À partir d'avril 1962, le commandement de la Force locale fut confié à Omar Mokdad, ancien préfet de Saïda, par un décret signé par Charles de Gaulle.
Une armée dont les effectifs oscillaient entre 30000 et 35000 hommeS
Le 8 janvier 1961 était organisé le premier référendum qui invitait les Français et les Algériens à se prononcer sur les réorientations de la politique algérienne de la France, amorcée par le général de Gaulle dans son discours du 16 septembre 1959. L'idée d'une Algérie algérienne commençait à prendre forme et dans son sillage les initiatives pour l'accompagner et la mettre en place. C'est dans ce climat, que le Comité des affaires algériennes (CAA), présidé par Louis Joxe, a développé l'idée d'une Force algérienne, pour assurer l'ordre et la sécurité en Algérie non encore indépendante mais plus totalement sous l'autorité française. Cette Force devait accompagner le projet de société esquissé par les accords d'Évian, en sécurisant les biens et le territoire d'une Algérie multiethnique. Elle était pensée également, comme le montre une note signée par le général Charles Ailleret, le haut responsable militaire en Algérie, pour constituer la future base de l'armée algérienne, et ce conformément aux orientations des accords d'Évian. Voyons comment cette armée a été mise sur pied par le gouvernement français et de quelle façon s'est-elle déployée dès le 19 mars 1962, date de la proclamation du cessez-le-feu.
Des harkis dans la Force locale
Le référendum sur l'autodétermination de l'Algérie a ouvert donc la voie à une indépendance de l'Algérie. C'est ainsi, dès le 20 janvier 1961, qu'un groupe interministériel réuni à Paris, a prévu la constitution d'une armée d'un effectif qui oscillerait entre 30000 et 35000 hommes. Ensuite, à l'issue de la consultation et les propositions faites par les autorités militaires en Algérie, le Comité des affaires algériennes (CAA), a donné un corps à cette Force, lors de la réunion du 24 octobre 1961, en la dotant de 4500 gendarmes auxiliaires, 11000 hommes des Groupes mobiles de sécurité et 18000 Moghaznis. Cette configuration n'a pas été validée par les négociateurs du gouvernement provisoire de la révolution algérienne (Gpra), comme le souligne Redha Malek dans son livre Algérie à Évian, histoire des négociations secrètes, qui rejetèrent la présence des supplétifs (les harkis) dans les effectifs et proposèrent, à la grande surprise, d'intégrer dans cette Force locale, les appelés du contingent, des appelés aussi bien de souche européenne que nord-africaine. Ce fut un point d'achoppement entre les deux parties qui déboucha sur un accord et une instruction écrite envoyée le 26 février 1962 par Pierre Messmer, le ministre des Armées, au général Charles Ailleret, le haut responsable militaire en Algérie. Le cessez-le-feu survint le 19 mars appuyé par le décret 62-306 et fut suivi par l'arrêté interministériel du 30 mars 1962 précisant les contours de la Force locale. 40000 hommes répartis en 114 Groupes mobiles de sécurité «GMS», 110 pelotons de Garde territoriale,(PGT) et enfin 114 compagnies d'appelés ayant plus de 8 mois de service. Comme le prévoient les accords d'Évian, cette Force est mise à la disposition du l'Exécutif provisoire. Signalons que de nombreux appelés français de souche, ont accepté à reculons leur affectation aux unités de la Force locale.
À partir d'avril 1962, le commandement de la Force locale fut confié à Omar Mokdad, ancien préfet de Saida, par un décret signé par Charles de Gaulle. Cependant, en raison de sa dépendance logistique et du financement français, l'autorité effective relevait davantage du représentant français en Algérie, Christian Fouchet, le haut-commissaire de la République, que de l'Exécutif provisoire, comme le résume si bien Robert Buron, dans Carnets politiques de la guerre d'Algérie par un signataire des accords d'Évian. Ce commandement bicéphale, a conduit à quelques divergences sur les missions de la Force locale. Si les missions de cette Force, conformément à l'arrêté du 30 mars 1962, étaient d'assurer la surveillance générale, la protection des personnes et des biens, et le maintien de l'ordre, Abdelkader Hassar, délégué à l'ordre public au sein de l'Exécutif provisoire, a demandé à ce que la Force locale soit impliquée dans la lutte contre l'organisation armée secrète (OAS). Christian Fouchet n'approuva pas cette demande.
Les Algériens exilés en Tunisie et au Maroc
Abderrahmane Farès, le président de l'Exécutif provisoire souhaitait élargir les missions de la Force locale à la lutte contre ceux qui remettaient en question les accords d'Évian. Voilà un souhait qui présageait le futur affrontement entre les défenseurs des accords d'Évian et l'aile opposée lors du congrès à Tripoli du Conseil national de la révolution algérienne (Cnra), qui, les uns et les autres, portaient un projet de société fondamentalement différent. Ceci dit, au mois de mai 1962, devant l'intensité des actions de l'OAS, les soldats de la Force locale furent déployés dans les grandes villes, au grand dam des appelés de souche européenne, qui craignaient les affrontements avec les Français d'Algérie. Toujours est-il que la Force locale a joué un rôle très important dans cette Algérie où l'exercice du pouvoir était confus, en sécurisant des endroits stratégiques, comme les barrages de rétention d'eau, et gérant l'ouverture des frontières pour permettre aux Algériens exilés en Tunisie et Maroc, de rentrer au pays. Elle a protégé le départ les Européens, avec quelques manquements, notamment à Oran. Cette Force a joué un rôle essentiel dans l'organisation et la préparation du référendum d'autodétermination du 1er juillet 1962, sous l'autorité d'Omar Mokdad.
Depuis sa mise en place à sa dissolution progressive à partir de juillet 1962, et l'intégration des soldats de souche algérienne aux wilayas, cette Force a été souvent entre le marteau et l'enclume. D'un côté, l'hostilité de l'OAS qui voyait en elle une armée avec des effectifs français et une logistique française, au service du Front de Libération nationale (le FLN). Et de l'autre, la véhémence de l'état-major de l'Armée de Libération nationale (l'ALN), du colonel Houari Boumediene. Amar Mohand Amer parle d'une opposition affirmée des wilayas à l'armée des frontières, en cet été 1962.
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