NIZAR QABB
Non loin de moi, elle prit un siège,
s'y installa sans hâte et fut comme une rose
exposant sa nonchalance
sur la lèvre du vase.
Le papier d'une lettre apparut, humble et soumis,
dans sa main,
moissonnant un reste de sa fidélité.
Ma tasse de café s'échappait, elle, sans cesse
de ma main,
dans le désir de rejoindre sa tasse.
O le tourment infligé par ce capuchon dont le soleil
auréolait sa tête ! ...
Et ce poudroiement d'or que met en mouvement
l'haleine de l'été !...
Le voyage d'un rayon de lumière
sur son genou
ébranle les fondations de mon âme !
Elle, de sa tasse, humait à loisir
quelques gouttes de café,
et moi j'en buvais au bord
de ses paupières !
Ah, ce récit conté par les deux yeux, qui me demandent
d'être son esclave,
comme sont les astres au ciel
en leur perpétuelle ronde !
Chaque fois que je la regarde
longuement, elle rit,
dénudant la blancheur de neige
de ses dents.
Partage avec moi le café du matin,
et ne t'ensevelis pas dans la noire tristesse
de l'irrésolution !
Je suis ton voisin, ô dame mienne,
et les collines elles-mêmes prennent des nouvelles
de leurs voisines.
Qui suis-je ? ... Laisse de côté
les questions. Je suis
une esquisse à la recherche des couleurs
qui la font exister...
Un rendez-vous, Madame ?
Elle sourit
et me montra du doigt
son adresse sur l'enveloppe.
J'y portais mes regards attentifs,
et ne pus rien voir, sauf
la marque du rouge à lèvres
sur sa tasse de café.
.
NIZAR QABBANI
Les commentaires récents