L'Insoumis d'Alain Cavalier, avec Alain delon, Lea Massari, Georges Géret, Maurice
Alain Delon dans L'Insoumis d'Alain Cavalier (©Park Circus)
Tout autre chose avec l’étonnant revenant qu’est L’Insoumis, film réalisé par Alain Cavalier il y a plus d’un demi-siècle, mais demeuré quasiment invisible.
C’est pourtant un magnifique film noir, avec en vedette Alain Delon, impressionnant de magnétisme et de fragilité. Il joue un militaire de la Légion étrangère pendant la guerre d'Algérie qui, après avoir rejoint l’OASet participé à l’enlèvement d’une avocate française du FLN, la sauve et s’enfuit avec elle. Ce sera ensuite à elle de prendre soin de lui. La cavale de ce couple que tout oppose les mène d’Alger à la campagne suisse.
D’une grande beauté plastique, il s’inspire explicitement des chefs d’œuvre du film noir américain (en particulier High Sierra, Les Amants de la nuit et Quand la ville dort). Mais, que ce soit dans un appartement en construction ou à la campagne française, il invente une écriture très originale, à laquelle contribuent quelques-uns des meilleurs techniciens qu’ait connu le cinéma français (Pierre Renoir à l’image, Antoine Bonfanti au son, Bernard Evein au décor), et des seconds rôles très réussis (Georges Géret, Robert Castel) parmi lesquels se distingue Maurice Garrel, bouleversant de justesse.
Après les débuts de Cavalier avec Le Combat dans l’île, déjà directement lié à ce sujet, L'Insoumis est une nouvelle preuve contre la rengaine injuste qui prétend que les cinéastes français ne se sont pas intéressés à la guerre d’Algérie, également filmée ou directement évoquée, à l'époque, par Godard, Varda, Resnais, Rozier... Ce ne sont pas les cinéastes qui ont ignoré le conflit, plutôt les producteurs et les distributeurs, le pouvoir politique voire la société française dans son ensemble qui n'en ont pas voulu.
Ce que fut vraiment le deuxième long métrage du grand réalisateur qu’était déjà Alain Cavalier, impossible de le savoir aujourd’hui. Avant et après sa sortie en 1964, le film a en effet été mutilé et même, cas exceptionnel, mutilé trois fois.
D’abord par la censure gaulliste, qui a exigé avant sa sortie des coupes importantes concernant la référence aux «événements» d’Algérie.
Ensuite, aussitôt après la sortie le 23 septembre 1964, par le jugement obtenu par Gisèle Halimi, alors avocate des indépendantistes algériens, qui avait été kidnappée par l’extrême-droite, et qui estimait que le personnage joué par Lea Massari lui portaient préjudice. Elle obtint que soient supprimées les scènes concernant les relations entre le beau légionnaire et la jeune femme engagée.
Enfin, bien plus tard, par la société américaine ayant récupéré les droits, et qui a à la fois rétabli des scènes censurées suite à la décision de justice et coupé le film selon ses propres critères commerciaux.
On comprend donc qu’Alain Cavalier, qui a depuis emprunté d’autres chemins cinématographiques, ait une relation distante avec ce lointain rejeton maltraité par tant d’autorités.
Il en parle avec humour et autant de détachement que possible, mais cela ne devrait pas occulter combien, par-delà toutes ces péripéties, L’Insoumisreste une splendeur de cinéma.
http://www.slate.fr/story/157564/cinema-wajib-phong-linsoumis-trois-echappees-critiques
Le film ''L'Insoumis'' de 1964 en noir et blanc et non censuré :
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