Deux jours supplémentaires de pause dans les combats ont été conclus entre Israël et le Hamas. Lundi onze otages, dont trois Franco-Israéliens, ont été échangés contre des détenus palestiniens.
Tal Goldstein-Almog, 9 ans, lundi 27 novembre, au lendemain de sa libération, à Petah Tikva, en Israël.
La journée de lundi 27 novembre, qui devait être la dernière de la trêve conclue entre Israël et la Hamas dans la bande de Gaza, a été encore plus longue que les autres pour les familles des otages en attente de leur libération. Les autorités israéliennes n’étaient pas satisfaites de la liste présentée par le Hamas, alors que onze personnes devaient encore être libérées et que près de 200 Israéliens restent détenus à Gaza.
C’est au coucher du soleil que la situation s’est débloquée. Sur le réseau X, un message du ministère des affaires étrangères du Qatar, annonce qu’un accord « a été conclu pour prolonger la trêve humanitaire de deux jours dans la bande de Gaza » jusqu’à jeudi, 6 heures du matin. Une heure plus tard, Israël confirme le compromis. Deux jours de plus, c’est, dans les tractations évoquées par Benyamin Nétanyahou dimanche soir, vingt otages prêts à être libérés – dix par jour, comme prévu par la décision du cabinet de guerre du 22 novembre. Cent cinquante prisonniers palestiniens peuvent encore être libérés, contre 50 otages israéliens. Mardi matin, le gouvernement israélien a reçu la liste de dix otages devant être libérés dans la journée, sans dévoiler leurs noms.
La prolongation de la trêve, qui permet aussi l’acheminement d’aide humanitaire dans l’enclave en partie détruite et où la situation demeure « catastrophique », selon l’émissaire de l’ONU pour le Proche-Orient, Tor Wennesland, satisfait l’ensemble des acteurs sur la scène internationale. A Washington, John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale, s’est félicité lundi de ce que « la pause ait déjà mis un terme aux combats, accompagnée d’un afflux d’aide humanitaire », ajoutant que les Etats-Unis aimeraient « voir cette pause encore prolongée jusqu’à ce que tous les otages soient libérés ». « C’est vraiment notre but. Ramener tous les otages chez eux avec leurs familles, quel que soit le temps que cela pourrait prendre », a-t-il insisté.
« Choc psychologique »
Dans la soirée de lundi, les Israéliens découvrent enfin qui sont les otages libérés. Après ceux du kibboutz de Kfar Aza, ceux de Nir Oz vont retrouver les leurs. Cette localité, proche de la frontière avec la bande de Gaza, a elle aussi été durement touchée par l’attaque du Hamas. 400 habitants, 25 morts, 80 disparus. Parmi eux, combien d’otages ? Au moins onze : les deux femmes et les neuf enfants de cette localité rentrés en Israël, dans la soirée. Et après la première Américaine – la jeune Avigaïl Idan, libérée dimanche –, c’est au tour de Franco-Israéliens de recouvrer la liberté, aux côtés de deux Allemands et de six Argentins. Trois des mineurs libérés sont dotés de la double nationalité franco-israélienne, Eitan Yahalomi et Erez Kalderon, deux garçons de 12 ans, et la grande sœur de ce dernier, Sahar Kalderon, 16 ans. Mardi matin, sur RTL, la ministre française des affaires étrangères, Catherine Colonna, a affirmé que les trois jeunes « vont bien » tout en soulignant le « choc psychologique » qu’ils ont subi.
« On ressent de l’angoisse, de la torture, on passe du plus haut au plus bas. Les familles avaient beaucoup d’espoir, tout en souffrant beaucoup de l’attente. On croyait avoir atteint des sommets de cruauté, mais il y avait plus cruel encore », témoigne Sabrina Belhassen-Nimtzovitch, qui représente les familles d’otages françaises en Israël, et a accompagné Hadas Kalderon, la mère de deux des adolescents libérés, au quotidien depuis le 7 octobre.
La libération des captifs du Hamas a fait débat, au sein de la communauté française en Israël. « En fait, nous sommes tous d’accord sur le fait qu’il est impossible de vivre avec des monstres comme voisins de palier. J’espère qu’une solution politique sera trouvée pour libérer les Israéliens de tels voisins et les Gazaouis du Hamas. Sinon, la guerre devra reprendre », estime Daphna Poznanski-Benhamou, représentante des Français de l’étranger.
Combats « seront plus importants »
Chaque jour, depuis les premières libérations d’otages, vendredi, la population israélienne assiste à des scènes poignantes de retrouvailles, et à d’autres montrant la profonde déception des familles dont les proches restent détenus. A chaque libération, « c’est un sentiment de bonheur mêlé de tristesse, comme tout le monde l’éprouve ici, témoigne Eyal Barad, habitant de Nir Oz, qui a réchappé du massacre avec sa femme et ses trois jeunes enfants. Je veux juste retrouver mes amis du kibboutz. Ils font partie de moi, comme je fais partie d’eux. Pour nous, le cauchemar a commencé le 7 octobre. Quand on a appris la libération des nôtres, un peu de lumière est entrée… Cinq minutes, puis nous sommes retournés dans le cauchemar ».
Lorsque des habitants de Kfar Aza ont été libérés, Hanan Dann, 38 ans, résident de ce kibboutz qui a échappé à l’attaque du Hamas en bloquant la porte de son abri avec une planche, s’est précipité avec ses deux enfants à Shefayim, une localité située au nord de Tel-Aviv, qui a accueilli la population du kibboutz attaqué. Sur les 400 habitants, une cinquantaine a été tuée le 7 octobre. Jusqu’à présent, neuf personnes de ce kibboutz, dont sept enfants, ont été libérées. « A chaque image montrant les otages libérés, on hurlait de joie. Et à un moment, je tourne la tête – et je vois la mère de quelqu’un encore en captivité. Le bonheur est mêlé à la tristesse. Mais c’est la première fois depuis le 7 octobre que je me suis autorisé à être heureux quelques minutes. »
Les pères de plusieurs des enfants libérés, dont celui des jeunes Franco-Israéliens, sont toujours en captivité. Un haut responsable du Hamas, Khalil Al-Hayya, a suggéré sur Al-Jazira que les prochaines libérations pourraient ne pas concerner que les femmes et les enfants. Mais cet espoir reste suspendu à la bonne volonté des belligérants et aux décisions politiques et militaires qui marqueront le « jour d’après » la trêve. Mardi, de nouvelles discussions étaient en cours pour définir de nouvelles modalités d’échange entre otages et prisonniers.
Côté israélien, Yoav Gallant, le ministre de la défense, a assuré à ses soldats que lorsque les combats reprendront, « ils seront plus importants et se dérouleront dans toute la bande de Gaza ». « Nous avons rechargé, réparé du matériel et profité de la pause pour préparer les futures opérations. L’objectif de la guerre reste de battre le Hamas », a ajouté l’un des porte-parole militaires israéliens, Jonathan Conricus. Lundi, la Maison Blanche, par la voix de John Kirby, a demandé que les futures opérations militaires israéliennes soient menées « de la manière la plus discrète, délibérée, prudente et attentive possible ».
https://www.lemonde.fr/international/article/2023/11/28/a-gaza-une-treve-fragile-pour-de-nouvelles-liberations-d-otages_6202724_3210.html
.
Les commentaires récents