L’Algérie ne se contente pas de sa posture de non alignée. Elle agit également dans le sens de faire du Monde arabe un pôle de puissance autonome.
Un accord de principe entre Alger et Téhéran pour un échange de visites, une première réunion du comité algéro-saoudien du dialogue politique et une audience accordées par le ministre de l'Énergie au vice-président de la compagnie pétrolière chinoise, Sinopec. Ces trois activités qui font intervenir des acteurs du nouvel ordre mondial qui se dessine, plantent le décor d'une nouvelle ère où l'Algérie aura un rôle majeur à jouer dans sa sphère d'influence régionale et à ce titre, sa participation dans le façonnement du monde appelé à être multipolaire, au regard de l'évolution de la situation géopolitique internationale. Les récents coups d'éclats dans la région Mena qui ont vu l'Arabie saoudite se rapprocher de l'Iran, la Syrie reprendre langue avec plusieurs pays arabes et l'attitude de l'ensemble de la nation arabe, l'exception du Maroc, face à l'agression israélienne contre la Palestine, constituent autant de signaux d'un réveil du Monde arabe et musulman. Il convient de noter que toutes ces questions ont été abordées, d'une manière ou d'une autre, lors du dernier Sommet d'Alger de la Ligue des Etats arabes.
L'apport inestimable de la Chine dans la résolution du différend irano-saoudien donne au nouvel ordre mondial ses premiers contours. En effet, associer le géant asiatique et premier rival des Etats- Unis d'Amérique à une entreprise aussi puissante que celle de mettre fin à un conflit majeur dans la sphère islamique, revient à lui accorder un statut de puissance mondiale, ce qui n'est certainement pas pour arranger les affaires de l'Occident qui a toujours investi dans les conflits au sein de l'ensemble arabe et musulman. Il reste que ce coup de théâtre n'aurait pas été aussi réussi, sans cet «éveil» de la nation arabe suscité par le discours de l'Algérie avant et après le Sommet d'Alger. La communication téléphonique entre les deux présidents algérien et iranien, quelques jours après la fin d'une longue période de conflits ouverts entre les deux grandes familles de l'Islam, comporte quelques non-dits, notamment sur la situation au Yémen où l'Algérie peut jouer un rôle majeur pour le rétablissement de la paix dans ce pays, pour avoir toujours refuser l'option armée défendue et mise en exécution par l'Arabie saoudite. La constance de sa position contre toute guerre entre Arabes, lui vaut aujourd'hui d'être un facteur de paix, comme elle l'a été à l'occasion de l'accord sur le nucléaire iranien et certainement dans le récent rapprochement entre Riyadh et Téhéran.
Cela pour dire que l'engagement de concertations politiques entre l'Algérie et l'Arabie saoudite et la perspective d'une visite du président iranien à Alger ont ceci d'intéressant, est qu'ils renforcent les liens au sein d'une communauté de destin, bridé par l'impérialisme occidental, mais qui trouve une voie de sortie par le haut. La nouvelle donne géopolitique facilite la mission des Arabes et l'éveil de l'Arabie saoudite, associée à l'entrée en jeu de la Chine, donne à la région Mena la force de répondre au pays de l'oncle Sam. Les guerres qui ont déchiré l'Irak, la Syrie, la Libye et le Yémen auront affaibli le corps arabe, mais la persévérance de l'Algérie à refuser le fait accompli, a fini par triompher.
Il faut dire qu'au moment où les pôles de puissance au sein de la Ligue des États arabes jouaient la carte des USA, l'Algérie militait pour un nouvel ordre mondial en prenant appui sur son non-alignement. C'est dire que l'Arabie saoudite a découvert la Chine bien après l'Algérie et reconnu l'obligation d'en finir avec les guerres fratricides sur conseil d'Alger. Il reste que le nouveau positionnement de l'Arabie saoudite est un point de basculement géostratégique qui profite au final aux nouvelles puissances émergeantes. Ces dernières, sans exception aucune, reconnaissent le rôle majeur de l'Algérie et lui concèdent un poids important dans la région.
Sa situation en face de la Méditerranée occidental en fait un relais de choix entre les deux mondes. Mais l'Algérie ne se contente pas de sa posture de non alignée qui peut résoudre beaucoup de conflits futurs entre les deux blocs, elle agit également dans le sens de faire du Monde arabe un pôle de puissance autonome. Cela n'est pas encore à l'ordre du jour, en raison du grand retard à rattraper en matière de développement technologique. Il reste que l'appui de la Chine est un facteur incontournable et une chance inouïe pour l'émergence. L'Algérie a pris la mesure de cet acquis historique.
Saïd BOUCETTA
- 12:04 | 11-04-2023
https://www.lexpressiondz.com/nationale/l-algerie-un-maillon-fort-368107
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