Pour tous ceux qui veulent trouver une excuse au surplace diplomatique d’Emmanuel Macron à l’égard du Maghreb, il y a la situation politique interne, tendue, tout en ruptures et qui nécessite une concentration maximale.
La fameuse loi sur l’immigration, la gestion des impacts de la guerre au Proche Orient peuvent justifier ce semblant de désintérêt de Paris à l’égard du Maghreb. Mais cela n’explique pas tout. L’absence d’initiatives politique est principalement le fruit de la permanence d’une grande indécision.
Et pour cause. Malgré de nombreux petits signaux politiques de part et d’autre, la relation entre Paris et Rabat n’arrive pas encore à sortir du dégel dans lequel elle s’est enfermée depuis de nombreux mois, voire maintenant quelques petites années . Le dialogue politique entre les plus hautes autorités est toujours publiquement en panne. La plus spectaculaire des preuves est l’impossibilité d’organiser une visite d’Etat du président Emmanuel Macron au Maroc, une visite reportée à plusieurs fois, une visite devenue le vrai baromètre de la normalisation des rapports entre les deux pays. Qu’elle ait lieu et c’est le printemps franco-marocain qui revient. Qu’elle demeure un projet dans les tiroirs et c’est la crise de confiance qui perdure.
Entre le Maroc et la France, il y a sans doute beaucoup d’incompréhensions qui, à la marge, nourrissent cette tension et cette froide rupture. Mais il y une divergence cardinale, celle sur la souveraineté du Maroc sur le Sahara.
Pour Rabat, Paris se maintient volontairement dans une zone de confort de non choix. Certes, il y a eu les déclarations sans ambiguïtés des deux ambassadeurs français au Maroc et aux Nations unies, Christophe Lecourtier et Nicolas de Rivière. Mais ces prises de position censées rassurer les Marocains n’ont pas été publiquement endossées par la ministre des affaires étrangères Catherine Colonna ou par Emmanuel Macron lui même.
Il est vrai que ces deux ambassadeurs ne peuvent afficher de telles postures sans le feu vert clair de leurs hiérarchies, mais le silence volontairement entretenu par Paris dans cette affaire déterminante pour la relation entre la France et le Maghreb nourrit la méfiance et la suspicion. Derrière ce silence, le message qui s’affiche pour les Marocains est que Paris n’est pas encore prête à traverser cette ligne de Maginot de la reconnaissance totale de la souveraineté du Maroc sur son Sahara.
Cette grande hésitation française est à lier avec la nature des relations que le président Emmanuel Macron rêverait d’entretenir avec le voisin algérien. Là encore, l’ambiguïté est de rigueur. Un autre bras de fer d’une autre nature est à l’oeuvre. Et comme avec le Maroc, la visite d’Etat, cette fois du président algérien, Abdelmajid Tebboune, est au cœur de cette impression de panne de l’axe Paris-Alger.
Le régime algérien voulait profiter de la crise entre la France et le Maroc pour faire avancer son agenda. Des exigences algériennes d’ordre stratégique et d’autres demandes jugées excessives d’ordre protocolaire sont sans doute à l’origine de ce multiple report de la visite de Tebboune à Paris et de cette atmosphère de crise dans la relation entre la France et l’Algérie.
Faut-il ajouter à ces arguments la décision d’Emmanuel Macron, en reportant à chaque fois cette visite tant attendue, de ne pas donner l’impression de soutenir publiquement la volonté de Tebboune debbriguer un second mandat. Les autorités françaises auraient-elles reçu la preuve que ce second mandat est loin de faire l’unanimité au sein des différents clans de l’armée algérienne, véritable détentrice du pouvoir en Algérie?.
Pour Emmanuel Macron, et s’il prend la décision de la considérer comme un pari stratégique, l’année 2024 s’annonce comme celle de la grande clarification de sa vision de ses relations avec le Maghreb. Et il est pris entre deux choix. Le premier est de briser la glace en se rapprochant du Maroc et en redonnant à la relation avec ce pays le grand lustre qu’elle mérite. Le second est de continuer à gérer ce statut quo fait d’indécisions et de maintien de tensions froides.
Emmanuel Macron souffre déjà d’une mauvaise réputation dans le monde arabe et dans certaines contrées africains, saura-t-il utiliser la région du Maghreb et sa relation particulière avec ses pays pour tenter de se relancer et se créer une nouvelle image, et pourquoi pas une nouvelle aura ?
vendredi 29 décembre 2023 - 08:36
https://fr.hespress.com/346216-france-maghreb-la-grande-clarification-approche.html
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