Souad Massi, la musicienne franco-algérienne est au micro de Totémic. Ses débuts sur scène, elle les a faits à Alger en 1989, elle avait 17 ans. Son nouvel album s’intitule “Sequana”, ce mot elle l'a trouvé à l’issue d’une balade le long de la Seine.
Ce jour-là, elle achetait une statuette qui représente la fameuse Sequana, déesse gauloise de la guérison. La déesse est donc devenue disque, composé de 11 chansons qui agissent comme un baume.
Elle continue de creuser son sillon, inédit et singulier sur la scène française. Un répertoire qui associe folk américain et chââbi. Répertoire qui s’ouvre encore plus grand à d’autres registres avec ce disque : bossa nova, rock, blues.
"Sequana" est nommé aux prochaines victoires du jazz dans la catégorie meilleur album de musique du monde. J’en citerai plusieurs vers au cours de cette émission et je commence par celui-ci :
“Sur la marge”, ma vie s’est écrite.”
Extraits de l'entretien :
Son enfance
Petite, Souad Massi jouait au garçon : « Je voulais me cacher, passer inaperçue, me couper les cheveux, jouer au foot. À l'âge de six, sept ans, je pensais que c'était la seule issue pour échapper à la maison, à cette lourdeur, aux interdits. Je voulais être libre et pouvoir jouer comme les garçons. » Sa mère l’a toujours encouragé à être indépendante : « J'ai eu la chance d'avoir une mère qui m’a encouragée à faire de la musique, du sport, des études. Ma mère rêvait de devenir une danseuse étoile, mais c'était un rêve impossible, surtout à l'époque. »
L’influence de sa grand-mère
La grand-mère paternelle de Souad Massi était poétesse : « Elle inventait des poèmes, malheureusement, personne ne les a enregistrés. C'étaient des formes éphémères avec beaucoup de métaphores. J’ai appris beaucoup de choses avec elle parce que j'ai grandi chez elle jusqu'à l'âge de sept ans. J'adorais sa façon de me donner des leçons avec des proverbes et des histoires. »
Souad Massi a grandi dans une famille de mélomanes : « J’ai un oncle qui jouait de la guitare classique et du jazz à la maison, du flamenco aussi. Presque tous mes cousins touchent un instrument, de la mandoline, de la guitare. Mais, pour une femme ou une fille, c’était très mal perçu de faire de la musique, mais mes frères m’ont encouragée et m’ont inscrite au cours de guitare classique.
Son premier tube
En 2001, Saoud Massi signe "Raoui", une chanson qui va devenir un tube en France et en Algérie : « J'accompagnais des amis musiciens à la radio et où ils étaient programmés ailleurs, ils m'ont proposé de les remplacer. Le temps qu'ils fassent leur passage, j'ai chanté cette chanson pour la première fois à l’antenne. Mes parents ne savaient pas que j'étais dehors et que je chantais. J'étais censée être chez ma grand-mère. Un de mes cousins m’a demandé si j’avais entendu cette fille qui chantait cette chanson à la radio, car tout le monde cherchait à la contacter, à savoir qui elle est. J'ai commencé à avoir peur de mes parents, je bravais tous les interdits, je sortais le soir avec des garçons. Un jour, je suis allée voir un programmateur et il m'a présenté un éditeur qui m’a fait enregistrer ma première cassette. »
La décennie noire
Aujourd'hui, Souad Massi a 50 ans, elle appartient à une génération qui a été marquée par la guerre civile, ce qu'on appelle la décennie noire, qui a commencé au début des années 90. Une génération qui a connu le terrorisme et l'islamisme : « Pendant cette période, c'était très difficile de se produire sur scène, mais je continuais de composer. Je répétais avec un groupe de rock dans un garage. Je ne sais pas si j'étais consciente des dangers, mais en tout cas, l'amour de la musique était plus forte et ça me donnait un nous, un sens à notre vie. On ne pouvait pas vivre sans musique. On devait jouer en cachette. »
Sequana, son nouvel album
Sequana, c'est le titre de l'album, mais aussi le titre aussi d'une chanson dans laquelle Souad s’adresse à ses filles. C’est donc aussi une histoire de transmission : « J’essaye de leur donner des conseils dans cette chanson. Le plus important, c'est d'essayer de garder les liens, de comprendre leurs centres d'intérêt, de s'y intéresser, de rentrer dans leur bulle. J’ai découvert plein de choses grâce à elles sur les mangas, la musique qu'elles écoutent. »
Pour Totémic, Souad Massi a choisi d’écouter « Blowin’ in the Wind” de Bob Dylan :
"La beauté de cette chanson réside dans sa simplicité. Et en même temps, Dylan soulève de vrais problèmes : la guerre, les injustices. En l’écoutant, je me suis rendu compte que c’était possible d'être un artiste et avec seulement une voix et une guitare et d'essayer de changer le monde."
La révolution du sourire
La révolution du sourire est un événement pacifique et populaire qui a massivement mobilisé le peuple algérien en 2019, chaque vendredi, pendant des mois. Elle va entraîner la chute d'Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 20 ans. Sur Instagram, un admirateur écrit à Souad Massi, "Bonjour grande artiste, venez à Alger vendredi prochain avec votre guitare en bandoulière, vous entendrez vos chansons reprises par une chorale, la plus belle du monde, celle du peuple d'Algérie" : « J'ai été agréablement surprise et contente de pouvoir voir une petite lumière, un élan d'espoir en Algérie. »
Le tube de Souad Massi
BOB DYLAN – Blowin' in the wind
Programmation musicale
SOUAD MASSI – Raoui
Pour en savoir plus, écoutez l'émission...
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