Pour son premier roman, le poète Kamel Bencheikh offre au lecteur une intrigue réaliste, qui évoque la guerre de libération nationale sous un autre angle.
Le poète et journaliste Kamel Bencheikh a laissé libre cours à son imagination dans L’impasse, son premier roman, paru aux éditions Frantz-Fanon (2020). Si l’intrigue n’est pas endiablée, on s’y laisse volontiers entraîner par le récit de cette fiction.
L’auteur a opté de peindre une tranche de vie de l’Algérie en guerre pour son indépendance où les Algériens avaient décidé de prendre leur destin en main. L’intrigue. Abdelkader, le héros, est l’un des rares scientifiques autochtones. Ça se passe en pleine guerre d’Algérie. Il s’est évadé de la tristement célèbre prison de Lambèse, dans les Aurès.
Les maquisards se sont mobilisés pour l’acheminer des dépressions du Constantinois, des Hauts-Plateaux sétifiens vers la Kabylie, à Bougie plus précisément, où il doit prendre le train pour Alger. Et de là rejoindre Marseille. L’auteur a choisi comme théâtre Sétif et l’arrière-pays, qui se prolonge vers la Kabylie. Il décrit, à travers cette marche progressive du déserteur, l’organisation du FLN historique. Les personnages sont tous aussi attachants les uns que les autres.
Les femmes y sont présentes en force, ce qui justifie la dédicace : “Pour ma sœur Rachida, partie trop tôt sans avoir pris le temps de m’embrasser, et sans avoir pris celui de lire ce roman.” C’est un roman réaliste, qui évoque la guerre d’Algérie sous un autre angle. Kamel Bencheikh a un style propre. Il gagnerait à être peaufiné bien qu’il réussisse des tournures impressionnantes. Son style est aussi très visuel, donc cinématographique.
Dans un extrait, nous pouvons lire : “La matinée allait être sereine : pas un rameau ne bougeait, pas un flocon de neige ne tombait des branches, mais les Hauts-Plateaux sétifiens avaient la résonance d’une maison vide.” Ou encore : “La nuit suivait son cours. Les étoiles clignotaient dans un ciel pâli par le froid, les arbres émettaient des craquements discrets en oscillant à peine sous le vent, des bruits, des tintements de la glace éclatée parvenant de plus loin.
On aurait dit du verre à vitre qui se brisait par terre.” C’est aussi un roman politique où l’écologie prend une place particulière. Il traite notamment de la place de l’élite durant la révolution et de son rôle, attendu, du moins espéré après le recouvrement de l’indépendance du pays. Il écrira à la fin de l’ouvrage : “Le colonialisme a été vaincu. Un nouveau peuple vient de bâtir les fondations d’une nation, et cette nation allait souffrir de ceux-là mêmes qui l’ont conduite vers une indépendance de façade, vers un fleuve endoréique, une impasse à l’échelle de tout un pays…” Seul petit bémol, le lecteur aura du mal à se situer dans le temps.
Est-ce que l’on est au début du déclenchement révolutionnaire, au milieu ou carrément vers la fin ? Sur la forme, l’auteur a contraint son héros, Abdelkader, à un détour de plusieurs kilomètres. Il le fait venir de Sidi Aïch jusqu’à Bougie pour prendre le train sur Alger, alors que la gare du chef-lieu communal est l’une des plus importantes. Né à Sétif et vivant à Paris, Kamel Bencheikh est chroniqueur dans Le Matin d’Algérie.
Il a publié un recueil de poésie, Prélude à l’espoir, aux éditions Naaman (1984) avant d’enchaîner des écrits académiques sur : Jeune poésie algérienne ; Anthologie de la poésie algérienne de langue française ; Poètes algériens d’expression française. Il a contribué, en outre, dans deux ouvrages collectifs : Les années Boum (Chihab Édition, 2016) et La révolution du sourire (Frantz-Fanon, 2019).
M. OUYOUGOUTE
mardi 08 septembre 2020
https://www.liberte-algerie.com/culture/un-roman-realiste-sur-la-revolution-algerienne-345189
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