Le colonel Jacques Allaire s’est éteint à 98 ans.
© (Photo NR, Julien Pruvost)
Jusqu’au bout, il aura porté son sac seul, sans personne pour le faire à sa place comme il le disait. Mais la mort a fini par rattraper dimanche le colonel Jacques Allaire, grognard du 20e siècle, grand officier de la légion d’honneur, peu après son 98e anniversaire.
Dire qu’il a une vie remplie tient de l’euphémisme, celui qui se rêvait libraire a vécu une grande partie de l’histoire contemporaine avant de retrouver la quiétude des livres biographiques ou de géopolitique dans son appartement de Tours, face à la Loire. Avec une étonnante mémoire, il racontait des souvenirs précis, ponctués d’argot militaire comme « prendre un caleçon » pour une défaite, mais aussi avec sagesse.
Sa vie de combattant a commencé en 1944, à 20 ans, aux côtés des FFI (Forces françaises de l’intérieur) au Mans. Il voulait rejoindre la 2e DB (Division blindée), mais n’a pas été pris à cause d’un problème à une jambe. Alors il s’est engagé dans le corps expéditionnaire français en Indochine. Ce pays le marque à vie. En 1954, il est « dans la cuvette », à Diên Biên Phu, où Bigeard finit par le joindre par radio : « Allaire, c’est foutu. Cessez-le feu à 17 h 30. » Il raconte ce moment incroyable dans la vidéo tournée chez lui à Tours par notre journaliste de La Nouvelle République, 60 ans après les événements (voir ci-dessous).
Dix mille soldats ont été faits prisonniers, réduits à marcher 50 ou 60 km de nuit, pendant un mois et demi en pleine saison des pluies, et à ne manger qu’une boule de riz. Trois mille trois cents survécurent. Après avoir été hospitalisé à Hanoï, il revient en France quinze jours plus tard. Puis l’armée le rappelle pour aller en Algérie. En 1956, il est envoyé sur le canal de Suez puis repart, participe à la bataille d’Alger.
De cette guerre qui ne dit pas son nom, il gardera un souvenir différent de celui de l’Indochine où il s’est rendu en tout six fois dans sa vie. Son ami l’écrivain Lartéguy appelait cet attachement « le mal jaune ». Le réalisateur Pierre Schoendoerffer avait appel à lui comme conseiller pour son film Diên Biên Phu (1992). Alors premier ministre, Édouard Philippe lui avait demandé de l’accompagner, sur place, en novembre 2018.
Obsèques et hommage national aux Invalides
La messe de funérailles sera célébrée mercredi 6 avril, à 10 h 30, en la cathédrale des Invalides.
Avant l'hommage rendu dans la Cour d'honneur pour ce grand officier de l'Ordre de la Légion d'honneur.
Le colonel Jacques Allaire sera inhumé à Blois.
Publié le | Mis à jour le
https://www.lanouvellerepublique.fr/tours/la-derniere-bataille-du-colonel-allaire
https://www.facebook.com/watch/?v=152341723544009
.
Les commentaires récents