Ceux qui veulent que l’Union du Maghreb arabe renforce le Maroc doivent remettre en question le calendrier de leur campagne militaire et réaliser deux choses: annexer le Sahara occidental au Makhzen ne garantit pas l’unité du Maghreb, tout comme la reconnaissance de l’autodétermination du peuple sahraoui ne rompt pas cet espoir.
Le Sahara occidental n’a jamais fait partie du Maroc. Après la Seconde Guerre mondiale, une vague de mouvements de libération a balayé les colonies européennes en Afrique. Alors que le Maroc a obtenu son indépendance des Français en 1956, le Sahara occidental est resté sous contrôle espagnol. En 1958, l’administration coloniale a annoncé que le Sahara occidental était une province espagnole.
En 1963, chaque État africain qui avait signé la Charte des Nations Unies a revendiqué le Sahara occidental comme indépendant, à l’exception du Maroc, ce qu’il a fait quatre mois plus tard. En 1967, l’Assemblée générale des Nations Unies a publié la résolution 2354 qui obligeait l’Espagne à appliquer le principe d’autodétermination du peuple sahraoui.
En 1975, le départ espagnol a ouvert la porte au Maroc pour annexer le Sahara occidental à son territoire. Malgré les résolutions successives de l’ONU en faveur des affaires sahraouies à la suite de la liquidation coloniale, le Maroc a toujours revendiqué le droit d’annexer le territoire.
Le conflit entre le Maroc et les Sahraouis, qui est dirigé par le Front Polisario, n’est pas nouveau. Hormis les combats de 1975, les allers-retours entre le Maroc et le Front Polisario ont toujours été un conflit stable qui n’a jamais dégénéré en guerre ouverte. Ce qui a changé au Sahara occidental, c’est le moment et les acteurs, associés à une campagne militaire ouverte.
Le déclin politique et géopolitique des États-Unis suivi de l’impact intense de la pandémie de COVID-19 a marqué un tournant vers les calculs stratégiques. La descente américaine après le 11 septembre et sa récession géopolitique après 2011 ont opposé les États-Unis à la Chine dans la région via le Sahara occidental.
Le Maroc a toujours été dans le camp américain, tandis que l’Algérie a rejoint les Soviétiques dans la période post-indépendance. Par cela, il semble que la stratégie de Washington pour étouffer l’Initiative chinoise de la ceinture et de la route (BRI) est de jouer les États les uns contre les autres. Cela signifie que l’instabilité de la sécurité joue en faveur des États-Unis, sapant le projet économique chinois.
La campagne militaire marocaine a coïncidé avec la normalisation des relations entre l’Égypte, les Émirats arabes unis (EAU) et Bahreïn avec Israël, jetant le doute sur le moment des violences. La guerre est néanmoins intervenue quelques semaines à peine après l’ouverture d’un consulat à Laâyoune, la plus grande ville du Sahara occidental.
L’Algérie a toujours été considérée comme un État voyou par Israël tout en agissant également comme un obstacle aux États-Unis.
Il est clair que Tel Aviv est l’agent actif au Moyen-Orient, tandis que les EAU sont devenus le nouveau jumeau d’Israël en Afrique du Nord. Ainsi, la question demeure: les EAU ont-ils convaincu le Maroc de normaliser ses relations avec Israël et d’être récompensé par le Sahara occidental?
Compte tenu de cela, de nombreux Arabes soutiennent l’agression militaire du Maroc sous prétexte de l’unité du Maghreb. Sur le plan géopolitique, la reconnaissance de l’indépendance d’une nation ne remet pas en cause la notion de création d’union.
Par exemple, la reconnaissance de l’indépendance de l’Érythrée en 1993 et de la Namibie en 1990 n’a pas sapé l’Union africaine fondée en 2002. De même, la réalisation d’unions comme la Ligue arabe, le Conseil de coopération du Golfe (CCG) et l’Organisation de la coopération islamique (OCI) ont n’a jamais réussi à rassembler les membres.
En revanche, outre l’échec de nombreuses affaires décisives dans les mondes arabe et islamique – en Libye, en Syrie, au Yémen, en Palestine, au Cachemire et au Myanmar – les membres d’un même syndicat sont plus hostiles les uns envers les autres que contre leur prétendu ennemi, Israël.
Ce sont des frères dans une Ligue, mais des ennemis sur le terrain. Prenant la ligue arabe et l’OCI comme exemples, leurs membres utilisent des slogans de fraternité dans leurs réunions et leur rhétorique politique, mais derrière cette façade se trouve le véritable caractère des États. Plusieurs exemples incluent le soutien du Qatar et des EAU à l’intervention de l’OTAN en Libye; Les relations de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis et de l’Égypte avec le Qatar; L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis travaillent contre l’Iran et bien sûr la guerre au Yémen. Beaucoup sont même contre l’indépendance palestinienne.
À cet égard, la reconnaissance du droit du Sahara occidental à l’autodétermination ne ferait qu’éliminer le colonialisme et laisser espérer une Union du Maghreb arabe. Si la question du Sahara Occidental concerne les frères ennemis sur l’unité maghrébine et musulmane, il vaut mieux reconnaître les sahraouis et pousser l’ONU à accélérer le processus référendaire à travers sa Mission pour le référendum au Sahara Occidental (MINURSO). Au lieu de forcer une nation à se soumettre avec des armes à feu, il est préférable de soutenir la liberté sahraouie et d’attendre avec impatience de les inclure dans l’union.
Enfin, les changements géopolitiques résultant du coronavirus, poussant le monde vers les conflits armés et les guerres doivent être pris en compte. La stratégie américaine envers l’Afrique du Nord avec le déplacement des EAU dans la région en dit long sur l’agression marocaine.
Pourtant, la question de savoir si les partisans du Maghreb revendiqueraient l’indépendance des Sahraouis si la normalisation avec Israël ou une stratégie américaine était derrière l’agression militaire actuelle reste une question à résoudre.
25 novembre 2020
https://moroccomail.fr/2020/11/25/le-sahara-occidental-et-le-pretexte-de-lunion-du-maghreb-arabe/
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