On oppose souvent Dieu et science alors que la science peut apparaître comme la meilleure alliée de Dieu. Best-seller en France, Dieu, la science, les preuves : l’aube d’une révolution, récemment paru aux éditions Guy Trédaniel, revient sur cette question existentielle. Quelle valeur accorder à cet essai au succès surprenant ?
Les auteurs de l'essai Dieu, la science, les preuves : l’aube d’une révolution, récemment paru aux éditions Guy Trédaniel, Michel-Yves Bolloré, ingénieur et industriel, et Olivier Bonnassies, polytechnicien et fondateur du site d’actualité chrétienne Aleteia, ont su aborder dans un style simple un sujet a priori complexe. Ceux qui y chercheront des preuves basées sur des formules mathématiques ou sur la physique quantique seront déçus. Mais tant mieux pour tous les autres, car cela rend la lecture du livre très fluide : plutôt que de s’embarquer dans des considérations incompréhensibles pour la plupart des lecteurs, les auteurs ont préféré recourir à une démonstration logique basée sur les différentes hypothèses possibles sur la création du monde et l’existence ou non d’une force créatrice qu’on définit comme étant Dieu. Dans une deuxième étape, ils essaient de définir la nature de ce Dieu et de déterminer son implication ou non dans sa création, en suivant toujours une approche analytique très méthodique.
La théorie du Big Bang
L’argument de base est que si l’univers a un début et une fin, ce que confirment l’ensemble des physiciens, c’est donc qu’il y a nécessairement un acte créateur évolutif. Un monde uniquement matériel ne saurait être évolutif.
Le plus intéressant dans ce livre, est qu’il s’attarde sur la théorie du Big Bang de façon accessible à tous. Mais alors que dans notre conscience collective la théorie du Big Bang s’oppose à la croyance en Dieu, les auteurs démontrent judicieusement que celle-ci est, au contraire, la preuve de l’existence d’une force créatrice, qu’on peut appeler Dieu. Puisqu’il est désormais établi que l’univers est né du néant à l’instant même du Big Bang, il ne peut donc naître que par un acte créateur. Cette démonstration se résume dans l’affirmation de Max Planck, prix Nobel de physique : « Toute la matière trouve son origine et existe seulement en vertu d’une force. Nous devons supposer derrière cette force l’existence d’un esprit conscient et intelligent. » Dans ce contexte, un chapitre entier est consacré à celui qu’on considère comme une référence en la matière : Albert Einstein. Le chapitre « En quoi croyait Einstein ? » évoque l’éternel débat entre croyants et athées, chacun considérant Einstein comme étant dans son propre camp...
Le rôle de Dieu dans l’évolution du monde
Dans une deuxième partie, composée de quatre chapitres, le livre s’attaque à ce qu’il appelle les « preuves hors science », pour essayer d’argumenter en faveur de l’action de Dieu dans ce monde, en puisant dans les récits bibliques et les miracles. Il est vrai que cette approche ne peut être considérée comme étant très scientifique, mais elle a le mérite de mettre en avant des arguments forts en faveur de l’action de Dieu dans sa création. Si, dans la première partie, on peut déduire que l‘existence d’une force créatrice extérieure ne fait plus aucun doute, le défi est de savoir maintenant si cette force créatrice, appelée Dieu, reste impliquée ou indifférente au sort dans sa création. Et c’est bien là que se situe le vrai débat de l’existence de Dieu. S’il est établi que l’univers tel que nous le connaissons aujourd’hui a bien été créé par Dieu, quel est alors le rôle de Dieu dans l’évolution de ce monde ?
Définir ce rôle n'entre plus dans un cadre purement scientifique mais plutôt religieux. C’est là où le livre bascule dans la recherche d’indices poussant à la réflexion – on peut parler d’intuition raisonnée – plutôt que dans les preuves scientifiques. Les auteurs ont l’honnêteté intellectuelle d'avertir le lecteur à ce propos : « Certains pousseront des cris d’orfraie et demanderont ce qu’un miracle peut bien venir faire dans un livre pour l’essentiel scientifique (...). Ceux de nos lecteurs qui se sentent allergiques à ce genre d’histoires pourront s’arrêter ici, ou sauter ces quatre chapitres : Nous comprenons leur réaction ; mais ils ne savent pas ce qu’ils perdent ! »
Ces quatre chapitres abordent les thèmes suivants : Y a-t-il une vérité scientifique dans la lecture de la Bible ou s’agit-il de simples légendes ? Qui peut être Jésus Christ, un sage, un illuminé ou bien plus que cela ? Le destin du peuple juif est-il le fruit du hasard ? Qu’en est-il du phénomène extraordinaire du miracle de Fatima ; peut-il être considéré comme une preuve ?
La Bible et la science
Le premier chapitre de cette deuxième partie aborde le lien entre la science et la Bible. Il commence par énumérer les arguments utilisés par les athées pour affirmer que la Bible est en opposition avec les découvertes scientifiques, pour ensuite réfuter un à un ces arguments en replaçant l’écriture de la Bible dans le contexte de l’époque. Le point fort de cette analyse réside essentiellement dans le parallèle entre le récit de la création tel que raconté par la Bible et l’évolution effective de l’univers telle que décrite par les physiciens. On découvre ainsi que lorsque la Bible mentionne au début de la Genèse (1:3) : « Que la lumière soit, et la lumière fut » (Fiat lux et facta est lux en latin), cette mention figure avant la création du Soleil. Or ce qui apparaissait comme une anomalie dans la Bible a été confirmé par les dernières découvertes scientifiques qui ont établi que la lumière existait bel et bien avant l’émergence du Soleil !
Le livre s’attarde ensuite sur les récits extraordinaires de la Bible, difficilement concevables dans une approche purement scientifique, pour les replacer dans le contexte de l’époque et les considérer comme des faits historiques enrichis d’images et d’exagération. C’est là où l’argumentation apparaît fragile car s’il est vrai que cela peut s’appliquer au récit de l’Exode par exemple, elle est difficilement applicable à d’autres épisodes de la Bible où le surnaturel est omniprésent. Certaines séquences de la Bible sont difficilement acceptables pour tout esprit scientifique même avec le recul que préconisent les auteurs. Sur ce point-là, le débat reste entièrement ouvert. De plus, les auteurs omettent (sciemment ?) de mentionner l’image du Dieu de la Bible, qui intervient à outrance, qui punit lorsqu’on lui désobéit et récompense celui qui exécute sa volonté. Cette image-là de Dieu peut-elle être compatible avec le Dieu créateur d’un univers ordonné mais librement évolutif tel que décrit dans la première partie du livre ? Les auteurs évitent de répondre à cette question...
L'identité de Jésus
Le deuxième chapitre de la seconde partie se penche sur l'identité du Christ. Les auteurs commencent par se demander comment Jésus, qui est né dans l’indifférence totale et a péri de la façon la plus cruelle qui soit et qui aurait dû finir dans les oubliettes de l’Histoire, a pourtant réussi à bouleverser le monde tant et si bien que le calendrier chrétien se rattache désormais à sa vie. Par quel mystère cela a-t-il été possible ? Par quel phénomène des disciples incultes, peureux et en proie perpétuelle aux doutes, ont-ils réussi, malgré les persécutions, à convertir au christianisme des populations entières sur la base de la simple histoire d’un prophète condamné et crucifié, puis ressuscité le troisième jour ? « Le destin de ce Jésus de Nazareth dépasse l’entendement », reconnaissent les auteurs. En toute logique, le christianisme aurait dû disparaître dès le premier siècle, et pourtant il est toujours là, bien présent aux quatre coins du monde... Cela aurait été inconcevable s’il n’y avait pas effectivement quelque chose qui tient de la vérité.
Les auteurs se livrent ensuite à un exercice passionnant en distinguant sept hypothèses concernant l’identité de Jésus. Soit il n’a pas existé et c’est un mythe créé de toute pièce. Soit c’est juste un grand sage. Soit c’est un fou illuminé. Soit c’est un simple aventurier qui a échoué. Soit c’est un prophète comme d’autres avant lui. Soit c'est un « élu de Dieu », un être exceptionnel. Soit il est bien le « Fils de Dieu », comme il l’affirmait lui-même. Toutes ces hypothèses, qui couvrent tout le spectre des possibilités, sont examinées à la loupe avec une logique implacable.
La première hypothèse – pourtant encore défendue avec une étonnante mauvaise foi par des auteurs athées comme Michel Onfray – est facilement balayée. Outre les preuves archéologiques et les documents historiques indéniables (cf. Dans L'Orient littéraire du 5 mars 2017, l'article de Jean-Christian Petitfils : « En réponse à Michel Onfray : Si, l’existence de Jésus est un fait historique avéré »), il suffit de se demander, au cas où l’histoire de Jésus serait vraiment un mythe, pourquoi « a-t-on imaginé une figure mythique sacrilège pour les Juifs, absurde pour les païens, achevant sa vie sur un échec retentissant et une mort infâme ? » C’est tout simplement absurde ! Surtout quand on sait que les premiers chrétiens ont accepté de mourir plutôt que de renier leur croyance, et que, malgré toutes les persécutions, ce « mythe » a réussi à survivre jusqu’à nos jours... « L’hypothèse du mythe Jésus est donc définitivement à écarter », affirment les auteurs qui analysent les autres hypothèses avec la même pertinence.
Des oublis regrettables
Mais cette partie, hélas, occulte Saint Paul et son revirement spectaculaire : persécuteur des premiers chrétiens, Paul se transforma en un fervent prédicateur et joua un rôle primordial dans la diffusion de la foi chrétienne dans les Empires grecs et romains ; il mourut en martyr plutôt que de renier sa foi. Le parcours de Paul de Tarse et son zèle extraordinaire à convertir les autres à sa nouvelle foi constituent une preuve supplémentaire que l’histoire de Jésus n'est pas hors de la vérité... On regrettera également l'omission du Linceul de Turin qui, analysé de façon scientifique et objective, représente une preuve tangible et incontournable de l’existence de Jésus, de sa condamnation, de sa mort, voire de sa résurrection – la formation de l’image du Linceul ne pouvant s’expliquer, sur le plan scientifique, autrement que par un flash de lumière suivi d’une dématérialisation du corps. L'oubli de cette « pièce à conviction » est sans doute l'une des lacunes inexplicables de ce livre qui comporte pourtant, parmi ses illustrations, l’image du visage de Jésus-Christ selon le Linceul !
Enfin, les deux derniers chapitres de l'essai apparaissent moins convaincants que les précédents. En effet, l’avant-dernier chapitre s’attarde sur un raccourci qui lie le destin du peuple juif à une intervention divine, tandis que le dernier chapitre considère le miracle de Fatima comme un élément en faveur de l’existence de Dieu, alors que cet événement, qui représente certes un signe extraordinaire qui relève de la foi et mérite réflexion, peut difficilement être admis comme preuve scientifique puisqu'il ne se base que sur les témoignages de ceux qui y ont assisté... Et puis, dans ce même ordre d'idées, pourquoi avoir choisi Fatima et point Lourdes ou les miracles de Sainte Rita ou Saint Charbel par exemple ?
Une portée philosophique
Le livre s'achève sur une analyse philosophique sur la présence immatérielle de Dieu dans la conscience humaine. Et si la preuve ultime de l’existence de Dieu se trouvait à l’intérieur de chacun de nous ? Notre âme, habitacle de nos sentiments et de nos émotions, « tient nécessairement son origine d’une cause elle-même spirituelle et absolue transcendante à l’ordre des choses physiques ».
Cette réflexion se poursuit avec des contre-arguments pour réfuter les affirmations généralement utilisées par les athées pour nier l’existence de Dieu. Au premier rang de ces affirmations vient évidemment la question de la souffrance humaine : « Si Dieu existe vraiment, pourquoi toute cette souffrance dans ce monde ? » Les auteurs y répondent sans ambages : « Dieu accorde un grand prix à la liberté. À cause de celle-ci, Dieu ne peut empêcher l’homme de mal agir sans remettre en cause cette liberté. » Ou encore : « Le monde et l’homme sont imparfaits pour ces deux raisons : d’une part pour que l’homme puisse évoluer dans le temps, et d’autre part pour que cette évolution puisse être le résultat de sa liberté d’agir. »
En définitive, Dieu, la science, les preuves : l’aube d’une révolution a le mérite de nous proposer une approche scientifique et analytique accessible à tous. Fruit d’un travail rigoureux de plus de trois ans, riche en références et en citations, il a bénéficié de l'apport d'une vingtaine de scientifiques et synthétise parfaitement toutes les hypothèses quant à l’existence de Dieu et la nature de Jésus. Malgré les quelques lacunes relevées, il comblera l'attente de ceux qui veulent affermir leur foi ou sont en quête de vérité.
Dieu, la science, les preuves : l’aube d’une révolution de Michel-Yves Bolloré et Olivier Bonnassies, éditions Guy Trédaniel, 2021, 532 p.
OLJ / Charles Najjar, le 06 janvier 2022
https://www.lorientlejour.com/article/1286707/et-si-la-science-prouvait-lexistence-de-dieu-.html
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