«C’était la civilisation qui arrivait en Algérie sous la forme d’une guillotine »
Victor Hugo.
L’histoire est terrible avec les hommes et d’abord elle leur bande les yeux en leur faisant croire que le pire n’est pas pour eux. La colonisation française a débuté avec le pillage du Trésor d’Alger (La Régence), l’indépendance a commencé avec la disparition des fonds et des bijoux collectés au titre de la Caisse de solidarité nationale sous prétexte de renflouer le trésor public pour finir par la dilapidation et le détournement de mille milliards de revenus pétroliers et gaziers par les gouvernants condamnant leur propre peuple à une pauvreté certaine.
L’ordre colonial français fût une occupation du territoire par « l’épée et la charrue » ; l’ordre étatique algérien serait une appropriation privative du sol et du sous-sol algériens par les «textes et le fusil». Si la violence exercée par la colonisation était légitimée par la mission « civilisatrice » de la France, la violence légale de l’Etat algérien s’effectue au nom du « développement ».
L’enjeu des pouvoirs colonial et post colonial n’est en vérité que la soumission de l’homme à l’ordre établi c’est-à-dire l’acceptation de son statut de sujet par le « bâton » (la répression) et/ou la « carotte » (la corruption).
Les élites dirigeantes considèrent l’Algérie décolonisée comme un « butin de guerre » à se partager et la population comme un troupeau de moutons à qui on a confié la garde. Tantôt, le berger les amène à l’abattoir, tantôt aux pâturages selon les circonstances du moment et les vœux du propriétaire. Ils gèrent les ressources du pays comme on leur a appris à le faire. La France est partie mais ses intérêts sont préservés.
L’élite dirigeante va reproduire les méthodes du colonisateur et parachever sa politique économique et sociale Cette gestion autocratique, anarchique et irresponsable de la société et des ressources du pays n’est nous semble-t-il pas étrangère à l’influence et l’attraction de la France sur/par les « élites cooptées » du pays, aujourd’hui vieillissantes pour la plupart, maintenue en activité malgré leur âge avancé et pour la plupart finissent presque tous dans un lit d’hôpital parisien entre les bras de « notre mère patrie la France».
Elle s’insère parfaitement dans la stratégie de décolonisation du général De Gaulle, engagée dès 1958 à son retour au pouvoir et parachevée en 1962 par la signature des accords d’Evian dont la partie la plus secrète a été semble-t-il largement exécutée.
Elle a permis à la France d’accéder à la pleine reconnaissance internationale en tant que grande nation (indépendance énergétique), à l’unité nationale retrouvée (menace guerre civile évitée) et au rang de puissance nucléaire (premiers essais concluants au Sahara) et a miné l’Algérie post coloniale par la dépendance économique (viticulture, hydrocarbures, importations), par la division culturelle (langue, religion, ethnie), et par l’émergence d’un régime militaire autoritaire peu soucieux des intérêts de la majorité de la population.
En imposant un schéma institutionnel dont la logique de fonctionnement était radicalement opposée à celle de la société indigène, et un modèle économique étranger aux réalités locales des populations, le colonisateur préparait en fait la société postcoloniale à l’échec de la modernisation politique et au développement économique.
La France n’est pas venue en Algérie pour la civiliser mais bien pour la militariser et en faire une armée de supplétifs prête à combattre à ses côtés le nazisme, le communisme, le terrorisme. Pour y parvenir, la France a pénétré l’intimité de la société algérienne afin d’en faire un levier puissant de domination et de dépendance.
La France a perdu la guerre par l’épée, elle l’a gagné par l’esprit. Coloniser un pays c’est conquérir son territoire par la force, posséder son corps par la prostitution, occuper son esprit par l’école. La domination des terres s’accompagne de la domination des corps. Il s’agit de s’approprier les corps et les âmes.
On rêve de l’ailleurs. 1830, les Français débarquèrent en Algérie pour l’occuper. 2022, les Algériens embarquèrent dans la «soute à bagages » des avions d’Air Algérie et/ou franchissent des murs en béton haut de trois mètres bravant tous les dangers, pour la retrouver qui les accueille froidement et avec des insultes de surcroît. Une histoire d’amour ou la passion d’une liaison bien singulière.
Deux femmes se querellent à propos de leurs maris respectifs, la vieille dit à la jeune : «Ton mari n’est pas comme toi, tu as par où le tenir». Si on devait se remettre à la taille, La France est petite « comme ça », l’Algérie est grande « comme ça » pour paraphraser un certain Poutine qui donne des sueurs froides à une Europe « dévastée mais toujours pleine de charmes » qui se réfugie dans les bras d’une Afrique « vierge et chaude ».
Dr. A. Boumezrag
12/03/2022
https://lematindalgerie.com/je-taime-france-je-thaine-algerie/
.
Les commentaires récents