Le film d’Emmanuel Audrain "Retour en Algérie" sera projeté mardi 19 mars à 20h30 à Saint-Nazaire. Une date symbolique 57 ans après les Accords d’Evian qui ont mis fin à la guerre d’Algérie.
"Le couvercle s’est soulevé, une force est au travail", constate Emmanuel Audrain, réalisateur de "Retour en Algérie". Le film raconte une libération de la parole sur l’Algérie entre 1954 et 1962. Il se consacre précisément à la parole des jeunes Français qui étaient sur place au cours de cette période d’"opérations de maintien de l’ordre" qui sera reconnue guerre d’Algérie par la France en 1999.
Un Malouin témoigne
Pierre Rambaud, syndicaliste ouvrier de Saint-Malo-de-Guersac, fait partie des sept témoins qui avaient 20 ans pendant la guerre d’Algérie. Sollicité dans les années 2000 par le Mouvement de la Paix pour une conférence sur la torture, il accepte de témoigner. "Je n’ai pas pu aller au bout de mon intervention", dit-il, "j’étouffais… ça ne sortait plus. Trop d’émotions ! Les cris des torturés – pendant des mois- c’est vraiment ce qu’on a vécu de plus dur."
En 2004, à 65 ans, des cultivateurs de l’Aveyron, anciens appelés en Algérie, ont la possibilité de recevoir une "retraite du combattant". Rémi Serres et Georges Treilhou décident alors de créer les "4ACG", "Anciens Appelés en Algérie et leurs Amis Contre la Guerre" pour mettre leurs retraites du combattant dans un pot commun et les redistribuer à des associations en Algérie et en Palestine.
"Ce n’est pas dangereux de parler..."
Le mouvement est encouragé par Simone de Bollardière, la veuve du général qui dénonça la torture en 1957 : "Ce n’est pas dangereux de parler..." leur dira-t-elle pendant la première assemblée générale. C’est elle aussi qui invite à cet événement le réalisateur Emmanuel Audrain, sensible à l’Algérie. Son précédent documentaire "Le testament de Tibhirine" révélait que trois des sept moines tués en 1996 pendant la guerre civile avaient fait la guerre d’Algérie.
"La seule clé qui permettait aux anciens appelés d’accepter tout ce vécu, c’était d’en parler entre eux", analyse Emmanuel Audrain qui ressent un grand besoin de parole et décide alors de montrer la libération qu’elle va leur apporter.
Les vieux coeurs s'ouvrent, sans jugement, et vont même à la rencontre des lycéens leur disant : "Parfois, il faut désobéir, oser dire non !" Le réalisateur est certain d'une chose : "Plus on met des mots sur tout ça et plus on va là-bas en Algérie, plus cela ouvre un avenir."
A Saint-Nazaire 8000 manifestants contre la guerre d’Algérie
Pour Paulette Mérand, responsable du comité nazairien du Mouvement de la Paix, "c’est une génération de jeunes -deux millions de jeunes Français- qui a été sacrifiée à la politique impérialiste de la France.Je me suis engagée pour la paix à Saint-Nazaire à ce moment-là.
En mai 1956 il y a eu un grand mouvement contre la guerre d’Algérie. Huit mille personnes ont manifesté à Saint-Nazaire contre le départ des rappelés car le contingent des conscrits ne suffisait pas.
On collectait de l’argent et on envoyait des avocats défendre les prisonniers qui avaient refusé de faire la guerre ou qui avaient soutenu le FLN (Front de Libération National)".
A Saint-Nazaire, le président du MRAP(Mouvement contre le Racisme et pour l'Amitié entre les Peuples) Augustin Grosdoy se dit touché par "la démarche des anciens appelés de renouer des liens d’amitié avec le peuple algérien".
Selon lui, "le film s’inscrit dans un mouvement de reconnaissance de la réalité de la guerre d’Algérie et de la torture. La société dans toutes ses composantes doit l’assumer.
Nous demandons qu’une rue de Saint-Nazaire porte le nom de Maurice Audain, personnalité qui a fait savoir que des centaines de personnes ont été torturées."
http://www.agglo-carene.fr/actus-401/retour-en-algerie-au-cinema-jacques-tati-le-19-mars-12766.html?cHash=f5992acf38aee2dc8a7c80e15ca2abf8
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