Les «parricides» de la France coloniale
La France a bel et bien liquidé ses propres enfants, engagés dans la lutte pour l'indépendance de l'Algérie.
Une nouvelle page de la guerre d'Algérie vient de s'ouvrir. Elle dévoile ce qu'elle recèle de plus atroce, de plus inhumain. Des Français, engagés dans la lutte en faveur de l'indépendance de l'Algérie, ont été assassinés de sang-froid. Sans état d'âme. C'est ce que révèle «Les tueurs de la République», un ouvrage de Vincent Nouville, à paraître aux éditions Fayard. Le journaliste d'investigation, Jacques Forollou, y fait référence dans une contribution publiée le 25 septembre, par le journal Le Monde. «Des documents lèvent le voile sur des projets d'élimination de Français, d'Européens et de dignitaires étrangers pendant la guerre d'Algérie», écrit-il. Son récit retrace la genèse de la naissance de cette opération criminelle qui sera menée par des barbouzes. Qui en est l'architecte? «Au coeur de l'été 1958, dans le plus grand secret d'un pouvoir gaulliste tout juste revenu aux affaires grâce au putsch d'Alger du 13 mai, Jacques Foccart a coordonné, sous les ordres du général, un programme d'opérations clandestines sur fond de conflit algérien», nous indique Jacques Forollou. Quel était le mode opératoire? «Menaces, attentats, sabotages, mais aussi des assassinats qui figurent parmi les moyens employés». Qui était chargé de l'exécution de ces crimes? «Le ser-vice action du Sdece (Service de documentation extérieure et de contre-espionnage, devenu Dgse) était chargé de mener ces missions», rapporte le célèbre quotidien parisien. Connaît-on le nombre de victimes? «Constantin Melnik, conseiller du Premier ministre, chargé des affaires de renseignement, de 1959 à 1962, chiffrait le nombre d'assassinats à 140 pour la seule année 1960, sans pour autant fournir de détails», révèle Jacques Forollou. Des documents inédits lèvent le voile sur cet épisode dramatique de la guerre d'Algérie, sur sa gestion par le gouvernement du général de Gaulle fraîchement revenu au pouvoir, par un coup d'Etat qui ne dit pas son nom. On est en été 1958. La révolution algérienne était en effervescence, soutenue par des ressortissants français qui avaient pris fait et cause pour elle. Ils feront partie d'une longue liste de femmes et d'hommes à abattre. «Cette liste a reçu l'accord de l'amiral Cabanier. Ce dernier n'est autre que le chef d'état-major de la Défense nationale attaché au général de Gaulle à la présidence du Conseil», indiquent ces nouvelles pièces. «L'autre document, mis au jour dans le livre de Vincent Nouzille, récapitule, sous forme de tableau, l'ensemble des opérations réalisées depuis le 1er janvier 1956: assassinats, sabotages ou attentats, en indiquant le but à atteindre, le lieu, les moyens utilisés et le résultat», indique Jacques Forollou. Sur les 38 opérations détaillées, 17 ont été réussies, 17 ont été annulées, notamment sur «ordre supérieur» ou pour «sécurité douteuse» et quatre sont qualifiées d'échecs, précise le journaliste. Glaçant!
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