UN PEU D’HISTOIRE
Après la défaite de Thapsus, en avril 46 avant J.C, Juba I avait tenté de regagner sa capitale, Zama mais, les Romains l’ayant devancé, il ne put accéder à la ville où était restée sa famille. Sur le point d’être capturé, le roi numide préféra se donner la mort. Son fils, le jeune Juba, fut pris et envoyé à Rome.
En septembre de la même année, César le fit figurer à son triomphe, aux côtés des chefs qu’il avait vaincu, dont Vercingétorix. L’enfant, qui avait tout juste cinq ans, suivit le char du vainqueur, à la place de son père.
Le même César prit sous sa protection le jeune Numide.
A sa mort, ce dernier passa sous la protection d’Octave qui se chargea de son éducation. Intelligent et doté d’une grande mémoire, Juba s’initia à toutes les disciplines qu’on apprenait alors. Il parlait, avec la même aisance, le latin et le Grec, ce qui fit dire à Plutarque que " le Barbare numide était devenu le plus fin des lettrés grecs ". Le destin du petit captif ne devait pas s’arrêter là.
Octave, qui était devenu son ami, lui fit obtenir la citoyenneté romaine et l’associa à ses campagnes d’Egypte, dans la guerre contre Antoine et Cléopâtre (31-29 avant J.C).
Le même Octave, devenu Auguste, le rétablit dans ses droits de souverain et lui tailla un royaume sur le territoire de la Maurétanie dont Rome s’était emparé après la mort du roi Bocchus. En fait, Auguste avait trouvé en Juba la personne qu’il fallait pour administrer un pays réfractaire à la domination étrangère mais peut-être prêt à accepter un souverain d’origine africaine. Bien que numide, Juba fut, en effet, accepté par ses sujets auxquels il apporta, il est vrai, la stabilité.
Sur ordre d’Auguste, sans doute, Juba épousa quelques années plus tard Cléopâtre Séléné, fille de la grande Cléopâtre d’Egypte et du triumvir Antoine. La jeune princesse avait été, elle aussi, enlevée à sa patrie, après la défaite et la mort de ses parents et élevée à Rome. Auguste voulait, par cette union, montrer au monde la grandeur et la magnanimité de Rome qui, après avoir vaincu ses ennemis, s’alliait leurs enfants, allant jusqu’à les faire gouverner pour son compte.
Conformément à la tradition égyptienne, Cléopâtre fut associée au règne de son époux : les monnaies frappées en son nom, entre 20 et 19 avant J.C., ainsi que les symboles égyptiens qui y figurent, le prouvent. Nous ne savons rien de la vie du couple sauf que Cléopâtre donna à Juba un fils, Ptolémée, appelé ainsi du nom d’un de ses aïeux égyptiens, et qui devait lui succéder. Cléopâtre Séléné mourut vers 6 ou 5 avant J.C. et, selon la tradition, Juba lui aurait élevé le fameux Mausolée Royal de Maurétanie (Tombeau de la Chrétienne), aux environs de Tipaza, à l’Est d’Alger
Le règne de Juba II, long d’une cinquantaine d’année, fut plutôt calme, même s’il fut traversé par des révoltes, comme celle des Gétules, en l’an 6 de l’ère chrétienne.
Jusqu’à sa mort, en 23 ou 24 après J.C, il fut un fidèle vassal de Rome et ne manqua pas de mettre à sa disposition, comme dans la guerre menée contre Tacfarinas, son armée et ses biens.
Son royaume connut, grâce à la stabilité dont il jouissait, une certaine prospérité. Sa capitale, Iol (l’actuelle Cherchell), rebaptisée Caesarea, en l’honneur d’Auguste, connut, sous son règne, un grand essor. Il l’agrandit, la dota d’un port et l’embellit de monuments et de statues de style grec.
Le commerce et l’industrie y florissaient, notamment les teintureries qui produisaient la célèbre pourpre de Gétulie, chantée par les poètes latins
Mais le tombeau a aussi sa légende, la voici :
Un Arabe de la Mitidja, Ben Kassem ayant été fait prisonnier lors d’une attaque pirate, fut emmené en Espagne et vendu comme esclave à un vieux savant.
Un jour, son maître lui dit : " Ben Kassem, je peux te rendre à ta famille et à ton pays, si tu peux me jurer de faire tout ce que je vais te demander. "
L’arabe promis car ce qu’on lui demandait était très simple.
Arrivé sur l’autre coté de la Méditerranée, il se rendit au tombeau de la Chrétienne et, là, il obéit à son ancien maître en faisant brûler un papier que le vieux savant lui avait confié.
A peine le papier qu’il avait jeté dans le brasier fut-il consommé, qu’il vit le tombeau s’entrouvrir pour donner passage à un nuage de pièces d’or et d’argent qui s’élevait et filait vers l’Espagne.
Ben-Kassem, pétrifié, réagit en lançant son burnous sur les dernières pièces et en ramena quelques-unes.
Quant au tombeau, il s’était déjà refermé, le charme était rompu…
Ben-Kassem garda longtemps le silence mais, finalement, ne put se retenir de conter cette aventure aussi prodigieuse.
Le Pacha Salah-Rais, qui régna (1552 à 1556), envoya un grand nombre d’ouvriers pour démolir pierre par pierre le tombeau et en ramener le trésor. Le monument venait à peine d’être attaqué par les pics des démolisseurs qu’une femme chrétienne apparut sur le sommet du tombeau, étendit les bras en s’écriant " Halloula !! Halloula ! à mon secours ! " et aussitôt une nuée d’énormes moustiques dispersa les travailleurs.
Plus tard, Baba-Mohamed-ben-Othmane, pacha d’Alger de 1776 à 1791, fit démolir à coup de canon le revêtement Est, toujours sans succès.
Puisque nous sommes à Tipasa, allons-nous promener dans les ruines, dans un site prestigieux en bordure de mer, avec comme fond la montagne du Chenoua.
Et si vous êtes vraiment curieux, imaginez ce que devait être la basilique chrétienne, construite après la mort de Juba II .
Si vous mêliez les vielles pierres, le site et l’esprit d’Albert Camus alors quelle belle journée vous aurez passée !
Robert ANTOINE
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