Le 13 avril 1958 est né d'une nouvelle philosophie de la révolution, un onze à nul autre pareil dans l'histoire du football : la glorieuse équipe du Front de Libération Nationale (FLN), constituée de joueurs qui ont tout abandonné, dont une riche carrière professionnelle et pour certains la Coupe du Monde 1958 en Suède pour porter, sur tous les continents, la lutte de libération nationale.
Malgré l'interdiction de la FIFA de jouer et, surtout, de ne pas reconnaître le statut de cette équipe sur intervention de la France, le «Onze de l'Indépendance», comme on l'appelait à l'époque, obtient très vite un énorme succès politique et diplomatique en Asie, en Europe et en Afrique où les joueurs de l'équipe du FLN obtiennent autant des succès sur les terrains de football qu'un soutien international jamais enregistré jusque-là pour une équipe de football, porte-voix de la lutte de libération d'un peuple.
Ils sont là où les missions sont les plus difficiles, en particulier celle, sur les stades de football du monde, d’être les ambassadeurs de l’Algérie combattante, de la Révolution. L’indépendance acquise, ils ont poursuivi leur mission : celle de doter le football algérien de ses premières lettres de noblesse, ses premiers titres continentaux.
Eux, ce sont ceux qui ont fait partie et porté haut son étendard, celui de l’Algérie combattante, l’équipe de football du FLN/ALN, composée et pensée par un orfèvre nommé Boumezrag, par les plus grands joueurs de football que les clubs de la France métropolitaine comptaient dans leurs rangs. Les Oualiken, Bentifour, Mustapha Zitouni, Mohamed Maouche, Rachid Mekhloufi, Abdelhamid Zouba, Abdelhamid Kermali, Said Amara, Abderrahmane Ibrir et toute l’équipe du FLN qui comptait 33 joueurs professionnels, ont écrit l’histoire de la révolution algérienne.
Une histoire singulière, unique dans les annales des processus de décolonisation dans le monde : pacifiquement, par le sport, le football, un langage commun et simple à tous les peuples de la planète épris de paix, de partage et de prospérité partagée, loin des schémas impérialistes de domination du monde et d'accaparement des richesses, d’assujettissement des peuples.
Ce qu’ont fait les 32 joueurs et les dirigeants de la mythique équipe de football du FLN, à leur tête Mohamed Boumezrag, est unique, historique, autant sur le plan politique, diplomatique que sportif : pareille stratégie de lutte avec un simple de ballon de football sur les terrains du monde n’a jamais été, auparavant utilisée comme arme de combat, comme stratégie de guerre d’indépendance.
L'ÉQUIPE DU FLN A FAIT AVANCER LA RÉVOLUTION DE DIX ANS
«L’équipe FLN a fait avancer la Révolution algérienne de dix ans» avait dit Ferhat Abbas, président du GPRA. Une déclaration qui, mesurée à l’aune du temps et des événements politiques en France métropolitaine au milieu des années 1950, avec la chute de la IVème république et le chaos politique qui s'en est suivi avant la naissance de la Vème république du Général de Gaulle, donne toute l’importance et la profondeur de la stratégie des responsables du FLN et de la révolution algérienne d’utiliser les armes les plus efficaces, y compris la diplomatie du sport, pour bouter la France et son armée de tortionnaires hors d’Algérie.
La mission dévolue à des joueurs, pour la plupart jeunes, qui ont mis entre parenthèses une carrière professionnelle prometteuse, le confort social en France, une vie sans soucis et, pour certains, comme Mustapha Zitouni ou Rachid Mekhloufi de jouer la phase finale de la coupe du monde en Suède (1958), a été remplie lorsque, en juillet 1962 les Algériens sont sortis fêter leur Indépendance.
Mais, pour ces guerriers des stades de football, les ambassadeurs sportifs de la révolution algérienne, commençait, au lendemain de la guerre de libération, une seconde mission, encore plus importante, plus stimulante : former et encadrer les nouvelles générations de footballeurs algériens.
Beaucoup ont, après avoir terminé une riche carrière dans les clubs professionnels européens, regagné le pays et entamé une carrière d’entraîneurs, dont celle de la sélection nationale.
Cela a été en particulier le cas de Rachid Mekhloufi, Abdelhamid Zouba, Abdelhamid Kermali, Mohamed Maouche, Kader Firoud, Said Amara, Abdelaziz Bentifour ou encore Abderrahmane Ibrir et Bekhloufi. En 1975 Mekhloufi remporte la médaille d'or des JM et Kermali la coupe d'Afrique des Nations en 1990 à Alger.
Baroudeurs des stades de football, militants balle aux pieds de la cause nationale, les 32 de l’équipe du FLN ont, eux également, écrit à leur manière, comme des artistes, l’histoire de la révolution. Mohamed Boumezrag en a été l'architecte, ce digne petit-fils de Hadj Ahmed Mohamed El Mokrani, ses amis l'orchestre de la révolution par le football.
DZfoot avec l'APSPAR WALID L
https://www.dzfoot.com/equipes-nationales/il-y-a-65-ans-naissait-lequipe-du-fln-240821.html
Des footballeurs au service de la patrie
Ils ont abandonné la sécurité de prestigieux clubs français, et des carrières professionnelles prometteuses en Europe pour répondre à l’appel de la patrie: ce sont ces 32 joueurs de football Algériens qui, le 13 avril 1958 ont donné naissance, sous la direction d’un chef d’orchestre nommé Mohamed Boumezrag, à la glorieuse équipe de football du FLN, dont les ordres de combat s’appliquaient sur un terrain pour porter haut la voix de l’Algérie combattante.
Parmi ces joueurs, plusieurs étaient en passe de participer, avec l’équipe de France, à la Coupe du monde 1958 en Suède. Ces joueurs Algériens ont choisi de répondre à l’appel de la patrie et rejoindre le FLN. Et tout va se passer le dimanche 13 avril 1958, alors que la guerre de libération entre dans sa quatrième année : ce jour-là se déroule la 30e journée de Division 1 de football en France et plusieurs joueurs Algériens évoluent sur les pelouses des neuf rencontres du jour. Moins de 24 heures plus tard, neuf d’entre eux auront quitté le territoire français pour Tunis, où siège le GPRA afin de rejoindre l’équipe du FLN et la lutte pour l’indépendance algérienne.
Sur les neuf joueurs qui ont rejoint Tunis, quatre jouaient à l’AS Monaco, et trois sont proches de participer à la Coupe du monde 1958 en Suède avec l’équipe de France : les Monégasques Mustapha Zitouni et Abdelaziz Bentifour, ainsi que le meneur de jeu de l’AS Saint-Etienne, Rachid Mekhloufi, alors âgé de 22 ans. “On était considérés comme des déserteurs qui allaient être rapidement recherchés. Il fallait donc qu’on sorte rapidement du territoire français. Mais lorsque Abdelaziz Bentifour est venu me voir, je n’ai pas hésité un seul instant à tout plaquer, car devant la cause nationale, il n’y avait qu’un seul choix à faire”, avait indiqué Makhloufi.
La “fuite” de ces joueurs provoque un choc et un ”trou d’air” politique en France, et la presse française, à l’instar de ”L’Equipe” en fait ses choux gras sur “Les neuf footballeurs Algériens disparus”. La France coloniale réagit comme il était prévisible : elle condamne la bravoure et la position politique de ces joueurs de football et intervient auprès de la FIFA pour ne pas reconnaître l’équipe du FLN, et donc l’interdiction est faite à toutes ses associations-membres de ne pas jouer contre cette équipe, qui, par ailleurs, volait de succès en succès en Europe, en Asie et en Afrique.
1958-1962, quatre ans de “combat” à travers le monde
Car moins d’un mois après avoir rejoint Tunis, l’équipe du FLN participe à son premier tournoi qui réunit la Tunisie, le Maroc et la Libye. Le premier d’une longue série de matches disputés à travers le monde dans les pays acquis à la cause algérienne. Certaines fédérations nationales paient cher le fait de côtoyer cette équipe bannie par l’instance internationale. “On devait représenter l’Algérie sur la scène internationale, mais pas n’importe comment. Il ne fallait pas donner l’image de pauvres malheureux, dont le monde aurait pitié. Il fallait, au contraire que notre équipe impressionne et donne une très bonne image, même en dehors du terrain”, avait affirmé le regretté Abdelhamid Zouba, décédé le 2 février 2022 à l’âge de 86 ans. Pendant leur tournée en Afrique, en Europe et en Asie, les membres de l’équipe du FLN qui ont disputé 83 matchs, soldés par 57 victoires, 14 nuls, et 12 défaites. Après quatre années de “combats” sur les terrains de football du monde, le “onze de l’indépendance” (surnom de l’équipe du FLN) cessa ses activités avec l’indépendance de l’Algérie le 5 juillet 1962.
La Fédération française de football lève alors les suspensions des joueurs algériens le 29 juin, ce qui permet à certains de rentrer jouer en France. D’autres ont fini leur carrière dans les différentes équipes du jeune championnat algérien où ils avaient un rôle important à jouer. La plupart d’entre eux ont eu l’occasion d’assurer le rôle de sélectionneur national, à l’image de Rachid Mekhloufi, Abdelhamid Zouba, Abdelhamid Kermali, Mohamed Maouche, Kader Firoud, Saïd Amara, Abdelaziz Bentifour ou encore Abderrahmane Ibrir. Sous la houlette de Mekhloufi, l’équipe nationale avait inauguré son palmarès par une médaille d’or lors des Jeux méditerranéens de 1975 (victoire 3-2 en finale face à la France).
En 1978, il conduit l’EN vers le sacre lors des Jeux africains, en battant le Nigeria en finale (1-0). Douze ans plus tard, Abdelhamid Kermali, décédé le 13 avril 2013, date coïncidant avec le 55e anniversaire de la création de l’équipe du FLN, mènera l’Algérie à remporter sa première Coupe d’Afrique des nations CAN-1990.
L’équipe du FLN en chiffres
L’équipe de football du FLN, créée le 13 avril 1958, était composée de 32 joueurs. L’initiateur et concepteur de l`opération était Mohamed Boumezrag, petit-fils d’Ahmed El Mokrani, initiateur de l’insurrection de 1871 dans les Bibans. Mohamed Boumezrag, natif de Chlef, lui-même joueur qui a mis fin à sa carrière professionnelle en France entre 1943 et 1945, a eu l’idée de créer cette équipe lors du festival mondial de la Jeunesse et des Etudiants de 1957 à Moscou.
Le responsable politique de l’équipe était Mohamed Allam et le Garde-matériel Sellami Zamri. Des 32 joueurs ayant effectué la tournée à travers de nombreux pays d`Europe, d`Afrique, du Moyen-Orient et d`Asie entre 1958 et 1962, trois sont toujours en vie : Dahmane Defnoune (Angers), Mohamed Maouche (Reims) et Rachid Mekhloufi (Saint-Etienne).
Les joueurs décédés sont : Mokrane Oualiken (Montpellier), Mokhtar Aribi (Lens), Ali Benfadah (Angers), Abdelaziz Bentifour (Monaco), Abderrahmane Boubekeur (Monaco), Cherif Bouchache (Le Havre), Hocine Bouchache (Le Havre), Abdelhamid Bouchouk (Toulouse), Hacène Bourtal (Béziers), Saïd Brahimi (Toulouse), Hacène Chabri (Monaco), Saïd Haddad (Toulouse), Abderrahmane Ibrir (Toulouse), Abdelkader Maazouza (Nîmes), Ahmed Oudjani (Lens), Saïd Amara (Béziers), Mohamed Soukhane (Le Havre), Mustapha Zitouni (Monaco), Abdelhamid Zouba (Niort), Abderrahmane Soukhane (Le Havre), Abdelhamid Kermali (Lyon), Kaddour Bekhloufi (Monaco), Mohamed Bouricha (Nîmes), Ali Doudou (Annaba), Smaïn Ibrir (Le Havre) Abdelkrim Kerroum (Troyes), Amar Rouaï (Angers), Abdellah Hedhoud dit Settati (Bordeaux), Mohamed Boumezrag (initiateur de l`opération) et Mohamed Allam (responsable politique).
Fiche technique de l’équipe de football du FLN :
Gardiens de but : Abderahmane Boubekeur, Ali Doudou, Abderrahmane Ibrir.
Défenseurs : Mustapha Zitouni, Kaddour Bekhloufi, Mohamed Soukhane, Chérif Bouchache, Smaïn Ibrir, Abdallah Settati.
Milieux : Mokhtar Aribi, Saïd Haddad, Ali Benfadah, Mohamed Boumezrag, Hassen Bourtal, Amar Rouaï, Hassen Chabri.
Attaquants : Abdelhamid Kermali, Abdelaziz Ben Tifour, Abdelhamid Bouchouk, Rachid Mekloufi, Saïd Brahimi, Mohamed Maouche, Ahmed Oudjani, Amokrane Oualiken, Abderrahmane Soukhane, Abdelkader Mazouz, Mohamed Bourricha, Abdelkrim Kerroum, Hocine Bouchache, Saïd Amara, Abdelhamid Zouba.
Equipe type : Abderrahmane Boubekeur, Dahmane Defnoun, Mustapha Zitouni, Mohamed Soukhane, Mokhtar Aribi, Amar Rouaï, Abdelhamid Kermali, Rachid Mekloufi, Saïd Brahimi, Abdelaziz Bentifour, Abdelhamid Bouchouk.
Principaux matchs
L’équipe de football du FLN a disputé 62 matchs officiels entre 1958 en 1962 pour 47 victoires, 11 nuls, 4 défaites, 246 buts marqués et 66 buts encaissés. Les coéquipiers de Amar Rouai ont livré des rencontres face à des sélections nationales en URSS (4 matchs), Yougoslavie (5 matchs), Tchécoslovaquie (4 matchs), Roumanie (4 matchs), Hongrie (4 matchs), Bulgarie (6 matchs), Chine (5 matchs), Vietnam (4 matchs), Maroc (7 matchs), Tunisie (4 matchs), Libye (2 matchs), Irak (6 matchs) et Jordanie (3 matchs).
Principaux résultats
L’équipe FLN était redoutable sur les terrains. Là où elle passait, elle remportait ses matches par des scores larges, notamment devant la Yougoslavie (6-1), la Hongrie (5-2), la Tchécoslovaquie (4 – 1), la Chine (4 – 0), la Tunisie (9 – 0), la Jordanie (11 – 0), l`Irak (11 – 0), Vietnam (11-0). Elle a été battue par la Bulgarie (4-3), la Yougoslavie (2-0), et la sélection de Rostow (URSS, 2-1).
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