Ce 29 janvier 1962, l ‘Organisation armée secrète (OAS) fait sauter le PC des barbouzes gaullistes, à El Biar (Alger).
Lorsque la « villa Andrea » explose, est détruit le lieu où de nombreux membres de l’OAS ou simples partisans de l’Algérie française ont été torturés longuement et sauvagement, et parfois assassinés (la République n’a toujours pas présenté ses excuses contrairement au cas Audin).
Lors de fouilles en 1968, une trentaine de squelettes sont retrouvés dans le jardin de la villa…
Les « barbouzes », comptant nombre de bandits, de condamnés de droit commun, ont été déployés en Algérie en mars 60 par le pouvoir gaulliste, avec pour objectif d’éliminer toute résistance à la politique d’abandon de De Gaulle, et visant surtout l’OAS dont l’activité rayonnait (notamment avec ses émissions radio pirates).
Ci-dessous un récit de la lutte engagée entre ces crapules gaullistes et les militants ou simples sympathisants patriotes (qui seront 400 à être assassinés dans cette infâme opération).
« LES BARBOUZES
Par Antoine Martinez
Brève présentation.Nom officiel : MPC (mouvement pour la communauté) créé le 9 juillet 1959. Président fondateur : Jacques Dauer, secrétaire général Lucien Bitterlin.
Le MPC mouvement à tendance Gaulliste de gauche, était donc chargé en quelque sorte, d’en assurer la devanture respectable et légale. Lucien Bitterlin à toute latitude pour agir suivant les directives de la direction.
L’implantation du MPC en Algérie débute en mars 1960.
Yves le Tac est nommé président, Lucien Bitterlin secrétaire général, Jean Dubuquoy responsable administratif pour Alger. (Yves le Tac fut mis hors d’état de nuire malgré quatre tentative d’attentats manquées entre le 13 novembre 1961 et le 18 février 1962).
C’est à Paris, octobre 1961, cabinet de l’avocat maître Lemarchand que sont mises en places les nouvelles orientations concernant la lutte contre l’OAS. En présence notamment de Roger Frey ministre de l’intérieur et de son adjoint, Alexandre Sanguinetti (responsable du cabinet anti OAS), Lucien Bitterlin, Fred Simon représentant parisien du MPC.
Membres du comité directeur : Charly Bonardi, Youssef Benhoura, son beau-frère Nouar, et le père Badin.
Chef du service action : Barthélémy Rossello. Il s’illustrera dans l’infiltration des réseaux OAS. Il transmettait ses résultats au commissaire principal Gautray et à son adjoint Nivos, des RG, qui étaient en étroite relation avec le cabinet de Roger Frey.
But officiel : permettre la réconciliation et l’association France Algérie des communautés en vue de préparer le régime démocratique de l’Algérie nouvelle
But réel : s’opposer à l’OAS par tout les moyens et mettre un terme aux agissements des commandos Delta de Degueldre et Z de Susini.
Le 15 octobre 1961 la section algérienne s’appellera « Mouvement Pour la Coopération »
Rayon d’action : tout le territoire algérien en toute indépendance.
Les ordres devaient venir du cabinet anti OAS.
En Algérie le délégué général Jean Morin sous les ordre de Louis Joxe et de son chef de cabinet Jacques Legrand et ses adjoints, Verger et Vieillecazes, devaient être mis au courant des actions de ces commandos.
C’est donc une organisation secrète au service du pouvoir, qui avait pour but d’accélérer la mise en place de la politique d’abandon de l’Algérie et d’anéantir, par tous les moyens, les derniers opposants. C’est une véritable police parallèle qui reçoit ses ordres des plus hautes sphères du gouvernement.
Première remarque : Il est impensable que le premier ministre Michel Debré, qui avait autorité sur le ministre des armées P Mesmer, sur le ministre de l’intérieur R Frey, et sur le ministre des affaires algériennes L Joxe, n’ait pas eu connaissance de ce mouvement.
Deuxième remarque : Il est également inconcevable quand on connaît les personnalités des uns et des autres, que le chef de l’état lui même n’ait pas eu vent de » l’affaire « .
Monsieur Charles de Gaulle, Président de la République ainsi que Monsieur Michel Debré Premier Ministre savaient, et même s’ils ne voulaient pas prendre connaissance des » détails « , ils étaient complices des futures actions.
Les moyens.
L’assistance matérielle sera assurée par le colonel Laurent responsable de la sécurité militaire en Algérie, sous le commandement de Pierre Mesmer ministre des armées.
Le directeur de la police judiciaire, Michel Hacq responsable de la » mission C » aidé par le commissaire Grassien, qui mettent 200 policiers métropolitains envoyés en Algérie, à la disposition des barbouzes en Algérie.
Aide matérielle de divers groupements gaullistes.
La publicité et documents officiels (laisser passer, permis de port d’armes .. .) furent assurés par la délégation du gouvernement. (Morin et Verger).
Origines des renseignements : RG, PJ, DST, sécurité militaire, MPC, mission » C « .
Aide de l’organisation DRF » Défense de la République Française « , très proche du MPC dont le chef était Robert Lavier, proche de Michel Debré. Lavier entraîne avec lui Frank Masson (casque d’or) et le colonel Foyer ( Boissière)
La SEDA (Société Européenne de Diffusion en Afrique) chargée entre autres, d’assurer la paye des barbouzes.
Une trentaine de véhicules (403, 404 et camionnettes), faux papiers, lots d’armes et explosifs de toutes sortes (fournis par la Sécurité Militaire), des ports d’armes ainsi qu’un pécule de 60 millions d’anciens francs furent débloqués grâce à Jean Morin.
Novembre 1961 réunion avec L Bitterlin, et les hommes de la Délégation Générale (qui dépendaient du cabinet du ministre des affaires algériennes Louis Joxe), A Goulay, J Morin, C Vieillecazes et L Verger. Elle portait sur le recrutement de trente cadres permanents majoritairement européens et de quatre vingts militants qui comptaient quelques musulmans nationalistes. Budget 60 millions d’anciens francs de l’époque.
L’OCC (Organisation Clandestine du Contingent), formé de jeunes appelés, interviendra également dans certaines actions.
Le GAR Groupe d’Action et de Résistance d’extrême gauche qui grâce aux RG éditèrent les affiches avec les photos des commandos Delta.
Chronologie sommaire des actions du MPC à Alger.
Le 6 novembre1961 A Goulay et L Bitterlin, rencontrent à Paris Pierre Lemarchand qui assure pouvoir trouver de la » main d »œuvre « . madame Lemarchand réglera les problèmes de logistique et d’intendance.
Première recrue : Pierre Lecerf
PC installé à la villa » Dar es saada » ou villa » Andréa » dans le quartier de » El Biar »
(Pour Orléansville, Guy Gits sera le responsable qui travaillera étroitement avec le préfet Mohand Ourabah. Son collaborateur Bovis sera exécuté le 16 novembre 1961 par l’OAS.)
Début des opérations le 13 novembre 1961 à 0 heure. Une centaine d’hommes sont lâchés dans la ville pour infiltrer les réseaux OAS.
A Alger, Trois équipes :
– Lavier : Place du gouvernement, bab el oued, square Bresson et Bd de la République.
– Dubuquoy : centre d’El Biar.
– Lecerf : Champ de manœuvre, ru de Lyon, Belcourt, Kouba et Hussein Dey.
– André Laurent à la sécurité militaire, coordonnait, analysait et traitait les renseignements et avait fourni, au MPC, des armes prises au FLN.
Le 28 novembre, André Palaccio qui avait en charge de retrouver la trace du général Salan, est gravement blessé par balles à Alger.
Son frère est abattu le jour même à Maison Carrée.
20 novembre nouvelle tactique des barbouzes : le contre plasticage. L’objectif faire sauter les fiefs de l’OAS pour retourner la population contre elle. Sept établissements publics (bars et brasseries) sautèrent dans la nuit du 20 au 21 novembre 1961.
Embauche de nouveaux volontaires.
A Orléansville, deux chefs de secteur, huit responsables et vingt huit militants. Leur groupe de choc était constitué de six baroudeurs triés sur le volet.
Deux autres villas furent louées à Alger dont l’une à Hydra abritait le siège de la SEDA
Suite à la riposte de l’OAS qui entreprit la traque des Barbouzes, le MPC s’attela à un nouveau recrutement de » soldats » plus ou moins recommandables par l’initiative de Dominique Ponchardier.
Ces nouveaux commandos serait appuyés par le soutien logistique d’une nouvelle recrue ; Ettore Lobianco dit » Mario » assisté de Gérard Maugueret et de Michel Dirand. Gaston Quetel (vice président du MPC) assurerait l’information de Dauer sur les activités en Algérie, de ces hommes.
Madame Lemarchand était chargée de transférer ces nouveaux venus que l’on appellera » colis « .
Le 2 décembre 1961 débarque à Alger sous la responsabilité de Michel Hacq » professeur Hermelin » (directeur central de la PJ), des commissaires et officiers de police, qui s’installent à l’école de police d’Hussein Dey.
C’est Renato Hernandez, officier de police, qui assurera les contacts avec le MPC.
Le PC central sera établit dans une quatrième villa proche du Palais d’été, » Dar Likoulia « .
6 décembre 1961 arrivaient à Alger neuf recrues quatre européens dont Viorme, Joseph Toniton, Alain Belaïche, ainsi que le père et le fils Amar, et quatre vietnamiens commandés par Jim Alcheik » Lassus » et de son adjoint Roger Bui-Thé. Tous spécialistes de sports de combats, ils formeront le commando » talion » qui montrera très vite une efficacité redoutable. Ils seront logés dans une cinquième villa qui sera vite abandonné au profit de la fameuse villa Andréa. Ils auront pour objectif principal : Annihiler la propagande OAS qui s’exprimait spectaculairement par des émissions de radio pirates.
Après plusieurs attaques de l’OAS contre des responsables ou de gardes du corps du MPC, ce dernier se lancera dans des kidnapping .
Trois techniciens de la société SN Repal sont enlevés par P Lecerf et torturés pour leur faire avouer une hypothétique collaboration à l’OAS. Ils seront » débarrassés » vivants dans El Biar.
Fernand Lopez agent immobilier est ensuite kidnappé pour les mêmes raisons.
Le 22 décembre Claude Veillard barbouze et gorille du vice président du conseil général d’Alger fait sauter le restaurant » Le grand Rocher » repaire des cadres de l’OAS. Douze morts sont ramassés des débris.Peu avant Noël, nouveau colis : Jacques Andréi.
Dans la foulée Christian David (qui assassinera le commissaire Gallibert), François Marcantoni garde du corps d’Alexandre Sanguinetti et truand notoire, Ange Simonpieri , Marcel francisci, Dominique Venturi » Nick « , qui s’illustreront dans le domaine de la drogue, Glaise secrétaire de FO, s’impliqueront dans la lutte anti OAS.
Le 31 décembre 1961, Marcel Hongrois » le Chibani » dynamite un café point de chute de l’OAS.
Onze mort et vingt trois blessés.
Le 31 décembre 1961 Attaque au bazooka du repaire barbouzes de la rue Faidherbe par six commandos deltas.
Après le décrochage des deltas, le sous brigadier François Paoli est tué par les barbouzes qui le confondent avec un renfort OAS.
Quatorze morts et deux blessés coté barbouzes qui ne déclareront qu’un seul blessé.
1er janvier 1962 Michel Massenet adjoint de Degueldre est tué à main nu par un vietnamien.
Arrivé ensuite à Alger Clauzure, Biard, Pelletier, Hortenzi et Gauthier, membres du SAC (Service Action Civique) dont le chef sera Jacques Cohen » Mustapha « .
Le 10 janvier 1962 l’activité du MPC est légitimée par les hautes instances Parisiennes.
Le 12 janvier 1962 Michel Lievin des commandos delta est capturé et torturé par les vietnamiens d’Alcheik.
Il sera mis dans un tel état que la mission » C » lui fera signer une décharge avant de l’incarcérer.
A partir du 10 janvier D Ponchardier reçoit l’investiture du MPC. Il y déploiera un zèle impressionnant.
Le 23 janvier 1962 nouvelle mission ordonnée par le ministre de l’intérieur : Détruire l’émetteur pirate de l’OAS Alger.
José Salord est enlevé et torturé ainsi que Albert Coronal qui sera supplicié pendant plusieurs heures.
Le 27 janvier 1962 Henri Vinent est capturé et atrocement torturé dans la cave de la villa » Andréa « . Il fut remis à la police légale de Hussein Dey qui authentifièrent les tortures. Les plaintes déposés ne connurent jamais de suite….
Alexandre Tislenkoff , technicien radio des émissions pirates est à son tour kidnappé. Il est torturé vingt quatre heures durant. Un de ses collaborateurs est également intercepté. Il sera achevé d’une balle dans la nuque et enterré dans le jardin.
La plainte déposée contre Pierre lemarchand par Tislenkoff, le 17 février 1966 n’aboutit pas plus même si une enquête fut ordonnée.
M Quidet est torturé à son tour au même endroit et par la même équipe.
29 janvier 1962 Jacques Gosselin est arrêté et torturé. Tislenkoff, Gosselin et Vinent ne durent leur salut qu’à l’explosion de la villa qui fit dix neuf morts tous barbouzes et à l’intervention d’un commandant de la gendarmerie mobile qui s’opposa à leur exécution sommaire par Christian David » le beau serge » après la destruction de la villa.
D Ponchardier nomme comme remplaçant de Alcheik, Robert Morel » Bob » ou » colonel Morel « .
Groupes participant à la lutte anti OAS contactés par Morel Le DRF , le GAR.
On recruta alors dans le » milieu » marseillais.
Installation à l’hotel » Radjah « , qui sera attaqué sans discontinuer par l’OAS.
Le 16 février 1962 quatre barbouzes seront exécutés dans leur voiture.
Le 7 mars 1962 Roger Frey donne l’ordre à Jean Morin de rapatrier en métropole les survivants.
C’est donc la fin des opérations qui ont coûté un milliard et demi d’ancien francs une centaine de morts barbouzes (environ la moitié de l’effectif) et quatre cents morts et disparus coté OAS.
Des fouilles entreprises dans les jardins des villas en 1968 ont permis de mettre à jour une trentaine de squelettes dont certains avaient le crâne percé.
Les tortures perpétrées par les barbouzes étaient psychologiques et surtout physiques. Coups, étranglements, électricité, ongles arrachés, yeux crevés, brûlures, sont le lot d’horreurs quotidien qu’ont à subir les malheureux prisonniers.
Le barbouzes ne sont pas intervenus uniquement à Alger, mais dans toutes les grandes villes d’Algérie. A Oran notamment elles furent très » actives « .
On peut penser aussi que leur rayon d’action dépassait les frontières européennes, et qu’ils » travaillaient » en étroite collaboration avec les services officiels français et les polices étrangères. (voir l’enlèvement d’Argoud en Allemagne)
Cependant la torture contre l’OAS ou les partisans de l’Algérie française ne fut malheureusement pas une spécialité unique des barbouzes : Les gendarmes du colonel Debrosse, les gardes mobiles à l’école de Police d’Hussein Dey, Les policiers de la mission » C » dans la fameuse caserne des » Tagarins » se sont également rendus coupables de crimes contre l’humanité. Est ce que notre histoire de France aura le courage d’en faire état un jour ? »
Tiré d'un site Pied-Noir.
https://www.contre-info.com/cetait-un-29-janvier-1962
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