« La première femme à avoir détourné un avion » est une jeune Palestienne de 25 ans qui avait choisi la lutte armée. Son portrait a fait le tour du monde et « l’Obs » revient sur son parcours à l’occasion d’un dossier spécial sur l’histoire d’Israël et de la Palestine.
Keffieh drapé autour des cheveux, visage penché comme pour se détourner de l’objectif. Sur la photo, Leïla Khaled tient un fusil-mitrailleur AK-47. Sa bague a été fabriquée à partir de la première grenade qu’elle a dégoupillée. Le portrait, devenu emblématique, est celui d’une Palestinienne de 25 ans devenue mondialement célèbre à l’été 1969. Le 29 août, avec un complice, elle prend le contrôle du vol 840 de la TWA à destination de Tel-Aviv. Les deux membres du Front populaire de Libération de la Palestine (FPLP) – une organisation nationaliste d’extrême gauche – détournent l’appareil jusqu’à Damas où ils dynamitent le cockpit, une fois les 116 passagers débarqués sur le tarmac. Celui qu’ils voulaient prendre en otage – Yitzhak Rabin, alors ambassadeur d’Israël à Washington – ne se trouve pas à bord.
L’objectif du commando « Che Guevara » est manqué. Mais c’est un succès médiatique. Les journalistes s’intéressent à la cause palestinienne et à celle qui, par les armes, la rend visible. Née à Haïfa, que le pilote de la TWA a été forcé de survoler, « la première femme à avoir détourné un avion » fait partie de la « génération des camps » : elle et sa famille se sont réfugiées au Liban lors de l’exode palestinien de 1948. A 15 ans, elle a rejoint le Mouvement nationaliste arabe (MNA) aux côtés de ses frères, et a choisi la lutte armée.
Au tournant des années 1970, le recours au terrorisme par des nationalistes palestiniens a deux objectifs : livrer des attaques dans les Territoires occupés, attirer l’attention par des actions spectaculaires. Prises d’otages et détournements d’avion émaillent ainsi la décennie. Le nez et le menton refaits, pour ne pas être reconnue, Leïla Khaled se prêtera d’ailleurs à un autre acte de piraterie. Le 6 septembre 1970, des commandos tentent de détourner quatre avions. Le complice de Leïla Khaled est abattu en vol. Remise aux autorités britanniques, à Londres, où l’avion a atterri, elle est libérée vingt-huit jours plus tard à la faveur d’un échange d’otages.
Elle ne participe pas cependant à l’action la plus marquante de l’été 1976, où une poignée de terroristes détournent un vol Air France reliant Tel-Aviv à Paris, avec plus de 240 passagers, pour le forcer à se poser en Ouganda. Eux réclament la libération de 53 prisonniers palestiniens. Après des jours de négociations, Israël déclenche un raid, conduit par Yonatan Netanyahou (frère aîné de Benyamin), pour libérer la quasi-totalité des otages.
Médiatiser la cause palestinienne
Comme l’écrit l’historien Gilles Ferragu, si le keffieh de Yasser Arafat et le sourire de Leïla Khaled ont pu médiatiser la cause palestinienne, une autre image la dessert, « celle d’un homme cagoulé qui se penche du balcon d’un bâtiment du village olympique ». En 1972, l’organisation Septembre noir, branche dissidente du Fatah, prend en otage et tue des athlètes israéliens pendant les Jeux de Munich. Sidération mondiale devant cette horreur. En représailles, l’armée israélienne bombarde des bases de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) en Syrie et au Liban.
Avec les accords d’Oslo en 1993, l’organisation d’Arafat s’engagera à renoncer au terrorisme et à lutter contre lui. Mais le bilan, sur ce point, est ambigu. Leïla Khaled, qui n’a jamais revu Haïfa, a vécu au Liban, en Syrie et en Jordanie, où elle a élevé deux garçons. Elle s’est engagée auprès du Conseil national palestinien. Perçue ici comme une terroriste et là comme une héroïne, elle répète ne pas regretter ses choix
·Publié le ww.nouvelobs.com/histoire/20231231.OBS82713/leila-
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