Double blasphème extrait de Lettres à un soldat d’Allah, de Karim Akouche. À mon avis, prose, poésie et pamphlet sont bien plus subversifs que des caricatures.
On tombe sous le charme. C’est un poète de guerre des mots. Dès le début, tu es pris à la gorge serrée. Avec ma pote en colère, on a déjà commencé à en parler, et à le faire parler. Il nous réveille. On s’aperçoit, ou alors on se souvient, qu’il existe de tout temps des apostats et des croyants en paix. On se remémore Samarcande, d'Amine Maalouf, et ce troisième siècle de l’islam, sous un tyran ubuesque, avec un cadi politique et Omar Khayyam, jeune savant et poète, épicurien et audacieux.
À mon avis, prose, poésie et pamphlet sont bien plus subversifs que les caricatures. En tous cas, ils ne sélectionnent pas les ennemis. Bien plus temporels que le dessin, même avec bulle, ils éparpillent les faits, les idées, les colères. Ils sont en synchronie et diachronie, universels et éternels. Les lettres actuelles de Camus ou d’Akouche plongent dans l’Histoire, la vraie, la profonde, la lointaine, ou la géographie, celle des guerres et des migrations. Tout ceci est bien plus puissant que l’humour, fut-il noir. Jamais un coup de dé n’abolira le hasard, disait l’autre. Jamais un éclat de rire n’abolira l’horreur.
Je ne me suis pas fait censurer de billet depuis Ma personne est sacrée, que j’ai fait reparaître un peu plus tard, subtilement modifié. Des commentaires, si, et c’est à chaque fois ubuesque. Peu importe. Le principal, c’est cette voix d’or. Vont-ils faire aussi sauter ça, pour cause de liberté ? (dans ce cas, on parlait de licence.)
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Chut, ne dis rien, ferme les yeux, bouche-toi les oreilles, ne dénonce pas l’islamisme et ses avatars. Faut pas faire le jeu de l’extrême droite ni celui des nostalgiques du colonialisme, encore moins celui du Grand Capital.
Mens ! Le djihadisme n’a rien à voir avec l’islamisme, lequel ne vient surtout pas de l’islam. Même si des intellectuels des pays musulmans, qui ont vu leurs sœurs et frères tomber sous les balles des fous d’Allah, nuancent ou pensent le contraire. Voile le réel, pratique le déni, c’est plus simple ainsi. D’une posture, deux conforts : tu t’inscris dans le « camp du bien » et tu ne prends aucun risque. Contourne la vérité, inverse les arguments, fais des détours sémantiques, ne désigne pas le mal ; tourne autour de la bête immonde, mais ne« l’affronte jamais. Dédramatise le terrorisme, folklorise l’idéologie salafiste, psychanalyse le djihadiste. Fais de celui-ci un déséquilibré, une victime de la société individualiste, du fétichisme marchand, de la crise sociale, de l’arrogance de la modernité. Trouve-lui toutes les explications possibles, sociales et psychologiques, sauf une, l’essentielle, la théologique, la religieuse.
Fais de l’islam une religion à part, de ses adeptes les « élus » de Dieu. Répète-le sur toutes les tribunes : ils sont des humiliés. Fouille dans les placards de l’Histoire, déterre les cadavres, éparpille les cendres, revisite la guerre d’Algérie, attise le choc des mémoires, évoque l’Irak, la Syrie et la Libye. Les « humiliés » ont subi le colonialisme, ils ont été dépossédés de leurs biens, de leur pétrole, de leur langue, de leur terre et, quoi qu’ils fassent, il faut les excuser ; ce n’est jamais leur faute, c’est toujours la faute des autres et de l’Occident. N’évoque surtout pas les esclavagistes arabes, ce chemin est miné, on te taxera de révisionnisme. Oublie l’Empire ottoman et ses crimes, oublie les « civilisations et les peuples colonisés par l’arabo-islamisme.
Depuis l’effondrement du bloc soviétique, la gauche ne propose plus d’utopies ; ses acteurs, n’ayant plus de nouvelles idées, marchent dans le brouillard. Les uns ont viré à droite, les autres ont sombré dans les désillusions. Hier internationalistes, ils deviennent tout à coup communautaristes, ethnicistes, différentialistes, relativistes. Ils ont tourné le dos aux Lumières, à la laïcité, aux droits universels et à la liberté.
L’islam est « révolutionnaire », le vert a remplacé le rouge, les chants religieux l’Internationale, le sabre la faucille, les djihadistes les brigadistes.
L’islamisme pousse sur les ruines du communisme. Les musulmans sont devenus les nouveaux prolétaires. Il faut les défendre contre Wall Street, le progrès, la dépravation des mœurs, les féministes, les homosexuels… Les perdants de la mondialisation doivent s’unir pour bâtir l’Oumma, pour faire face au « gouvernement mondial ».« Complotistes de tous les pays, unissez-vous ! Déçus de la société de consommation, organisez-vous !
Marx est mort, vive Mahomet !
16 NOV. 2020 PAR JEAN-MAX SABATIER BLOG : AD FRATRES ET SORORES
https://blogs.mediapart.fr/jean-max-sabatier/blog/161120/marx-est-mort-vive-mahomet
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