Les plaies des essais nucléaires menés par la France coloniale dans le Sahara algérien ne se referment pas, et ne se refermeront jamais si on continue encore à feindre l'ignorance du crime et de ses effets qui s'inscrivent dans la longue durée. Cacher les preuves en fermant les archives et ne pas reconnaître le crime ne sert à rien quand les séquelles se perpétuent dans le temps. Les essais nucléaires français au Sahara algérien resteront à jamais des crimes imprescriptibles engageant une «responsabilité juridique», a indiqué le Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) à travers un communiqué, publié à l'occasion de la Journée internationale contre les essais nucléaires, coïncidant au 29 août.
Le CNDH soutient que «toutes les circonstances ayant entouré ces explosions nucléaires et l'ampleur des effets des radiations qui en ont résultés sur la population de la région ne font aucun doute sur le caractère intentionnel et prémédité de ce crime».
La France, qui a fermé les archives liées aux essais nucléaires dans le Sahara algérien après une brève ouverture à la fin des années 90, tente-t-elle de dissocier ce dossier des actions visant la réconciliation mémorielle ? Ce n'est pas innocent qu'on garde la chape de plomb sur ces événements dans des moments où on parle de réconciliation des mémoires et d'assouplissement de l'accès aux archives devant les chercheurs.
La France a décidé d'ouvrir les archives dans les «affaires relatives à des faits commis en relation avec la guerre d'Algérie entre le 1er novembre 1954 et le 31 décembre 1966», et les essais nucléaires dans le Sahara algérien ne font pas partie de ces faits. Un secret militaire qu'on ne veut pas livrer à l'opinion publique ? Toute la période coloniale, gérée par les militaires, en collaboration avec des civiles pour faire tourner la machine administrative, est empreinte de pleins de secrets militaires, qui n'ont pas résisté à l'éclatement de la vérité, à l'enseigne de la torture qu'on ne voulait pas reconnaître, mais on a fini par passer aux aveux.
Seuls ces essais nucléaires ne veulent pas livrer leur secret. Enfin, pas si secret que cela en a l'air, puisque des témoignages d'Algériens et de soldats français qui ont vécu cette époque, et qui en souffrent dans leur chair de nos jours, ont tout dit, tout ce qu'il y a lieu de savoir sur ces horreurs. Mais là où le bât blesse encore plus, c'est que la France persiste encore dans son crime en refusant de collaborer avec l'Algérie dans le cadre de la décontamination nécessaire des sites où ont eu lieu les essais nucléaires. Le minimum de son devoir. L'Algérie ne cherche pas «les indemnisations adéquates, mais seulement l'application des méthodes scientifiques pour trouver des solutions adaptées aux problèmes environnementaux qui exigent une décontamination totale», comme l'a relevé le communiqué du CNDH.
Il reste seulement à se demander s'il n'est pas plus entreprenant de se tourner vers d'autres parties pour effectuer cette décontamination. Et, tant qu'on y est, saisir les instances internationales pour la reconnaissance de ce crime contre l'Humanité. On ne doit plus rien attendre après soixante ans de silence.
Jeudi 31 aout 2023
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