BOUMEDIENE, QUOI QU'ON DISE
TROISIEME PARTIE.
La publication de mes deux précédents textes sur Boumediene m'a ramené beaucoup de satisfactions... j'ai eu le plaisir de découvrir nombre d'algériennes et d'algériens courageux qui ont défendu crânement, courageusement sincèrement et magistralement la mémoire du défunt par des argumentaires irréfutables...
j'ai dû supporter aussi les assauts de ses détracteurs, très souvent en forme de sentences, toujours les mêmes et sans aucune preuve pour les faire admettre et, comme à leur habitude, ces messieurs dames, à défaut d'argumenter leurs attaques , se sont trouvé plus simple méthode de participation au débat: m'insulter personnellement avec une hargne qui montre leur degré d'intolérance et de haine et leur conception de la liberté d'expression et du débat d'idées dont ils se font champions en d'autres circonstances.
...Je ne me suis pas excessivement formalisé devant ces attaques même si j'ai dû parfois répondre à la bêtise par la bêtise.... mon calme provient de l' habitude que j'ai, de ces attaques personnelles, que je supporte depuis très longtemps de la part des mêmes personnes qui ne viennent pas participer au débat autant qui'elles viennent troller mes publications, parfois pour se faire une audience que leurs pages ne leur ont jamais donnée comme me l'expliquait un jour mon amiAbderrachid
Je vous livre donc cette troisième partie qui concerne un sujet très sensible et qui a connu les plus perfides spéculations contre le Président Boumediène... J'ose espérer que l'on s'en tiendra au sujet du débat et qu'on ne sous sortira pas encore les sempiternelles inepties du genre: "il n'a tiré aucune balle", "il était l'homme de De Gaule, l'homme de Nasser, l'homme du Baath, l'homme de Moscou, l'homme des Américains"..."il a tué tous ses opposants", "il a généré Bouteflika et sa politique de prédation" ...
BOUMEDIENE, QUOI QU'ON DISE...
(3eme Partie)
ACCORDS D’EVIAN, OUED NAMOUS, MERS EL KEBIR, INN EKER
Il y’a d’abord une vérité sur laquelle s’accordent tous les gens intellectuellement honnêtes : Boumediene n’a pas accepté les termes des accords d’Evian négociés par Krim Belkacem et un aréopage de cadres de la Révolution parce qu’il y’aurait décelé des clauses limitant l’indépendance du nouvel état…
D’aucuns disent que ce refus n’est qu’une manifestation de sa jalousie morbide face à Krim qui, en signant ces accords s’est construit le statut de fondateur de l’Algérie moderne et que son refus de cautionner le texte découle de cette seule raison… Il s’en faut de peu pour qu’ils aillent prouver son implication dans l’assassinat du « lion du Djurdjura » en invoquant cette même raison…
Il est quasi certain que les clauses rejetées par Boumediène sont militaires et concernent les facilités et concessions arrachées par Joxe et ses compagnons sur la poursuite de la présence de l’armée française dans « certains sites » après l’indépendance.
Quant au rejet de ces accords pour cause de « jalousie », il ne tient pas la route… il n’a jamais été prouvé qu’une quelconque inimité existait entre les deux hommes si ce n’est peut être la méfiance inhérente à tous ceux qui cohabitent et agissent dans la clandestinité…
Et puis, il faut savoir que parmi les 9 négociateurs : Taïeb Boulahrouf, Saâd Dahlab, Mohamed Seddik Benyahia, Krim Belkacem, Benmostefa Benaouda, Redha Malek, Lakhdar Bentobal, M'Hamed Yazid et Seghir Mostefaï, on va en rencontrer 8 qui vont s’accommoder de son pouvoir et y participer chacun à sa manière…
Ceci démontrera aussi le doute quant à l’implication de Boumediene dans l’assassinat de Krim car il est impensable que pas un seul de ses compagnons n’en soit venu à dénoncer sa responsabilité dans l’assassinat de leur "responsable" à ces négociations qu’ils semblaient pourtant tenir en haute estime…
L’argument de la peur sera évacué pour deux raisons :
1- personne ne peut décemment accuser ces 8 héros de couardise…
2- leur silence à ce propos s’est poursuivi même après la mort de Boumediène.
On parle aujourd’hui d’un accord secret conclu sous l’impulsion des DAF entre le pouvoir de Boumediene et l’armée française, particulièrement en ce qui concernait la poursuite des essais des armes chimiques à Oued Namous jusqu’en 1978; et certains pourfendeurs de Boumediene le rendent responsable de la poursuite de l’occupation de Mers El Kébir jusqu’en 1967 et des essais nucléaires au Sahara jusqu’en 1966.
Je suis très certain que ceux qui lancent sous formes de scoops récurrents ces accusations sont, très bien (dés)informés et le font plus pour discréditer l’homme que par jalousie pour « l’indépendance trahie » du pays…
Ces gens là se recrutent dans :
1- les milieux revanchards qui ont été exclus du pouvoir ou s’en sont plutôt exclus par narcissisme et trop haute estime de leur importance ; parce que ce « pouvoir » ne semble avoir exclu que ceux qui ont trouvé que s’il était rentable d’y participer, il était encore plus intéressant de s’y opposer …
2- les embusqués qui se sont inclus dans les pouvoirs ayant succédé à Boumediene et qui n’ont jamais réussi à gagner le prestige du leader en dépit de leur populisme et de leur démagogie, qui ont pensé que leur aura est bridée par la sienne et qu’elle ne s’illuminera que s’ils arrivent à l’éteindre même en usant des plus vils procédés…
3- les théoriciens et rhétoriciens du démocratisme qui parlent du peuple pour les besoins de leurs dissertations en le considérant toujours comme une canaille immature qui ne connait pas son intérêt et qui applaudit les fossoyeurs de ses « libertés »…
Ces trois milieux ont toujours agi séparément mais en toute bonne intelligence…
Les premiers en créant des contre-vérités quitte à leur trouver des témoins parmi leurs activistes…
Les seconds en laissant faire, la main sur le cœur pour dire que s’ils n’avaient pas arrêté les dérives c’est qu’ils étaient impuissants devant « le dictateur » ou… non-informés…
Les troisième en colportant la propagande, en l’étoffant et en prenant pour vérités coraniques les témoignages des premiers et comme aveu de véracité, mais jamais comme preuve de complicité, les silences des seconds afin de ne pas les effaroucher et s'en aliéner le partage de la haine pour Boumediène.
Et pour parfaire l’idée que les accusations sont incontestables, la France officielle s’est toujours confinée dans un mutisme trop parlant en jubilant intérieurement, mutisme qui se veut certification que tout ce qui se disait sur les forfaits et la forfaiture de l’homme était vrai, laissant même se développer l’idée de l’existence de ces accords secrets qui ne sont pas exhibés juste parce qu’il n’est pas encore temps de les «déclassifier»…
Les Accords d’Evian permettent pourtant au dernier de leur lecteur de comprendre que s’il y’eut « troncage » d’une partie de notre indépendance, la cause en revient aux clauses qu’ils comportent et que ce sont les pièges insérés dans le texte d’origine qui ont motivé sa dénonciation par Boumediene plutôt que des raisons psychologiques qui ne tiennent pas la route comme on l’a vu aux premiers paragraphes.
MERS EL KEBIR ET OUED NAMOUS
Le texte des Accords d’Evian signé le 18 mars 1962 dit très clairement : « L'Algérie concède à bail à la France l'utilisation de la base de Mers El-Kébir pour une période de quinze ans, renouvelable par accord entre les deux pays. »
La fin du 1er bail devait donc avoir lieu en 1977…
L’évacuation se déroula le 31 janvier 1968, soit une bonne dizaine d’années avant…
Personne ne fait état du probable pressing exercé par Boumediène pour que cette clause soit corrigée au profit du principe d’indépendance et d’aucuns mettent même cette « victoire » sur le compte de tractations secrètes visant en échange, à conserver plus longtemps le site de Oued Namous, sans oublier de préciser que ce site qui devait être évacué en 1978 l’a été définitivement en…1986, c'est-à-dire 8 années après la mort de Boumediene.
Mais qu’en réalité le gros des installations y avait été démantelé en 1974 soit, 4 ans avant la date programmée de sa restitution que je n’ai lue ou entendue nulle part ailleurs que dans une interview du général Benyelles datant du 22 mai 2017…
Le texte des Accords d’Evian dit en effet et de manière très évasive : « L'Algérie concède également à la France l'utilisation de certains aérodromes, terrains, sites et installations militaires qui lui sont nécessaires. »
Il n’est pas précisé quels sites sont concernés, ni la durée de conservation, ni les modalités techniques et financières auxquelles doivent obéir les concessions de ces sites…
Il est très compréhensible que les français n’aient pas indiqué les noms, coordonnées, superficies et activités de ces sites et qu’un accord secret lie les deux pays sur ce point.
Cet accord peut même avoir été signé par Boumediène qu’il ne devrait pas être invoqué à charge contre lui mais à sa décharge puisque la clause figure dans le texte des négociations qui fut déposé à l’ONU et qui engageait les deux pays…
M. Benyelles parle de l’échéance de 1978… vous pouvez chercher autant qu’il vous plaira, vous ne trouverez jamais cette date dans un document officiel et je suppose que le général a divulgué en la précisant, un secret militaire dont il était détenteur…
Et je pense, sauf si on m’apporte la preuve du contraire que ces accords secrets s’ils ont existé et ils doivent exister sont de rédaction similaire à celui, public, qui régit la concession de la base de Mers El Kébir, c'est-à-dire qu’ils contiennent une clause de renouvellement du bail…
Il est par ailleurs certain que le désengagement français de Oued Namous s’est effectué avant terme comme pour la base de Mers El Kebir suite à l’intransigeance de Boumediene et à son animosité déclarée et assumée contre l’ancienne puissance coloniale plutôt que ne se soit poursuivie l’occupation pour quelque cynique amitié secrète liant Boumediene à la France ou pour ce fumeux lien de subordination qu’on a inventé entre lui et De Gaulle…
Mais on n’évacue pas une base d’expérimentation chimiques et bactériologiques comme on évacuerait un champ de pommes de terre après la récolte…
Il doit y avoir plein de mesures à relever sur le terrain des opérations sur le court et moyen terme et d’opérations de décontamination à réaliser ; et la poursuite de la présence français de 1974 à 1986 devait rentrer dans ce cadre et non dans l’utilisation du site pour de nouvelles expériences et c’est d’ailleurs ce qu’affirmait le Général Benyelles…
Ceux qui accusent aujourd’hui Boumediene d’avoir conclu un « accord secret » ne savent pas ce qu’ils disent…
En réalité si accord il y’eut c’est certainement pour régler les modalités de retrait des équipes françaises et non pour la reconduction du bail…
Ce qui est loufoque dans l’exploitation de cette affaire, c’est le gros holà de feinte consternation des scribouillards en tous genres devant le caractère « secret » de ces tractations…
Comme si on devait reprendre in-extenso les termes de ses tractations par nature secrète comme on reprendrait le texte d’un accord sur les échanges culturels entre l’Algérie et la République Équatorienne…
Autre grief retenu contre Boumediene, celui d’avoir fait garder la base de Oued Namous par l’ANP, suggérant une complémentarité, une subordination ou une complicité entre notre armée et celle de l’ex puissance coloniale, juste pour réactiver l’abcès de fixation des DAF, sans penser que si Evian a permis de tronquer notre indépendance à Oued Namous, laisser le site sous occupation loin de la surveillance de notre armée aurait été aliéner totalement cette indépendance…
ESSAIS NUCLEAIRES DE INN EKKER
Les sites réservés par l’Armée française pour ses essais nucléaires datent d’avant l’indépendance quand la France considérait notre pays comme un de ses départements.
Ces sites ne pouvaient être désaffectés du jour au lendemain… Ce sont les Accords d’Evian qui ont prévu le maintien de leurs activités et Boumediène n’avait aucune possibilité de les dénoncer ou d’y mettre fin avant l’échéance du premier bail…
il n’avait pas aussi la force de s’y opposer… la volonté, il est certain qu’elle ne lui manquait pas !...
Et c’est à ce titre que les essais ont continué après le 19 mars et jusqu’en 1966…
Il est affirmé sans que je n’en ai personnellement trouvé trace, que les Accords d’Evian prévoyaient que : « la France utiliserait pour une durée de cinq ans les sites comprenant les installations In-Eker, Reggan et de l’ensemble de Colomb-Béchar-Hamaguir ».
Je pense que si cette affirmation est exacte, ce ne sont pas les Accords d’Evian qui prévoyaient cette disposition mais des accords secrets explicitant le point relatif à la concession à la France de « certains aérodromes, terrains, sites et installations militaires qui lui sont nécessaires »…
Mais même si la France s’est désengagée du site de In Ekker avant le terme de 5 ans pour aller exécuter ses méfaits sur d’autres terres qui ne sont pas les siennes, en Polynésie, les détracteurs de Boumediène n’hésitent pas à lui imputer une félonie qu’ils sont les seuls à voir en l’accusant de permissivité avec De Gaulle dans les 11 essais nucléaires de Inn Ekker exécutés entre 1963 et 1966.
EN RESUME
1- Boumediene ne saurait être accusé d’une quelconque responsabilité dans la rédaction des clauses des Accords d’Evian défavorables à l’Algérie… il n’était pas négociateur ni signataire et il a dénoncé haut et fort ces Accords.
2- En dépit de tout ce qui se dit ou s’écrit, Boumediène n’a pas renouvelé les bails prescrits par les Accords d’Evian pour Mers El Kebir, Inn Ekker et Oued Namous puisque la France a quitté ces sites avant terme…
3- L’éventuel accord secret autorisant la présence française à Oued Namous n’est qu’une hypothèse… aucun document officiel ne prévoit une durée précise de la concession.
4- Les français ont arrêté leurs essais à Oued Namous 4 années (1974) avant la date de fin de concession (1978) prévue par les dispositions secrètes des Accords d’Evian (selon le Général Benyelles)
5- Affirmer que Boumediène aurait négocié en secret la présence française sur ces sites est une cynique contre-vérité… Les dispositions relatives à ces sites sont nécessairement secrètes et ont été négociées en marge des Accords d’Evian et certainement pas par Boumediene car il était opposé à ces accords, principalement à cause de ces dispositions.
6- L’ANP mobilisée pour garder Oued Namous n’était pas supplétive de l’Armée Française mais exerçait ses missions de souveraineté en veillant à ce que les opérations réalisées dans le site y restent circonscrites et ne dépassent pas le cadre dans lequel elles étaient autorisées par les Accords d’Evian.
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