d’un comportement imprévisible d’un adversaire épaulé par une puissance déterminée à nous amener à ses vues. Nous sommes dans un siècle où les armes classiques sont de moins en moins efficaces. Un adversaire invisible du fin fond d’une salle climatisée peut démolir le fonctionnement d’un pays en s’emparant des codes informatiques des centrales thermiques, des logiciels de planification et de régulation, des différents organes de fonctionnement d’un pays (armée aviation…). Dans cette guerre sans mort, cette guerre de quatrième génération fait appel à la maîtrise des nouvelles techniques reposant sur la technologie. C’est de fait le défi principal du XXIe siècle, engageant la sécurité mondiale et toute inadaptation à ces mutations isolerait encore plus le pays. Il faut croire l’ANP quand elle déclare qu’elle déjoue des milliers de piratages.
Nous n’avons pas compris qu’il faut changer totalement de logiciel. Avec son logiciel Pegasus, Israël peut espionner tout le monde. Il le fait en faisant endosser cela aux services marocains. Le monde est à la nanotechnologie, aux robots, à l’homme augmenté. La guerre classique fait partie de l’histoire. En traversant le siècle, nous avons laissé derrière nous la guerre classique. Les vrais combats sont ceux de l’intelligence. Les centres de recherche des armées recrutent des milliers d’ingénieurs et de docteurs.
Doit-on continuer à regarder dans le rétroviseur alors que le monde avance et n’a que faire de nos états d’âme et de ses combats d’arrière-garde ? Doit-on continuer à nous lamenter en comptant les points des coups reçus ou sommes-nous déterminés à nous battre avec les armes du XXIe siècle ? Il est temps de ré-étalonner notre rapport au monde. Un maître-mot : le savoir. Si nous décidons de donner une visibilité à l’Algérie pour qu’elle ne devienne pas une zone grise, ce ne sont plus des rodomontades sans lendemain. C’est la mise en place sans tarder en laissant l’idéologie en dehors de l’école et de l’université.
Dans ce cadre, le mieux est de prendre acte et de prendre rendez-vous avec l’Histoire et se mettre au travail autour d’un projet, celui d’une Algérie du futur qui donne sa chance et où ceux qui ont une valeur ajoutée la mettraient au service du pays, barrant la route à tous ceux tentés par l’aventure et qui croient trouver dans l’adoubement à l’ancienne puissance une façon de rendre service au pays. Cruelle erreur ! On sait ce que c’est que la démocratie aéroportée pour des pays vulnérables. Un exemple récent, l’Afghanistan. Comme sont tentés par l’aventure de combats d’arrière-garde ceux qui s’arriment à la sphère moyen-orientale, autrement plus féroce contre l’Algérie qui refuse de rentrer dans leur rang.
Le campus de l’intelligence de Sidi Abdallah avec une ambition et des moyens
Devant les nuages qui s’accumulent du fait de nouvelles de guerre dites de quatrième génération, où nous ne voyons pas l’adversaire qui généralement est difficile à déceler. La seule parade est de mettre des stratégies préventives très résilientes et pouvant répondre rapidement . De ce fait, il est urgent que La formation de l’élite capable soit capable de rendre coup pour coup par nécessité vitale. Il serait présomptueux d’en attendre des résultats dans un futur immédiat. Nous ne pouvons entrer dans le développement d’une parade efficace par effraction, c’est une lente maturation, ce sont des nuits blanches, c’est une autre Révolution qu’il faut mener en rassemblant toutes les opportunités pour déceler l’élite à tout les niveaux.
Un pays comme le Maroc , l’a compris : Quand les élèves des grandes écoles préparent les classes préparatoires en France, Hassan II reçoit les élèves la veille de leur départ en France et leur dit qu’il compte sur eux. Résultat des courses, il y a des dizaines de polytechniciens marocains : «Depuis 1985, le nombre d’élèves marocains passant de 68 à 128 élèves entre 1955-1985 et 1986-2000 a doublé. Cette augmentation confère au Maroc le premier rang de la fréquentation étrangère de l’École polytechnique. On compte 17 élèves algériens des promotions 1963 à 1985 à l’École Polytechnique de Paris, proportion inchangée de1986 à 2000. Deux caractéristiques majeures différencient la situation marocaine de la tunisienne. D’une part, le nombre de polytechniciens marocains qui continuent à rentrer au pays reste relativement élevé en comparaison : ils sont 21 sur 38 (55%) dans les promotions 1948-1980, 12 sur 29 dans les promotions 1981-1985 (41%) et 25 sur 48 dans les promotions 1986-1992 (52%). Où sont les polytechniciens algériens?»(8)
Ce campus de Sidi Abdallah devrait pouvoir avoir toutes les sollicitudes en termes de moyens. L’élite formée dans de bonnes conditions devrait pouvoir permettre de donner la pleine mesure de son talent en étant sécurisée du point de vue de l’emploi. Pour être en phase avec la réalité du monde, notamment pour investir les nouvelles disciplines qui interviennent dans la cyber-sécurité, il nous faut former chaque année des dizaines de milliers d’informaticiens, d’ingénieurs en intelligence artificielle/an.
Les écoles d’intelligence artificielle et de mathématiques devraient être complétées par les autres concernant les autres domaines. C’est le cas de l’informatique, de la robotique, de l’électronique, de la transition énergétique (ITEER)… Quelle que soit la santé financière du pays, il faut mettre en place un campus de l’intelligence à Sidi Abdallah où nous devons former les futures troupes scientifiques capables de répondre d’une façon appropriée aux différentes agressions d’un nouveau type, où vous ne voyez plus votre adversaire «à l’ancienne».
L’Algérie doit savoir qu’elle va au-devant de difficultés de plus en plus complexes. Notre adversaire n’est pas celui désigné mais c’est toute la capacité de nuisance de l’allié israélien du Makhzen dont nous aurons aussi à nous prémunir. Nous avons déjà un échantillon de cette collusion avec le programme Pegasus. Un autre danger dans les prochaines années et la concurrence concernant la vente de gaz des gisements en Méditerranée orientale. L’Italie, la Grèce, et Chypre ont paraphé un plan avec Israël prévoyant la construction d’un gazoduc allant des champs gaziers maritimes israéliens vers les côtes sud-européennes.
Plus que jamais nous avons besoin de consolider dans toutes nos actions la nécessité d un récit national décliné de façon différente mais complémentaire aussi bien dans le système éducatif en permettant le brassage que dans toutes les actions qui nécessitent, qui font intervenir les différentes régions du pays. Au risque de me répéter , l'économie de la connaissance devra être la colonne vertébrale de toute vision du futur
Le célèbre écrivain Antoine de Saint-Exupéry qui écrivit notamment: " le petit prince", parlant de l’engouement à développer au sein des jeunes en terme de mobilisation propose de ne pas se situer au détail mais viser plus haut. L’Utopie. Il écrit : «Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas tes hommes et femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose. Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer.»
Mutatis mutandis, nous devons faire naître au sein de la jeunesse ce désir d’être utile et d’être acteurs de leur destin, ce désir de construire, de se sentir responsable de l’avenir du pays et ceci par des chantiers permanents qui développent en eux à la fois la conviction d'être utiles et de compter dans l'échelle des valeurs sociales, mais aussi cet esprit pionnier qui est le moteur de la marche des civilisations.
Un exemple ? Le développement du Sud dans ses multiples dimensions : utilisant les énergies renouvelables, développant l’agriculture, créant des villes nouvelles autant de chantiers qui créeront une nouvelle utopie.,celle de faire du Sahara une nouvelle Californie. Amen.
Professeur Chems Chitour
Ecole Polytechnique
1.https://www.persee.fr/doc/mesav_0398-3587_1878_num_9_1_1064 page 142
2https://www.reporters.dz/entretien-yahia-zoubir-specialiste-en-geopolitique-la-bataille-au-sein-de-lua-tournera-autour-disrael-et-du-sahara-occidental/
3.https://lapatrienews.dz/mohamed-laichoubi-a-la-radio-nationale-le-maroc-est-inscrit-dans-un-processus-de-destabilisation-de-notre-pays/
4.https://www.algerie360.com/rupture-des-relations-avec-le-maroc-le-pt-prend-position/?
5.https://www.aps.dz/monde/126631-un-ancien-diplomate-tunisien-met-en-garde-contre-l-importation-des-conflits-du-moyen-orient-au-maghreb
6.Mohamed Nassim https://dia-algerie.com/des-notables-de-larbaa-nath-irathen-remettent-un-cheque-de-3-milliards-de-centimes-a-la-famille-du-defunt-bensmain/amp/
7.Maamar Farah https:// www.le soirdalgerie.com /haltes-estivales/lettre-a-un-independantiste-66493
8.https://books.openedition.org/irmc/1531?lang=fr
1.https://www.persee.fr/doc/mesav_0398-3587_1878_num_9_1_1064 page 142
2https://www.reporters.dz/entretien-yahia-zoubir-specialiste-en-geopolitique-la-bataille-au-sein-de-lua-tournera-autour-disrael-et-du-sahara-occidental/
3.https://lapatrienews.dz/mohamed-laichoubi-a-la-radio-nationale-le-maroc-est-inscrit-dans-un-processus-de-destabilisation-de-notre-pays/
4.https://www.algerie360.com/rupture-des-relations-avec-le-maroc-le-pt-prend-position/?
5.https://www.aps.dz/monde/126631-un-ancien-diplomate-tunisien-met-en-garde-contre-l-importation-des-conflits-du-moyen-orient-au-maghreb
6.Mohamed Nassim https://dia-algerie.com/des-notables-de-larbaa-nath-irathen-remettent-un-cheque-de-3-milliards-de-centimes-a-la-famille-du-defunt-bensmain/amp/
7.Maamar Farah https:// www.le soirdalgerie.com /haltes-estivales/lettre-a-un-independantiste-66493
8.https://books.openedition.org/irmc/1531?lang=fr
6 SEPT. 2021
Professeur Chems Eddine Chitour
Ecole Polytechnique Alger
https://blogs.mediapart.fr/semcheddine/blog/060921/lalgerie-du-xxie-siecle-lelite-scientifique-et-la-guerre-de-quatrieme-generation
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