1Dans une communication intitulée : « La guerre d’Algérie revisitée : zones d’ombre, points aveugles » datant de 2002, l’historien Guy Pervillé notait que des événements importants de la guerre d’Algérie restaient « méconnus ou mal connus, soit parce que les enquêtes sérieuses qui ont été faites sont trop peu diffusées et trop peu relayées par les médias, soit parce qu’aucune enquête méthodique n’a pu être faite » [1][1]Guy Pervillé, « La guerre d’Algérie revisitée : zones d’ombre,…. Parmi ces zones d’ombre, il évoquait des événements relatifs à la période qui suit les accords d’Évian. C’est en effet au moment des négociations du cessez-le-feu que le Comité des Affaires Algériennes (CAA) prend la décision de créer une force complètement hybride, aux multiples dénominations dont l’appellation la plus courante est celle de « force locale [2][2]C’est pourquoi nous retiendrons cette dénomination dans notre… ». Rares sont les ouvrages sur la guerre d’Algérie qui évoquent son rôle durant la période de transition du pouvoir. Pourtant cette force inédite de par sa composition a connu la période trouble qui s’est déroulée du 19 mars 1962, date de la proclamation du cessez-le-feu en Algérie, aux premiers jours de l’indépendance. De fait durant environ cent cinq jours, le Haut-Commissaire de la République Christian Fouchet et l’Exécutif provisoire, institution mixte dirigée par Abderrahmane Farès [3][3]L’Exécutif provisoire est composé de douze personnes : trois… s’accordent sur des mesures de maintien de l’ordre, en particulier dans les deux principales villes d’Algérie, Alger et Oran, où l’Organisation Armée Secrète (OAS) conteste activement le cessez-le-feu par une série d’attentats. L’Exécutif provisoire a également la charge d’organiser le scrutin sur l’autodétermination de l’Algérie [4][4]El Watan, 1er octobre 2004. « L’Exécutif provisoire entre le…. C’est à cette fin qu’il a obtenu la création d’une force locale qui devra garantir le bon déroulement du référendum [5][5]Vitalis Cros, Le Temps de la violence, Paris, Presses de la…. Pour les autorités françaises elle pourra également faire concurrence à l’Armée de Libération Nationale (ALN), le bras armé du Front de Libération Nationale (FLN) en devenant l’embryon de la future armée algérienne bien qu’elle inclue des recrues européennes. Analyser le rôle de la force locale, c’est donc non seulement mettre en lumière la création d’une force militaire sans précédent mais aussi mettre en évidence les nombreux événements tragiques de la fin de la guerre d’Algérie.
Un problème de recrutement
2L’historique de la force locale révèle que sa création, d’essence française car préparée en amont par le gouvernement français, a été sévèrement discutée aux Rousses et à Évian voire contestée par les deux parties [6][6]Chantal Morelle, Comment de Gaulle et le FLN ont mis fin à la…. Si elles sont d’accord sur cette création, la pierre d’achoppement porte sur sa composition et son effectif [7][7]François-Xavier Hautreux, « L’armée française et les…. Ainsi c’est au CAA que revient l’initiative de la formation d’une force algérienne. Mais il faut attendre le mois de mars 1962 pour que la force locale soit définitivement créée. La valse hésitante des civilo-militaires n’a donc pas laissé un grand souvenir d’efficacité et révèle une grande improvisation.
3Le 20 janvier 1961, un groupe de travail civilo-militaire dépendant du CAA prévoit pour la fin de l’année la constitution d’une force qui comptera entre 30 000 et 35 000 hommes. Placée sous l’autorité d’un délégué général, elle sera transférée « le cas échéant, à un organisme algérien chargé de préparer l’autodétermination [8][8]Ibid., p. 342. ». Le 24 octobre, son nom est modifié. Elle est désormais appelée : « force d’ordre, locale » et en théorie sa composition serait la suivante : elle comprendrait 4 500 gendarmes auxiliaires, 11 000 gardes des Groupes Mobiles de Sécurité (GMS) et 18 000 moghaznis, sous l’autorité d’une personnalité civile musulmane, assistée d’un officier supérieur musulman [9][9]Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique…. Initialement, les autorités françaises et le FLN s’opposent au recrutement de supplétifs dans la force locale. Redha Malek négociateur à Évian, rappelle dans son livre que les « harkis et groupes d’autodéfense en seront exclus [10][10]Redha Malek, L’Algérie à Évian. Histoire des négociations… ». En réalité les auxiliaires de gendarmerie sont des supplétifs qui ne sont pas désignés par leur appellation courante : « harkis gendarmerie [11][11]François-Xavier Hautreux, « L’armée française et les… ». Selon l’historien François-Xavier Hautreux, la force locale représente donc une solution de reclassement pour l’ensemble des GMS et de nombreux harkis [12][12]Ibidem, p. 345.. D’ailleurs le lieutenant Georges Grillot, chef du « Commando Georges » crée en 1959, demandera en vain l’intégration de ses supplétifs dans la force locale afin qu’ils ne rejoignent pas l’OAS [13][13]Guy Pervillé, Les Accords d’Évian (1962). Succès ou échec de la….
4Pourtant, un problème de recrutement est posé en raison du déficit de l’encadrement musulman. Les autorités françaises décident donc de recruter des cadres européens [14][14]Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique…. En février 1962, la composition de la force locale est encore étudiée aux Rousses et elle est l’objet de vives discussions entre les deux parties. D’un effectif de 30 000 à 35 000 hommes, elle comprendrait des unités de sécurité à base de GMS, de maghzens et de pelotons de gendarmes auxiliaires. Néanmoins, la délégation du FLN n’accepte pas qu’il y ait des GMS et des moghaznis. C’est pourquoi, les négociateurs envisagent de remplacer les moghaznis par 19 000 appelés dont 1 000 Européens [15][15]Ibid., p. 71.. Pour Pierre Messmer, le ministre des Armées, qui souhaite la création de la force locale afin de ne pas mêler l’armée aux tâches secondaires :
La moitié des officiers musulmans n’étant pas volontaire pour l’encadrer, il faudra désigner sans faire appel au volontariat (sic) des cadres français, qui ensuite pourront constituer des organismes d’assistance technique de l’armée algérienne, comme cela a si bien réussi au Maroc. Les gendarmes, peuvent fournir 4 500 hommes. Ou bien on obtient 10 000 à 15 000 GMS, complétés par 15 000 appelés. Ou bien aucun GMS, il faudrait alors trouver 25 000 appelés, qui seront « d’une mauvaise qualité technique » [16][16]Ibid., p. 72..
6Une autre alternative est également proposée. Il s’agirait d’utiliser des unités existantes, retaillées en gardant les cadres et en y mettant des appelés [17][17]Ibid.. Selon le capitaine de Camille Renaud – une ancienne recrue de la force locale – cette solution a été confirmée. Il lui aurait dit lors d’un entretien téléphonique en 2000 :
« Votre commando 127, on n’en a plus besoin. On va le transformer en force locale ». Il raconte ensuite : « Après ça, il arrivait des Algériens (appelés) de partout. Alors, on a utilisé les anciens locaux du commando 127 et la structure » [18][18]Entretien avec Camille Renaud..
8Cependant d’emblée, des responsables sont réticents à la création de la force locale. La composition comme la direction de cette force sont controversées [19][19]Le Soir d’Algérie. Abdelmadjid Merdaci, « Actualités :…. Et ce, du côté des autorités européennes comme des autorités algériennes. À Reghaia, le commandement est hostile à cette initiative. Le général Emmanuel Hublot, chef d’état-major, estime que le maintien de l’ordre requiert des forces spécialisées. Tandis que les frontistes refusent cette force qui ferait concurrence à l’ALN [20][20]Chantal Morelle, Comment de Gaulle et le FLN ont mis fin à la…. En effet, pour le général de Gaulle cette force locale pourrait constituer le noyau de la nouvelle armée et boycotter l’ALN :
Plus l’Exécutif provisoire exercera une emprise, plus il souhaitera avoir une armée. Ces forces peuvent être appréciées et devenir le noyau d’une future armée au lieu de l’ALN. Le but à atteindre est de fournir des éléments militaires valables qui puissent constituer l’embryon de cette armée [21][21]Maurice Faivre, Les Archives de la politique….
10Selon Chawki Mostefai, membre de l’Exécutif provisoire, elle sera « l’armée algérienne de demain [22][22]Ibidem, p. 350. ». Cette idée est confirmée par le colonel Mohamed Ramdani, ancien moudjahid, sur son blog :
De grandes opérations ont été menées pour réduire la pression sur les wilayas […] Noyauter le passage à une armée nationale avec la constitution à la veille de l’indépendance, durant la période de cessez-le-feu, précisément, d’une force locale. Pour les Français, la force locale devait servir de colonne vertébrale à la constitution d’une armée nationale [23][23]http://www.mohamedramdani.com « Ramdani Mohamed rend hommage à….
12Par ailleurs l’effectif de cette force est aussi critiqué dès le premier jour des négociations à Évian, le 7 mars. Les nationalistes algériens veulent qu’elle soit nombreuse afin de lutter efficacement contre l’OAS. C’est pourquoi le nombre de 40 000 hommes avancé par les autorités françaises est jugé « dérisoire » par Saâd Dahlab. Celui qui est alors ministre des Af- faires étrangères du Gouvernement Provisoire de la République Algérienne (GPRA) propose un volume entre 50 000 et 80 000 hommes [24][24]François-Xavier Hautreux, « L’armée française et les….
13En dépit de ces critiques, la force locale est tout de même créée et correspond à la composition déjà prévue par les autorités françaises bien avant les accords d’Évian ; comme le révèle une lettre de Pierre Messmer au commandant supérieur des forces armées en Algérie le général Charles Ailleret, en date du 24 février 1962 [25][25]SHD 1H 2457, dossier 1. Le ministre des Armées à M. le général….
14C’est finalement l’arrêté interministériel du 30 mars 1962 pour l’ap- plication du Titre IV du décret 62-306 du 19 mars 1962 portant sur l’organisation provisoire des pouvoirs publics en Algérie qui fixe dans l’article 2, la répartition des 40 000 hommes en :
15– une direction des commandements régionaux et départementaux ;
16– 114 GMS ;
17– 110 Pelotons de Garde Territoriale (PGT) constitués par des gendarmes et des auxiliaires de gendarmerie ;
18– 114 compagnies constituées par des appelés, dont la numérotation commence à 401.
19À ces unités s’ajoutent des compagnies sahariennes d’un effectif total de 3 500 hommes. Destinée à être l’embryon de la future armée algérienne, la force locale comporte pourtant des Européens.
Une force hybride ou des « compagnies caméléons [26][26]Expression du commandant Michel Passicos qui a fait partie de… »
20Dans son livre intitulé C’était de Gaulle le ministre de l’Information Alain Peyrefitte, rapporte une discussion au cours du Conseil des ministres du 18 avril 1962 sur la mise en place de la force locale et sa composition : « Diverses unités sont constituées de 90 pour cent de musulmans du contingent et de 10 pour cent de Français de Souche Européenne (FSE) [27][27]Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, Paris, Fayard, 1994, t. I,…. » Les Unités de Force Locale (UFL) sont donc mixtes [28][28]SHD 1H 3605, dossier 3. Le commandant supérieur des forces…. Majoritairement composées de Musulmans [29][29]SHD 1H 2918, dossier 1. Exécutif provisoire algérien.…, elles comportent aussi quelques Européens ce qui donne lieu à des « compagnies caméléons ».
21De nombreux Européens refusent d’en prendre le commandement. C’est l’exemple du capitaine J. de F., dont le témoignage est rapporté par l’historien Maurice Faivre. Il a été désigné en avril 1962 pour être à la tête d’une UFL par le colonel Bernard, commandant le 19e RC. N’acceptant pas cette responsabilité il est, en conséquence, condamné à une peine d’un mois d’arrêt de forteresse. Finalement il change d’avis et prend le commandement d’une UFL déplacée de Bou Saada à Bouira [30][30]Maurice Faivre, Les Combattants musulmans de la guerre….
22En outre le transfert dans la force locale est très mal vécu par certains Européens. On peut citer à ce propos le témoignage de Camille Renaud. Appelé européen métropolitain de 2e classe, il a appris son incorporation dans la 514e UFL à son retour de permission, en avril 1962. Il insiste sur le changement brutal résultant de l’alliance de l’armée française avec le FLN :
Je m’adressais au capitaine qui me connaissait : « Je n’ai pas demandé cette affectation ! Je ne les considère pas comme mes frères ! Je n’ai rien à faire de la force locale ! » Dès les premiers mots, le capitaine m’arrêta : « Puisque vous le prenez sur ce ton, Renaud, je refuse de vous écouter. » Il me tourna le dos. Fou de rage, je continuais à crier mon désespoir. Le lieutenant Ghazzi, un Arabe, militaire de carrière, me prit par le bras et m’entraîna à l’écart : « Qu’est-ce qu’il y a Renaud ? Qu’est-ce qui ne va pas ? » J’étais incapable de parler, les larmes me brouillaient les yeux. Et je me dégageais sans douceur. Notre désarroi était total. Nous étions livrés, aux ordres d’une armée arabe, commandés par des Arabes, que nous venions de combattre, un mois auparavant [31][31]Témoignage de Camille Renaud tiré du courrier des lecteurs….
24Quand nous l’interrogeons sur cette réaction, Camille Renaud s’explique a posteriori :
Mon désarroi n’était pas d’être commandé par des Musulmans, mais d’avoir été muté malgré moi, dans une armée étrangère, celle-là que nous combattions, depuis 16 mois pour mes camarades et moi. Comme je l’ai indiqué à ma première entrée dans cette chambrée que je connaissais bien, j’ai instantanément compris que je n’incorporais pas l’armée française mais l’armée du FLN [32][32]Entretien avec Camille Renaud..
26Il avait donc le sentiment de servir l’armée algérienne même si la force locale dépendait clairement des autorités civiles françaises. Les propos de Camille Renaud sont corroborés par le général de brigade Robert-Jacques Frat, commandant la Zone Nord-Constantinois (ZNC) qui affirme au mois de mai 1962 que :
Les cadres européens se trouvent aux ordres d’un organisme pour moitié composé de membres du FLN qu’ils combattent depuis sept ans. Aux difficultés d’ordre interne qu’ils vont connaître va s’ajouter l’impression d’être sous les ordres de l’adversaire [33][33]SHD 1H 3605, dossier 3. Le général de brigade Robert-Jacques….
28En revanche pour certains supplétifs, l’engagement dans la force locale est un moyen de rester en Algérie. En effet alors que J.-P. Sénat, chef de Section Administrative Spécialisée (SAS) à la SAS du barrage de Ghrib, à l’ouest de Médéa, conseille à ses moghaznis d’aller en métropole, certains décident de rejoindre les UFL, à l’image de Z. dont l’entretien est rapporté par l’historien Gregor Mathias. « Moi, on m’a dit que la force locale, c’était comme l’armée », raconte le témoin qui s’est engagé volontairement dans la force locale, de mars à juillet 1962 [34][34]Gregor Mathias, Les Officiers des SAS et des SAU et la….
29Ce n’est pas le point de vue de M. Saadi. Abandonné par ses supérieurs, ce moghazni doit essayer de rejoindre la métropole par ses propres moyens. Le chef de SAS d’Azrou M’Béchar, le capitaine J.M. a mis ses affaires dans un conteneur et l’armée a récupéré ses armes et ses munitions. M. Saadi semble alors très perplexe quant à son intégration dans la force locale, qu’il attribue à tort à Ahmed Ben Bella, où se côtoient des recrues de diverses origines :
On nous a dit de nous débrouiller et de faire ce qu’on voulait. De toute façon, Ben Bella va nous intégrer soi-disant dans une force locale : comme si on pouvait mettre ensemble un chien et un chat [35][35]Ibid., p. 759..
31Finalement se dégage une impression de force hybride voire « fourre-tout », qui est confirmée par le témoignage de Jean Kersco, auteur du livre : Quand le merle sifflera. Algérie, 1961-1962, du putsch à l’indépendance :
On en profite pour déverser le tout-venant des harkas, des maghzens, des forces supplétives de gendarmerie, etc. qui déserte au bout de quelques jours avec son arme afin de donner des gages tardifs au FLN. C’est la démarche du patron qui veut licencier sans respecter ses obligations légales : il crée une structure provisoire dans laquelle il entasse les candidats au licenciement. Un véritable fiasco, un tonneau des Danaïdes qui se vide aussitôt qu’il se remplit [36][36]Jean Kersco, Quand le merle sifflera. Algérie, 1961-1962, du….
33À cela s’ajoute le problème de la gestion de la force locale : son autonomie est théorique.
Une autonomie illusoire
34La force locale est censée être sous l’autorité de l’Exécutif provisoire selon l’article 3 de l’arrêté interministériel du 30 mars 1962 :
Les pelotons de garde territoriale, les compagnies de force de l’ordre ainsi que les personnels militaires désignés pour servir dans la direction et les commandements, sont mis pour l’emploi à la disposition de l’Exécutif provisoire.
36L’article 4 précise que :
L’emploi des unités de la force de l’ordre relève normalement des autorités préfectorales. L’Exécutif provisoire peut, toutefois donner à une partie d’entre elles, normalement aux groupes mobiles de sécurité et exceptionnellement seulement aux autres formations, des missions particulières hors de la région où elles sont stationnées. Les pelotons de garde territoriale et les compagnies agissent en principe dans les limites de l’arrondissement où ils sont implantés.
38En effet si elle est d’abord organisée par le général de gendarmerie Corberant [37][37]Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique…, à partir du mois d’avril cette responsabilité est confiée au colonel Ghenim et au commandant Yazid, attachés au cabinet d’Abderrahmane Farès. Son commandement est quant à lui, assuré par le préfet de Saida, le commandant Omar Mokdad [38][38]Omar Mokdad a servi dans l’infanterie comme officier entre 1941… et par son adjoint le lieutenant-colonel Abdelkrim Djebaili, nommés au début du mois d’avril par l’Exécutif provisoire [39][39]Journal Officiel de la République française, 10 avril 1962.. Enfin la force locale est supervisée par Abdelkader El Hassar [40][40]Guy Pervillé, Les Accords d’Évian (1962). Succès ou échec de la….
39Néanmoins pour Redha Malek, son autonomie est fictive car elle dépend de la logistique française [41][41]Redha Malek, L’Algérie à Évian. Histoire des négociations…. Initialement, le but était de créer une force indépendante des autorités françaises et du FLN, uniquement aux ordres de l’Exécutif provisoire [42][42]François-Xavier Hautreux, « L’armée française et les…. En réalité cette institution n’a que trop peu de pouvoir et de légitimité en Algérie. De plus le maintien de l’ordre relève, en dernier ressort, de l’autorité du Haut-Commissaire de la République en Algérie : Christian Fouchet. D’ailleurs, lorsque le ministre des Affaires algériennes Louis Joxe demande au général Philippe de Camas d’exposer les conceptions françaises sur la façon d’assurer l’ordre en Algérie pendant les mois critiques il affirme que :
En cas de situation grave et, si la force locale était débordée, l’Armée française interviendrait sous la requête du Haut-Commissaire [43][43]Robert Buron, Carnets politiques de la guerre d’Algérie par un….
41Il est vrai que le maintien de l’ordre restera finalement essentiellement entre les mains de Christian Fouchet [44][44]Hubert Michel, « Les institutions politiques algériennes »,…. C’est donc conjointement que le Haut-Commissaire et le président de l’Exécutif provisoire inspecteront les rangs de la force locale [45][45]« Christian Fouchet et Abderrahmane Farès inspectent la force….
Les missions de la force locale
42Selon l’article 1 de l’arrêté interministériel du 30 mars 1962 sa principale mission est de faire régner l’ordre :
La force de l’ordre créée par l’article 19 du décret 62-306 du 19 mars 1962 est chargée d’assurer la surveillance de générale, la protection des personnes et des biens et le maintien de l’ordre à l’exclusion de toutes des missions en matière de police judiciaire et de police militaire.
44Le 14 avril 1962 lors d’une réunion de l’Exécutif provisoire, Abdelkader El Hassar annonce que la force locale doit servir à lutter contre l’OAS. Cette idée est soutenue par Chawki Mostefai [46][46]Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique…. En revanche pour Abderrahmane Farès, la force locale devrait être employée dans les maquis du Sud afin de combattre les opposants aux accords d’Évian [47][47]Abderrahmane Farès, La Cruelle vérité. L’Algérie de 1945 à…. Mais Abdelkader El Hassar maintient sa volonté de déplacer des UFL dans les villes, lors de la réunion du 19 avril. Puis le 24 avril, il propose également la création de policiers auxiliaires car il estime que la force locale n’est pas assez efficace [48][48]Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique….
45Il est vrai que dans les grandes villes fortement européanisées : Alger et Oran, les activistes pratiquent la stratégie de la tension qui se manifeste par de nombreux attentats [49][49]Jean Monneret, La Phase finale de la guerre d’Algérie, Paris,…. C’est pourquoi Rabah Zerari, dit Si Azzedine, le commandant de la Zone Autonome d’Alger (ZAA), attend avec impatience le déploiement de la force locale dans Alger afin de liquider les groupes de l’OAS [50][50]Si Azzedine est un combattant de l’Algérois. Il passe à…. À la suite de l’attaque orchestrée par l’OAS à l’encontre des dockers musulmans qui a eu lieu le 2 mai sur le port d’Alger, le chef de la ZAA décide de riposter ouvertement en opérant une série d’attentats visant des commerces européens dans la ville, le 14 mai. Puis lors d’une conférence de presse, il réclame la force locale insistant sur le fait que les autorités françaises ne luttent pas assez contre l’OAS [51][51]Jean Monneret, La Phase finale de la guerre d’Algérie, op.…. Cet argument récurrent dans le discours nationaliste est peu justifié : au même moment, commence l’opération Fouchet, une série de mesures prises par le Haut-Commissaire afin de dissoudre l’OAS [52][52]Soraya Laribi, « Le plan Simoun ou l’appel anticipé des…. Mais la présence d’une force composée majoritairement de Musulmans est aussi réclamée par Si Azzedine à des fins stratégiques car elle serait plus bienveillante envers les nationalistes.
46Le gouvernement français renforce ainsi la lutte contre l’OAS en déplaçant dans les grandes villes des UFL, comme le montre un article du journal Le Monde datant du 14 mai 1962 qui a pour titre : « La reprise en mains dépend de l’emploi de la force locale. L’absence de la force locale à Alger. » D’ailleurs certaines recrues de la force locale protestent elles aussi contre leur affectation dans des zones relativement calmes. Elles demandent à être transférées à Alger où leur rôle serait, selon elles, plus utile : « Dans la région de Batna en particulier deux groupements ont protesté contre leur maintien dans une région où ils n’ont rien à faire alors que leur présence paraissait beaucoup plus nécessaire à Alger [53][53]Le Monde, 14 mai 1962, p. 3.. » Les UFL sont également aidées par les Auxiliaires Temporaires Occasionnels (ATO), désignés dès le mois de mai 1962 [54][54]Soraya Laribi, « Le dernier “gouverneur général” de l’Algérie :…. Ce sont des policiers musulmans au nombre de 1 200 à 1 500 qui seront encadrés par des gendarmes mobiles, dont 150 venant du Maroc [55][55]Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique…, et établis dans huit commissariats d’Alger. Ils poursuivront la lutte contre les activistes sous la houlette du commandant Omar Oussedik, officier de liaisons et de renseignements de la wilaya 4 [56][56]Libération, 13 mai 1962, p. 3. Cependant il sera difficile pour….
47Mais la force locale a aussi d’autres missions comme le montre le témoignage de Jacques Macé – sergent de la 3e compagnie du 3e Zouaves dans le Constantinois – affecté au sein de la 403e UFL au mois de mars 1962 :
Début avril, la 403e UFL, rassemblée à Ouled Rahmoun-important nœud ferroviaire au sud de Constantine-était transférée en plein bled, à la Cheffia à une quarantaine de kilomètres au sud de Bône.
Sa mission nous allions l’apprendre progressivement-était triple :
– protéger le chantier d’un important barrage hydraulique en construction dans le cadre du Plan de Constantine ;
– assurer la sécurité d’un regroupement de population situé près de notre camp ;
– ouvrir le barrage de la frontière tunisienne (la Ligne Morice) pour permettre l’entrée en Algérie des unités de l’ALN stationnées de l’autre côté de la frontière [57][57]Jacques Macé, « Mes cent jours dans la force locale », Guerre….
49Pour Jean-Claude Enard, 2e classe, transféré dans le Sud Constantinois avec une trentaine de soldats européens et environ 300 Musulmans dans une SAS à Henchir Toumghani afin d’encadrer la 413e UFL :
[La] mission consistait notamment à les former à la discipline militaire. J’étais moi-même secrétaire, trésorier et je devais enseigner à un jeune Algérien comment gérer les effectifs, effectuer la paye, acheter la nourriture pour les hommes [58][58]« J’ai rencontré pour vous : Jean-Claude Enard », L’Ancien….
51Une autre mission est d’assurer le bon déroulement du référendum sur l’autodétermination en veillant à la protection des urnes et au maintien de l’ordre aux abords des bureaux [59][59]Vitalis Cros, Le Temps de la violence, op. cit., p. 258.. Yvon Marie-Noël Priou – 2e classe du 4e Bataillon de Chasseurs à Pied (BCP) – affecté dans la 434e UFL à T’kout puis à Guyotville raconte :
Au milieu d’une circulation imposante et d’une foule assourdissante, le matin du 1er juillet 1962, j’avais accompagné le capitaine […] de l’unité 434 et le nouveau chauffeur de la jeep J… M. du 86, pour aller vérifier l’installation des bureaux de vote de Guyotville, pendant que l’armée française était consignée dans leurs cantonnements respectifs [60][60]http://wwww.marienoelyvonpriouforcelocale19mars1962.e.monsite.co….
53Les recrues de la force locale se sentent pourtant en danger car elles ont connaissance de l’insécurité grandissante avec notamment les vols de voi- tures, les occupations abusives d’appartements, les enlèvements d’Européens et le sort des supplétifs. Les missions des UFL sont donc risquées [61][61]ANOM. MA 155, dossier 1. Ce dossier contient des lettres des…. Certes un plan a été rédigé afin d’assurer le repli des UFL et de garantir la sécurité des civils qui dépendaient des autorités françaises. Appelé « Carrousel », ce plan en trois volets prévu pour les mois de juin et de juillet 1962 n’était que théorique et il ne fut pas appliqué en dépit des nombreux accrocs au cessez-le-feu. Par ailleurs il concernait le Constantinois [62][62]Soraya Laribi, « Le plan Carrousel, mesures à prendre contre…. Il semble qu’aucun plan similaire n’ait été préparé pour l’Algérois ou l’Oranie.
54Finalement les UFL n’ont pas pu mener à bien leurs missions car elles souffraient de nombreuses carences comme le raconte rétrospectivement Bernard Tricot, secrétaire du Haut-Commissaire durant cette période troublée :
Une force algérienne de l’ordre fut créée et le préfet Omar Mokdad en fut nommé directeur début avril. Les premiers éléments de cette force commencèrent tout de suite à intervenir ; mais bien qu’elle ne fût pas sortie d’un coup du néant, elle manquait d’entrainement et de cohésion [63][63]Bernard Tricot, Les sentiers de la paix. Algérie 1958/1962,….
56D’ailleurs, le rôle de la force locale est très vite limité par les nombreuses désertions et le noyautage.
Noyautage et « crise d’identité [64][64]Redha Malek, L’Algérie à Evian. Histoire des négociations… »
57Très rapidement, des désertions avec emports d’armes sont notables dans les UFL. Charles Koenig membre de l’Exécutif provisoire raconte que : « Ses effectifs fondaient comme neige au soleil, ses membres désertant pour aller grossir les rangs de l’ALN avec armes et bagages [65][65]Guy Pervillé, Les Accords d’Évian (1962). Succès ou échec de la…. » De fait au printemps 1962 beaucoup de Musulmans souffrent d’une « crise d’identité ». Ils sont écartelés entre l’armée française dans laquelle ils combattaient auparavant, la force locale, nouvel organisme, et le FLN qui les incite à déserter et à rejoindre ses rangs [66][66]Gilbert Meynier, Histoire intérieure du FLN, Paris, Fayard,…. Ceux qui prennent le parti de rejoindre le FLN, sont appelés les « marsiens ». Ces désertions sont grandement favorisées par le FLN car elles ont pour but de renforcer son potentiel militaire [67][67]François-Xavier Hautreux, « L’armée française et les…. Ainsi en témoignent les propos du général Lennuyeux commandant la zone de l’Oranais qui dans une lettre du 2 avril 1962 évoque les difficultés à « maintenir les appelés Français de Souche Nord-Africaine [FSNA] sous les drapeaux ou au sein de la force locale ». Il est impossible alors, selon lui d’accorder « la moindre confiance » à ces hommes ce qui entraîne une « discrimination entre “Français de Souche Européenne” et “Français de Souche Nord-Africaine” dans l’usage des armes ». Il propose ainsi leur démobilisation [68][68]SHD 1H 1393, dossier 1. Le général Lennuyeux à M. le général…. Ces désertions ont aussi lieu dans le Constantinois, comme le révèle le général Frat, à la date du 18 avril :
Le FLN les considère comme un objectif prioritaire dans son action subversive. Il empêche leur mise sur pied sous le drapeau français ou tout au moins les rend inefficaces, laissant le champ libre à l’action de ses propres forces. De surcroît, il y trouve, sans bourse délier, des armements supplémentaires [69][69]SHD, 1H 3605, dossier 3. Le général de brigade Robert-Jacques….
59Michel Passicos – sous-lieutenant au 51e Régiment d’Infanterie (RI) dans l’Ouest-Constantinois – affecté après le cessez-le-feu dans une UFL dans la région de Grarem, met en évidence, dans son récit, le climat de peur suscité par les nombreuses désertions et les emports d’armes des Musulmans :
Pour les cadres européens, de moins en moins nombreux, au fil des jours, les choses n’étaient pas simples, les inquiétudes et la méfiance régnaient de façon insidieuse. Le bruit courait que des compagnies des forces locales, sans attendre l’indépendance, étaient passées de l’autre côté après avoir liquidé les “roumis” encore présents [70][70]Bulletin de l’association des officiers de réserve de Bordeaux,….
61À ces désertions et noyautages s’ajoute une certaine méfiance de toutes parts. Du côté des Européens, certains pensent à tort, que ce sont des membres de la force locale qui auraient tiré sur la foule durant la manifestation de la rue d’Isly, le 26 mars 1962 [71][71]Jacques Macé, « Mes cent jours dans la force locale », op. cit.. La mise en place de l’opération Fouchet qui vise à lutter contre l’OAS ainsi que l’installation des UFL et des ATO dans Alger suscite aussi l’inquiétude des Pieds-Noirs comme Francine Dessaigne qui écrit dans son journal, à la date du 13 mai, les lignes suivantes :
Hier, au Rocher Noir, on a pris des mesures en vue de détruire l’OAS et de réduire la résistance des Européens. Des milices musulmanes vont être armées, quinze mille hommes de la force locale implantés en ville, et dans les commissariats il y aura des gardes mobiles assistés de policiers musulmans. Ces mesures avivent l’inquiétude au moment où on retire aux Européens l’autorisation de posséder des armes mêmes déclarées [72][72]Francine Dessaigne, Journal d’une mère de famille Pied-Noir,….
63Du côté des nationalistes la méfiance est également de mise. Le commandant Si Azzedine, qui avait pourtant insisté pour que la force locale s’installe à Alger, révèle qu’elle était surveillée par ses hommes :
La ZAA doit s’assurer, de son côté, que la force locale sert la paix et la sécurité. Nous la contrôlons en douce, car des milliers d’hommes armés et formés par l’ennemi d’hier ne peuvent avoir, d’un coup de baguette magique, les mêmes aspirations que les militants FLN/ALN [73][73]Si Azzedine, Et Alger ne brûla pas, op. cit., p. 322..
65Face à l’échec de cette force hybride contestée par tous, plusieurs options ont été proposées. Sa suppression et sa relève par l’ALN. La création d’une gendarmerie mobile algérienne ou le maintien dans sa forme actuelle [74][74]Maurice Faivre, Les Archives de la politique algérienne.…. Par ailleurs, lors des accords OAS/FLN, respectivement signés le 17 juin 1962 par Jean-Jacques Susini et Chawki Mostefai mais désavoués par les représentants des deux parties, une clause signalait que les Européens pourraient rejoindre la force locale [75][75]Chantal Morelle, Comment de Gaulle et le FLN ont mis fin à la…. Finalement elle a été maintenue jusqu’aux premiers jours de l’indépendance qui furent critiques pour ses recrues.
Un repli rapide ou l’échec de la force locale
66Les premiers jours de l’indépendance, proclamée le 3 juillet et célébrée le 5 juillet ont été très difficiles pour les membres de la force locale. Les UFL se retrouvent mêlées au conflit intra-FLN qui oppose les groupes de Tlemcen et de Tizi-Ouzou. Il y a des prises d’otages dans un contexte de guerre entre les wilayas comme le rappelle Yvon Marie-Noël Priou :
Au soir des élections, il [Yvon Priou] fut considéré comme déserteur, les 3 et 4 juillet 1962, comme tous ses camarades, par toute la presse les radios françaises et la télévision, ainsi que par des hauts responsables de son régiment et de l’armée française, lors d’une mutinerie. Mutinerie et prise d’otage par des éléments civils et armés d’une wilaya, sur l’unité 434 de la force de l’ordre algérienne cantonnée à Guyotville-Alger, au cours du soulèvement des wilayas, en dissidence entre elles, et, contre le Gouvernement Provisoire de la République algérienne pour la prise de pouvoir [76][76]Témoignage d’Yvon Marie-Noël Priou, op. cit..
68Dans la même logique Jean-Claude Enard raconte que le 5 juillet son UFL devait se rendre à Djidjelli. Après avoir passé plusieurs barrages de l’ALN, elle est arrêtée à Ain M’lila où la population en liesse fêtait l’indépendance et acclama les recrues de la 413e UFL. Au Nord de la ville, le convoi fut arrêté par un barrage de l’ALN et les Européens assistèrent impuissants à la désertion des 212 Musulmans qui faisaient partie de l’unité. Puis survint le pillage des paquetages, des vivres, des armes, des munitions, des dix-huit véhicules par la foule. Celle-ci était soutenue par l’ALN qui tenait en joue les chauffeurs [77][77]« J’ai rencontré pour vous : Jean-Claude Enard », op. cit.,….
69Tandis que l’UFL de Brahim X, un supplétif dont le témoignage est rapporté par Maurice Faivre, est désarmée par l’ALN. Le préfet Mokdad l’avait affecté en mai 1962 au 6° Régiment des Chasseurs d’Afrique (RCA) et il commandait un peloton half-track de la force locale. Mais le 4 juillet, l’ALN fait emprisonner les cadres de la force locale. Brahim X arrive à s’évader et à rejoindre le 1er RCA à Fort de l’Eau [78][78]Maurice Faivre, Les Combattants musulmans de la guerre….
70Seules quelques UFL sont restées intactes à l’image de celle du lieutenant Rabah Kheliff. La 4e compagnie du 30e BCP dont il était lieutenant a été transformée en 430e UFL [79][79]Id., p. 162.. Contrairement aux ordres du général Joseph Katz, ce lieutenant a décidé d’intervenir au secours des personnes menacées lors des massacres du 5 juillet à Oran [80][80]Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique…. Il en fut de même pour l’officier musulman R.B. qui commandait la 502e UFL [81][81]Jean Monneret, La Phase finale de la guerre d’Algérie, op.….
71La déflation des effectifs de la force locale a lieu quelques jours plus tard. De Gaulle décide de replier rapidement les recrues européennes des UFL ce qui confirme l’échec total de cette force militaire. Il écrit à Messmer le 10 juillet : « Étant donné l’anéantissement de la force locale par désertion, il paraît nécessaire de reprendre les cadres français que nous y avons encore [82][82]Charles de Gaulle, Lettres, notes et carnets. 1961-1963, Paris,…. » L’ordre est confirmé le 17 juillet : « Le retrait des cadres de la force locale doit être achevé dans les meilleurs délais [83][83]Décisions prises le 17 juillet 1962 et notifiées le 21 juillet.…. » C’est la fin de la force locale.
Conclusion
72En somme la force locale ne fut jamais qu’une création de circonstance, une force mixte, de maintien de l’ordre au moment du changement de souveraineté sur l’Algérie. Les diverses appellations de la force locale dite : « force bancale » à Alger ou « petit monstre » [84][84]Entretien avec Yvon Marie-Noël Priou. reflètent l’échec de cette création [85][85]Maurice Faivre quant à lui, parle d’un « constat de faillite ».…, en raison des nombreuses désertions des Musulmans et du refus d’y adhérer des Européens, notamment. Cette force n’est plus qu’un témoignage du drame de la fin de la guerre d’Algérie. C’est pourquoi, pour les anciennes recrues un sentiment d’incompréhension est encore très vivace plus de cinquante ans après. Ainsi en témoigne la conclusion de Camille Renaud :
73Qu’une force de l’ordre algérienne ait été décidée cela semble normal. Qu’elle ait été créée durant la période transitoire peut s’admettre. Que cette force locale ait été saupoudrée de soldats métropolitains, cela semble aberrant surtout pour d’anciens combattants de la France Libre ayant connu le chaos qui a suivi la libération de la France [86][86]Entretien avec Camille Renaud..
Notes
- [1]
Guy Pervillé, « La guerre d’Algérie revisitée : zones d’ombre, points aveugles », in Anny Dayan-Rosenman, Lucette Valensi, La Guerre d’Algérie dans la mémoire et l’imaginaire, Saint-Denis, Éditions Bouchène, 2004, p. 225-253.
- [2]
C’est pourquoi nous retiendrons cette dénomination dans notre article.
- [3]
L’Exécutif provisoire est composé de douze personnes : trois Européens et neuf Musulmans dont six font partie du Front de Libération Nationale. Abderrahmane Farès, La Cruelle vérité. L’Algérie de 1945 à l’indépendance, Paris, Plon, 1982, p. 98.
- [4]
El Watan, 1er octobre 2004. « L’Exécutif provisoire entre le marteau et l’enclume » : Interview de Chawki Mostefai.
- [5]
Vitalis Cros, Le Temps de la violence, Paris, Presses de la Cité, 1971, p. 258.
- [6]
Chantal Morelle, Comment de Gaulle et le FLN ont mis fin à la guerre d’Algérie. 1962, les accords d’Évian, Bruxelles, André Versaille éditeur, 2012, p. 215.
- [7]
François-Xavier Hautreux, « L’armée française et les “supplétifs musulmans” pendant la guerre d’Algérie. Expérience et enjeux ». Thèse de doctorat sous la direction du professeur Didier Musiedlak, université Paris X-Nanterre, 2010, p. 343.
- [8]
Ibid., p. 342.
- [9]
Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique algérienne.1958-1962, Paris, L’Harmattan, 2000, p. 71.
- [10]
Redha Malek, L’Algérie à Évian. Histoire des négociations secrètes, 1956-1962, Paris, Seuil, 1995, p. 204.
- [11]
François-Xavier Hautreux, « L’armée française et les “supplétifs musulmans” pendant la guerre d’Algérie. Expérience et enjeux », op. cit., p. 344.
- [12]
Ibidem, p. 345.
- [13]
Guy Pervillé, Les Accords d’Évian (1962). Succès ou échec de la réconciliation franco-algérienne (1954-2012), Paris, Armand Colin, 2012, p. 126.
- [14]
Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique algérienne.1958-1962, op. cit., p. 72.
- [15]
Ibid., p. 71.
- [16]
Ibid., p. 72.
- [17]
Ibid.
- [18]
Entretien avec Camille Renaud.
- [19]
Le Soir d’Algérie. Abdelmadjid Merdaci, « Actualités : l’indépendance de l’Algérie : le 3 ou le 5 juillet 1962 ? », 4 juillet 2012.
- [20]
Chantal Morelle, Comment de Gaulle et le FLN ont mis fin à la guerre d’Algérie. 1962, les accords d’Évian, op. cit., p. 215.
- [21]
Maurice Faivre, Les Archives de la politique algérienne.1958-1962, op. cit., p. 72.
- [22]
Ibidem, p. 350.
- [23]
http://www.mohamedramdani.com « Ramdani Mohamed rend hommage à Houari Boumediene. » Site consulté en juin 2014.
- [24]
François-Xavier Hautreux, « L’armée française et les “supplétifs musulmans” pendant la guerre d’Algérie. Expérience et enjeux », op. cit., p. 343.
- [25]
SHD 1H 2457, dossier 1. Le ministre des Armées à M. le général CSFA, 24 février 1962. Courrier cité par François-Xavier Hautreux. Ibidem, p. 344.
- [26]
Expression du commandant Michel Passicos qui a fait partie de la force locale. Bulletin de l’association des officiers de réserve de Bordeaux, 2005.
- [27]
Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, Paris, Fayard, 1994, t. I, p. 113.
- [28]
SHD 1H 3605, dossier 3. Le commandant supérieur des forces armées. État-major. 3e bureau. 9 mai 1962.
- [29]
SHD 1H 2918, dossier 1. Exécutif provisoire algérien. Organisation de la force de l’ordre, 14 mai 1962.
- [30]
Maurice Faivre, Les Combattants musulmans de la guerre d’Algérie. Des soldats sacrifiés, Paris, L’Harmattan, 2007, p. 193.
- [31]
Témoignage de Camille Renaud tiré du courrier des lecteurs d’Historia magazine, série consacrée à la guerre d’Algérie. Supplément au numéro 369. Il a été de nouveau publié sur le site suivant : http://www.grands-reporters.com, avec pour titre « Algérie la force locale ». Site consulté en juin 2014.
- [32]
Entretien avec Camille Renaud.
- [33]
SHD 1H 3605, dossier 3. Le général de brigade Robert-Jacques Frat, commandant la Zone Nord-Constantinois à la 14e division d’infanterie. 18 avril 1962.
- [34]
Gregor Mathias, Les Officiers des SAS et des SAU et la politique de pacification pendant la guerre d’Algérie. Thèse de doctorat sous la direction du professeur Guy Pervillé, Université de Toulouse Le Mirail II, 2013, p. 757.
- [35]
Ibid., p. 759.
- [36]
Jean Kersco, Quand le merle sifflera. Algérie, 1961-1962, du putsch à l’indépendance, Paris, Thélès, 2007, p. 150.
- [37]
Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique algérienne. 1958-1962, op. cit., p. 73.
- [38]
Omar Mokdad a servi dans l’infanterie comme officier entre 1941 et 1963. Michel Hardy, Hervé Lemoine, Thierry Sarmant, Pouvoir, politique et autorité militaire en Algérie française. Hommes, textes et institutions, 1945-1962, Condé-sur-Noireau, SHAT/L’Harmattan, p. 356.
- [39]
Journal Officiel de la République française, 10 avril 1962.
- [40]
Guy Pervillé, Les Accords d’Évian (1962). Succès ou échec de la réconciliation franco-algérienne, op. cit., p. 126.
- [41]
Redha Malek, L’Algérie à Évian. Histoire des négociations secrètes, 1956-1962, op. cit., p. 250.
- [42]
François-Xavier Hautreux, « L’armée française et les “supplétifs musulmans” pendant la guerre d’Algérie. Expérience et enjeux », op. cit., p. 345.
- [43]
Robert Buron, Carnets politiques de la guerre d’Algérie par un signataire des accords d’Évian, Paris, Plon, 1965, p. 253.
- [44]
Hubert Michel, « Les institutions politiques algériennes », Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée, n° 1, 1996, p. 141.
- [45]
« Christian Fouchet et Abderrahmane Farès inspectent la force locale ». Ina, JT 20 heures, 21 avril 1962.
- [46]
Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique algérienne. 1958-1962, op. cit., p. 73.
- [47]
Abderrahmane Farès, La Cruelle vérité. L’Algérie de 1945 à l’indépendance, op. cit., p. 106.
- [48]
Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique algérienne. 1958-1962, op. cit., pp. 73-74.
- [49]
Jean Monneret, La Phase finale de la guerre d’Algérie, Paris, L’Harmattan, 2000, p. 123.
- [50]
Si Azzedine est un combattant de l’Algérois. Il passe à l’extérieur en 1959. En mars 1962, le GPRA l’envoie dans la capitale algérienne afin de réorganiser la ZAA et de combattre l’OAS. Commandant Azzedine, Et Alger ne brûla pas, Paris, Stock, 1980, p. 197 et 201.
- [51]
Jean Monneret, La Phase finale de la guerre d’Algérie, op. cit., p. 175.
- [52]
Soraya Laribi, « Le plan Simoun ou l’appel anticipé des conscrits européens d’Algérie en juin 1962 », Revue historique des armées, n° 269, décembre 2012, pp. 98-107.
- [53]
Le Monde, 14 mai 1962, p. 3.
- [54]
Soraya Laribi, « Le dernier “gouverneur général” de l’Algérie : Christian Fouchet, Haut-Commissaire de la République (mars-juillet 1962) », in Vincent Joly, Patrick Harismendy, Algérie, sortie (s) de guerre (1962-1965), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014, p. 89.
- [55]
Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique algérienne. 1958-1962, op. cit., p. 74.
- [56]
Libération, 13 mai 1962, p. 3. Cependant il sera difficile pour l’Exécutif provisoire de recruter des ATO.
Maurice Flory, « La fin de la souveraineté française en Algérie », Annuaire Français de droit international, vol. VIII, 1962, p. 914. - [57]
Jacques Macé, « Mes cent jours dans la force locale », Guerre d’Algérie Magazine, n° 6, 2002.
- [58]
« J’ai rencontré pour vous : Jean-Claude Enard », L’Ancien d’Algérie, n° 516, avril 2013, p. 36.
- [59]
Vitalis Cros, Le Temps de la violence, op. cit., p. 258.
- [60]
http://wwww.marienoelyvonpriouforcelocale19mars1962.e.monsite.com Témoignage d’Yvon Marie-Noël Priou, extrait de son blog consulté en juin 2014.
- [61]
ANOM. MA 155, dossier 1. Ce dossier contient des lettres des procureurs d’Alger et d’Oran (8 et 12 juin) au sujet d’assassinats et blessures causées à des personnalités européennes des UFL.
- [62]
Soraya Laribi, « Le plan Carrousel, mesures à prendre contre l’ALN dans le Nord-Constantinois (juin-juillet 1962) », Revue historique des armées, n° 268, 2012, pp. 66-78.
- [63]
Bernard Tricot, Les sentiers de la paix. Algérie 1958/1962, Paris, Plon, 1972, p. 333.
- [64]
Redha Malek, L’Algérie à Evian. Histoire des négociations secrètes, 1956-1962, op. cit., p. 250.
- [65]
Guy Pervillé, Les Accords d’Évian (1962). Succès ou échec de la réconciliation franco-algérienne, op. cit., p. 126.
Entretien avec Yvon Marie-Noël Priou. - [66]
Gilbert Meynier, Histoire intérieure du FLN, Paris, Fayard, 2002, p. 638.
- [67]
François-Xavier Hautreux, « L’armée française et les “supplétifs musulmans” pendant la guerre d’Algérie. Expérience et enjeux », op. cit., p. 398.
- [68]
SHD 1H 1393, dossier 1. Le général Lennuyeux à M. le général commandant le CAO, 2 avril 1962 cité par François-Xavier Hautreux. Ibid., p. 346.
- [69]
SHD, 1H 3605, dossier 3. Le général de brigade Robert-Jacques Frat, commandant la Zone Nord-Constantinois à la 14e division d’infanterie. 18 avril 1962.
- [70]
Bulletin de l’association des officiers de réserve de Bordeaux, op. cit.
- [71]
Jacques Macé, « Mes cent jours dans la force locale », op. cit.
- [72]
Francine Dessaigne, Journal d’une mère de famille Pied-Noir, Paris, L’Esprit Nouveau, 1962, p. 201.
- [73]
Si Azzedine, Et Alger ne brûla pas, op. cit., p. 322.
- [74]
Maurice Faivre, Les Archives de la politique algérienne. 1958-1962, op. cit., p. 75.
- [75]
Chantal Morelle, Comment de Gaulle et le FLN ont mis fin à la guerre d’Algérie. 1962, les accords d’Évian, op. cit., p. 223.
- [76]
Témoignage d’Yvon Marie-Noël Priou, op. cit.
- [77]
« J’ai rencontré pour vous : Jean-Claude Enard », op. cit., p. 37.
- [78]
Maurice Faivre, Les Combattants musulmans de la guerre d’Algérie. Des soldats sacrifiés, op. cit., p. 200.
- [79]
Id., p. 162.
- [80]
Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique algérienne. 1958-1962, op. cit., p. 77.
- [81]
Jean Monneret, La Phase finale de la guerre d’Algérie, op. cit., p. 248.
- [82]
Charles de Gaulle, Lettres, notes et carnets. 1961-1963, Paris, Plon, p. 246. En effet, Maurice Faivre note que les cadres musulmans ne sont pas concernés par cette directive. Maurice Faivre, Les Archives de la politique algérienne. 1958-1962, op. cit., p. 77.
- [83]
Décisions prises le 17 juillet 1962 et notifiées le 21 juillet. Ibidem, p. 302.
- [84]
Entretien avec Yvon Marie-Noël Priou.
- [85]
Maurice Faivre quant à lui, parle d’un « constat de faillite ». Maurice Faivre, Les Archives inédites de la politique algérienne. 1958-1962, op.cit., p. 75.
- [86]
Entretien avec Camille Renaud.
- Mis en ligne sur Cairn.info le 29/09/2015
- https://doi.org/10.3917/gmcc.259.0077
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